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lieux communs (et autres fadaises)
31 mai 2023

le rose et le bleu

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GRAND PARIS
de Martin Jauvat

Je me suis retenu d'y courir hier à 18h (à la première séance) puisqu'on avait prévu d'y aller cet aprem', avec Marie (et peut-être Catherine). Finalement ce fut juste avec Marie (et jusqu'au bout, puisque nous fûmes seuls dans la salle, les deux autres personnes croisées ayant choisi d'aller voir le film de V. Donzelli (qui passe pourtant plein d'autres fois, hein...).
Ce film c'est un peu mon bébé à moi, tellement j'avais envie de le voir et que j'ai tout fait pour qu'on le programme (il s'en est fallu de très peu -une place- pour qu'on le programme la dernière fois, et donc pour moi cette fois c'étaitun point d'honneur que ce soit  la bonne... Et ce le fut.)
Soient donc deux zozos en survêts fluo, (qui disent wesh, gros, ma gueule, et fument beaucoup de weed) Leslie, le black (c'est le bleu) qui fait un peu la tronche, et Renard, peroxydé à lunettes qui se prétend à moitié rebeu par son père (c'est le rose), qui lui est aussi agressif qu'un chamallow, qui se rencontrent sous un abribus : Leslie doit convoyer de la came jusqu'à la gare rer de St Rémy Les Chevreuse (= très loin) et demande à son pote Renard s'il veut bien l'accompagner (et il lui file même 20€).
St Rémy les Chevreuse ne sera que la toute première étape d'une (longue) déambulation en transports en commun (mais pas que) qui va les mener finalement très loin (beaucoup plus loin en tout cas que ce qu'ils escomptaient...) Mais surtout parce  qu'ils ont trouvé, dans l'eau (sur un chantier du Grand Paris) un artefact (un truc en pierre avec des autres trucs gravés dessus)qui a aussitôt enflammé leur imagination (surtout celle de Renard) et dont ils espèrent tirer beaucoup d'argent...
C'est une épopée naïve, une odyssée candide (en majorité nocturne), un road-movie en transports en commun, un film de banlieue prenant l'exact et complet contrepied de tout ce qui a déjà été fait dans le genre, vraiment, et une comédie fluo et régressive (on pense aux bonbons harib*) authentiquement -et singulièrement- "décalée", avec des rencontres extra (ordinaires) : William Lebghil et Sébastien Chassagne le sont vraiment, tous les deux, et, bien sûr, (le meilleur pour la fin) un film de potes (plus juste que buddy movie), où, même en survêt, ça fait du bien de s'étreindre parfois pour se réconforter (vive le hug).
Grand Paris est un film court (1h12) mais réussit le pari de cocher toutes ces différentes cases. Sans jamais en faire non plus des caisses.  C'est... différent, c'est drôle, c'est attachant, c'est doudou, c'est mystérieux. Comme pour Leslie et Renard, (vous verrez pourquoi / comment à la fin) ça m'a vraiment ravi.
Et quand on apprend que le réalisateur (qui est aussi un des deux interprètes principaux) n'a que 27 ans, on se dit que vraiment, un Top10 est la moindre des choses pour l'encourager...

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renard et leslie

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GRAND PARIS
de Martin Jauvat

Je l'ai vu avec Marie le 2 ème jour, j'y suis retourné tout seul cet après-midi, pour la dernière séance (en espérant qu'il y aurait un peu plus de monde : bof, on était 6...) et pour vérifier que ce film me ravissait toujours autant... Mission accomplie, je confirme mon éternelle reconnaissance envers Leslie et Renard. Total respect pour ces deux branleurs adolescents, leurs improbables aventures, et l'habileté (le talent) avec laquelle est élaborée cette gourmandise, cette douceur, qui sous sa fine coque sucrée et régressivement joyeuse, acidulée, dissimule un petit noyau dense (et légèrement amer) de mélancolie. Ca rigole, ça déconne, ça vanne, et pfuit! de temps en temps, ça reprend sa respiration et ça avoue quelques faiblesses...
Oui, la deuxième fois, le film passe toujours aussi bien, et oui oui on confirme le Top 10, pour cette friandise amicale où il est notamment question de babybel de chocapic et de malabar fraise-citron... (grands) enfants de tous les pays, unissez-vous!

Tiens et je ne résiste pas au plaisir de vous offrir en prime la très enthousiaste critique de Libé...

"Leslie, banlieusard taciturne, accepte d’aller récupérer un colis à Saint-Rémy-lès-Chevreuse. Il entraîne avec lui Renard, un ami pas mal clownesque qu’il croise en chemin, au détour d’un Abribus. Une fois sur place, personne ne vient au rendez-vous et ils décident, faut de mieux, d’explorer les lieux. Sur un chantier de la future ligne du métro du Grand Paris, ils découvrent une étrange pierre frappée d’inscriptions cryptiques qu’ils se mettent en tête de revendre, pensant avoir trouvé une relique de l’Egypte ancienne. Mais au retour, entre bus retardés et problèmes techniques sur les voies de train, ils se retrouvent bloqués à La Hacquinière (station RER de Bures-sur-Yvette, au sud-ouest de Paris), point de départ d’une longue nuit au cours de laquelle vont se multiplier phénomènes surnaturels et rencontres d’outre-espace.

Il faudra impérativement voir Grand Paris au moins deux fois, parce qu’il y a dans le premier long métrage de Martin Jauvat deux films indistincts, qui se répondent, se mélangent et se confondent. Le premier, imparable et immédiat, est une formidable comédie, une des meilleures qu’on a vues ces dernières années en France, à la fois tendre et acide, parfaite de tempo, croisement inespéré entre les Apprentis de Pierre Salvadori et le cultissime Withnail & I de Bruce Robinson, modèles de bromance mordantes entre pieds nickelés grande pointure, auxquels Grand Paris offre un sublime contrepoint actuel, plein de néons hurlants, de joints éventés, de sandwichs steak-cordon bleu et de contrôleurs RATP conspirationnistes. Ce film-là file sans arrêts inutiles ni voyageurs sur les voies – rapide, implacable et s’offrant à mi-parcours une grosse demi-heure de délire ininterrompu avec l’arrivée d’Amin (William Lebghil), dépanneur en tout et n’importe quoi à bord de sa Renault Espace siglée "Chicken 3000", et de son ami Momo (Sébastien Chassagne).

Mieux, il a l’intelligence d’aborder des thèmes essentiels à son récit – racisme, fossé entre classes sociales, inégalités géographiques – sans jamais marquer d’arrêt, les évoquant au travers d’un geste, d’une réplique, qui en disent plus que de vaines démonstrations. Mais Martin Jauvat a surtout la bonne idée de saturer l’espace de punchlines cinglantes et de détails subreptices sans jamais étouffer ses images qui respirent toujours abondamment. Faisant apparaître, sous la comédie, un deuxième film, petit miracle de poésie occulto-shlagos, road movie en RER dont le voyage irréel s’étend par-delà des galaxies entières, parfaitement incarné par ses deux héros, Leslie (Mahamadou Sangaré), saoulé-marre-de-tout mais toujours à deux doigts de se briser, et Renard (interprété par Jauvat lui-même), crétin cosmique au cœur d’or, techniquement plus proche du jeune chiot que de l’être humain.

Jauvat montre des personnages infiniment plus denses et touchants qu’il n’y paraît, dont le périple entre pyramides, tunnels secrets et bord de mer vient révéler la magie là où on ne veut plus qu’elle existe, montrant la banlieue comme un monde englouti, des cités aux barres trapézoïdales aux arrêts de RER vides et silencieux comme des capsules à la dérive dans l’espace. Et délivre le message ultime de tout récit : croire qu’il existe une forme de miracle à l’œuvre dans le monde et, peu à peu, le dévoiler. En 1 h 12, temps record, Martin Jauvat non seulement y parvient, mais réussit aussi à communiquer quelque chose de plus large – une pulsion de vie, une électricité contagieuse."

 

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