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lieux communs (et autres fadaises)
22 septembre 2015

c'est la rentrée (littéraire)

Dilemne...
J'avais un chèque-cadeau à utiliser, et je ne trouvais rien d'assez bien...
J'ai erré longuement au rayon "nouveautés" et donc "rentrée littéraire", mais je n'arrivais pas à me décider... Pas de coup de foudre indiscutable, comme s'il ya vait eu, disons... un Jean Echenoz, un  Rick Moody, un John Cheever, un Richard Yates...
J'en ai tenu plusieurs, successivement, j'ai lu les quatrièmes de couv', j'ai hésité et finalement je n'ai rien pris.
Ce n'est qu'en rentrant chez moi, le soir, que j'ai regretté de ne pas avoir pris Les amygdales, le premier roman de Gérard Lefort. (Ah, les regrets les regrets les regrets... air connu). Quand je suis revenu au magasin, deux jours plus tard, je me suis précipité dans le même rayon, je savais ce que je voulais, et, ô chance, je le trouve illico, posé en travers sur la pile d'exemplaires d'un autre roman publié aussi à L'Olivier. Un seul! Et de traviole, il m'attendait, et je l'ai donc pris (je l'ai tenu, ensuite, pendant un certain temps, cherchant un autre volume pour l'apparier afin de dépenser exactement le montant du chèque cadeau, mais hélas je n'ai rien trouvé d'autre d'aussi bien... il y avait bien le bouquin de Delphine de Vigan qui m'appâtait, mais bon, il y en avait au moins une pile de 25, et j'ai horreur de faire comme tout-un-chacun, surtout pour les livres, et je ne l'ai donc pas pris.)
Je suis sorti avec mon petit roman, dans mon petit sac, avec un joli bandeau Gérard Lefort écrit en blanc sur fond bleu, assez joyeux. Du bouquin je ne savais strictement rien, à part son titre, et le fait que j'ai toujours pris un énorme plaisir à lire les chroniques de Gérard Lefort (surtout les critiques de films, qu'il devrait bien rééditer, comme le fit en son temps Jean-Louis Bory (? non non, j'ai dit ce nom-là comme ça, presque par hasard...). Je ne l'ai pas ouvert tout de suite, d'ailleurs, j'en avais un autre à finir. Et j'ai vu entretemps une chronique qui en parlait, dans Libé justement, dont le titre m'a semblé hélas un poil trop révélateur (je ne l'ai donc pas lue en entier).

Je l'ai donc entamé hier. Il est question d'un enfant. D'une enfance, plutôt, de l'enfance d'un garçon racontée par lui-même. Il faut bien un ou deux chapitres pour se mettre dans le bain, à bonne température. L'écriture, le style, je les connais, je m'en suis toujours régalé (cf plus haut), mais là il s'agit d'autre chose. Un roman, une fiction (pas question d'auto-) dont la  construction évoque, assez vite, celle d'une autre enfance romanesque (mais, elle très auto-, justement) célèbre : le Poil de carotte de Jules Renard. sauf que l'enfant depapier ne sera, ici, jamais nommé. Une suite de chapitres courts, chacun avec un titre court (les amygdales en est un, justement), qui ne constituent pas une narration strictement chronologique -on pourrait les permuter-, mais plutôt une série de vignettes, d'instants, de madeleines, d'épiphanies (chacun les nommera selon son envie). Et qui  comme les madeleines justement, ou les chocolats, ou les pistaches,  quand on met le nez dedans, se révèlent assez vite terriblement addictives. Une première juste pour goûter en appelle une autre qui à son tour, etc.

le seul regret que j'aurai à propos de ce bouquin, c'est qu'il est trop court (288 pages), j'en aurais voulu plus, encore et encore.

Car tout ça me plaît d'autant plus que c'est un gamin dans lequel je me retrouve, au moins à double titre : d'abord parce qu'il lit beaucoup et, par cette appréhension livresque du monde, il s'est donc construit un univers fantasmatique très riche et flamboyant, passionné, dramatique, violent, romanesque (le naufrage du Titanic, par exemple, y occupera un chapitre de choix), mais aussi, -et surtout-, parce que cet enfant éprouve une fascination (que j'ai aussi ressentie très tôt) pour un objet qui m'est toujours très cher, le corps des hommes (et, donc, l'amour des hommes aussi).

Les amygdales se compose de 5 parties, au début on se demande pourquoi, puis on réalise qu'on pourrait les qualifier de concentriques (ou d'oignonesques) par cette façon qu'elles ont de faire progresser le lecteur de l'extérieur "réel" (la famille, les événements) vers l'intérieur -de plus en plus intimement-. Ca commence par le chapitre intitulé La maison et ça se clôt (ou s'ouvre, justement) sur le chapitre intitulé Le paradis. Le gamin des Amygdales est un héros de fiction, mais doit avoir avec son auteur  les points communs les plus intimes (le goût des hommes tel qu'il est dépeint, ça ne s'invente pas, d'une façon aussi juste -et réjouissante-, non ?) . Comme tout bon (jeune) lecteur, il s'identifie aux héros de ses livres ou des récits des faits divers, il les incarne, il les joue, il les accommode à sa sauce, il les fait vivre (et parfois mourir) au gré de ses envies. C'est drôle, tristounet, juste, exagéré, tendre, vachard, troublant... Bref, j'ai adoré ça.

En plus, Lefort aime les énumérations (moi aussi, ça tombe bien!)

Un livre à ranger au rayon (pas si fourni) des livres qui parlent, justement, de l'enfance, par fragments : Poil de Carotte, donc, déjà évoqué, et Les Contes du Chat perché, l'Opoponax, Le Grand Cahier, Le Crispougne, Les Malheurs de Sophie (oui oui!). On a souvent évoqué le vert paradis des amours enfantines, il faudrait voir à ne pas oublier celui des cruautés du même nom (ça va forcément avec, non ?) Chapeau, Gérard!

lefort

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