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lieux communs (et autres fadaises)
29 septembre 2015

le renard qui dort sous la branche

L'ANNEE DU SOULEVEMENT
de Hubert Mingarelli

Lu après La promesse, et celui-ci a un peu souffert de la comparaison.
Deux hommes (un plus âgé, Cletus, et un plus jeune, Daniel), des "insurgés", qui se sont révoltés contre l'armée, dans un pays indéterminé, ont la charge d'un prisonnier (un militaire) nommé San-Vitto. Ils l'escortent jusqu'à un endroit, dans la montagne, où d'autres viendront le chercher pour l'interroger, et, probablement, l'exécuter.
Les voilà tous les trois dans la montagne, à côté d'une maison abandonnée à moitié écroulée, à attendre que "les autres" arrivent. La nuit tombe. En attendant, ils parlent...
Aucun personnage féminin (sauf une, dans un souvenir -ou dans un rêve ?-) ici pour venir distraire les relations et les tensions (et parfois aussi les apaisements) entre ces trois hommes. (Et beaucoup moins de sentiments "positifs" entre eux aussi que, par exemple, dans La promesse). Il y a les deux qui sont du "bon côté du fusil" qui s'asticotent (c'est surtout Daniel, le jeunot, qui revient régulièrement à la charge.) et, en face San-Vitto, dont on ne saura finalement pas grand-chose.
Cletus est celui des trois que l'auteur détaillera le plus précisément (des mots, des souvenirs, un rêve), il est le centre de gravité du livre, et on peut regretter que les deux autres restent assez flous, quasiment à l'état d'esquisses.
La maison au toit cassé évoque celle du Voyage d'Eladio (et, finalement, les "insurgés" recomposent, avec San-Vitto, le même genre de trio que celui du poignant Un repas en hiver). Mais se jouent entre eux des choses moins fortes, moins vitales.
Un fusil, un fauteuil, un paquet de cigarettes. voilà pour les accessoires. et pour ce qui est des animaux, une jument dans la nuit et un renard (dans un souvenir). Et des sapins, dans le même souvenir
Le petit théâtre de Mingarelli est prêt à fonctionner (il y aura, comme d'habitudes, des moments magnifiques qui font résonner à l'intérieur de vous on ne sait trop quelle corde sensible, et on aime le son que ça produit et la façon dont ça se répercute.) Ce qu'on demande, ce qu'on a fait, ce qu'on ne dit pas, ce qu'on ne comprend pas, ce qu'on refuse... les mots vont et viennent entre les trois. je crois que le souvenir de La promesse était encore trop frais, son ombre portée encore trop présente pour que je puisse complètement me laisser aller à celui-là.
Il y a le présent, entre les trois hommes, qu'on suit linéairement, et parfois, accidentellement, des bribes de passé. Des fragments ciselés, , magnifiques, mais comme posés là. Le sentiment diffus que les différents morceaux ne "s'emboîtaient pas" vraiment.
Et la fin de l'histoire (enfin, l'avant-fin, puisque le tout dernier chapitre ne relève pas de la même chronologie) est à la fois très touchante et très frustrante, à la façon dont elle escamote subrepticement deux personnages sur trois.
On reste sur sa faim légèrement, peut-être, mais, ce Cletus, on aurait envie de le connaître mieux, de l'accompagner (comme beaucoup de personnages de Mingarelli.) De regarder les sapins, de penser à la neige, d'allumer une cigarette avec lui sous la pluie, même si on a depuis bien longtemps arrêté de fumer...

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