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lieux communs (et autres fadaises)
20 juin 2016

ce que les mollahs sont ?

NO LAND'S SONG
de Ayat Najafi

(Dans le cadre de notre "semaine musicale". Bonne surprise : presque une vingtaine de spectateurs à cette séance de samedi 18h dans le bôô cinéma.)
Sara Najafi, musicienne et compositrice iranienne, s'est mis en tête -quelle folie!- d'organiser un concert public de voix de femmes. Sauf que "ils" (les instances politico-religieuses, ou religioso-politiques, c'est selon, bref les vieux birbes avec les barbes) ont déclaré que c'était interdit, de faire entendre, comme ça, au grand jour, des voix de femmes solistes : pensez donc, ça risquait de provoquer des pensées impures chez la gent mâle et de nous les échauffer, les pauvres... alors, raoust : pas de concert!
Sauf que la jeune femme est entêtée, et on va suivre son projet de a jusqu'à z (on sait quand même, dès le début du film, que le fameux concert aura eu lieu), toutes ses démarches, successives (c'est pire qu'un 400m haies), tous les bâtons qu'on lui mettre successivement dans les roues, tous les refus, les arguments fallacieux, les tentatives d'intimidation, les manipulations, les suggestions hypocrites.... Tout, oui, elle aura tout vu (et entendu, surtout!), pour que l'événement ne puisse pas avoir lieu.
Sauf qu'elle a eu la bonne idée d'assoicer, assez vite, aux voix des chanteuses iraniennes, des voix de chanteuses étrangères : deux françaises (Elise Caron et Jeanne Cherhal) et une tunisienne Emel Mathlouthi), et aux musiciens iraniens leurs homologues, français. Faisant de son projet initial un pont entre les deux cultures, un échange fructueux entre les patrimoines et les techniques de chant de chacun(e). (Elle en profitera pour nous esquisser  un historique  des voix de femmes iraniennes -où l'on aura notamment l'occasion de voir un extrait de film (scopitone ?) plutôt surprenant où une voluptueuse chanteuse iranienne chante, sans voile et le verre à la main, une ode à l'ivresse... Autres temps... L'extrait en question est, me semble-t-il, daté de 1954-. Visiblement ça avait l'air de rigoler un  plus en Iran, en ces temps-là.)
Donc les femmes ne peuvent pas chanter seules, (ou devant un public exclusivement féminin), mais bon elles le peuvent en étant accompagnées par des voix mâles (devant un auditoire mixte) ou par un accompagnement musical suffisamment fort pour qu'il couvre leurs voix! Et ainsi de suite.(Une femme a été interdite de chant, mais on l'autorise à donner des cours, notamment à des homme, mais sans que ceux-ci puissent entendre sa voix! C'est plus qu'ubuesque, c'est aussi révoltant que grotesque. combien de fois je me suis retenu de ne pas crier "vieux cons!". Et pourtant, c'est comme ça, ma soeur.)
Le film fait des allers-retours entre Téhéran et Paris, au fur et à mesure que les mois passent, entre espoirs et déceptions, entre feux et contre-feux, entre tentatives de dialogues et fins de non-recevoir, entre oui on y va et non on ne peut plus y aller (menaçant de devenir non on ne veut plus y aller), les "ministres de la culture" changent, les décisions aussi, oui mais non, mais Sara Najafi tient le cap, s'acharne, persiste, infatigablement.

Jusqu'à réussir à obtenir gain de cause. Ouf, les visas sont enfin délivrés, les européen(ne)s s'envolent pour Téhéran, les répétitions commencent, jusqu'à ce qu'un pénultième rebondissement intervienne : sur son compte f*cebook, une des chanteuses a fait de la pub pour l'événement. Ach! Forbiden! Très interdit! "Ils" proposent un nouvel arrangement "amiable" : le concert ok mais dans une salle minuscule, devant un public (réduit) par eux autorisé, plus 3000€ (pour acheter leur silence). Tempêtes sous plusieurs crânes dans la salle de répèt, jusqu'à la décision unanime : on refuse de le faire dans ces conditions-là. Et on va donc reprendre l'avion.
Et la réaction alors  presque surprenante des "ils" : "Ah bon ? Mais on ne veut pas que nos amis européens repartent avec une mauvaise opinion de nous. Bon, alors, allez-y, vous pouvez..."
Et la bonne nouvelle est annoncée par Sara au reste du groupe, et c'est la joie, "ça" va se faire, on vit ce moment avec eux, et on a les larmes aux yeux quand on entend les applaudissements du public et qu'on les voit -enfin!- monter sur scène. (On aurait même aimé en voir davantage, de ce fameux concert). Oui, c'est vraiment très émouvant (il n'y a pas que moi qui avait la larmichette à l'oeil héhé). Et c'est comme une minusculissime et bienfaisante goutte d'espoir. Oui, on peut toujours réver...

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