CHANGEMENT D'ADRESSE
d'Emmanuel Mouret
Hmmm ça fait du bien de retrouver les salles z'obscures... presque 15 jours sans ciné et j'ai survécu! Donc fait le déplacement jusqu'à Besac in the big chaleur pour voir ce film. Bonne surprise déjà en entrant, la clim était réparée dans la petite salle (ça fait plusieurs années que ça se faisait avec des ventilateurs!)
Le film commence et finit par un déménagement / emménagement (d'où son titre) : David, un professeur de cor timide, devient, par hasard, colocataire d'Anne, aussi blonde que bavarde. Il donne des leçons de cor à Julia, brune et silencieuse, dont il tombe éperdument amoureux. Anne, de son côté, est très amoureuse de Gabriel (? je ne suis plus sûr du prénom, mais c'est pas grave, puisqu'on ne le voit jamais), rencontré dans la boutique de photocopies qu'elle tient. David et Anne, au jour le jour, suivent chacun le fil de leur propre histoire amoureuse mais également celle de l'autre. Jusqu'au jour où, en week-end à Deauville, David et Anne rencontrent Julien, dont Anne tombe aussi sec grave amoureuse... Aïe aïe aïe !
Il est donc quasi exclusivement question d'amour (je l'aime, est ce qu'il/elle m'aime ? est-ce que je dois lui dire ? est-ce que je ne vais pas trop vite ? qu'est-ce que j'attends de lui/d'elle ? Comment interpréter les signes ? Et quels signes d'abord ? Et est-ce que je ne me fais pas des illusions ?) ou de ce qu'on croit être de l'amour, et que des fois ça s'appelle de l'amitié, et d'autres de la tendresse, ou de la faiblesse, et que des fois on se trompe, et que des fois on veut pas s'avouer que, et que des fois on cherche bien loin ce qu'on a juste...
(le jeu de l'amour et du hasard ?)
Un film que certains diront très écrit et d'autre très bavard. C'est vrai que les dialogues en constituent l'essentiel, l'ossature, mais quels dialogues ! C'est drôle, c'est spirituel, c'est introspectif (extro aussi, des fois!) et surtout c'est attendrissant parce que c'est juste. On est dans un marivaudage (même s'il n'y a ici ni complot ni machination, ni travestissement, juste les aléas de la "vraie" vie) rohmérien (oui, je sais, ce n'est pas original mais je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Octave dans Les nuits de la pleine lune, même si -et heureusement d'ailleurs!- Emmanuel Mouret (à la fois devant et derrière la caméra) est à des années-lumière de Fabrice Lucchini.)
Bref, c'est très finement noté et retranscrit (une vraie petite porcelaine de Limoges, fragile et gracieuse) ; j'avoue que je me suis reconnu (je pense que c'est fait pour, hu hu) dans certaines attitudes, certains fragments du discours amoureux, qu'ils soient nunuches, béats, inquiets, fâchés, paradoxaux, illogiques, etc... bref la panoplie complète du petit désordonné amoureux (même s'il est ici strictement hétérosexué, mais ça n'est pas gênant, parce que
a) j'ai l'esprit large
b) l'amour est aveugle, hin hin...)
Bref une chronique assez désinvolte et charmante, parfaite pour ce début d'été surchauffé/footeux...