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lieux communs (et autres fadaises)
26 novembre 2005

en vie

Un beau texte de Bernard Bretonnière, découvert grâce à Adèle. Qu'elle en soit remerciée...

Vieillir

"La coupe réglée des grandes rêveres, les trains ratés et les cahiers perdus, cette douleur de l'effritement jusque dans les pierres qu'on aime, les maisons d'enfance rapetissées, les hannetons plus rares dans les soirs du printemps, le même coeur levé, tout ce qui ne dit plus son nom, tant à côté de tout, mais des mots revenus, le petit jour intact perché sur les ardoises, le chapelet des maigres espérances racommodé entre les doigts, la poussière posée sur les livres qu'on sait, les coups qu'on ne se donne plus, l'indifférence chaque jour remise à demain, cette marche inapaisée vers la paix, l'envie de vivre jamais acquise, l'incroyance en son âge, l'effarement devant les échéances, les fécondités épuisées, à peine assoupie la terreur, à peine entamée la candeur, non plus tel enthousiasme de jeunesse, mais le désir parfois, et l'énergie, un ressort tellement détendu, trop de passions défaites, l'exigence essouflée, les objets et les souvenirs qui encombrent, tu ne peux pas savoir, tout ce qu'on n'a pas essayé, le faix des malheurs advenus, la bonté implorée qui parfois répondit, une lumière nouvelle sur mille petites choses quand les jours raccourcissent, et puis : avoir manqué au bord de la détestation d'être quelqu'un de mieux."

(Bernard Bretonnière. Ce qu'i faut de patience.  Editions Le dé bleu)

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