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lieux communs (et autres fadaises)
24 février 2014

prises de sang

ONLY LOVERS LEFT ALIVE
de Jim Jarmusch

Jim J. faisant partie de la garde rapprochée de ma cinéphilie personnelle, il importait donc que ce film fût vu le premier jour à la première séquence (déjà que je n'avais désespérément pas pu aller à la journée de prévisionnement...), surtout en ce mercredi après-midi qui dès le début m'avait semblé placé sous les meilleurs auspices...
"Oooooh Jim..." pensais-je en m'installant, comme le chantait Lou Reed sur Berlin. Je connaissais déjà l'avis de Nicolas, celui de Claude, celui d'Hervé (qui l'avaient déjà vu, eux), je n'étais donc pas vraiment inquiet, juste surtout impatient. Il y a des plaisirs, comme ça, que je suis incapable de différer.
Claude  m'avait prévenu que la scène d'ouverture était comme un vortex. Normal, pour pénétrer dans un film de vampires, il faut au préalable y avoir été invité par les hôtes du lieu. Et cette invitation prend une forme tout à fait enivrante il est vrai. Et nous voilà installés dans cette demeure pleine de bric-à-brac. Bien que le thème du vampirisme me soit assez étranger (à part au 36ème degré, genre série Z, Hammer productions et Christopher Lee, et encore...) le petit père Jarmusch se l'approprie, il le plie, le replie et le redéplie avec des virtuosités d'origamiste, et le transfigure, comme il avait pu le faire pour le western avec Dead man, ou le film de gangsters et de mafia avec Ghost Dog.
Il nous livre un objet incroyablement classieux, glamour, sans être du tout papier glacé. Plutôt feuilles de grimoire, quelque chose d'écrit de beau, de raffiné, de touchant, qui existe depuis si longtemps (au fil du temps) qui nous est transmis (et nous survivra).
Un homme, une femme, Detroit et Tanger, la musique et les livres, lui Adam et elle Eve. Boy meets girl. Ou plutôt l'a rencontrée il y a trèèèèèèèèès longtemps (leurs journées se comptent en siècles) et nos amoureux se parlent via portables ou tablettes, voyagent, en avion (départ de nuit et arrivée de nuit) dorment le jour terrés dans leurs antres et se réveillent le soir, mais pas de chauves-souris de cimetières  de gousses d'ail ni de pieu dans le coeur. Pour assurer leur subsistance ils s'approvisionnent en sang sélectionné (le O négatif semble être leur nectar préféré) auprès de médecins dûment rétribués, breuvage quasiment psychotrope qu'ils boivent dans de jolis verres et semble leur procurer une ineffable extase.
Une vie, deux vies plutôt, de vampires dandys, vaguement décadents, cultivant -lui surtout- une indicible et permanente mélancolie (il est compositeur, et souffla d'ailleurs jadis quelques airs à Schubert). Aristocratiques buveurs de sang, toujours entre deux sommes, deux départs, deux déceptions. Une fuite quasi immobile, exigeante et recluse (ils se sont coupés volontairement de ceux qu'ils surnomment les zombies -c'est à dire nous-) à mi-chemin entre la rock-star et l'anachorète.
Il ne se passe quasiment rien, question anecdote : à Detroit, un dénommé Ian (au look de métaleux gentil) aide Adam avant qu'Eve ne les rejoigne , puis ils recevront la visite de la soeur d'Eve (une petite pestouille), avant que de repartir ensemble à Tanger.
C'est nocturne, c'est baroque, c'est grandiose, ça se déguste comme nos vampires chéris sirotent leur élixir : avec respect, dans un certain cérémonial. Un objet magnifiquement hors-normes.
Oooooh Jim...

445377

Top 10, probablement

 

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