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lieux communs (et autres fadaises)
31 mars 2019

manteau moutarde

075
SYNONYMES
de Nadav Lapid

Premier jour, première séance au Victor Hugo, j'y étais! (Il est programmé dans le bôô cinéma mais pas avant quatre semaines, alors je ne pouvais pas tenir jusque là vous imaginez bien...). Nadav Lapid, on a déjà passé ses deux premiers films  (Le policier et L'Institutrice), il pratique un cinéma pas forcément confortable mais toujours impressionnant. celui-ci nous arrive avec l'Ours d'Or qui l'a couronné à Berlin, et une critique assez dithyrambique dans l'ensemble (quoique souvent un peu absconse).
C'est l'histoire de Yoav, un jeune homme qui fuit son pays, Israel, et débarque à Paris avec l'intention de couper avec ses racines, en ne parlant, par exemple, que le français (et si c'est déjà sexy pour moi d'entendre d'un israélien parler en hébreu, ça l'est encore plus de l'entendre parler en français). le voilà tout seul dans un appartement immense et vide (qu'on lui a visiblement prêté) dans un immeuble cossu, et les choses commencent mal puisque, alors qu'il se lève la nuit pour aller pisser, on lui vole toutes ses affaires : le voilà à poil, en hiver, dans un appartement sans chauffage... Il sera secouru par un couple de jeunes bobos de l'étage du dessous, Emile et Caroline. Lui est joué par Quentin Dolmaire (qu'on a découvert chez Desplechin) et elle par Louise Chevillotte (découverte chez Garrel), et c'est donc comme si Yoav (joué par Tom Mercier, dont c'est le premier rôle au cinéma, et qui se révèle impressionnant à plus d'un titre, j'y reviendrai) était accueilli / recueilli par la (jeune) fine fleur du cinéma d'auteur art & essai français...
Pour apprendre la langue, Yoav s'est acheté (chez Gibert) un "dictionnaire léger", dont il apprend les mots qu'il restitue souvent sous forme de liste de synonymes.
Le film ? Luc Chessel en a fait, dans Libé () une critique que je trouve extraordinairement pertinente (et juste), et que j'aurais pu recopier dans son intégralité (mais que je préfère vous laisser lire). Nadav Lapid fait du cinéma de la même façon qu'il fait exister son personnage : rageusement (pendant la projection, je m'amusais à dresser moi aussi une liste de synonymes à propos du film : désarmant, désarçonnant, dérangeant, perturbant, provoquant, irritant...) mais ce cinéma instable, qui tient du précipité (et de la réaction) chimique a tout d'un vrai choc. Lapid pratique un cinéma peu aimable mais qui dit "aime moi" en vous regardant droit dans les yeux. Et c'est très juste (je me répète) ce que dit Chessel à propos de l'entre-deux dans lequel se trouvent à la fois le film de Lapid et son personnage principal (qui est aussi lui).
Tom Mercier porte le film par son corps d'abord (la scène de l'appartement nous le révèle dans sa splendeur virile, et filmé comme tel par le réalisateur, un corps objet de désir -dois-je préciser que le film est à QV, et que celle de Yoav l'est de façon assez imposante-...) par sa voix (déjà évoquée plus tôt) dont le ton (la déclamation) tirerait plutôt le film vers l'irréalisme, et par sa façon d'occuper l'espace (celui de l'appartement comme celui de la ville) en en restant toujours le centre.
Un film absolument fascinant, peut-être encore plus parce qu'il est difficile de le raccrocher à quoi que ce soit d'autre (et, dans son récit même, d'avoir parfois du mal en tant que spectateur à se raccrocher à quelque chose de sûr, ou de rassurant, ou de etc. ) Un film qui ne raconte pas (une histoire) mais qui parle de. Un film, enfin, qu'il me tarde de revoir dans le bôô cinéma sur un écran de la taille qu'il mérite (clic clic)...
Top 10 ?

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28 mars 2019

semaine latino 8

067
MON PERE
de Alvara Delgado-Aparicio

Un trou perdu au fin fond du Pérou. Un père forme son fils dans son atelier où il réalise des rétables.  C'est un artiste. Régulièrement ils partent en stop tous les deux pour porter leurs créations à la ville voisine, dans une boutique où les touristes viennent les acheter. La vie des gens dans cette région a l'air spécialement rude. Traditions archaïques, survivance de rites moyen-âgeux. Et, pour les hommes (et encore plus les ados) virilisme exacerbé de rigueur (avec l'homophobie qui l'accompagne, bien entendu). Jusqu'au jour où, lors d'un trajet vers la ville, le fils depuis l'arrière du pick-up surprend son père dans une activité qui le déstabilise (dans tous les sens du terme) et réagit. A partir de cet instant, les choses vont aller en se dégradant... dans la famille d'abord (le père, le fils, la mère, la grand-mère) puis avec les voisins, suivant une progression qu'on devine (et qu'on craint) êtresans espoir. Pas facile d'être gay par là-bas, surtout quand on est père... Un premier film impressionnant de maîtrise, où le réalisateur utilise fort intelligemment la forme-même du rétable pour mettre en images son propos. une réussite.

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(l'affiche est magnifique je trouve, et, comme le film, file la métaphore du rétable)

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068
NUESTRO TIEMPO
de Carlos Reygadas

Vu en avant-première à Entrevues, mais (je l'ai réalisé aujourd'hui) y beaucoup dormi. Là, je n'en ai pas manqué une miette.Reygadas a une haute opinion de lui-même en tant que réalisateur mais il a le mérite de filmer à hauteur de ses ambitions (2h58, quand même, pour une histoire simple somme toute : le mari, la femme et l'amant : le mari est propriétaire d'un ranch où sont élevés des taureaux, la femme l'assiste dans son travail et l'amant est un gringo, dresseur de chevaux sauvages). Un film démesuré entre  micro -cosme- (l'humain, le couple, le désir, les pulsions), et macro (l'espace environnant, la nature, les cycles le cosmos), hyper construit hyper pensé (et donc hyper fascinant), vertigineux aussi quand on sait que c'est le réalisateur qui joue le mari, et sa femme sa femme (une auto-fiction à la manière des Climats du très cher Nuri Bilge ceylan), que le ranch aussi est le vrai sien, et formellement sidérant (Reygadas expérimente, et ça fonctionne presque à chaque fois) un film, donc, qui laisse admiratif et rêveur (je n'avais vu à Belfort, me semble-t-il, que la parie émergée de de l'iceberg).

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069
RETOUR DE FLAMME
de Juan Vera
(avant-première, sortie le 08.05.19)
Du Mexique on passe en Argentine, avec juste quarante minutes de moins (question durée), pour un film qui, même si apparemment aux antipodes, raconte néanmoins plus ou moins la même histoire (le mari, la femme, et les autres, les amants pour elle les maîtresses pour lui), mais dans le registre de la comédie sentimentale - ou romantique- (ce qui fait du bien dans une Semaine Latino où le mot drame revient souvent quand est évoqué le genre du film) Elle, c'est Mercedes Moran (vue chez Lucrecia Martel, Walter Salles, Pablo Larrain) et lui c'est le toujours aussi charismatique et craquant Ricardo Darin, qu'on a grand plaisir à -enfin- retrouver (on l'avait adoré dans El Chino, dans Hipotesis, dans Les nouveaux sauvages, tous programmés lors de précédentes Semaines Latinos). Au début ils sont mariés (mais Darin raconte face caméra comment ils en ont venus à se séparer), puis ils se séparent, puis (le titre français vend la mèche) bien évidemment ils vont finir par réaliser qu'ils 'aiment et basta. Un film plaisant, souriant, solaire, autour d'une bande de quinqua/sexagénaires et de leurs différentes manières de vivre les notions de couple, d'amour, et de fidélité. Très agréable, mais -peut-être- juste un petit peu trop longuet (quoique). mais bon, pour les beaux yeux de Ricardo Darin...

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070
LOS SILENCIOS

de Beatriz Seigner
(avant-première, sortie le 03.04.19)

A peine dix minutes de battement, et hop! direction la Colombie, ou, plus précisément La Isla de la Fantasia, qui n'est d'ailleurs ni brésilienne, ni colombienne, ni péruvienne, un no-man's-land géographique, donc, qui a très logiquement généré cet ailleurs cinématographique, qui commence et finira d'ailleurs de la même manière : en bateau la nuit. L'héroïne accoste avec ses enfants et est accueillie par sa tante, qui l'héberge, et fait ce qu'elle peut pour l'installer dans sa nouvelle vie de déplacée (réfugiée), avec toutes les difficultés humaines et administratives que cela suppose. Car les habitants de cette île sont pauvres, et pas forcément disposés à partager le peu de moyens dont ils disposent. Le film -magnifique- démarre comme un documentaire (les acteurs sont tous des non-professionnels) et évolue subtilement dans une direction à laquelle on ne s'attendait pas forcément. Successivement prennent place des événements, apparaissent des personnages qui viennent, en douceur, égratigner le réalisme qui semblait jusque là la ligne de force du récit, jusqu'à une extraordinaire  scène finale où la réalisatrice exprime et concrétise ce qui jusque là ne faisait qu'affleurer dans l'histoire familiale de cette femme. Le fin mot de l'histoire. Bouleversant. Peut-être le film que j'urai préféré de cette Semaine latino 8 (sans doute beaucoup à cause de la pliure occasionnée par ce troublant plan-séquence final...)

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071
LA VIE COMME ELLE VIENT
de Gustavo Pizzi

Nouveau jour, nouveau pays, le Brésil cette fois, pour une comédie familiale tendre : le portrait d'une famille (maman, papa, quatre enfants -un aîné, un ado grassouillet, et deux jumeaux blondinets-) dans une maison qui leur ressemble -attachante et un peu bordélique),et voilà que l'aîné, jouer de handball, est engagé en profressionnel pour aller jouer en Allemagne. Vingt jours, il partira dans ving jours, et le film tout entier se tient dans ce délai, évoquant les états d'âme de la maman (Karine, Teles, excellente), la course d'obstacles pour les formalités administratives, les états d'âme du papa, obligé de liquider sa librairie-papèterie mais plein de projets pour rebondir, sans oublier les problèmes annexes de la soeur de l'héroïne qui a fui un mari brutal et est venue se rajouter avec son fils à la famille déjà nombreuse qui vit dans cette maison où la serrure  de la porte d'entrée est bloquée et où donc les entrées et sorties se font par la fenêtre. Un portrait de famille très attachant, car plein de vie, de petits bonheurs et de tristesses aussi, au jour le jour, à la météo aussi changeante que le moral des troupes (quand il pleut, il pleut très fort, mais le soleil -Brésil oblige- finit toujours par revenir). Emouvant, attendrissant, réconfortant.

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072
COMPAÑEROS
de Alvaro Brechner
(avant-première, sortie 27.03.19)

Juste le temps de boire une bière (oui elle est dure, la vie de cinéphile) et me voici en Uruguay. On change complètement d'univers (le choc est brutal) puique les trois personnages qu'on va suivre viennent de se faire arrêter (ce sont des Tupamaros, j'avais oublié ce mot) et vont passer le reste du film en prison. En prisons, plutôt, puisqu'ils sont régulièrement transbahutés ailleurs (camion militaire et sac sur la tête)  pendant les douze ans (le titre original du film est plus clair : La noche de 12 años) que va durer leur détention. Le film attaque frontalement et violemment (j'étais un peu inquiet en me demandant si j'alllais pouvoir supporter ça jusqu'à la fin) mais le réalisateur (dont on avait projeté le premier film, Sale temps pour les pêcheurs, 2011) sait moduler ses effets, et faire alterner les moments brutaux avec d'autres plus "légers" (on se surprend même à sourire plusieurs fois, si si), en suivant ces trois "fortes têtes" qui vont devoir aller chercher très loin dans leurs réserves mentales pour réussir à survivre à toutes les saloperies qu'on leur inflige. Le film suit la chronologie entre 1973 et 1985, nous précisant à intervalles réguliers la date et le nombre de jours d'emprisonnement des trois hommes (avec l'insertion de quelques flashes-back bienvenus), et la fin m'a tiré -oui oui ça vous étonne ?- des larmes, mais qui étaient peut-être juste de joie. Fort, très fort.

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SERGIO ET SERGEI
de Ernesto Daranas
(film en avant-première : sortie le 27.03.19)

Dimanche soir à Cuba, pour la dernière des avant-premières "adultes" (il y en a une cinquième, Jeune Public, que je ne pourrai pas voir), pour une aimable fantaisie, ce qui fait du bien. A Cuba en 1991, quand l'URSS se ramasse à la pelle et devient la Russie, mais où, sur place on continue comme si de rien n'était. Les seuls au courant de la "vraie" actualité sont les radio-amateurs, dont fait partie Sergio. Sergio qui entre, par hasard en contact avec Sergei, un cosmonaute russe laissé en orbite dans sa station orbitale, et que les autorités ne semblent pas se presser à venir chercher... il y a aussi un autre radio-amateur, américain cette fois, un ami de Sergio, qui intervient pour tenter de sauver Sergei, et par-dessus tout ça, les "officiels" (en kaki) qui surveillent tous ces échanges internationaux triangulaires (USA/USSR/ Cuba) en cherchant à deviner quel complot peut bien se dissimuler derrière tout ça... Mais le ton est résolument à la comédie pour ce film solaire et attachant, avec un certain nombre de personnages secondaires qui le sont tout autant (le film est raconté par la fille de Sergio). Charmant (pour la vie à Cuba dans ces années-là, je vous recommande l'excellent Avant la nuit de Reinaldo Arenas)

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074
LES HERITIERES
de Marcelo Martinessi

Et voilà, et de huit, et c'était déjà la fin. Au Paraguay cette fois, qu'on ne voit pas si souvent (je me souviens de Hamaca Paraguaya, en 2006, qui m'avait émerveillé) dans notre Semaine latino... Qui plus est avec un récit peuplé uniquement de femmes, ou presque. un beau film inattendu, où une femme d'un certain âge (et d'un certain rang social) se retrouve obligée de faire le taxi (et convoyer des vieilles bourgeasses) pour, pourrait-on dire, faire bouillir la marmite (son amie, celle avec qui elle partage une maison qui jadis fut cossue mais se vide au fur et à mesure que se revendent les choses qui se trouv(ai)ent à l'intérieur, se retrouve en prison à cause de la banque qui l'accuse de vol, alors qu'elle ne parle que de prêt). Et je m'en veux (mais je n'y suis pour rien) d'y avoir dormichouné par intermittence (le genre d'assoupissement qui vous fait croire que vous n'avez pas dormi ou presque...) et donc de ne pas pouvoir avoir tout vu de cette chronique délicate, de ce très beau portrait de femme (dans un univers de femmes) d'un certain âge, "déclassée", à qui les événements donnent soudain la possibilité de prendre les choses -et sa vie- en main (et Ana Brun, qui incarne Chela, a d'ailleurs obtenu le prix d'interprétation féminine au Festival de Berlin 2018 (où le film a aussi gagné le prix Prix Alfred Bauer (remis à un film qui "ouvre de nouvelles perspectives dans l’art cinématographique") ainsi que le Prix Fipresci compétition, n'en jetez plus...). Bref à la fois une excellente surprise et (pour moi) des regrets aussi (à cause de ce fichu sommeil). Mais je le reverrai, promis...

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25 mars 2019

ma pétroleuse fait yeah!

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REBELLES
de Allan Mauduit

Après la déception du Blier, j'avais encore une chance de profiter du PDC (mais cette fois sans ticket orange), et Dominique avait enve de voir celui-ci, alors, fort du conseil donné la veille par Zabetta (qui l'avait beaucoup aimé), j'ai décidé de l'y accompagner.
Un film drôle et noir, et cette fois-ci pas avec un duo de mecs mais un trio de nanas, jouées par Cécile de France, Yolande Moreau, et Audrey Lamy. Qui sont ouvrières dans une conserverie de poisson à Boulogne (sur mer), et qui, par un certain concours de circonstances vont se retrouver avec un mort sur les bras, plus un gros sac plein d'argent (sans oubler un gland coupé -oui vous avez bien lu- enveloppé dans un mouchoir en papier). Trois pétroleuses : la blonde, la rousse et celle avec les racines apparentes, qui vont faire tout ce qu'elles peuvent (et même davantage) pour garder le fric et sauver leurs fesses. Car tout le monde le cherche ce fric, et d'abord Simon Abkarian (oh que je l'aime toujours autant  lui, toujours aussi à l'aise dans son rôle de mafieux-maquereau-dealer-gangster-etc.), mais aussi le "gang des belges" (une bande familiale  à gros flingots et plafonds bas) à qui cet argent appartient, et qui entend bien le récupérer illico.
Et c'est parti! Le scénario est lancé, met le turbo, et file à toute berzingue, laissant rarement au spectateur l'occasion de reprendre son souffle.  C'est très drôle, très noir, et on adore ça. C'est filmé un peu désinvolte, un peu cracra, mais c'est normal, pour un film qui sent le poiscail. On a assez vite compris qu'il va beaucoup changer de mains, ce sac avec des biffetons... Tout le monde le veut, tout le monde le cherche, tout le monde court après tout le monde, chacun(e) veut flinguer chacun(e), et les rebondissements pleuvent comme, justement, les poissons sur le tapis-roulant de la conserverie... Non, ça n'arrête pas de défiler.
Cécile de France est sidérante de naturel en bimbo (ex "Miss Nord et pas-de-Calais") qui rentre au bercail avec un cocard sous ses grosses lunettes noires (on a du mal à la reconnaître dans la première scène), pleine de hargne et prête à tout pour s'en sortir. Ses copines ne sont pas en reste (Yolande Moreau fait sensation en Ma Dalton, ou plutôt en Hulkette, tellement elle change de rôle et de statut quand la colère la gagne, et Audrey Lamy ferme la marche en nunuche pas si nunuche que ça (mais peut-être si finalement ?), ce qu'elle sait très bien faire...) et la belle équipe au féminin nous entraîne à sa suite (et sa poursuite) sans jamais faiblir ni mollir, bien au contraire. le scénar en rajoute dans les coïncidences et les révélations, mais jamais le spectateur n'est pris pour un con (ou, dans le cas présent, un gland...)
Il y a beaucoup d'armes à feu, de flingues qui vont pas mal changer de main aussi (évidemment chacun(e) est à l'aise pour manier ça comme s'il/elle avait fait ça toute sa vie) avec, notamment, comme dans tout western urbain qui se respecte, une scène de canardage en intérieur assez apocalyptique pour figurer dans le top 10 des scènes de canardage en appartement! D'anthologie!
Et nos trois héroïnes feront mentir l'adage : Telle n'est pas prise, justement, qui croyait prendre, et le film ira jusqu'au bout de sa joyeuse amoralité. Yes, pour une fois, c'est les filles qui gagnent, c'est bien fait, et c'est tant mieux!
Très très très plaisant.

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24 mars 2019

scénario

065
CONVOI EXCEPTIONNEL
de Bertrand Blier

J'ai fait le déplacement spécialement (bus à 1,50€, vous connaissez l'histoire) pour aller finir le PDC à Besac avec BB, même si les critiques étaient moy-moy (à tel point que j'ai cru que sur allocinoche les commentaires spectateurs avaient été trustés par une armée de trolls...
Bertrand Blier, c'est quelque chose, quand même, un monument du cinéma français (pour mémoire, Les valseuses, 1974), que j'ai quelquefois adoré (Buffet Froid, Tenue de soirée, Merci la vie), qui m'a d'autres fois déçu, et dont je réalise que je n'ai pas vu les derniers films depuis belle lurette... Et, allez savoir pourquoi, la bande-annonce de celui-ci m'a fait envie (Depardieu et, tiens, Clavier, qui pour une fois ne me paraissait pas insupportable, Bouli Lanners, Alex Lutz, des dialogues qui évoquaient l'humour froid de Buffet froid...) et donc direction le Victor Hugo à 13h30 (la caissière rentrait de congés et paraissait un peu déboussolée mais on a eu nos deux places pour 4€!)
Effectivement, ça commence très bien : rencontre entre deux mecs, un riche et un pauvre (un maigre et un gros) au milieu d'un embouteillage où le gros/pauvre pousse un caddie vide "qui contient toute sa vie", et où le maigre l'informe que, trois scènes plus tard ils doivent tuer un mec... Les deux mecs suivent le scénario, le commentent, vont effectivement chez le mec qu'ils doivent tuer (et qu'ils ne connaissent pas, et le spectateur fait la connaissance des "scénaristes" (une armada de mecs en parka sombre avec un col en fourrure) qui rédigent des pages des scénarii de la vie des deux (le gros le maigre) qu'ils leur font regulièrement transmettre par des intermédiaires (les "nouvelles scènes", qui modifient le scénar pré-existant) jusque là c'est très bien. Passe un nouveau personnage, une belle femme triste qui n'a ni nom ni pages de scénario jolie scène dite "devant la boulangerie", qui va un peu chambouler le récit.
Et puis ça part un peu en sucette (ou en roue libre). Comme si Blier voulait "refaire du Blier" (Buffet Froid 2), mais bon le coeur n'y est plus. D'autant qu'il laisse soudain en plan son histoire de scénario et de scénaristes pour repartir dans un récit plus planplan.
On est déçu, et on est triste d'être déçu. Et pourtant le film ne fait qu'une heure vingt mais bon on a quand même le temps de s'y ennuyer. Oh ce n'est pas un naufrage intégral, il y a de-ci de-là des choses à sauver mais bon on se souvient du bon vieux temps du grand Blier et on est en droit d'avoir un peu envie de pleurer.
Le début est très bien, la fin, symétrique (et qui, comme faisait remarquer Dominique, pourrait auss être le début) est bien aussi. Et entre les deux ? Circulez, rien à signaler.

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23 mars 2019

serendipities

064
MA VIE AVEC JOHN F. DONOVAN
de Xavier Dolan

What a surprise! Vu cet aprem' dernière séance en VO (ma résolution anti-PDC* aura tenu un jour, quand même!) Je savais que les critiques étaient moy-moy', que Pépin faisait un peu la tête tandis que Jean-Luc sautait en l'air d'admiration... Dans quel camp donc allais-je me ranger ?
Je précise que je ne suis pas trop Dolan. Je ne fais pas a priori partie du club des aficionados du jeune homme. Il a commencé à m'agacer dès son premier film, J'ai tué ma mère (2009, le bougre avait 20 ans!) et ça ne s'est pas toujours forcément arrangé ensuite , des hauts et des bas plutôt dirons-nous : si Laurence anyways ne m'a pas convaincu, si Mommy m'a exaspéré, je dois reconnaître que je fus beaucoup plus sensible aux Amours imaginaires (que m'avait recommandé Loulou) -pour son maniérisme-, à Tom à la ferme -pour son hitchcokisme-, ou encore (et surtout) Juste la fin du monde -pour son lagarcisme-...
Bref j'éprouve pour Xavier Nolan des sentiments... mêlés. C'est peut-être la problématique de la mère toxique (qui semble lui tenir, depuis le début, tellement à coeur) qui me fait le tenir un peu à distance.
Et des mères, à nouveau, il y en a (excusez du peu, les superbes Susan Sarandon et Natalie Portman, et on peut supposer que Jessica Chastain, dont Nolan a fini par supprimer le personnage et toutes les scènes où elle apparaissait -le film aurait alors duré plus de quatre heures aurait-il déclaré), des mères toxiques de fils uniques.
D'autant plus que le jeune cinéaste (il n'a que 30 ans) a complexifié son récit en le situant à deux époques : celle du jeune John F Donovan (sa maman est Susan) et celle du encore plus jeune Rupert (sa maman est Natalie), qui sont devenus amis épistolaires et se sont écrits pendant des années, sans jamais se rencontrer, ca le plus âgé des deux est mort avant que la chose ne puisse se faire. Un adulte qui "devient l'ami" d'un enfant... rien de malsain ni de graveleux là-dedans, même si le sujet peut paraître sensible (voire incompréhensible à certains). Cette situation "originale" est (inutilement ?) complexifiée par un montage alambiqué : elle est racontée via une interview de Rupert, devenu adulte et lui aussi acteur, par une journaliste (avec qui au départ le courant ne passe pas très bien) et donc le film ne cesse d'opérer par sauts temporels,flashes-back (et flashes-back de flashes-back) qui nécessitent pour le spectateur d'être très attentif pour ne pas perdre le fil.
J'ai beaucoup aimé le démarrage du film (j'étais ravi de cette façon qu'a Dolan d'oser filmer flou -j'adore le flou, je l'ai déjà dit et redit-), la mise en place est efficace, bouillonnante (je continue de me demander quelle place y aurait eu Jessica Chastain** : peut-être sera-t-elle réintégrée dans le director's cut ?), même si ensuite l'intérêt baisse un tantinet lorsque -décidément il ne peut pas s'en empêcher, c'est plus fort que lui- Dolan se met à nous refaire Mommy en version américaine (anglaise, plutôt). C'est vrai que depuis le début du film je jubilais (j'adore être surpris en bien par un film dont je n'attendais pas forcément grand-chose...) et je jubilais encore plus de me sentir jubiler (je jubilais au carré, en quelque sorte).
Non seulement j'aime la façon dont il filme, mais je suis encore plus sensible (et ça c'est vrai pour tous ses films) à l'intelligence et à la force de ses choix musicaux pour la bande-son... Ce gars-là est très doué pour trouver pile-poil la bonne musique a bon moment (Bittersweet symphony pour la fin, ça ne pouvait pas tomber mieux, du grand art!).
Peut-être que, si j'ai aimé autant, c'est parce que Xavier Dolan a -un peu- "dé-dolanisé" sa façon de filmer, et, en s'américanisant s'est un (curieusement) dépersonnalisé (aseptisé ?) mais bon, en tant que gay & midinet, je ne pouvais pas rester insensible à ce film-là...

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* Printemps Du Cinéma
** j'ai lu -je ne sais plus où qu'elle devait jouer une directrice de tabloïd persécutant l'acteur et décider à flinguer sa carrière... une méchante, quoi

22 mars 2019

mouise

DANS LA DECHE A LOS ANGELES
de Larry Fondation

Il y a un message que j'aime bien recevoir de chez Priciceministruche, c'est celui-qui dit "votre souhait est exaucé" (oui oui comme dans les contes)  et encore plus lorsque le souhait en question est exaucé par Gibertuche Joseph de son prénom (à moins que ce ne soit le contraire) parce que je sais qu'il n'y aura pas de frais de port à ajouter à la somme annoncée (avec un minimum d'achats, bien sûr, qui varie entre 10 et 20€, et m'oblige donc à chaque fois -pas fou le Gibertuche- à sélectionner deux trois autres bouquins pour faire bonne mesure (le jeu étant d'atteindre la somme exigée en la dépassant le moins possible, voire en l'atteignant juste pile-poil)
Et là, bingo, voilà que trois de mes voeux étaient exaucés d'un coup! J'ai donc commandé, sans avoir rien à rajouter...
J'étais très content de pouvoir lire ce cinquième (et dernier, pour l'instant) bouquin de Larry Fondation, qui est chronologiquement le troisième, et semble énorme en comparaison des autres volumes (celui-là frôle les 300 pages).
Larry Fondation c'est noir très noir, une écrite très séche, des chapitres comme au cutter qui font parfois à peine une demi-page, une écriture que j'adore (et que je prends plaisir de temps en temps à lire à haute voix tellement des fois ça slamme). On est toujours à Los Angeles, on est toujours dans la merde, la violence, les petites gens, les putes, les clodos, mais, cette fois l'auteur nous pose trois personnages principaux (Fish, Ponds et Soap), deux hommes et une femme, trois sdf au quotidien dans la ville des anges...
Je l'ai déjà écrit, plus qu'un roman, c'en sont des. Les histoires de Soap, Fish et Bonds sont souvent comme des shrapnels, elles en ont  la violence et la létalité, la "contondance" en nous montrant, simplement, "de l'intérieur", ce que c'est, justement, au quotidien, que de vivre dehors. Eclats de vie qui sont aussi, parfois, juste de petits bonheurs, les épiphanies chères à James Joyce ("Par épiphanie, il entendait une soudaine manifestation spirituelle se traduisant par la vulgarité de la parole ou du geste ou bien par quelque phase mémorable de l'esprit même. Il pensait qu'il incombait à l'homme de lettres d'enregistrer ces épiphanies avec un soin extrême car elles représentaient les moments les plus délicats et les plus fugitifs.")
Dans la dèche à Los Angeles (le titre original, Fish, Soap and Bonds était plus juste, plus "neutre") est un peu le bagage personnel de ces trois-là, vous savez, comme si on avait l'occasion d'inventorier le contenu des sacs plastiques qu'ils trimballent, des souvenirs, des des rêves, des coupures de journaux, des détails, au milieu d'incessant déplacements (va-et-vient, allées et venues) car la mobilité est ce qui définit (caractérise) ces trois personnages terriblement attachants.
je précise que, dans la réalité, les sdf sont dens gens qui me font un peu peur, qui me mettent mal à l'aise, que j'ai tendance à éviter, à fuir... parce qu'ils figurent un état dans lequel tout citoyen "normal" n'a pas envie de se retrouver. Et le livre de Larry Fondation serait alors comme une forme d'apprivoisement (d'apaisement aussi, parfois). A la fois sans pathos, mais sans pitié aussi. Un livre magnifique.

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21 mars 2019

fête du court 2019

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TROP BELGE POUR TOI
Programme de 5 courts-métrages belges

Une soirée en forme de clin d'oeil conjoint à la fête du court-métrage et à la Semaine Belge qui n'aura pas pu avoir lieu cette année...

Welkom (de Pablo Muñoz Gomez) – 17’ – 2013 - avec Jean-Jacques Rausin, Simon André, Wim Willaert
Le père prend une poule pour sa défunte épouse, le fils veut donc construire un poulailler pour Maria (la poule), mais pour ça il doit avoir un permis de construire, et pour obtenir le permis il doit apprendre à parler flamand... Très drôle

Avec Thelma (de Ann Sirot et Raphaël Balboni) – 14’ – 2017 - avec Jean Le Peltier, Vincent Lécuyer, Thelma Balboni
Les parents d'une petite fille, Thelma, la confient à un couple d'amis, le temps de pouvoir rentrer de voyage. Les deux papas-poules s'organisent...Très tendre.

Kapitalistis (de Pablo Muñoz Gomez) -14’ – 2017 – avec Georges Siatidis, Nikos Saxas, Anne Paulicevich, Wim Willaert, Jean-Benoît Ugeux, Catherine Salée, Tom Audenaert
Un papa grec doit se débrouiller pour offrir pour Noël à son jeune fils le sac d'école dont il rêve... mais le sac est cher et l'argent est rare... Il ne faut pas hésiter à payer de sa personne...

Le plombier (de Xavier Seron et Méryl Fortunat-Rossi) – 15’ – 2016 – avec Tom Audenaert, Catherine Salée, Jean-Benoît Ugeux, Philippe Grand’Henry, François Ebouele et Delphine Théodore
Un doublage de film porno "maison", fait avec les moyens du bord... comme quoi on peut être très expressif en étalon porno et très timide dans la vie réelle...

L’Ours noir (de Xavier Seron et Méryl Fortunat-Rossi) – 16’ – 2015 – avec Jean-Jacques Rausin, Jean-Benoît Ugeux, Catherine Salée, Terence Rion, François Neycken, François Ebouele
Un groupe d'amis en randonnée au Québec se fait décimer par un ours qui a l'air très gentil comme ça (un ours en peluche géant) alors que pas du tout. Beauvcoup d'hémoglobine, de membres arrachés et d'humour très noir...
"Welkom"
"Avec Thelma"
"Kapitalistis", l'un des courts-métrages du programme "Trop belge pour toi"
"Le plombier"
"L'ours noir"
Un programme belgissime (je connaissais juste le dernier des cinq) et très plaisant (on reconnait des acteurs passant d'un film à l'autre, c'est rigolo...). Chaque film a sa tonalité propre (et son charme idem). J'ai un faible, personnellement, pour la poule du premier, qui est celui qui m'a fait le plus rire...
20 mars 2019

trois-gorges

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LES ÉTERNELS
de Jia Zhang-Ke

Expédition à Besançon en bus à 1,50€ pour aller y voir ce film avec un ticket orange avec Dominique... (du coup la place à 4,25€) mais le film la mérite amplement (l'expédition).
Un nouveau voyage en compagnie de Jia Zhangke (le dixième, si j'ai bien compté), à nouveau en compagnie de son actrice fétiche Zhao Tao (Dominique qui est très people m'apprend que c'est parce que c'est sa femme!), qu'on va suivre pendant plus de deux heures (et quasiment vingt ans!), dans un film en plusieurs parties, distantes à la fois dans l'espace et dans le temps.
On y reverra des lieux déjà évoqués dans certains de ses films précédents (dont le fameux Barrage des trois-Gorges), via l'histoire de cette femme, Qiao, amoureuse d'un malotru (il a beau être mafieux et patron de la pègre, au début, il mérite en premier chef ce qualificatif de malotru (ou butor ou goujat, ou mufle, ou, plus simplement, gros con).
Elle l'aime en 2001, elle continue de l'aimer quand elle va en prison à sa place pour avoir tiré des coups de révolver (de son révolver à lui) -alors que c'est interdit d'avoir une arme-, au cours d'une scène à la violence insoutenable (du vrai de vrai Jia Zhangke), elle l'aime toujours à sa sortie de prison, cinq ans plus tard, et elle continue de l'aimer indéfectiblement, même s'il n'est pas venu l'attendre à la sortie, et qu'il en a profité pour prendre une nouvelle maîtresse (et refuse donc de la reprendre), et elle l'aime tellement qu'lle ira jusqu'à

(et vous, vous irez jusqu'à voir le film pour savoir la suite, non mais, hein mais...)

Le réalisateur comme à son habitude, depuis son premier long-métrage (Xiao Wu artisan pickpocket découvert, tiens, grâce au Ficâââ) a enchâssé l'histoire de son héroïne dans celle de son pays, que le film s'attache à nous faire (re) découvrir, les lieux autant que les gens... Elle sonne terriblement juste cette Chine de Jian Zhangke, démesurée, inhumaine, un pays de fatigue et de crasse, de violence et de corruption, un pays en perpétuelle mutation, qui se construit et prolifère pour le profit de quelques-uns au détriment de beaucoup d'autres (remarquez, y a pas besoin d'aller jusqu'en Chine pour voir ce genre de fonctionnement hein... mais là c'est vraiment flagrant). Et Qiao est, une fois encore,une magnifique égérie pour cette nouvelle histoire chinoise, filmée toujours aussi superbement, avec ce lyrisme si désespérement terre-à-terre qui le caractérise. Ce n'est pas pour rien si Jia ZhangKe fait partie du peloton de tête de mes cinéastes de chevet depuis quelques années déjà.

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19 mars 2019

lapins

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LA FAVORITE
de Yórgos Lánthimos

Troisième film de la journée. Après l'onirisme chinois somptueux du Grand voyage vers la nuit et le romantisme iodé à la française de Ma vie avec James Dean, nous voici en Angleterre, à la Cour, pour un film en costumes qui m'en a délicieusement évoqué certains de Peter Greenaway (les nobles emperruqués, la musique à la Michael Nyman, ne manquait même pas le gros bonhomme tout nu... -j'adorais les films de Peter Greenaway aussi pour ça, pour les messieurs tout nus qu'on ne manquait pas d'y voir...-)
Une reine sans roi apparent (on apprendra qu'elle a perdu 17 enfants, qu'elle a successivement remplacés par des lapins) mais avec une dame de compagnie avec qui elle fricote assez joyeusement (et saphiquement aussi, s'entend). Mais la favorite du titre n'est peut-être pas la brunette en question mais une autre, une blonde, justement, nobliette déclassée mais intriguante et ambitieuse, qui va grimper un à un tous les barreaux de l'échelle sociale nobiliaire (et elle part de très bas, souillon dans les cuisines) pour arriver au sommet, dans les bras -et le lit- de la reine, à la place de la brune honnie qu'elle fera tout pour déloger...
Les décors sont fastueux, les costumes aussi, et le film est un peu à leur image, un chouïa empesé et tout aussi m'as-tu-vu. Dès qu'on a compris le manège de la blondinette (il m'a fallu recourir au générique de fin pour savoir -me rappeler- que c'était Emma Stone), le parcours est assez balisé et plutôt logique (sans surprise). Elle a démarré le film crottée, tombée dans la boue du haut d'un carosse dès son arrivée, puis aura connu le sol de la cuisine - comme Cendrillon- qu'on lui fait nettoyer à la soude sans ménagement (ce qui abîme ces jolies mains) et c'est grâce à des herbes mâchouillées ramassées dans la forêt (amusante coïncidence avec le pourtant fort éloigné Sibel) qu'elle sauvera sa peau et commencera à se rapprocher de la reine, que les plaies à ses jambes font fort souffrir...
On est entre gens de la cour, et bien sur tout le jeu est de réussir à faire le maximum de saloperies en les accompagnant d'un maximum de révérences et de courbettes, et vous vous doutez bien que le combat va être tout aussi rude que pas du tout à la loyale. Nos trois tigresses (Emma Stone la blonde, Rachel Weisz la brune, et entre les deux Olivia Colman, véritablement époustouflante -et méconnaissable- dans le rôle de la Reine, qui lui a d'ailleurs valu un Oscar...)
J'étais quand même un peu fatigué à l'issue de cette dense journée cinématographique, et j'avoue que j'ai piquouillé un peu du nez vers la fin. Parce que j'ai trouvé ça un peu longuet.
Un film plutôt "grand public" de la part d'un réalisateur qui s'est fait une spécialité de la méchanceté et/ou la cruauté filmique (avec ce que peut avoir justement d'un peu fatiguant cette volonté systématique de jouer la provoc' pour être reconnu) mais nous livre ici (par rapport à ses films précédents : Canine, Alps, The Lobster, Mise à mort du cerf sacré) quasiment un film "gentillet"... (j'exagère à peine.) Avec des aspects formalistes parfois un peu agaçants (les mots du générique et des intertitres sont systématiquement justifiés, et ça rend les choses plus difficiles à lire, tout comme le fait d'avoir recours systématiquement au grand-angle pour filmer rend souvent les choses moins faciles à regarder...) mais, sans hésitation, un film à voir (ne serait-ce que pour être ébloui par la magnificence des décors...)

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18 mars 2019

feu de bengale

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UN GRAND VOYAGE VERS LA NUIT
de Bi Gan

(un post en fragments)

Juste une petite déception en arrivant, (qui n'a rien à voir avec le film lui-même) j'apprend à la caisse du bôô cinéma que le film sera diffusé en 2D (alors que toutes les critiques encensent la fabuleuse dernière partie en 3D, où le héros rentre dans un cinéma et met des lunettes 3D pour voir un film qui raconte sa propre histoire - tiens j'avais déjà vu ça il y a bien longtemps dans Le shérif est en prison, de Mel Brooks) mais bon tant pis (enfin surtout pour les autres, puisque, en ce qui me concerne, je ne le perçois pas, ce fameux relief, alors, hein) on le verra comme ça, hein, en l'état...

Et même comme ça, en l'état, c'est une splendeur.

Un film, oui... extraordinaire. Un coup de foudre pour cette cinématographique déambulation onirique, que, même après deux visions (car j'y suis retourné le lendemain, avec Catherine) j'aurais bien du mal à raconter (j'aimerais avoir le dvd pour pouvoir le revoir, j'aimerais avoir la possibilité de le revoir en 3D, j'aimerais oui j'aimerais...)

Une  "expérience" magnifique (quoiqu'en dise le rédacteur en chef des Cahiaîs que j'aurais du coup -une nouvelle fois- bien envie de gifler...)

Un film avec une identité et des choix esthétiques forts, des fragments de narration, des endroits remarquables le temps d'une séquence, des objets, des personnages énigmatiques, parfois juste entrevus, une caméra qui vadrouille, sinueuse, des jeux sur les matières, sur ce qui s'interpose entre celui qui regarde et ce qu'il regarde (on voit souvent "à travers quelque chose") avec une musique -et un rythme- qui pourraient évoquer des lambeaux du Wong Kar Wai de In the mood for love (même si tout le reste n'a pas grand-chose à voir). Des jeux sur la matière même du film aussi, sur le(s) fil(s) du récit. Pas le domaine du "c'est", plutôt celui du "ce serait -peut-être" ou bien du "et si c'était..." (ou même "et si ça avait été ?")

Labyrinthe mental, perte de repères, chatoiements, fluorescences, instants, souvenirs, suppositions, superpositions, on voyage ici, passionnément, comme un des personnages mange une pomme : jusqu'au trognon.

Les critiques se sont extasié(e)s sur le fameux plan-séquence final en 3D de 59' (quand le héros s'assied dans le cinéma et met les fameuses lunettes), bon, hélas dans le bôô cinéma on est resté à plat, mais c'est vrai que, même en 2D, déjà  il fait son effet (de savoir qu'il a été filmé en une seule prise nous fait le regarder un peu différemment -bien plus attentivement, encore-).

L'histoire d'une (en)quête, d'une recherche, celle d'une femme, par un héros "au look de détective". Une femme, mais laquelle ? La mystérieuse jeune femme en robe verte (à cheveux longs) de la première partie a cédé la place à une non moins mystérieuse jeune femme en blouson rouge (à cheveux courts) qui , dans la seconde, joue avec le héros à attrape-moi si tu peux.

La séquence entière est une longue déambulation à travers des espaces multiples mais qu'on est bien obligé (plan-séquence oblige) de considérer comme unique : un cinéma, un tunnel, des coulisses, une salle de billard, le mur d'une prison, et des escaliers, beaucoup d'escaliers... une déambulation cotonneuse complexifiée techniquement par les divers moyens de transport empruntés (une moto, une tyrolienne), où on croise un cheval chargé de pommes, un aspirant champion de ping-pong avec un masque en crâne d'animal, une femme en colère qui pourrait être la mère du héros, un karaoké géant, une raquette qui permet de s'envoler, dans un espace tordu comme un ruban de Moebius où, lorsqu'on continuer d'avancer, on revient soudain à son point de départ. La topologie d'Un grand voyage vers la nuit est de type onirique, et c'est sans doute pour ça qu'on l'aime autant... Et je n'ai évoqué que l'espace. Parce que, si on parle du temps...

Il lui a offert une montre cassée ("ça représente l'éternité" a-t-elle remarqué) et elle lui a offert en retour un feu de bengale ("ça représente l'éphémère" a-t-il répondu.)

A la fin rien n'est résolu, mais c'est bien mieux comme ça, chacun propose ses éclairages, et ça permet d'échanger dans le couloir puis dans le hall et finalement même sur le parvis...

Un ravissement. Je suis amoureux de ce film.

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tiens j'ai confondu les deux affiches... il y a de quoi, non ?

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