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lieux communs (et autres fadaises)
11 novembre 2019

je pars

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NE CROYEZ SURTOUT PAS QUE JE HURLE
de Franck Beauvais

Un choc, une autre perle dans un semaine cinématographiquement anthologique (après J'ai perdu mon corps et avant L'Angle mort). Un "film de mileu", incontestablement, pour lequel, quand je me suis installé, j'étais tout seul dans la salle, et je m'apprêtais donc à une séance privée, quand Claude W. a surgi dans le noir, me faisant bondir de mon siège d'une dizaine de centimètres tant j'ai été surpris quand elle s'est soudain matérialisée derrière moi, puis une autre personne, que je ne connaissais pas (mais c'est quand même très rageant quand je pense aux centaines de documents acid que j'ai déposés à la caisse, au vu du peu de résultat produit...)
Le film est programmé dans le cadre de notre "mois du Doc", même s'il ne s'agit pas vraiment d'un, ou alors un "autodocumentaire", comme le Ce répondeur ne prend plus de messages d'Alain Cavalier, une observation minutieuse de sa propre douleur, une auscultation, sauf que, là ou Cavalier se filmait lui-même (même si le visage entouré de bandages), Franck Beauvais utilise les images des films des autres. Plus précisément des quatre cent films qu'il a visionnés pendant une période donnée, celle qui a succédé à une rupture amoureuse et a duré jusqu'à son déménagement (les derniers mots du film sont Je pars). Une période qu'on peut définir comme dépressive. La bande-son du film n'est constituée que de la voix de Franck Beauvais qui dit, de façon assez neutre, le texte qu'il a écrit (le texte a été édité et peut être commandé pour 8€ chez Capricci, qu'ils en soient remerciés) à propos de cette rupture et de ce temps qui l'a suivie.
Mon copain Philou avait un jour dit  "ce qui est important, c'est ce qui n'est pas important..." (je ne sais plus si c'était à propos de photos ou de textes) et cette formule, mi-sérieuse mi-boutade, que j'ai tant aimée que je l'ai faite mienne, s'applique ici à la perfection.
Il y a donc une voix, et il y a des images (prises dans les 400 films dont la liste exhaustive est donnée dans le générique de fin, dont je ne connaissais d'ailleurs pas la moitié), et c'est à un incroyable travail de titans que se sont livrés le réalisateur et son monteur, pour organiser cette quantité monstrueuse de matière filmique dont ils disposaient. Ahurissant. Le sentiment de sidération était un peu voisin de celui éprouvé à la vision intégrale (24h! je l'ai fait!) du mythique The clock de Christian Marclay, même si l'enjeu n'est pas du tout le même : Marclay montrait le temps qui passe, tandis que Beauvais montre les films qui passent, les extraits, les fragments, les détails. Les à-cotés. Mais il s'agit bien ici d'une symbiose entre ce qui est dit et ce qui est montré. Parfois ensemble et parfois séparément.
Ce film est un incroyable tour de force, partant du plus intime, individuel, personnel (un homme parle de lui) pour aller vers le collectif, le commun, le tout un chacun (et nous permettant, à chacun d'entre nous, spectateurs, de nous (re)faire notre propre film, nos propres films plutôt, d'inventorier les fantômes qui viennent à notre rencontre lorsque nous franchissons le pont, tout ça en soixante-quinze minutes), faisant du cinéma, en tant que tel, tout et son contraire : le poison et le remède, la blessure et le pansement, la souffrance et la jouissance (et bien sûr le souvenir et l'oubli).
Un film important, un film essentiel (au sens propre).
Un film à voir, et à revoir, et à re-revoir.
(mardi, ticket naranja, j'y retourne)
Top 10

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pour celles et ceux que cela intéresse, nous disposons encore, au local de not assoc', d'un certain nombre de documents acid sur le film (et j'aime énormément l'affiche)

J'y suis retourné, ce mardi, avec Catherine (on était, cette fois, au moins 7, dans, allez savoir pourquoi, une des salles les plus gigantesques du bôô cinéma), et je confirme tout le bien que j'ai pu en écrire ci-dessus. J'ai reçu ce jour le petit livre rouge avec le texte intégral (et une préface de Bertrand Mandico) édité par Capricci, et c'est drôle comme en le lisant surgissent (parfois) les images que le film avait accrochées sur certaines phrases. Oui, un film à revoir.

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B
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