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lieux communs (et autres fadaises)
24 janvier 2016

les phéromones des éléphantes du chapitre 13

ENVOYEE SPECIALE
de Jean Echenoz

Enfin! Le retour de "mon" vrai Jean Echenoz, avec un bon gros roman (de plus de 300 pages), ce qui nous change un peu de ses dernières livraisons : 3 biographies romancées, Ravel, Tesla et Zatopek, respectivement dans Ravel, Des éclairs, et Courir (je ne suis pas sûr de l'ordre), plutôt courtes et diversement plaisantes, suivies d'un 14 intéressant (touchant) mais maigrichon (124 pages au compteur (chroniqué ), et en large vision : avec la police usuelle on eut compté au max une quatre-vingtaine de pages), tout ça couronné par un Caprice de la Reine qui flirtait avec le foutage de gueule (une compilation de nouvelles moyennement intéressantes) qui m'avait à la fois déçu et irrité...

Je suis pourtant allé acheter celui-ci les yeux fermés, sans rien en avoir entendu dire, juste en en sachant la date de sortie (et je suis d'ailleurs allé presque spécialement à Besac pour ça).
Je l'ai commencé aussitôt. (Et peut-être commis au départ l'erreur de le fractionner, en n'en lisant quasiment qu'un chapitre à la fois -oui j'ai toujours des problèmes d'endormissement quasi-instantané-). Ce qui fait qu'au bout d'un moment, j'ai eu peur de me mélanger un peu dans les personnages (qui sont assez nombreux et portent chacun des noms improbablement délicieux), et j'ai donc été plus attentif, -et raisonnable- en le lisant de jour et par rasades beaucoup plus conséquentes. Chapitre par chapitre, c'était bien, mais en lecture de plus longue haleine ça devient de plus en plus plaisant, voire jouissif.
Je viens de le terminer et j'ai le sourire en le reposant, car ce livre m'a ravi. J'ai retrouvé le "ton Echenoz" qui me plaisait tant et m'avait ravi, enchanté, subjugué, etc., dans Cherokee, L'Equipée malaise, Nous trois, Au piano, Les grandes blondes, Je m'en vais (il n'y a que le tout premier, Le méridien de Greenwich, que je n'ai toujours pas réussi à lire... mais ce n'est pas faute d'avoir essayé). Il y a eu le Echenoz polar-jazzy, le Echenoz aventures exotiques, le Echenoz fantastique, le Echenoz sciences et techniques, là, ce serait plutôt le Echenoz contre-espionnage (mais n'y a-t-il pas eu, déjà, le Echenoz espionnage ?), où les aventures de Constance (le libraire des Sandales ma dit que ça lui avait fait pensé très fort à un film, le seul qui me viendrait à l'esprit serait Nikita, de Luc Besson, mais dans un traitement plus... décalé et beaucoup beaucoup plus drôle.

Oui, le contre-espionnage, c'est très mystérieux. mais, présenté par Jean Echenoz ça devient plaisant, assez drôle voire très drôle, ironiquement réaliste, tendrement cruel, lucidement rêveur, précisément flou, (les paires adverbe/adjectif pouvant chacune se permuter, je vous laisse le faire). Surtout que (si je ne m'abuse) il introduit très vite, et jusqu'au bout, dans son roman, une certaine distance -inédite si je ne me rabuse-, en parasitant régulièrement  le cours de l'action par un commentaire "extra-romanesque",  dans une adresse (un clin d'oeil) au lecteur, qu'il associe et rend complice, en utilisant un "on" (ou un "nous")  plutôt que le "je" qu'on aurait pu attendre. Si le nous est associé à la première personne du pluriel, je me souviens d'avoir appris dans ma jeunesse que "on" c'est "il" (au moins pour les accords grammaticaux). Donc je me suis demandé plusieurs fois qui donc il recouvrait : Lui-même  (Jean Echenoz) ? le narrateur (anonyme ?) le deus ex machina (idem)? le lecteur ? l'ensemble des lecteurs ?

Mais ce procédé littéraire (plutôt plaisant, il faut le reconnaître, une fois qu'on s'y est habitué) donne un peu le sentiment d'être dans une salle de montage, de voir les aventures de Constance à la fois comme un récit en train de se dérouler "normalement", mais aussi  en train d'être écrit, sous nos yeux, ce qui est moins fréquent. Et multiplie au moins par deux le plaisir du lecteur.

Jubilatoire ? Oui, oui, on peut se risquer à l'écrire. Et avoir ensuite envie de tout relire.

envoyée spéciale

 

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