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lieux communs (et autres fadaises)
8 juin 2013

le bateau dans l'arbre

MUD
de Jeff Nichols

Un sacré film. Jacky revenait le voir, ça avait dû sacrément l'enthousiasmer. Je dois dire, que, juste au début, j'ai été un peu dubitatif, j'ai eu un peu de mal à rentrer dedans : d'une part le Mississippi n'est pas vraiment ma tasse de thé, et d'autre part il y avait un peu de barouf dans la salle (gens qui rentrent en retard, d'autres qui sautent par-dessus les sièges pour s'installer, lumières de portables, etc.).
Ellis et Neckbone. Deux gamins qui ont découvert, sur une île, une bateau dans un arbre. Puis, en le visitant, que ce bateau est habité. par un mec qui s'y cache, visiblement, qui crève la dalle, visiblement aussi, et qui les fascine, tout aussi indubitablement. Il leur dit s'appeler Mud. Il se cache sur l'île parce qu'il a tué un homme et qu'il attend sa dulcinée, Juniper. Et qu'il est aussi recherché par des chasseurs de primes... Les gamins vont tout faire pour l'aider...
A cette première ligne scénaristique (le fugitif / la belle amoureuse / les tueurs / les flics) s'en rajoute une seconde, plus documentaire, sur le mode de vie de ces gamins (qui n'est pas sans évoquer le milieu des Bêtes du sud sauvage) familles dysfonctionnelles, père absent, menaces de destruction des "maisons" par les autorités, précarité, bibine, expédients, etc. Et une troisième, plus principalement centrée sur l'un des deux gamins, et de la "crise" familiale et affective qu'il traverse (ses parents sont en instance de divorce, il tombe amoureux d'une jeune beauté qui a au moins 4 ans de plus que lui. Et le réalisateur réussit le prodige de mener tout ça de front, avec une maestria qui va se déployer au fur et à mesure que le film progresse.
Pour moi, Mud est comme une pyramide posée sur sa pointe : au départ, on a juste un point de contact (le début du film), pas beaucoup de place pour bouger ni s'y raccrocher, et, progressivement, le propos s'élargit, la cinématographie devient plus ample, les inspirations plus profondes, l'immersion plus complète, et on ne peut qu'être de plus en plus fasciné par ce film qui s'avère être beaucoup plus qu'un simple polar ou une chronique adolescente, mais bien une tentative ambitieuse (et incroyablement réussie) de dramaturgie américaine, dans son essence ses singularités même.
Nichols retranscrit aussi bien la beauté de ces payages horizontaux que l'attachement qu'il éprouve envers chacun de ses personnages (même ceux qui paraissent "secondaires" mais sont traités avec la même attention), et réussit, après Take Shelter, un nouveau grand film.
Inutile de préciser que les acteurs sont parfaits, avec une mention spéciale pour Matthew Mc Conaughey, qui connaît une seconde carrière phénoménale en mal rasé cabossé tatoué, et, surtout, l'extraordinaire Tye Sheridan, dans le rôle d'Ellis, d'une justesse monstrueusement confondante (la scène où il pleure et engueule Mud est extraordinaire, de ce point de vue).
Film riche, foisonnant, multiple, précieux... Chapeau, Jeff Nichols!

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