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lieux communs (et autres fadaises)
18 avril 2006

à la colle

ENFERMES DEHORS
d'Albert Dupontel
(Vu il ya quelques jours déjà, mais il fallait que je vous en parle, même si un peu plus tard.)

Ce mec-là, ce qu'il fait, il faut oser. Total respect. De Bernie me reste le bruit d'une pelle qu'on aiguise, à travers la vitre ouverte d'une bagnole, contre la glissière qui borde l'autoroute. Là, tout pareil. Il y a là-dedans une authentique folie furieuse, un truc allumé de chez allumé, que vient tempérer, adoucir (tiédir ?) une toute aussi authentique... tendresse ? candeur ? gentillesse ?
Oui, Dupontel, c'est comme ça, un genre de grand écart sur pattes.

Dès le générique, on est prévenu : ça va secouer, et méchamment! (c'est quoi déjà ce groupe, avec des grosses grosses guitares énervées ? ah oui : Les Hyènes (des transfuges de chez Noir Désir, si j'ai bien compris...). Le scope est à donf, les titres n'arrivent pas à rester en place, tressautent se tortillent et se scratchent autant que le zigoto qu'on voit dzoïng dzoïng s'éclater joyeusement en arrière plan, comme une pub pour la nouvelle Danse de St Guy (encore mieux que la Lambada ou la je-ne-sais-quoi-en-a de l'été prochain : il vous suffit d'un sac en plastique rose, d'un tube de colle (à rustines je suppose) et d'un matelas (défoncé autant que vous, bien entendu), et vous voilà fin prêt pour tous les rebondissements possibles.)

Dupontel a écrit et filmé cette histoire d'un SDF (joué par lui-même) qui trouve un uniforme de flic (le flic en question s'étant doublement suicidé sous ses yeux, par noyade et pendaison... ça rappelle les Idées Noires de Franquin !), qui tente d'abord de le restituer à la maréchaussée, et qui, après s'être fait jeter comme un malpropre (ce qu'il est d'ailleurs, stricto sensu) va décider de l'utiliser, modernisant le vieil adage "L'unif fait le keuf", d'abord pour aller bouffer à la cantine de la police, puis pour s'identifier grave à son personnage de chevalier-là-pour faire-respecter-la-loi-et-défendre-la-veuve-et-l'orpheline, c'est à dire tout faire pour tenter de récupérer -par n'importe quel moyen- le bébé de la femme dont il est tombé -au premier regard- raide amoureux...

S'ensuit un joyeux bordel, avec des SDF à la pelle (Dupontel est allé recruter la crème des Deschiens, Yolande, Bruno L., Philippe D.), une ex-hardeuse, un épicier malhonnête, un financier véreux, un grand-père gâteau, une grand-mère qui fait involontairement de la varappe, un grand patron quasi-légume intubé de partout sur son lit d'hôpital, (et j'en passe), tout ça dans le décor d'un squat aux graphs hallucinants, entre deux sniffs de colle, où vous risquez de subir des hallucinations matérialisées (ah, les gens qui sortent des affiches...) ... Bref, ça dépote ! (pour les spécialistes, vous aurez même droit à un caméo de Terry Gilliam himself!) A l'instar de la musique du film, entre rock hargneux et fanfares flonflonesques, on passe sans cesse du pur délire cartoonesque (je ne vous raconte pas les chutes diverses, les poteaux qu'on se prend dans  la tronche, les coups de moëllons et autres accessoires... Dupontel assurant lui-même toutes ses cascades...) à un filmage plus "normal", plus calme, plus humain (au risque de sembler, du coup, plus banal et plus mièvre). Au moins, on peut en profiter pour souffler un peu!

Comment on disait dans les livres de lecture ? "...sous son aspect bourru cache un coeur d'or". C'est vraiment ça, Enfermés dehors. Sans donner de leçons (chacun y prendra ce qu'il pourra/voudra), sans jouer les moralistes ni les vierges effarouchées, il réussit à nous montrer ce qu'on n'a pas forcément envie de (sa)voir, à nous toucher en parlant, plus ou moins mine de rien, des exclus, du libéralisme, des holdings, du pouvoir du fric, du respect de l'autre, de la survie individuelle... et de l'amour aussi ! (même avec les dents pourries, on y a droit!) Oui, on rit fort, mais on serait à deux doigts de pouvoir pleurer autant... Si je devais résumer sa démarche en un mot, je dirais générosité.

C'est vrai que tout cette ménagerie risque de faire un peu tâche au milieu de nos comédies franchouilles formatées-prédigérées, à l'image de l'arrivée du même Dupontel, crade, échevelé, au milieu des beaux gens offusqués narines pincées et moues méprisantes, qui s'écartent et établissent autour de lui le cordon sanitaire de l'indifférence (c'est peut-être pour ça, d'ailleurs, qu'il a eu tant de mal à trouver des sous pour monter ce projet dont personne en voulait...)
J'espère que le film va marcher du feu de dieu, pour que Monsieur Albert Dupontel puisse pour son prochain film disposer d'un budget plus conséquent (quoique... on ne peut pas dire que le manque de moyens soit ici véritablement flagrant...)

Tout compte fait, ne change rien, Albert, c'est comme ça qu'on t'aime!

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Commentaires
M
juste pour dire que mr gougnafier n'est plus dans ma vie... histoire finie, coeur tristounet mais marie toujours pleine de vie et d'envies ! <br /> bisous
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C
content de recevoir un petit clin d'oeil (et une bouffée de rire) de ta part.<br /> pour moi aussi (mais p't'etre pour d'autres raisons), Clermont est resté un moment "entre parenthèses" <br /> (...)<br /> biz à tte le tite famille! (et à Mr Gougnafier!!)
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M
un petit coucou en passant, le festival clermontois de février est déjà bien loin derrière nous, j'en garde un très joli souvenir, comme un moment un peu entre parenthèse, comme si c'était pas la vraie vie, ça fait du bien ! <br /> bon tout ça pour te dire que j'aaaaaaaaaaaadoré enfermé dehors, que j'ai ri comme j'aime, sans retenue, et pourtant la retenue s'imposait parfois car la peinture de notre société à la dupontel dérange également... et oui, on est sur la corde, même dans ses émotions. <br /> bisous bisous de la marie et à bientôt
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