Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
lieux communs (et autres fadaises)
28 novembre 2015

écureuil

THIS IS NOT A LOVE STORY
de Alfonso Gomez-Rejon

Figurez-vous qu'il y a seulement quuatre ou cinq jours, je n'avais encore jamais entendu parler de ce film. Puis j'ai lu un interview du réalisateur, avec dedans des choses qui m'intéressaient, voire m'appâtaient (non non, pas de QV) puis j'ai lu les appréciations sur all*ciné, et voilà que, ce matin,  j'ai la chance de pouvoir le voir (grâce à mon entregent personnel qui est somme toute bien riquiqui, enfin, de taille normale, re-enfin juste de la taille de tout-un-chacun un peu fûté qui fouine sur le ouaibe...)
All*ciné le tague "drame, comédie" et c'est assez juste, (plus que, en tout cas, l'habituel "comédie dramatique"). Les critiques sont excellentes et bien étoilées (même si n'y apparaissent pas celles des "journo de ciléma" habituels - les C, P, les I- qui ont dû boycotter l'affaire sans doute parce que le film était distribué en France par un énormissime studio et/ou qu'il venait d'être double couronné à Sundance -Jury et Public-).
C'est vrai que cela peut paraître surprenant qu'un tel film soit propulsé par un biiig studio, avec un biiiig travail de promo (les différentes affiches sont superbes, cf plus bas), affublé, en plus, d'un titre français en anglais pour remplacer le titre original, plus lapidairement juste : Me, Earl and the dying girl. Qui dit bien plus simplement les choses.

(Bon je retire tout ce que je viens de dire, j'ai regardé les chiffres du box-office et il semble que, grand studio ou pas,  le film ait été conduit à l'abattoir et ne soit sorti que dans une salle parisienne, en sortie nationale, et n'ait fait que 5 spectateurs à la première séance)

Moi, Earl, et la fille en train de mourir. Le narrateur (un ado timide qui se souhaiterait invisible et se présente comme "ayant une tête de hamster"), Earl, son pote black, et Rachel, une adolescente atteinte de leucémie. Oui, rien que ça. Une histoire d'amitié (le slogan est "un peu d'amitié n'a jamais fait mourir personne"), initiée par la mère du narrateur qui, au début du film,  supplie son fiston d'aller voir la jeune fille, qu'il ne connaît pas plus que ça. il fait donc l'effort de, mais les débuts sont très froids. On n'est donc pas dans un Love story à la sauce ado (même si le film est tiré d'un roman pour ados). On est dans un univers à la fois très réaliste et complètement fantaisiste, avec, surtout, beaucoup beaucoup beaucoup de références au(x) cinéma(s) (on sent que le réalisateur aime énormément ça) sous toutes les formes : affiches, musiques, photos,  citations, clins d'yeux, et même re-fabrication de films (à la façon de Michel Gondry dans Be kind rewind).

Greg et son pote Earl (qu'on peut, au final regretter de ne pas voir suffisamment, d'avoir été un peu squeezé) sont amis depuis la maternelle, et font tout ou presque ensemble. Notamment toute une flopée de films (qui interviendront régulièrement dans le récit) où ils détournent/retournent des classiques, des imparables, immanquables du 7ème art (et je vous recommande de bien parler anglais pour saisir toute la subtilité des titres détournés en à-peu-près phonétiques, la plupart sont à pisser de rire). L'intervention de Rachel dans leur duo va légèrement modifier la donne (au début du film, Earl ne semble considérer les meufs que comme une paire de boobs sur pattes, à la fin remarquez peut-être aussi quand même), chacun inter-agissant avec l'autre pas forcément dans la direction souhaitée. Et le film suit son cours, comme l'année scolaire, et on prend plaisir à les voir évoluer, et, comme au flipper, (ou au billard) au milieu de seconds rôles très justes (les parents, un prof d'histoire tatoué, quelques copines, deux ou trois garçons, juste la quantité indispensable.)

Avec, dans la forme même du film, des pieds-de-nez aux narrations habituelles de teen-age movies, ou college-movies, ou prom night-movies. Titres, intertitres, voix-off, animations, angles de prise de vue, le réalisateur serait très souvent dans le commentaire de ce qui est en train de se passer, avec une virtuosité certaine, trop peut-être même (certains grinchouilleux pourront penser que Alfonso Gomez-Rejon est un petit malin qui a fait un film à son image, malin, et un peu trop sûr de lui, tout à l'opposé de son personnage principal...)
Mais midinet on est, et midinet on reste... (Bien sûr que j'ai pleuré à la fin -enfin, plutôt un peu avant, d'ailleurs- et bien sûr que j'ai adoré ça.) C'est une friandise cinéphile incontestablement addictive, au goût de revenez-y (d'autres diraient d'on y est déja venus : Wes Anderson et Moonrise Kingdom par ci, Gus Van Sant et Restless par là, et pourquoi pas Michel Gondry -j'en ai déjà parlé pour Be kind rewind, mais on pourrait aussi évoquer The we and the I- et (500) jours ensemble de Marc Webb, et tiens, un chouïa de Tu dors Nicole de Stéphane Lafleur, et comment s'appelait-il ce doc sur les teenage movies ? ah oui Beyond clueless de Charles Lyne... Purée j'en ai vu des films d'ado(s) cette année ! Et donc je ne peux pas ne pas nommer It follows avant de fermer cette parenthèse, même si la parenté là me semble un peu plus lointaine, quoique.)

This is not a love story fanfaronne le titre, et il a sans doute raison. Ca aurait pu aussi s'appeler This is not a teenage movie, au risque d'attirer encore moins de spectateurs. Mais c'est vraiment bien la façon dont le film se dépouille petit à petit de ses oripeaux formels parfois un peu voyants (mais c'est aussi la façon d'exister de ces ados, non ? Se forger une identité pour être "reconnu" par les autres) pour révéler sa vraie nature (qui n'est, finalement, pas si éloignée que celle dont il semblait se moquer. Comment s'appelle cette fable déjà ? Ah oui Le geai paré des plumes du paon. Sauf que le réalisateur n'a pas délibérément essayé de nous berner. Le film est aussi sincère dans les ricanements, au début, que dans la mélancolie finale.  Même la voix-off se calme. Le discours s'apaise, se calme (je n'irais pas jusqu'à s'épure mais bon). Un film qui réussit quand même à faire pleurer, mais plutôt habilement, sans tirer sur les grosses ficelles habituelles, et qui par son prosélytisme ne peut que toucher tout cinéphile qui se respecte.

(en repensant au doc que j'ai cité, il me semble que le film respecte la structure puisqu'on voit notre jeune homme avec smoking, fleur et limousine pour la prom night, qui est, normalement, le clou de ce genre d'histoires... Sauf que...)

050615

208022

(en haut l'affiche originale, en dessous l'affiche... française (!),
qui, s'y on s'accorde à la lire scrupuleusement
semblerait induire un sous-sous-texte gay, mais non, non, même pas...)

*

466970  468689 472908
trois des (multiples) affiches américaines

 

 

 

27 novembre 2015

chipmunk

IN THE FAMILY
Patrick Wang

Ca y est, j'ai enfin réussi à le voir.
J'ai même bravé les éléments pour mériter cette séance à 14h au Kursaal (que j'avais inscrite sur mon agenda pour être sûr de ne pas l'oublier). je savais que le film était long (3h!), je connaissais les réticences d'Hervé concernat la seconde partie, mais, vous savez bien, il vaut toujours mieux se faire son avis propre, n'est-ce-pas ?
J'ai déjà dit ici tout le bien que je pensais des Secrets des autres, et ce premier film de Patrick Wang m'a mis quasiment dans le même état  d'enthousiasme cinéphilique et de surchauffe laudative.
(adresser ici une triple paire de gifles à Peauzitif, Les Cahiaîs, et le Mmonde, qui l'ont honteusement flingué, sans autre forme de procès que leur condescendance hautaine et méprisante.)

Le quotidien d'une petite famille, déjà. Sauf qu'ici le gamin (Chip) a deux papas : papa et papou. Sans en faire une montagne et en banalisant au maximum, il a deux papas, voilà. La maison, l'école, les week-ends, les repas de famille, l'histoire du soir, la nounou, juste le quotidien, simplement, quoi. Filmé avec grâce et attention.
Sauf que, bien sûr,  ça serait trop simple. Un des deux papas a un accident de voiture et laisse l'autre, Papou, tout seul avec l'enfant. Et ça pourrait continuer tout aussi simplement, sauf que. Le papa décédé n'a pas pensé a rédiger un testament et donc c'est sa soeur qui récupère tout : les comptes bancaires, la maison, tout, même la garde de Chip. La situation s'envenime rapidement entre Papou qui veut récupérer celui qu'il considère comme son fils, Chip, et les autres, qui le lui ont soustrait et comptent bien le garder. Chacun s'arc-boute sur ses positions. La situation se grippe inexorablement.
Dans le même temps, le réalisateur en profite pour, en quelques flash-backs judicieux (et très délicatement intégrés), nous raconter toute l'histoire de Papa, Papounet et Chip, depuis le début. La même façon de procéder (prière d'insérer pourrait-on dire dans le domaine de l'édition) sera utilisée, avec tout autant de bonheur, dans Les secrets des autres, avec juste un peu plus de procédés stylistiques (surimpressions, surtout).

Le film est long, mais jamais longuet. L'histoire est linéaire, quasiment rectiligne (hormis les quelques retours en arrière déjà évoqués) la narration en est simple et élégante (la façon de filmer le moment où papounet apprend l'accident de son compagnon, en est un exemple parfait), et le déminage de la situation est provoqué par un deus ex machina grisonnant et bonhomme, un avocat à la retraite, qui va prendre Papounet sous son aile, et voler à son aide, avec du papier et un stylo, en l'aidant à faire le point  pour organiser une audition (une confrontation) en présence de la partie adverse (sa soeur et son beau-frère et leur avocat, -abominable-).
C'est cette fameuse scène qui fait grincer des dents Hervé, et c'est vrai qu'elle est comme un bloc un peu lourd, de texture hétérogène,  inséré presque de force dans la fluidité du reste du récit. Une longue scène d'intérieur autour d'une table, bavarde, statique, certes, mais, pour moi, indispensable. Conventionnelle, -dans l'esprit des films de procès, elle donne la parole d'abord au méchant (l'avocat de la partie adverse) pour des questions affreuses, puis au gentil (l'avocat de Papounet), pour des questions qui vont rééquilibrer la balance-, mais formellement efficace (je me demande comment aurait pu se boucler le film sans en passer par là).

Quant à moi, je regretterai juste la rapidité du dénouement (j'ai pensé à la fin du poème de Victor Hugo : "Tiens, dit-elle en ouvrant les rideaux, les voilà.") mais cet arrêt sur image pour couper une scène en plein élan est, réflexion faite, tout aussi justifié -et pesé- que le reste.

Voilà un film qui m'a (pudique euphémisme) beaucoup touché, par cette simplicité et cette justesse, cette façon de parler de l'amour en général et entre hommes en particulier, et j'avais les yeux rouges et je reniflais lorsque les lumières se sont allumées, mais ma voisine aussi, et les copines de ma voisine qui sont arrivées ensuite pour discuter aussi (les vrais hommes, ça va pas au cinéma, et ça y pleure encore moins, non ? hihihi).

041675

26 novembre 2015

le placard

(fin de rêve)

Je suis en train de visiter l'école où j'ai longtemps travaillé, avec un groupe de personnes (à part nous, l'école est déserte)

j'arrive dans "ma classe" et je m'aperçois qu'elle est entièrement vide, qu'elle est redevenue une salle de jeux (comme il y a très longtemps), le placard derrière la porte, où je rangeais mon bazar, est lui aussi entièrement vide, et je le regarde avec une certaine émotion
Sylvie (une ancienne ATSEM) parle alors du fait que j'y laissais tout en désordre, elle parle de tasse à café, de filtre à café, oubliés régulièrement, et je lui fais remarquer que c'est dommage qu'elle ne se rappelle que des choses négatives (alors qu'en plus, cette histoire de filtres à café est totalement inventée)

nous continuons la visite (de l'autre côté du couloir) la "classe de Catherine" (qui fut aussi précédemment la mienne) est quasiment vide elle aussi, je pense que c'est là que le Rased vient s'installer pour les prises en charge en petit groupe, mais Catherine m'explique que cette salle a été prêtée à un groupe extérieur (un syndicat ?) pour y organiser ses réunions

je suis légèrement ému à la fois d'être là et de voir ces salles vides ou presque, mais je continue ma discussion avec Sylvie, en lui demandant, si, par exemple, quand elle sera sur son lit de mort, elle va récapituler toutes les choses négatives qu'elle aura vécues dans sa vie et en dresser une liste exhaustive (je l'imite en rigolant et prend la position du gisant, mains jointes sur la poitrine, faisant mine de chercher toutes les mauvaises choses qui lui sont arrivées)

25 novembre 2015

vodka

je suis quelqu'un, finalement, d'assez discipliné
je fais où on me dit de faire, je regarde où on me dit de regarder (des fois je regarde la lune, et des fois juste le doigt), et je découvre où on me dit de découvrir

là c'est venu des Inrocks, qui m'enjoignent de découvrir deux groupes :

THE FAT WHITE FAMILY

et

ODEZENNE

Petite

deux groupes dont je ne pensais jamais avoir entendu parler jusuqu'alors, mais pourtant qui se sont avérés avoir été programmés aux Eurocks alors que j'y étais (en 2014). Sans que j'en ai vu aucun des deux. J'ai donc googlé, lu ce qu'il y avait à lire, grappillé ce qu'il y avait à.

Pour les premiers j'ai découvert ce genre d'images qui, forcément, m'attirent l'oeil :

fat-white-family-262320941

et pas mal de prestations live sur y*utube. Le groupe est renommé pour des concerts pleins de bruits et de sueur (ils auraient, selon les chroniqueurs, une identité olfactive assez forte) où le leader du groupe n'hésite pas à tomber la chemise, (et souvent même le pantalon) et à passer le reste du concert en slip (et en chaussettes). Le concert visionné me l'a confirmé.
A la fois que ce jeune homme est sexy et agréable à l'oeil, mais que la musique du groupe ne correspond pas vraiment a priori avec mes goûts et références musicaux habituels. Un concert à regarder sans le son, donc ?
J'ai tout de même commandé leur album, histoire de me faire une idée.
En attendant, on peut aussi mater les clips, celui de Touch the leather, avec pour seule et minimale chorégraphie le déplacement latéral d'un postérieur indiscutablement de sexe mâle (ce qui n'est pas vraiment pour me déplaire) dans une petite pièce, ou celui de Cream of the young, avec son étalage de bouffe, ses coups de poulpe et autres léchages de tête de veau (crue), légèrement vomitif. Avec aussi des jeunes gens barbouillés de fromage blanc (ou d'autre chose... Du y*p, peut-être ? -sourire ingénu) Il y a dans tout ça quelque chose de fascinant, de malsain, de pas recommandable mais bon justement qui attire l'oeil, quoi, et qui donne envie.


Pour les seconds je me suis procuré leur dernier album Dolziger St. 2. Que j'ai écouté sans aunune idée préconçue. Ce qui était intriguant, c'est qu'ils sont rangés sous l'étiquette rap, mais qu'ils la réfutent. Que plusieurs critiques insistent sur la proximité avec Fauve, ce qui ne me semble pas très évident après écoute... Et qu'ils sont aussi spécialement dynamiques en concert (mais qu'ils ne sentent rien, eux). Et j'ai donc écouté. Ce qui pourrait évoquer le rap, c'est le fait qu'ils ne chantent pas. Ils parlent (mais avec quelle voix! j'ai immédiatement craqué sur la (les ?) voix.) Puis, des ambiances qui accrochent, par les mots (mes babines, mes babines), par la musique qui accompagne, par le thème (je me suis entiché presqu'illico de Vodka, qui m'a donné envie d'en boire) par l'ambiance (on n'est ni dans le bling bling les bagnoles les meufs et les grosses chaînes, non, on est plutôt dans le "je suis qu'une merde sortie d'un gland", je les cite) plutôt sombre mais pas violente, réaliste, quoi, poétiquement réaliste, humainement poétique, avec un côté gentiment salace (lubriquounet, parce que ça n'est jamais gore), et les pauvres ils étaient effectivement programmés aux Eurocks 2014, ce soir où il avait tant plu, et qu'après le concert de Mo (avec un o barré, je ne sais pas le faire) j'avais hésité parce qu'il restait encore deux heures jusqu'à Casseurs Flowters, et à l'époque je ne savais pas que c'était ces gaillards-là qui passaient (mais bon, ils n'auraient joué ni Bouche à lèvres ni Vodka ni On nait on vit on meurt, alors...) et qu'on était finalement tous repartis dans la twingouille, un peu la queue basse il faut le reconnaître... recommandé(s) donc, et tiens je vais aller de ce pas mater leurs clips... J'veux de la vodka dans un verre tout haut...

9738-tab

24 novembre 2015

dobbiamo pagare tutti

ROCCO ET SES FRERES
de Luchino Visconti

Settimana italiana, la suita (ok ok j'arrête de parler rital de cuisine)
Je me souvenais d'une scène et je croyais donc avoir vu le film (avec -couic- Annie Girardot, vers la fin) , mais j'ai du ne voir que cette scène. et j'ai donc découvert (prudemment, en après-midi) les presque trois heures de cette re-sortie.
La copie est magnifique.
Comme sont magnifiques "le" Delon, "la" Girardot et "le" Salvatori du haut de l'affiche (et on a droit aussi -j'en étais le premier surpris- à un magnifiquissime Hanin, dans un rôle délicieusement ambigu où le sous-sous-texte gay n'a quasiment plus besoin de se cacher tellement il pointe -comme le nez au milieu de la figure, tsss qu'alliez-vous penser-.)
Je ne suis pas sûr (aïe!) d'être un énorme fan de Visconti (aïe aïe!! arrêtez de me donner des gifles) mais là il faut reconnaître qu'il sait -qu'il aime- filmer les hommes (hmmm les boxeurs, allez tous à la doccia!, et la fratrie en caleçon -ils sont cinq frères !- au réveil, et même les ouvriers d'Alfa-romeo à la pause -et à la pose!- et en bleu), qu'il sait -qu'il aime- parler de l'Italie, qu'il sait raconter des grandes histoires bien familiales bien ritales,  mamma, religion, porca miseria, puttane, carabinieri... qui fleurent bon le néo-réalisme (ah la transpiration des hommes, des vrais, qu'ils soient maçons, boxeurs, ouvriers ah leur rugueuse -le rugueux est ici tout à fait de mise- beauté...) avec ce que ça implique d'engueulades, de coups de poings, de larmes, d'invocations à la madone, d'imprécations maternelles, de vols de bicyclettes  chemises ou de bijoux...
C'est très bien ficelé (la qualité de la restauration est altissima) mais bon à un moment le scénario devient un peu laborieux, entre les fratelli, ça semble un peu too much (oui oui je sais, on me parlera de "tragédie") celui qui prend sans faire exprès la copine de son frère aîné et qui ensuite va se sacrifier quand il réalise le mal qu'il lui a fait, et décide de rendre la copine en question au frère en question -et pas vraiment pour son bien, d'ailleurs, la suite du film le prouvera...-.
Le film est découpé en chapitres qui portent chacun le prénom d'un des frères (dans l'ordre décroissant) et on se dit que si c'est Rocco qui est resté dans le titre, c'est que la belle petite gueule de Delon ne devait pas laisser Luchinochounet insensible...). Tout ça est magnifique, flamboyant, exacerbé, frémissant. Ca n'en finit plus de vibrer de tous les côtés. Et il faut bien reconnaître que les trois heures passent sans presque qu'on s'en rende compte.
(Qu'ils sont beaux ! Que le noir est blanc est beau! Que l'Italie est belle!)

8600_fr_rocco_et_ses_freres_1310561247784 rocco_et_ses_freresartoff1456
affiches...

 

rocco-et-ses-freres
...ils sont magnifiques, non ?

23 novembre 2015

l'acteur, juste à côté du personnage

MIA MADRE
de Nanni Moretti

En avant-première dans le bôô cinéma, pour la soirée d'ouverture de la semaine italienne...
On a presque fait salle comble (les Italiens de Haute-Saône s'étaient mobilisati !)

Il était temps que je le voie, trop de gens déjà me disaient (m'avaient dit) qu'il était bien (surtout ceux qui l'avaient vu à Cannes).
Ca commence, et j'ai illico les larmes aux yeux (aux oreilles, plutôt) en reconnaissant, en même temps que les lettres du générique, les petites notes de piano que j'adore du Alina d'Arvo Part (musique chérie depuis que je l'ai -tiens, grâce au jeune homme en t-shirt vert- découverte dans le Gerry de Gus Van Sant).

C'est l'histoire d'une réalisatrice (Margherita Buy, magnifique) qui est en train de tourner un film et dont la mère est en train de mourir. (Et dont le frère est joué par Nanni Moretti.). On navigue entre les niveaux de réalité (les niveaux de conscience ?) Il y a donc le film dans le film (des ouvriers qui manifestent contre leur licenciement dans une usine dont le nouveau patron -et licencieur- est joué par John Turturro -acteur cher à mon coeur-), les gens en train de tourner ce film, le quotidien de la réalisatrice, équitablement partagé entre le tournage de son film et les visites à sa mère, et, rendant l'ensemble encore plus attirant, une épaisseur  supplémentaire de réalité-fiction, constituée par les rêves de la réalisatrice, tournant de façon assez obsessionnelle -on la comprend- autour de sa mère et du film qu'elle est en train de tourner...

Ca pourrait être une façon de Journal intime ou de La chambre du fils (version "la chambre de la mère") mais ça n'est ni l'un ni l'autre. Nanni Moretti est très fort, en réussissant à raconter des choses qui le touchent de près (le concernent) en changeant l'éclairage, en les déplaçant vers un alter ego au féminin (je suis persuadé qu'il y a quelques années il se serait attribué le rôle principal, celui du réalisateur qui doute, là il est juste -magnifiquement juste- le frère de -et le fils de-. Simplement.) Comme si sur le scooter imaginaire que je continue de lui associer depuis, justement, Journal intime, il roulait sur la ligne blanche entre sourire et douleur, avec juste quelques embardées, quelques zigzags, d'un côté ou de l'autre. Bel exercice d'équilibre.

Mia madre est non seulement un film à voir, absolument, mais aussi un film qui mérite d'être revu. Par la façon dont il est construit (on peut, à la seconde vision, s'attacher au petit plaisir d'y déceler les"coutures" (les sutures) entre le réel et l'onirique) par la richesse et la multiplicité des reflets qu'il renvoie, sur la famille, sur le cinéma, sur les acteurs, sur les manifestations, sur les rêves, sur l'amour filial.  Par cette manière magnifique de n'être jamais définitif, (ni dans le récit de la maladie, de l'apprivoisement de l'idée de la mort, ou des théories filmiques  péremptoires) de choisir de rester dans cet entre-deux un peu cotonneux, incertain instable. "C'est savie, c'est ma vie, c'est un peu la vôtre aussi...", semble nous chantonner (nous chuchoter ? nous pianoter ?) Nanni M.
Et la musique vient sublimement accompagner tout ça (Arvo Part, Phil Glass, Benjamin Britten... je me régale...)

354717

22 novembre 2015

éclat dans l'oeil

SNOW QUEEN
de Michael Cunningham

J'avais failli l'acheter (fort cher, au moins 13€!) à la FAL, et je m'étais repris à temps, vérifiant le soir même qu'il était deux fois moins cher sur pr*ceminister (et le commandant donc aussi sec).
Michael Cunningham, je l'ai découvert avec Les heures, dont je suis tombé amoureux, puis j'ai lu La maison au bout du monde et De chair et de sang, que j'ai beaucoup beaucoup aimé. Du temps a passé, et quand le suivant est sorti, Le livre des jours, je l'ai acheté et lu illico (tiens c'était du temps de ma cervicotomie), et déchanté idem : ce fut une énorme déception. Peut-être l'hôpital me rendait-il grincheux, mais j'ai trouvé ça faiblard facile (et systématique me semble-t-il, je ne saurais plus expliquer pourquoi, de toute façon ne me reste de ce roman que l'image atroce de dizaines d'ouvrières aux robes en feu sautant par les fenêtres de leur atelier dont les portes ont été condamnées).
J'ai tout de même ensuite acheté le suivant, Crépuscule, dont je n'ai aucun souvenir, (et pour cause, je l'ai trouvé rangé dans ma bibliothèque avec un marche-pages bleu fiché aux environs de la quarantième page...)

Allez savoir pourquoi (le bénéfice du doute ? et la sympathie inexplicable que m'inspire le bonhomme), j'ai donc commencé Snow Queen. Et j'ai trouvé ça plutôt... plaisant, puis agréable, voire, très agréable, avec certaines phrases qui me plaisaient énormément, voire des paragraphes... Le plaisir retrouvé, quoi, même si, inexplicablement, malgré le fait que je trimballais le bouquin partout avec moi, il est advenu que j'en ai morcelé irraisonnablement la lecture. La première partie s'y prêtait, qui n'était constituée que de chapitres très brefs commençant chacun par UNE PHRASE EN MAJUSCULES. Mais lorsque je le prenais le soir, je ne pouvais en lire que peu, et pendant très très longtemps je me suis emmêlé dans les deux personnages principaux, Tyler et Barrett, deux frères qui habitent ensemble, avec la même femme, Beth, qui est en train de mourir doucement du cancer.

Je me désespérais de ne pas parvenir à en lire plus que quelques pages à la fois (oui, je sais, je n'ai pourtant pas grand-chose d'autre à faire de mes journées, hein, les esprits chagrins) mais peut-être en même temps avais-je envie que cela durasse (je sais ça n'existe pas, mais c'est plus joli que durât, non ?) ainsi plus longtemps. Et quand est arrivé un trèèèès long chapitre je me suis posé dans mon canapé (enfin façon de parler, je me rappelle très bien où j'étais mais je ne vais pas vous le dire en vrai ici) et je l'ai lu jusqu'au bout, et j'ai enchaîné sur la -plutôt très triste- partie suivante, et je ne me suis presque plus arrêté, et c'est vrai que c'est beaucoup mieux comme ça. D'une traite.

C'est très Cunningham, new-yorkais, bobo, avec de la neige dans Central Park, les petites rues du Lower East side (que j'ai eu le plaisir de moi-même arpenter voici trente ans et -argh!- des brouettes), une boutique où on vend des choses vintage et très chères, de la cocaïne qu'on sniffe en douce, une chanson qu'on essaie d'écrire, une cohabitation idéaliste (idéalisée ? le triangle amoureux est habituel chez M.C), et une apparition lumineuse et nocturne (dont il sera question tout au long du roman), sorte de mcguffin fluorescent que les personnages se renvoient affectueusement comme une patate chaude. Avec, en plus, un clin d'oeil amical à La Reine des neiges d'Andersen, conte qui était particulièrement cher à mon coeur depuis l'enfance, avant qu'on en fasse un film Disnuche une comédie musicale un spectacle de patinage et que sais-je encore et que ça commence vraiment à me casser les oreilles et le reste...

reste un roman très agréable, quelques passages magnifiques, à recopier (surtout sur l'amour, le désir, le temps qui passe, et autres sujets réjouissants) avec un petit cristal fiché dans l'oeil (ce fameux fragment du miroir brisé de la reine des neiges qui me faisait tant délirer quand j'étais plus petit -oui oui, j'ai un jour été plus petit-).

21 novembre 2015

les quatre soeurs

NOTRE PETITE SOEUR
de Hirokazu Kore-Eda

je voulais que ça s'intule LES TROIS QUATRE SOEURS, mais avec l'éditeur de titres ça n'est pas possible.
Le nouveau film, donc, de Mr Kore-Eda, qui fait partie des réalisateurs que je suis depuis leurs débuts ou presque, tellement j'apprécie leur travail. Avec des films que j'adore plus ou moins, c'est normal. (Et je réalise, en révisant sa filmo sur all*ciné qu'on ne nous en a pas tout montré en France, mais mais qu'est-ce à dire ?)
Les récents étaient plutôt sympathiques, le dernier que j'ai adoré était Still Walking, (2008, déjà tout de même) une histoire de famille (comme d'hab) bienveillante en apparence mais nimbée d'une imperceptible -et délicieuse- cruauté.
Ici, il sera encore question de famille, où trois soeurs vont à l'enterrement de leur père, parti bien des années plus tôt avec une autre femme, et y font la rencontre de leur jeune soeur, qu'elle ne connaissaient pas. jeune soeur avec qui elles sympathisent immédiatement, lorsqu'elles apprennent que c'est elle qui s'est dévouée pour accompagner les derniers jours de leur père, ce que n'a pas su faire leur belle-mère (la seconde compagne de leur père).
Le divorce, la maladie, la mort, le film, on le voit, se bâtit sur des thèmes pas très guillerets mais construit sur ces bases a priori doloristes une histoire pleine de tendresse de lumière et de chaleur. C'est la principale différence de ce film avec Still walking, de rester toujours du côté du positif, du lumineux, de la douceur.
Les trois soeurs invitent la plus jeune à venir habiter chez elles, la prennent sous leur aile, elles vivent ensemble dans la maison familiale dont leur mère à elles, qui est aussi partie ailleurs "vivre sa vie", envisagerait peut-être la vente...
Et la vie passe, dans la maison, et c'est juste ça le film, la vie de ces "quatre soeurs", les détails, le quotidien, retranscrits avec délicatesse, entre estampe et hai-ku. C'est très japonais, très Kore-Eda, très délicieux. Le post aurait pu aussi s'intituler "Liqueur de prunes et cerisiers en fleurs" tellement le réalisateur nous rend sensibles -attentifs- à toutes les perceptions, tous les petits bonheurs -typiques ou pas- de la vie, et ça m'énerve beaucoup (ah, un sentiment négatif, le premier dans ce post) lorsqu'il apparaît que plusieurs critiques (les Cahiaîs, notamment) utilisent le terme de mièvrerie (mais c'est juste parce qu'ils sont jaloux (affreux machos, oui) que ce film ne soit "tenu" que par des femmes, voilà pourquoi). Pour une fois qu'il est question de pardon plutôt que de vengeance, de vivre ensemble plutôt que de se séparer, de sourires plutôt que de gros flingues, de jeunes filles en fleurs -de cerisier- plutôt que de yakuzas, de traders ou de serial-killers, laissons-nous aller, passons le pont qui mène à ce jardin japonais sur lequel se clôt le film -avec des Hana-bi, hihi, ça veut dire feux d'artifice en japonais, mais vous le saviez déjà depuis Kitano, no?-, sans craindre les fantômes qui pourraient venir à notre rencontre, et, surtout, surtout, ne boudons pas notre plaisir...

566337

 

20 novembre 2015

qui suit charlie ?

Mercredi matin, je me suis dit qu'il fallait que j'aille faire un tour chez le marchand de journaux.
Je me suis dit que je voulais acheter ce numéro, précisément (non, je ne me suis pas abonné après les attentats de janvier, même si j'ai hésité un moment), voir ce qu'ils avaient trouvé comme une.
Et je me souviens comme ce jour de janvier après les attentats, où j'avais fait tous les magasins de V. pour essayer de trouver un exemplaire du numéro de la semaine en cours, et où tout avait été dévalisé à quarante kilomètres à la ronde, et pire encore,  à la folie furieuse (l'hystérie) qui avait suivi les jours suivants, pour le fameux numéro d'après, où des gens se levaient à 6h du mat' pour faire la queue au kiosque pour avoir "leur" Charlie...

charlie_une_0

(c'est vrai j'entretiens avec Charlie-Hebdo un rapport... ambigu, je n'achète que les numéros "sensationnalistes", de la même façon que je ne conserve de libé -auquel je suis abonné- que les "numéros des gens morts")

charlie amour haine

(celui-là je l'ai même encadré...)

 

j'envisageais donc déjà de faire le tour des marchands de presse, où les rayons seraient vides et où ils me répondraient d'un air désolé "non je n'ai plus de Charlie", où même ils auraient déjà mis un panonceau en vitrine "plus de Charlie"... d'autant plus que je m'y prenais un peu en retard (c'était le milieu de l'après-midi)

j'ai commencé par là-même où j'avais commencé au mois de janvier : le Super U (oui, je sais, on fait mieux a priori comme marchand de journaux mais bon c'est le plus près...) et en arrivant j'ai été plutôt étonné de voir, en rayons, les trois ou quatre exemplaires habituellement en vente de Charlie...

charlie-hebdo-18-11-2015-n-1217

Pas d'hystérie, de bousculade, d'exemplaires que l'on s'arrache, de voisins que l'on piétine pour être servi plus tôt, non, calme plat, tout le monde s'en fout et est passé visiblement à autre chose... j'en ai pris un et je suis passé à la caisse, et la caissière m'a dit, en le scannant "Ah, Charlie, c'est pas souvent que j'en passe..."

Dire qu'au mois de janvier, toute la France ou presque a défilé pour aller l'acheter

Ça a passé

...comme passeront les actuels cocoricos et Marseillaise(s) et autres bleu-blanc-rouge(s), non ?

18 novembre 2015

angkar

L'IMAGE MANQUANTE
de Rithy Panh

Terrifiant.

L'image manquante est un film terrifiant. Par ce qu'il évoque : le régime de terreur instauré par les Khmers rouges et leur leader Pol Pot au Cambodge, de 1975 à 1979. Le réalisateur était alors un enfant, il y a perdu toute sa famille, et il nous raconte son histoire, leur histoire. Qu'il reconstitue par l'intermédiaire de petites figurines de terre qu'il a façonnées sculptées et peintes. C'est l'histoire de son pays, le Cambodge, durant ces années effroyables, à partir du coup d'état du 19 avril 1975. Comment le délire d'un homme ("frère numéro un") noyauté par un groupe de fanatiques a planifié et exécuté un génocide (qui pour le reste du monde est resté longtemps tu) dont le nombre de victimes n'a jamais pu être d'ailleurs précisément établi (il serait question d'un cinquième de la population cambodgienne de l'époque, plus de deux millions de personnes dans les estimations les plus pessimistes.)

L'image manquante est un film bouleversant. La voix-off (celle de Rithy Panh qui dit les mots de Christophe Bataille écrits d'après les siens propres) sert de fil conducteur et de liant entre les images reconstituées (avec les figurines), les documents d'époque, et les images "autres" filmées par Rithy Panh (la vague qui revient, le flot, le flux), avec des interférences entre ces différentes strates / textures (Rithy Panh fait intervenir plusieurs fois ses figurines dans des décors réels et/ou d'époque. Le discours est posé, qui nous évoque des choses insupportables sans haine ni violence ni pathos. Une incantation douce, implacablement douce.

L'image manquante est un film magnifique. Il y est question du passé du réalisateur, de sa mémoire, de ses souvenirs et de sa douleur. A la succession implacable des événements (les habitants de Pnom-Penh chassés de leurs appartements, leur déportation à la campagne, les camps de travail, l'éradication par les Khmers rouges de tout ce qui rappelait la société "d'avant", les conditions de vie abominables, la faim, la maladie, le déni de toute humanité, de toute individualité) fait écho l'évocation par le réalisateur des jours "d'avant", justement, de la vie simple, du bonheur, de la famille, de toutes ces petites choses qui font le sel des souvenirs heureux.

L'image manquante est un film indispensable, primordial. Vital.

21036327_20130905144921481

1 2 3 > >>
Archives
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 384 428