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lieux communs (et autres fadaises)
22 septembre 2018

"comme c'est cruel..."

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MADEMOISELLE DE JONCQUIERES
d'Emmanuel Mouret

Oui, comme c'est cruel... Une belle histoire de vengeance, la vengeance d'une femme (jouée par Cécile de France), marquise de son état à l'égard d'un homme, marquis lui aussi (Edouard Baer) qui a commis la faute de cesser de l'aimer (de se lasser d'ele, plutôt).. Titres de noblesse car film en costumes (le premier pour Emmanuel Mouret), tiens encore un quelques temps après l'autre premier film en costume de Lucrecia Martel (Zama). 
Châteaux, gens de maison,  vaisselle raffinée, langage châtié, courbettes, perruques, robes échafaudées comme des pièces montées, jardins à la française, lettres cachetées, aucun détail n'y manque... Mais sans excès ni affectation.
Dans un premier mouvement, le marquis courtise (en vain) la marquise qui lui résiste, dans le second (vous devriez bien un peu vous en douter) elle finit par lui céder mais ça ne dure pas toute la vie, et dans le troisième acte, le plus long, elle va se venger de ça... (oui, assez cruellement), avant que l'affaire ne soit close dans un épilogue "apaisé" (pour qui ?).
On n'est pas très loin des Liaisons Dangereuses et du triangle Merteuil / Valmont / Cécile de Volanges, puisque, ici aussi, c'est une jeune fille d'apparence pure et virginale qui va servir d'appât (de proie) dans la machination ourdie par Madame de la Pommeraye.
C'est comme un petit théâtre raffiné qui se joue devant nous, Emmanuel Mouret joue la carte historique mais comme avec retenue, juste ce qu'il faut de costumes d'accessoires et de décor. L'important ce sont les mots, ceux que s'échangent les divers(es) protagonistes, ceux qu'ils s'écrivent aussi (spontanément ou sous la dictée) mais qui ne seront pas forcément lus par la destinataire prévue, ce beau langage (c'est adapté de Denis Diderot, tout de même) courtois et policé, qui nous narre avec une certaine délicatesse les égarements du coeur et de l'esprit. Beau monde, beaux atours, et beau langage. Plumage et ramage. Avec esprit et pudeur, sans vraiment oser appeler un chat un chat.
Et, donc, les personnages en question, aussi, Cécile de France en maîtresse d'oeuvre d'une vengeance impitoyable envers le pauvre Edouard Baer, idéal en libertin séducteur amoral (et manipulé, sous les yeux d'une Laure Calamy mi-confidente mi choeur), utilisant la jeune et diaphane Alice Isaaz (qui m'a rappelé avec émotion la porcelaine fine de la jeune Michèle Pfeiffer lorsqu'elle incarnait Cécile de Volanges) suivant le vers de Corneille "Et le désir s'accroît quand l'effet se recule..."
Tout ça aurait pu paraître artificiel, poseur, empesé... il n'en est rien. Ah qu'en termes galants ces choses-là sont dites... Mouret nous régale avec son joli conte (a)moral, servi par des comédien(ne)s superbes, un quintette à cordes parfaitement accordé(es), à l'image de celles du Giardino Armonico, qui viennent réveiller Vivaldi dans l'alerte bande-son. qui finit d'emballer parfaitement l'ouvrage (Décidément, Bach la semaine dernière, Vivaldi cette semaine, un vrai rbonheur pour les oreilles. Et pour le coeur.)
Comme le dit in fine Mme de la Pommeraye : "Mon coeur est en paix...".
Le nôtre aussi, assurément.
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