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lieux communs (et autres fadaises)
19 juin 2019

la chemise dans le pantalon!

113
GENESE
de Philippe Lesage

C'est québecois (et donc, ça ça me fait toujours sourire,  parfois sous-titré quand ils parlent trop vite), et le fait qu'il s'agisse d'une chronique, québecoise donc, sur les amours adolescentes avec une bande-son qui pulse bien pourrait raviver le souvenir du pop  Amours imaginaires de l'adulé acidulé Xavier Dolanchounet chéri par un tout un chacun (par moi pas tant que ça je le redis), mais Robert Lesage est assez fort (et son film assez lumineux) pour sortir de l'ombre tutélaire de XD, et réussir à exister par lui-même, sans souffrir de ce voisinage.
Un tryptique, nous dit-on, mais d'une construction assez singulière : les deux premières parties se déroulent en même temps (les amours -un peu- malheureuses d'un grand dadais très touchant (Guillaume) et, parallèlement, celles d'une brunette jolie (Charlotte), qui se retrouveront in fine dans le même lit, puisqu'ils sont frère et soeur -ou demi?- pour se consoler), tandis que la troisième, qui est d'un seul bloc, vient après, et concerne deux personnages juste un poil plus jeunes, Félix et Sandrine, qui expérimentent, eux, le "premier amour" (de vacances).
La structure m'a fait penser à ça :

cercle genèse film

ce qui m'a fait penser à ça...

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me ramenant ainsi à ma propre adolescence...
(je pensais que ceci était le symbole de la liberté mais c'est celui de la paix... mais oui bien sûr peace and love!).
Si le film est love, il n'est pas très peace... Ah La confusion des sentiments,  Les souffrances du jeune Werther, Portnoy et son complexe, Lettres à un jeune poète... Adolescence, émois, grandes espérances, mal-être rimbaldien, on est en terrain connu. C'est l'âge  des grands élans, des déchirements, entre la soif d'amour (absolu, éternel, illimité, infini) et les pulsions charnelles, entre le bouillonnement des hormones (pour les gâs), et celui des mille questions sans réponse. L'inquiétude, la terra incognita de l'autre, la timidité quand il s'agit de faire le premier pas, les grandes manoeuvres, les échecs, les trahisons... oui c'est à la fois délicieux et terrible.
Chacun souffre / expérimente à sa manière, et avec ses moyens... Guillaume découvre qu'il est amoureux de son meilleur pote, Charlotte flippe quand son amoureux lui dit que leur histoire pourrait peut-être ne pas durer éternellement et du coup va voir ailleurs mais tombe sur bien pire, Félix et Sandrine tâtonnent avec prudence dans leur premier balisage de la Carte du Tendre, et tout ça est traité avec attention (attentivement, ou, mieux, affectueusement) par Philippe Lesage, dont c'est (merci allocinoche) le deuxième long-métrage de fiction (je n'ai pas vu le premier, Les Démons) après trois films documentaires dont les titres (Pourrons-nous vivre ensemble ?, Ce coeur qui bat et Comment savoir si le petits poissons sont heureux ?) semblent bien confirmer l'orientation affective du propos du réalisateur.
Le film appartient sans conteste à la catégorie "films d'ados" (à la maison, en cours, au bar) mais peut-être n'est-ce qu'un leurre,   car traité avec un éclairage sensiblement (!) différent, une certaine façon de dire et surtout de montrer : des détails viennent régulièrement aiguillonner les histoires racontées, comme des petits chocs électriques qui dynamiseraient la fiction ( l'absence  des parents (comme dans le très aimé It follows), la façon d'enseigner d'un des profs de Guillaume, l'attitude du nouveau copain de Charlotte avec son ex, les shorts des jeunes éléves filmés frontalement avec une complaisance qui ne peut pas relever du hasard, un pique-nique filmé comme une scène de Hitchcock, un viol sous la pluie à la façon d'un polar sud-coréen voire d'Apocalypse now, la version québecoise de La jument de Michaux...) . Le film m'a autant surpris et plu que, il y a quelques années, le plaisant Tu dors Nicole ? qui nous venait déjà du même endroit...
En plus, je le répète, la bande-son est superbe (on passe du temps dans les bars ou les boîtes), et le fait de bénéficier quasi d'une séance spéciale (j'étais tout seul dans la salle et ai donc pu prendre mes aises) ne m'a fait qu'apprécier encore davantage la chose.
Un très bel objet de cinéma.

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