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lieux communs (et autres fadaises)
8 avril 2010

des hommes qui s'ét(r)eignent

AJAMI
de Scandar Copti et Yaron Shani

Bon, je sais, j'ai peut-être du monde une vision un peu bisounours, mais, simplement le fait que ce film soit co-réalisé par un juif et un arabe, ça me fait plaisir, genre si tous les gars du monde, et ça me semble être une première et bonne raison pour aller le  voir (le film). Ensuite parce qu'on sait (ce blog ne s'appelle pas "Lieux Communs" pour rien, il aurait pu s'appeler aussi  "Cruchasseries et autres enfonçages de portes ouvertes") que la situation là-bas est plutôt complexe (géographiquement, politiquement, religieusement et tout et tout) et donc que les deux réalisateurs ont fait un film à l'image-même de cette complexité, avec toute une série de personnages en butte en proie en opposition en combat les uns envers les autres (surtout contre les autres, tant il est question de heurts d'affrontements et de chocs divers) dont on ne comprendra, pour certains, qu'à la toute fin ce qui leur est vraiment arrivé.
On démarre par une histoire "simple" de famille, de règlements de comptes entre juifs et arabes il est ici question de bédouins mafieux), puis le récit (divisé en chapitres) va progressivement se complexifier, dans la mesure où deux scènes "centrales' (regroupant les interprètes principaux) vont devenir les centres d'une toile d'araignée narrative avec allées et venues temporelles (les chapitres suivants vont permettre de revenir "avant" pour suivre un personnage -et un point de vue- en particulier), jusqu'à la poignante version intégrale "finale" où le spectateur a enfin en main tous les éléments..
Où comment la petite histoire personnelle de chacun, (ses liens, ses besoins, ses rancoeurs, ses obsessions, ses angoisses, ses joies) qu'il soit flic ou voyou ou même aucun des deux, interfère forcément avec celle du voisin, ce qui ne risque pas de simplifier les choses. Les réalisateurs font pourtant tout (en apparence) pour nous aider : situer précisément les lieux géographiques importants (Naplouse, Jaffa, Ajami dont on apprend que c'est le quartier le plus violent, celui où les flics laissent en général les habitants se démerder entre eux), et préciser -au niveau des sous-titres, quand on parle en hébreu et quand on parle en arabe (les deux langues pourtant me réjouissent idemmement l'oreille:... je crois que je fais une petite fixette érotique sur ces mots heurtés, hérissés, tout autant que le sont (hérissés, il est juste question ici de barbe et de pilosité)  ceux qui les prononcent -et pour lesquels j'éprouve le même genre de fascination euh... érotique.-
La construction en chapitres, si elle est "logique" pour les deux premiers, va ensuite embrouiller suffisamment la donne pour que le spectateur se demande s'il a bien entendu ce qu'il a cru entendre, et vu ce qu'il a cru voir (d'ailleurs il s'avère que des fois oui, et des fois non, comme le film va le le lui expliquer dans les parties suivantes.) Des personnages attachants (le grand frère et le petit frère, le fils qui travaille pour que sa mère s'en sorte, le pote qui voudrait se barrer de là) , d'autres moins en apparence (le "parrain", le flic) mais finalement personne n'est tout à fait ce dont il donne l'apparence. Quoique...
Ajami est -comme les polars en général- surtout un film d'homme(s), qui passent leur temps à se chatouiller leur honneur et leur respect d'icelui, à s'empoigner, à se gueuler dessus, à se faire subir mutuellement leur loi de l'emmerdement maximum (alors que ça serait tellement plus simple s'ils arrêtaient tout et se mettaient plutôt -bisounours united- à se faire des papouilles et des gros câlins, hein, mais bon moi ce que j'en dis, je n'ai aucune autorité, ni politique ni religieuse hein. Remarquez, à certains moments, on se dit qu'il seraient presque sur la bonne voie, avec cette façon qu'ils ont de rester au chaud entre eux, de se serrer, de se toucher, de se tenir les mains, mais, manque de bol, y a toujours une histoire de (cochez la case) famille, fric, came,  rivalité, jalousie, race, religion et paf! ils se foutent sur la gueule c'est plus fort qu'eux.
Un beau film noir donc, où les réalisateurs ont juste assez mis les mains dans le cambouis, tripatouillé la matière filmique, pour en faire un sacré bon film tout court. (Je ne suis pas sûr que le même film, monté "normalement" en suivant scrupuleusement la chronologie, aurait été aussi fort.) Et il ne faudrait pas oublier, dans ces éloges, la totalité de la distribution, surtout quand on apprend que ce sont tous ou presque des amateurs, que les réalisateurs ont fait jouer "au plus près de leur(s) vie(s)".
On sort de là un peu secoué (oui oui j'avais un peu les larmes aux yeux) d'autant plus que ce jour-là le film a eu la bonne idée de casser à 5 minutes de la fin, nous permettant de réaliser, à nous spectateurs, combien on était tendus et haletants, à ce moment-là précisément, et qu'il n'aurait pas fallu que ça reste trop longtemps allumé dans la salle, avant que le film ne reprenne...

19244090

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Commentaires
J
T'as presque tout dit, y compris la qualité des embrassades... <br /> J'ajouterai juste une mention sur les sous-titres, surtitrés [arabe] ou [hébreu] au changement de langue, pour nous aider à nous repérer et sentir les incompréhensions. Et aussi (surtout?) pour comprendre au passage, une fois encore, que ce sont toujours les dominés qui apprennent la langue des colons.
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