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lieux communs (et autres fadaises)
8 juin 2019

l'odeur des pauvres

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PARASITE
de Bong Joon Ho

Bon, j'avais tout mélangé. Ou compris ce qui m'arrangeait. J'ai cru qu'après The Host, avec un titre pareil, Bong Joon Ho avait (re)fait un film d'extraterrestre (ou un critique aura dû mal s'exprimer). Donc j'ai attendu pendant un certain temps le fameux monstre extra-terrestre en question. Pour des prunes (du sirop de prunes, même). En vain, car point d'E-T ici ne poindra.
(Encore que.) (hihi).
Quelle histoire !  Quel film! Je n'avais voulu lire aucune crique, mais j'avais aussi compris qu'il était question de familles, et de riches et de pauvres (ouf, sur ces points, j'avais bien compris...) Ca commence sur un plan de vieilles chaussettes qui sèchent, un entresol où s'entassent les "pauvres", le fils, la fille, la mère et le père (c'est dans cet ordre je crois qu'on les découvrira), engagés, dans la première scène à la chasse au "saint wifi", puis, on le comprendra très vite ensuite à la chasse au fric, simplement. Une famille de pauvres démerdards et (immédiatement) sympathiques.
Par l'entremise d'un copain du fils, ils vont avoir l'opportunité (le mot est ici justifié, Hervé, isn't it ?) d'entrer en contact avec une famille de composition équivalente (maman, papa, grande soeur, petit frère) mais d'un tout autre rang social (et statut financier), des gens riches, dans une splendide maison de riches, quoi, puisque s'ajoutent (se greffent) à ladite cellule familiale les gens de maison : une gouvernante, un chauffeur, et un professeur d'anglais "à domicile". C'est à ce titre que le fils va entrer, le premier, dans la maison magnifique de la famille riche, sur la recommandation de son copain étudiant (qui y exerçait la même fonction mais a dû partir à l'étranger, et a donc proposé ce rôle à son pote, le chargeant de "surveiller" la jeune fille, le temps qu'il puisse la demander en mariage lorsqu'il rentrera...) Le fils trouvant le boulot plaisant (et gratifiant) va vite trouver un stratagème pour y faire entrer sa soeur, qui va à son tour trouver un moyen de faire entrer le père, qui va faire la même chose pour la mère. Prof d'anglais, art-thérapeute, chauffeur, gouvernante, les voilà tous les quatre désormais dans la place. Qu'on retrouvera en train de se saoûler paisiblement et familialement la gueule au whisky (qu'on soupçonne hors d'âge et hors de prix) dans le gigantesque salon de la famille riche (qui est sortie pour fêter l'anniversaire du petit -et remuant- dernier.). A ce moment-là (ce qu'on pourrait nommer "fin de la première partie") je me suis demandé qu'est-ce qui allait bien pouvoir se passer, quel rebondissement, et quoi de neuf sous le soleil coréen allait bien pouvoir venir éclairer cette plaisante histoire de -effectivement- parasitage.
J'étais loin de me douter...
Jusque là on a souri, on s'es attaché, on s'est réjoui devant la mise en place de ce siphonnage familial (les gentils pauvres démerdards et les riches gentils aussi  trop pleins de morgues -et de pépettes-.)
Car c'est là que le film (re)démarre, "vraiment", pour une (autre) histoire qu'on n'avait pas du tout vu venir, pas forcément aussi réjouissante (quoique), et bam bam bam! (j'adore cette onomatopée), ne va plus s'arrêter, plus vous lâcher, plus vous laisser le temps de prendre votre respiration. Le scénario est... diabolique, et  plus une seconde de répit ne vous sera accordée, ni le temps de rêvasser ou penser à autre chose... Parasite est un film directement politique (et politiquement direct). Puissamment, aussi. (j'aurais pu ajouter quelques autres adverbes). Un film "grand public" (en tout cas, pour une Palme, et il faut encore saluer Monsieur Iñarittu pour la qualité de son palmarès Cannois 2019), mais ni bourrin ni benêt ni racoleur ni putassier, zigzaguant (de plus en plus) entre violence et (oui) tendresse. (je vous recommande tout particulièrement la scène -grandiose- dite "de l'anniversaire dans le jardin" qui en constitue en quel).que sorte l'acmé, le point d'orgue, l'apocalypse.) Je ne veux pas en dire plus, je ne voudrais pas gâcher une miette de votre plaisir de spectateur.
Un film étourdissant, éblouissant, dont on sort complètement entourné, chaviré, tourneboulé. Oui, un film politique en costume de thriller qui, comme les personnages du film, sait parfaitement tromper son monde... Un film contondant (comme les personnages du film, encore une fois), dont le spectateur lambda ne sortira pas indemne. Frappant, dans un maximum de sens (et de manières) du terme. Ca fait souvent mal, mais ça fait du bien (pour le film).
A près Memories of murder, The Host, Mother, Snowpiercer, le réalisateur coréen s'en tire une nouvelle fois (très) haut la main (et on ne peut rêver que de réussir à voir un jour Okja...) et la (suprême) récompense Cannoise obtenue est à la hauteur, non seulement de l'intelligence du film, mais tout autant du bonheur de spectateur qu'il génère.
La vie, c'est comme des vieilles chaussettes qui sèchent...

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