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lieux communs (et autres fadaises)
18 décembre 2014

lunettes noires

OF MEN AND WAR
de Laurent Bécue-Renard

Après le magnifique De guerre lasses (la guerre du point de vue des femmes) Laurent Bécue-Renard a donc réalisé le second volet de ce qu'il envisage comme une trilogie : la guerre encore, cette fois du point de vue des hommes. Pas n'importe quelle guerre ni n'importe quels hommes. Il s'agit de soldats américains de retour d'Irak et  victimes de syndromes post-traumatiques : si le physique est indemne, le mental en souffrance. Ces hommes ont vécu là-bas des trucs effroyables, qu'ils portent en eux,  dont ils n'arrivent parfois même pas à parler.
On les suit au Pathway home, un centre d'accueil (et de "rééducation" pour anciens combattants) lors de séances de groupe où chacun à son tour est appelé à prendre la parole s'il le désire, et à partager avec ses coreligionnaires le(s) trauma(s) qui l'habite(nt). C'est très émouvant de voir ces corps de soldats, de combattants (muscles, tatouages) conçus pour endurer, résister, soudain mis en échec  par leurs propres rouages intérieurs, et ces hommes se mettre à pleurer,  ou même être sur le point de vomir, à l'évocation de ce qu'ils ont vécu, parce que, justement, cette parole-là est, au sens propre, inexprimable.
Le film alterne les scènes de groupe, de thérapie, au Pathway home, et les moments familiaux privés, où chacun des soldats est filmé dans sa vie quotidienne, avec sa femme, ses enfants, s'en exprime, et le va-et-vient entre les deux états (le soldat en souffrance / le père de famille en voie de guérison) est d'autant plus impressionnant qu'à première vue, il est difficile de voir combien (et comment) ces hommes souffrent, cela n'est manifesté que par la parole (la leur ou celle de leurs proches.
Ils ont tué, volontairement ou par accident, d'autres êtres humains, amis ou ennemis, ils les ont vu mourir, et ce qui les hante désormais les a aussi profondément changés. Crises de violence, pétages de plombs, perte de contrôle, c'est désormais d'eux-mêmes qu'ils ont peur. Comment vivre, pouvoir envisager de continuer de vivre, avec ces choses épouvantables cadenassées à l'intérieur de soi , comment s'en défaire, comment s'alléger enfin de ce poids, se débarrasser du barda militaire, se reconstruire en tant qu'homme, père, mari, juste quidam, average guy ?
Le dispositif adopté par le réalisateur est aussi fort qu'il est extrêmement simple : la caméra est posée, elle est là, au milieu d'eux, près d'eux, présente, elle enregistre. Elle retranscrit. Et on suit sans que l'attention faiblisse ces hommes, pendant les deux heures vingt que dure le film, et c'est passionnant, c'est bouleversant, c'est révoltant aussi. La façon dont ces paroles individiuelles se provoquent, s'unissent, s'entrecroisent, s'entraident. L'armée, la guerre, les combats, les ennemis, la violence, la "virilité". Les dommages (causés), et les réparations (hypothétiques).
Ca m'a remis en tête ce que chantait Maxime Le Forestier, il y a longtemps, dans la chanson Parachutiste ...

275924
(encore une fois, une affihce plutôt laide, et qui dessert le film)

 

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