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lieux communs (et autres fadaises)

19 mai 2015

de bruit et de fureur

LA TÊTE HAUTE
d'Emmanuelle Bercot

Un ado tête à claques sujet à des accès de violence et ses rapports fusionnels avec sa mère immature, tiens tiens on a déjà eu ça l'année dernière, non ?,  avec Mommy de X. Dolan (que j'ai mis du temps à voir mais que j'ai vu quand même.) Là j'ai préféré y aller le plus tôt possible pour que la même chose ne se reproduise pas. Des inconvénients de la surmédiatisation. Le film d'Emmanuelle Bercot (dont j'ai adoré le Elle s'en va, même si vu très tardivement) vient d'en faire les frais. Parce qu'il faisait l'ouverture du Festiwal de Cccânnes, parce que Catherine Deneuve, parce que jeune prodige, parce que choix audacieux pour ce genre de film en ouverture parce que parce etc.
C'est quoi ce "genre de film" ? L'histoire d'un gamin de 7 à 17 ans, un gamin qui est "mal parti dans la vie" (dès la première scène), et qui va affronter successivement  les acronymes de tous les services sociaux, juridiques, pénaux, éducatifs, ou presque, grâce à l'entêtement d'une juge pour enfants maternelle et et compréhensive (Catherine Deneuve, qui a fait quelque chose à ses sourcils) et d'un éducateur aussi cabossé (là je ne pouvais pas échapper à cet épithète) qu'entêté (Benoît Magimel, les cheveux en pétard), qui veulent toujours continuer à espérer, sans fin, avec obstination, au fil des ans, et pourtant il y aurait largement de quoi baisser les bras et lâcher l'affaire. La mère immature est (un peu sur-)jouée par Sara Forestier, et le jeune homme souvent énervé par Rod Paradot, dont c'est le premier rôle et qui est effectivement phénoménal. Tout le monde l'a dit et s'en est extasié, mais c'est vrai. Vraiment vrai. Que ce soit lors de ses accès récurrents de violence (qui surviennent à un rythme quasi métronomique), lors des moments "normaux" ou ceux de calme (ou d'abandon) il est d'une justesse et d'une force qui laissent admiratif.
Un survol des différentes mesures de prévention, de suivi, et de (punition ?), centré autour d'un jeune homme très énervant (autant que très attachant). Heureusement, on ne joue pas exactement sur le même terrain que Mommy (là, en gros, la mère et le fils ne se voient que dans le bureau de la Juge ou ceux des instances socio-éducatives -ou pénitentiaires-). Mais tous les deux restent toujours en contact, tant le lien qui les unit est fort (on dirait un film écrit par un éducateur, quand même, non ?), et même "trop" fort (plus ça va et plus la réalisatrice insiste là-dessus). Je connais peu les juges pour enfants, alors je me garderai bien de juger, mais, hmmm, toute cette compassion, cet attachement, ça n'est quand même pas un peu roudoudou et chamallow ? C'est en cela que tout ça m'a quand même un peu gêné (avec en plus comme dit Marie, "un peu l'impression d'être au boulot", tellement certains de ces acronymes (AEMO, notamment) tintaient réalistement à mes oreilles.) Et que le clou est bien bien enfoncé, que le concept de "famille" ou de foyer est visiblement importantissime aux yeux de chacun (et semble rester la panacée, cf le passage de relais final qui me paraît tout de même un peu honteusement crapoteux).
Contrairement à Polisse (dont elle a co-écrit le scénario et dans lequel elle jouait) où la nécessité d'un "regard extérieur" (celui, doublement, de Maïwenn, en tant que personnage et en tant que réalisatrice) permettait justement de prendre une imperceptible distance par rapport aux choses parfois effroyables du récit ("Oui, c'est du cinéma"), Emmanuelle Bercot se focalise  ici juste sur Malony, et son environnement proche, sur cet unique (j'avais écrit inique) parcours, mais de très près, comme vu de l'intérieur. Sans filtre. Apparemment sans recul ni enjolivures ni effets de matière filmique. Brut. Les faits, les décisions de justice, les placements. Rien que. Et un gamin qui tente de s'en démerder (pas de s'en sortir ou de s'y insérer, il nous est montré à plusieurs reprises comme suffisamment intelligent et roublard pour être -un certain temps- capable de "jouer le jeu", d'être conforme à l'image qu'on attend de lui, d'être acteur -la réalisatrice le fait même s'en vanter ouvertement "je suis un bon acteur..."-) Cinéma social, humain (humaniste ?). Ok. Mais il y a quand même un contraste, un hiatus, un effet de friction, entre le parti-pris du film, ses intentions, et, par exemple, la présence -très forte- de Catherine Deneuve, le battage médiatique, la montée des marches, etc.
Pour parler franchement, ce cinéma-là n'est pas celui qui me convient. L'angle "sociétal", humanitaire, la bonne conscience, la curiosité (oh que ces pauvres sont pittoresques, diantre que ces manants ont de drôles de manières, ciel qu'ils s'expriment de blasphématoire façon) pourraient presque virer malsain, voire obscène. La composition de Sara Forestier irait d'ailleurs dans ce sens. Rosetta, le film, de la même façon, ne m'avait pas convaincu (et pourtant, elle avait, elle (le personnage), à la fois un background et un but qui justifiaient son attitude, et légitimaient la façon de la filmer. Notre Rosetton, là, est moins bien servi scénaristiquement, juste comme un instamatic mental (deux positions : soleil et nuage) et, si le personnage devient à la longue moins intéressant, le jeune acteur qui l'incarne est, je le répète, toujours passionnant.

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18 mai 2015

je ne suis pas là

Je serai à Paris du 18 au 23
Peut-être que j'écrirai depuis là-bas.
Peut-être pas...

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18 mai 2015

un américain à paris

MY OLD LADY
d'Israël Horowitz

Je suis allé voir ce film sur les noms de Kevin Kline et de Maggie Smith, et la promesse d'une comédie, je n'en savais même pas le nom du réalisateur (que j'ai confondu avec le Vladimir du même nom, m'étonnant qu'un pianiste passe à la réalisation, mais lorsqu'on lit les petits caractères du générique on comprend qu'il a adapté pour l'écran sa propre pièce de théâtre, et qu'il produit aussi le film... -et, j'ai vérifié en rentrant, le pianiste homonyme est mort depuis des lustres-)
J'ai trouvé sympathique de découvrir qu'il y avait, en plus, Kristin Scott-Thomas (qui est une actrice que j'ai toujours beaucoup aimée), et même Domnique Pinon, et Stéphane Freiss, et, encore une louchette, Noémie Lvosky... Un américain débarque à Paris pour prendre possession de l'hôtel particulier dans le Marais (avec jardin) dont il vient d'hériter de son père, avec l'intention de le vendre rapidement et de repartir idem, sauf qu'il découvre qu'il est habité par une vieille dame anglaise à qui son père l'a vendu en viager... Qui plus est cette dame, qui fut la maîtresse du père de l'américain, vit là avec sa fille.
Ca commence comme une fantaisie immobilière, ça continue en flânerie parisienne, ça fluctue comédie bilingue -les anglicisants parlent un peu en français, les français parlotent en anglais (ils prennent d'ailleurs des cours)- puis ça dévie en comédie sentimentale, avant de passer à des choses plus graves (un peu le genre de ce qu'on se disait devant un feu de cheminée entre frère et soeur, mari et femme, épouse et belle-soeur, dans le Winter sleep de Nuri Bilge Ceylan), puis  de faire un peu du sur-place cinématographique (il y a un moment, oui, où tout retombe un peu, où on est peut-être un peu fatigué, où on s'ennuierait presque un peu) avant que de se terminer, grosso modo  et pas trop tristement, comme on avait escompté que ça se terminerait depuis un bon moment...
On l'a vu juste après Une femme iranienne, et pour ce film aussi, on peut s'estimer encore une fois avoir été grugé sur la marchandise  (et comme a dit Dominique "il y a toujours un problème avec les films adaptés d'une pièce de théâtre...") Si Maggie Smith et Kristin Scott-Thomas restent égales à elles-mêmes (délicieuses), Kevin Kline (qui a très bien vieilli) quant à lui est vraiment meilleur dans les scènes d'émotion, où il sait rester sobre, contrairement celles où il ne l'est pas, justement, (sobre).

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17 mai 2015

taxi(e) téhéran

UNE FEMME IRANIENNE
de Negar Azarbayjani

Hormis l'affiche (qui connote tout de même furieusement celles des films d'Ashgar Farhadi, avec ses 3 bandes photographiques) et la bande-annonce (vue une fois), je n'en savais absolument rien (ah si : que le distributeur en était Outplay, qui est pour moi plutôt et strictement associé aux films LGBT, ce qui m'étonnait un peu, du genre "ah ils ont élargi leur créneau..." mais bon). Je m'attendais donc à voir l'histoire d'une dame dont le mari est en prison et qui doit faire clandestinement le taxi pour pouvoir rembourser les traites du crédit de la voiture, ce qu'est tout à fait le début du film.
Taxi, Téhéran, je vous vois venir... Panahi aurait-il fait des émules (et donc, ici, une Panahette ?) Non non, pas du tout, parce que, d'abord, ce film-ci a été fait quelques années avant (peut-être la délicatitude de son sujet n'a pas incité un distributeur français a prendre le risque plus tôt ? heureusement, Outplay était là, applaudissons encore une fois leur initiative, de toute façon, je les adore) Rien à voir donc, puisque la dame dans le taxi va, assez vite, prendre à son bord une autre dame, qu'on a croisée déjà quelques scènes avant, dont on sait qu'elle s'est fait arrêter par les flics iraniens parce qu'elle conduisait la voiture de son frère en se faisant passer pour lui, que son père en colère est venue la chercher au commissariat, et qu'il souhaite la marier rapidement et contre son gré (là je me frottais les mains... "ah, je me disais bien quand même, si c'est Outplay, il y a forcément du LGBT dans l'air...")
Figurez-vous qu'il y a du I. I comme Intersexuel. (Il faudrait que je me renseigne sur la différence entre intersexuel et transexuel : un début de réponse ). S'il est question d'une histoire d'amour entre femmes (ce qui, a priori, en Iran, ne doit pas déjà être la plus simple des situations), elle est compliquée par le fait que l'une des deux se sent homme à l'intérieur, et voudrait donc faire le traitement et l'opération qui lui permettraient de matérialiser son genre (ce qui, surprise, est beaucoup plus facile en Iran que je n'aurais cru, puisque non seulement la situation est prévue, depuis Khomeyni, mais que le gouvernement facilite même les choses en mettant en place des prêts pour les candidat(e)s à l'opération afin de faciliter les choses...), traitement auquel son père est farouchement opposé. Obstinément, même.
L'histoire entre la dame mariée et son mari en prison (il est adorable et n'a rien fait de mal) va donc passer provisoirement au second plan, tandis que le film va s'attacher à ce qui se passe entre la dame mariée et sa passagère (mais non non vous n'y êtes pas du tout, ce n'est pas entre elles deux l'histoire d'amour), de quelle façon leurs rapports évoluent (d'abord méfiance, incompréhension, rejet (j'avais écrit regrets) puis rapprochement, dialogue, compréhension... Chacun(e) à son tour venant à l'aide de l'autre à sa façon. La quasi-sècheresse documentaire du début vient s'humecter d'une touche de mélodrame.
C'est un film généreux, touchant, sincère, solide, qui parle de l'Iran d'aujourd'hui, mais ce n'est en aucun cas "aux limites de la cocasserie" comme on a pu le lire sur une des critiques affichées à l'entrée du cinéma. (Je pense que le journaliste en question a du voir au maximum les quinze premières minutes du film, et encore, je ne vois pas vraiment ce qu'elles contiennent de cocasse, - ou alors si peut-être, quand la passagère (Adineh/Eddy) va aux toilettes des garçons ? ce qui n'est tout de même pas le summum de la désopilance-).
Un film de femmes (je viens d'apprendre que le réalisateur est une réalisatrice), où, pour une fois, ce ne sont pas les mâles qui agissent -ou se donnent les moyens d'agir- (le mari est en prison, le père est borné, le frère est un dégonflé) ce qui est encore plus original pour un film iranien, mais où ce sont les femmes qui agissent, qui prennent les choses en main, qui font avancer l'histoire (celle du film, hein, avant, on l'espère, de pouvoir un jour faire la même chose avec celle avec un grand H, d'Histoire). un pays où il vaut mieux changer de sexe que d'aimer son prochain comme soi-même (pour parler au sens biblique du terme). Rappelons qu'en Iran l'homosexualité est passible de la peine de mort.
Le film finit comme il a commencé, avec une jolie (et tendre) conversation entre mari et femme, où il est question de thé, de sucre et de cardamome, sauf que les circonstances sont alors très différentes.
Petite(s) précision(s) cinéphile(s) : Shayeteh Irani, qui joue Adineh, tenait le rôle principal dans Hors-jeu de Panahi, et c'était Homayoum Ershadi, qui joue le père, qui conduisait la voiture (et le rôle principal) du Goût de la cerise, de Kiarostami.
Et on peut donc, encore une fois, applaudir Outplay pour cette initiative.
(je viens de fouiller un peu sur le ouaibe, et il se trouve que pas mal de gens (de confession LGBT) ronchonnent sur les choix d'Outplay concernant le changement de titre (le titre original était Facing Mirrors, qu'on peut traduire littéralement par faire face aux miroirs), les approximations de sous-titres (masculin/féminin) arguant que le personnage d'Adineh n'est pas une lesbienne mais un mec trans, bref, ce qui est décrit comme les problèmes d'identité et de genrage*, sujet sur lequel je m'avoue assez mal documenté, au point d'avoir visiblement tout faux dans ce post, où je m'obstine -je viens de le relire- à roucouler à propos "des femmes" et que je devrais peut-être donc entièrement réécrire, mais non. Adineh est joué par une actrice, non ? Je m'en tiens là, et foin des querelles de chapelles.)

* un post très argumenté

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l'affiche du film

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...et trois affiches de films de Farhadi... Troublant, non ?

 

 

 

15 mai 2015

réminiscences

L'ASTRAGALE
de Brigitte Sy

On quitte l'Inde (comme Titli) et on revient aux adaptations littéraires (comme Journal d'une femme de chambre).
Je connaissais, bien sûr le nom d'Albertine Sarrazin, et de son roman L'astragale (on a dû en parler dans les années 70, lorsqu'en était sorti une adaptation au cinéma par Guy Casaril (Les novices) avec Marlène Jobert dans le rôle-titre (pas celui de l'os du pied, hein) ce qui vous date assez précisément un film -ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit-...) mais je ne l'avais jamais lu (et n'avais pas très envie de le lire).
Or, après avoir vu le film de Brigitte Sy, on aurait drôlement envie de pouvoir reprendre le bouquin, parce que ce qu'elle écrit, dans le film, est vraiment magnifique (pfff je n'ai aucune imagination : quand je trouve ça beau et que j'aime bien c'est "magnifique"). Dans le film il est surtout question d'amour, (de désir, d'attente, d'espoir, de déceptions, oh que ce processus (ces processi ?)-là me parle...), d'Albertine pour Julien (et réciproquement). Albertine est jouée par Leila Bekhti, tandis que son Julien d'amour l'est par Reda Kateb. Un critique les qualifie de "magnétiques", et je m'y joins (ce qui me permet d'éviter de replacer un autre "magnifique"). Si je  découvrais, me semble-t-il, la qualité du jeu de Leila Bekhti (ce qui ne veut pas dire qu'avant je la trouvais mauvaise, hein, simplement que je pensais ne l'avoir jamais vue jouer), celle de Réda Kateb venait, ecore une fois, confirmer que ce mec-là, quoi qu'il joue (un gitan énervé chez Audiard, un terroriste torturé chez  Bigelow, un kidnappeur pédophile chez  Videau, un interne bûcheur chez Lilti), m'impressionne à chaque fois tellement il y est bien. Et qu'on y croit. Et toujours en restant simplement lui-même. Sans jamais en faire trop (on pourrait même avoir le sentiment qu'il "en garde toujours sous le pied".) C'est sidérant.
Là c'est un "apache", un marlou, un petit truand dans le Paris (noir et blanc) de la fin des années 60. L'astragale s'emploie à retranscrire (à faire renaître) une époque désormais assez lointaine (le toute fin des années 50), et Brigitte Sy utilise donc à cet effet d'un  très beau noir et blanc (je ne sais pas pourquoi, j'ai toujours un gros faible pour les films en n&b). Le film ne peut néanmoins être trop précisément daté, sauf dans les intertitres, -on évoque...- et c'est tant mieux qu'il évite aussi de tomber dans l'objet-d'époquisme maniaque qui peut vite devenir plombant dans ce genre d'entreprise.
Brigitte Sy joue avec habileté sur les deux tableaux : l'évocation de la France des années 50/60, mais aussi du cinéma de cette France-là. Un esprit populo parigot, un certain folklore cinématographique (rades où le loufiat vous sert  des ballons de rouge, filles de joie sur un coin de trottoir, chambres d'hôtel de passe) oui ces films où on fume à la chaîne des gitanes sans filtre, où les téléphones pèsent 50kg...). Il y  a  dans ce souci plastique une arrière-pensée de film noir mais aussi de romance, plus ou moins dramatique, un parfum de Gabin et Morgan, d'Arletty, de Piaf, de Prévert et Kosma, (et, pourquoi pas, de Bardot jeune) de Rififi à Paname (non, je viens de vérifier, ça n'est pas ça, c'est plus récent, et Gabin y est déjà vieux, mais le titre est représentatif, dans l'esprit) plutôt de Rififi chez les hommes (le mot Rififi, tiens, ça aussi ça vous date un film...).
Le milieu, Albert Simonin, les "caves", les condés, tout ce folklore, certes, mais aussi un contexte politique précis (la guerre d'Algérie) évoqué en toile de fond -en filigrane- de l'histoire d'amour (elle-même doublée d'une autre, symétrique presque, celle entre Albertine et Marie). Un film que je rangerais pas loin de Nos héros sont morts ce soir (de David Perrault, avec l'impressionnant Denis Ménochet) : même époque, même ambiance, même noir et blanc... S'il s'agissait d'un exercice de style, genre revival réalisme poétique, il est sacrément bien réussi. En "temps subjectif" (la durée supposée, celle qu'on évalue en regardant le film), je l'ai trouvé à peine un peu plus long que sa durée réelle, mais bon, s'agissant d'un film sur l'attente, ça peut se comprendre...
Le carton final (combien d'années de prison, combien d'années d'amour) n'était peut-être pas complètement indispensable, voire même la "vraie" photo ultime... mais peut-être la dernière image du film, le plan sur le visage de Réda Kateb à travers la vitre était-il  -finalement- trop ambigu ?

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12 mai 2015

anagrammes

du rêve de cette nuit ne me restait, à mon réveil, que le fait que les mots caféine et fiancée sont des anagrammes...
en essayant de les retrouver ce midi, j'ai découvert, en plus, que faïence en était un(e) aussi.
(voilà qui va, je pense, bouleverser le monde)

cafeinefiancée

12 mai 2015

à trois (sur la moto) on y va!

TITLI
de Kanu Behl

"Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs" (allociné)
Je confirme.
Plusieurs fois j'ai détourné la tête ou je me suis carrément caché les yeux pour ne pas regarder. Ce Titli (en hindi ça veut dire papillon, c'est joli, hein ? c'est léger ça virevolte, ça va de fleur en fleur... sauf que pas du tout du tout...)-là est le plus jeune d'une fratrie de trois, qui habitent ensemble avec leur vieux père (la maman est morte) et sont bandits pour vivre. Le frère aîné est le plus orageux, d'ailleurs ça pète assez fort devant la maison familiale dès le début quasiment du film. Leurs "coups" ? Ils arrêtent  de force des bagnoles dont ils détroussent les occupants, par la violence s'il le faut.
Mais Titli a d'autres ambitions : il veut se mettre à son compte, acheter un parking dont il serait le boss,  mais pour ça il lui faut 300 000 roupies. Il va tout faire pour que son projet se réalise, mais tout va mal se goupiller, parce qu'il est inexpérimenté, parce qu'il a voulu la jouer seul,  parce que les flics sont corrompus, et la solution que ses frangins trouvent est de marier Titli, ça serait bien qu'il y ait une femme dans leur petit commerce (ils veulent aussi ouvrir une épicerie), ça fait davantage venir le client. A mariage arrangé,  (oh quelle tristesse sur le visage des deux tourtereaux) nuit de noces compliquée. Et les choses vont continuer d'aller de plus en plus mal, de plus en plus fort, les mensonges s'accumulant et les tromperies idem. Mais Titli et Neelu (sa jeune épouse) finissent par trouver un terrain d'entente, (chacun est prêt à aider l'autre à réaliser son rêve), au terme d'un accord dont le prix est le plan-épargne de Neelu (250 000 roupies).
C'est parfois insoutenablement violent (quelques personnes ont quitté la salle) mais je pense que c'est aussi cruellement réaliste. Dans un "vrai" Delhi très contemporain de béton et de crasse, ça nous change vraiment des bollywooderies. Là, on n'a même pas un poil de musique indienne (mais celle qu'on entend dans le film, plutôt ambient, est très belle) ni marahadjahs ni éléphants ni numéros musicaux avec sourires et oeillades. Juste du brut, du concret. Et du sang, donc.
Un belle étude de personnage, d'un jeune garçon qui est soudain amené à faire des choix. A grandir, à assumer. (Le dernier quart d'heure, recentré sur Tetli, est magnifique, sans doute parce qu'aussi beaucoup moins violent (physiquement, en tout cas, moralement c'est une autre paire de manches) sauf peut-être le tout dernier dernier petit bout, où la presque happy-end semble presque articielle (mais bon, c'est quand même bien de finir sur une -petite- note d'espoir, après cette accumulation de noiceur.)
De beaux personnages féminins, aussi (ce n'est pas souvent qu'il est question de divorce dans un film Indien), comme dans The lunchbox, des femmes qui sont assez fortes pour oser s'affranchir de leurs brutes de maris (les mères) ou pour aimer celui qu'elles veulent aimer en dépit d'un mariage arrangé (les filles), et de la belle complicité qui les unit (les mères et les filles).
Le film est un premier film (de fiction) pour son réalisateur (venu du court-métrage) mais il l'est aussi pour ses deux -jeunes- acteurs principaux, Shashank Arora (Titli) et Shivani Raghuvanshi (Neelu) deux non-professionnels qui y sont d'une belle justesse, et auxuqels on croit. Et, (paradoxalement  ?), ça fait plaisir de retrouver dans un film une image  juste de l'Inde qu'on connaît, dans son évolution, sa prolifération, son ambition. Une image au quotidien, parfois un peu appuyée (les scènes de lavages de dents avec crachats deviennent presque un gag récurrent) mais juste dans ses couleurs (ah ces murs roses bleus multipeints de l'Inde que j'affectionne tant), dans les vêtements (ah les marcels des frangins) dans la nourriture (on a l'impression qu'ils mangent tout le temps...) dans les décors et les environnements (immeuble en construction, parking à louer, appartement-témoin), dans les comportements aussi (besoin d'argent, volonté d'ascension sociale, importance de la structure familiale).
Un autre élément  important du film est (le cinéaste s'en est exprimé) le rapport au père. Dans la maison de Titli, il est omniprésent (un très beau travail sur les cadrages) même s'il ne s'exprime pas beaucoup, il observe, c'est lui qui régit cette tumultueuse fratrie, et dont l'autorité sera plusieurs fois remise en cause plusieurs fois au long du film. se fera même à plusieurs reprises traiter d'"ordure".
Le film est multiple et contrasté (ah... "Inde, terre de contrastes", n'est-ce pas ?), composite (du thriller, de la chronique sociale, du mélo) et, comme tout "vrai" plat Indien, après une attaque en bouche plutôt incendiaire et agressive, vous pourrez ensuite apprécier la subtilité épicée du mélange des genres...

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(l'affiche en anglais)

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(l'affiche en français)

11 mai 2015

micro143

*

grâce à Fauve, j'ai appris le mots roselières

*

Mais, enfin, comment peut-on ne perdre qu'un seul nu-pieds ?

*

une énigme de Malou :
"notre amélanchier a fleuri comme un merle" *

*

j'ai préparé un plat de chou-fleur dont j'étais assez fier

*

en cherchant une chose, on en retrouve généralement une autre

*

 beaucoup besoin, en ce moment, d'écouter des choses belles à pleurer

*

question idiote de ma part (qui a fait beaucoup rire Philou)
"Combien peut-on avoir d'oncles au maximum ?"
(mais je n'étais plus à jeun)

*

les Turcs et la fémininitude : une histoire de textile et de motifs

*

petits artichauts violets : c'est nul à cuisiner!

*

faites monter l'aventure
au-dessus de la ceinture"
(Bashung)

*

Mais qu'est-ce qu'on faisait (de ses mains)
quand on attendait et qu'on n'avait pas de téléphone ?

*

je suis de plus en plus empêtré dans mes rapports avec les gens

*

un dernier calcul
et on s'en va
(from Pascal G.)

*

 * (réponse de l'énigme :
"parce qu'il a fait six fleurs..."
et c'est de Mon Pascal © )

9 mai 2015

daho a doré

Décidément... (smiley avec grand sourire et joues roses)
On continue dans la catégorie "musiques jolies oui très jolies" :
Loué soit le ouaibe et la façon dont il conserve les traces ! Il s'agit d'un truc qui s'est passé l'été dernier, à La Rochelle : un concert "unique" où Julien Doré a re-joué en intégralité l'album "la notte la notte" d'Etienne Daho, pour fêter les 30 ans d'icelui (de l'abum, pas d'Etienne, lol) Pour être franc, j'avais déjà vu passer (et j'avais attrapé, hop! avec mon filet à papillons musicaux) une version au piano de La notte la notte justement, mais je n'avais aucune information sur sa provenance, et voici  soudain que là, clic clic!, j'apprend que c'était juste le rappel du concert en question, et voilà que des mains charitables ont rendu disponible l'intégralité du concert  (9 chansons... il n'y en avait pas plus ? j'aurais dit au moins 10*) et que je trouve ça encore mieux que la version piano solo de la notte la notte : Julienchou a repris tout, mais à sa sauce et dans son ordre perso, c'est "sa notte sa notte".
On attaque donc par Saint lunaire dimanche matin (une très jolie mise en route -et en oreilles-, qui situe en finesse l'esprit dans lequel va se jouer cette séance) et on finit sur Poppy Gene Tierney, une hallucinante relecture de ce titre (qui, sur l'album d'origine semblait il faut l'avouer nettement plus anecdotique...) avec intro minimalisto-répétitive avec des guitares jouissives, une version rock, pop, électro, (avec une voix quasi  d'outre-basse pour Julienchou) et des choeurs ad hoc, une version black, cold, qui givre et glace (et remodèle) le sucre pop caramélisé de l'époque. Et qui enchante. Hop direct répétitition bouton "lecture en boucle" (en plus c'est une version de plus de 7 minutes, dont presque 3 d'intro!).
Mais le reste n'est pas en reste... Successivement Sortir ce soir moins pop, plus rock, gentiment furieux (furieusement gentil ?), Et si je m'en vais avant toi où il prend une tonalité ni vraiment Daho ni vraiment Hardy, Laisse tomber les jaloux où je n'ai reconnu que le refrain, Promesses,avec des guitares belles à tomber, Le grand sommeil avec sa basse qui donne vraiment envie de rester avec lui sous la couette, et Signé Kiko insulaire et chaloupé de charmante facture. Toutes sont relues, réexplorées, réarrangées (je dois reconnaître qu'il y avait belle lurette que je n'avais pas réécouté cet album, et que hormis La notte la notte, ou Promesses -retrouvée très récemment- pas grand-chose ne m'en paraissait inoubliable). Et là, magiquement, tout fonctionne, tout touche oui, on aime ce Daho pour ce qu'on doit à Doré... (à moins que ce ne soit le contraire)

dahodoré

* ah au fait j'ai vérifié : il y avait bien 10 chansons sur l'album originel. Il manque Jack tu n'es pas un ange (dont je n'ai aucun, mais alors aucun souvenir...)

9 mai 2015

beaucoup d'amour (et de regrets)

ANTON TCHEKHOV - 1890
de René Féret

L'avant-dernier film de René Féret s'appelait Le prochain film. Il ne savait pas que, justement, ce prochain film,  (celui-ci, donc), serait aussi son dernier. Nous avons appris sa mort au moment où nous mettions en page la nouvelle programmation (où figurait son film) et c'est donc un peu comme un hommage que nous en profitons pour lui rendre.
Et quelle belle fin de cinéaste, de partir ainsi, là-dessus. Un film qui raconte quelques années de la vie de Tchekhov (dont j'avoue que je ne connaissais pas grand chose). Je ne le savais pas isssue d'une fratrie quasi-Daltonienne de joyeux moujiks (tous de barbounettes diversement dotés), avec heureusement au milieu une soeur (Macha, tiens, jouée par la douce Lolita Chammah). Un film sur Tchekhov et  tout autant un film tchekhovien...
En sortant de la salle, on était quatre à être restés à discuter sur le parvis du bôô cinéma, et on était encore, tous les quatre, sous le charme du film. Un je-ne-sais-quoi de doux, d'apaisant, d'apaisé. Comme flottant sur un petit nuage de Tchekhovie. Simple et simplement.
On découvre Anton dans sa famille, au moment où des pontes de la littérature venus de Pétersbourg viennent à domicile chanter ses louanges et insister pour éditer ses nouvelles. Tchekhov est alors médecin, et son don pour la littérature ("j'écris comme je mange une crêpe, je pose la plume sur le papier, et quand je la relève, l'histoire est terminée..." lui fait dire Féret) lui sert surtout à subvenir à l'entretien de sa famille. C'est un moment particulier, un tournant dans son existence, cette soudaine reconnaissance publique ou du moins critique, et la caméra de Féret s'affaire à nous retranscrire tous les remue-ménage (remue-famille, plutôt) que ce changement de situation (ou de point de vue) soudain engendre. D'autant plus qu'il est poursuivi par les assiduités amoureuses d'une demoiselle (à laquelle d'abord il résiste mais pas longtemps). A la mort de son frère, il décide de respecter la promesse qu'ils s'étaient faite tous les deux et part pour l'ile de Sakhaline où sont entassés les condamnés, dans des conditions assez effroyables, avec l'intention d'en faire un livre de témoignages, en interrogeant chacun d'eux l'un après l'autre sur leurs conditions de vie. Il y rencontre aussi une jeune institutrice avec laquelle se noueront des liens affectifs tchékhovienissimes, avant que de revenir à Petersbourg (où sa famille est désormais installée) pour assister à la création de sa pièce La mouette...
Le film est construit en trois actes (la renommée / Sakhaline / La mouette) et c'est sans doute dans sa partie centrale qu'il est le moins convaincant parce que le moins "sobre" (c'est difficile de montrer l'horreur ou la misère sans être démonstratif, et tomber dans l'illustration façon clip de Mylène Farmer avec guenilles pieds sales et morve au nez) au début tout du moins, car ce qui se joue avec Anna vient heureusement à nouveau re-tchékhover l'histoire. Trois parties, trois beaux portraits de femmes (la soeur, la maîtresse, l'institutrice), trois façons d'aimer, aussi, et cette magnifique conclusion où Tchekhov , assistant aux répétitions de La mouette, donne aux comédiens des conseils (des explications) sur sa façon d'envisager la tristesse, le désespoir, et, surtout, la manière de les figurer, de les jouer. Par un effet de mise en abyme douce, on réalise alors que c'est aussi René Féret qui vient de s'adresser à nous, par la voix de son personnage, sur le jeu de ses comédiens.
L'acteur incarnant Tchekhov (Nicolas Giraud, que je ne connaissais pas) est le diapason magnifique au son duquel tous les autres s'accordent. Musique de chambre, quelque chose de beau, de doux, de sensible. Partition affective pour soliste et famille, interprétée avec attention(s) et sensibilité. René Féret nous parle d'Anton et de ses siens, certes, mais c'est toute sa famille à lui (René Féret) qui transparaît discrètement à travers le dépoli des images de l'écran.
Un beau film, qui donne enve de voir ou de revoir tous les précédents (qui n'ont jamais, il faut le reconnaître,  tonitrué dans l'actualité cinématographique, à part La communion solennelle -une belle histoire de famille, encore-, qui avait été un beau succès en son temps).

 

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