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lieux communs (et autres fadaises)
12 mars 2019

journal d'un curé de campagne

058
AIME ET FAIS CE QUE TU VEUX
de Malgorzata Szumowska

Merci Uncut qui m'a permis de découvrir ce film qui m'avait échappé en janvier 2014 -mais comment ai-je pu passer à côté de ça ?- même si le titre n'est pas terrible je trouve (et pourtant c'est du St Augustin), et l'affiche non plus d'ailleurs.
Le film s'ouvre sur une scène plutôt dure ou des gamins s'acharnent sur un mec simplet. Bienvenue  en Pologne, une Pologne "profonde", catholique, brutale, xénophobe. On fait ensuite la connaissance du personnage principal, un prêtre qui bosse dans un foyer d'accueil pour jeunes délinquants, en train d'arbitrer un match de foot plutôt... viril. l'arbitre se fait insulter par un des joueurs et lui colle un carton rouge. On va suivre un moment notre prêtre barbu et charismatique (magnifiquement incarné par Andrzej Chyra, vu récemment dans le Frost de Sharunas Bartas) exerçant son sacerdoce (c'est comme ça qu'on dit) au sein de ce bouillonnant aréopage de jeunes bourrins testostéronés pour qui l'affrontement viriliste est le seul moyen de communication ou presque (et donc, plastiquement, esthétiquement devrais-je dire, tout ça ne pouvait que me plaire vous vous en doutez...)
Il va s'avérer que notre prêtre, si sa foi semble entière (intègre) est tout de même soumis à certains tiraillements intimes (les choses sont assez vite posées, oui, un prêtre ça a aussi le droit de se branler), d'abord avec la proposition plutôt directe d'une jeune et jolie paroissienne bovaryenne, qu'il récuse frontalement, ensuite avec, bien plus indidieusement, l'intérêt croissant qu'il porte à un jeune barbu christique, frère justement du simplet victime des ados dans la scène d'ouverture.
Et (hoho là ça devient intéressant pour moi) de l'attention à l'intention, il n'y a qu'un pas, mais ce pas-là est sacrément dur à envisager pour notre père qui connaît alors les affres du désir (sport que j'avoue avoir moi-même pratiqué avec une certaine obstination) surtout quand l'objet de votre désir est a priori absolument hors de votre portée. sauf qu'ici, il va s'avérer que, eh bien justement (là ça devenait encore plus intéressant) l'objet du désir, il n'est peut-être pas si inaccessible que ça et que, eh bien, il ne serait peut-être pas forcément à ce que. A ce que quoi, justement ? Il y a toute une série de scènes délicieuses qui mettent en place le rapprochement progressif des deux tourtereaux (la réalisatrice n'y allant pas forcément de main morte dans l'imagerie christique et/ou sulpicienne : la leçon de natation comme un baptême, la course dans les champs de maïs avec cris d'animaux...) et qui m'ont mis en émoi, avec toujours l'environnement bourrinesque et homophobe qui sert d'écrin à ce beau roman, à cette belle histoire (à cette romance d'aujourd'huiiiiiiiii... Je ne persifle pas, j'ai vraiment beaucoup beaucoup aimé ça...)
Mais rien n'est facile pour notre prêtre, qui, en plus des tourments moraux inéhrents à ses sentiments envers le jeune homme, va devoir faire face à d'autres problèmes : l'arrivée d'un nouveau jeune perturbateur et provoquant (un blondin gay et actif, on l'entrapercevra à l'oeuvre), le suicide d'un des pensionnaires, et, surtout, la dénonciation à l'évêque de la part du plus proche collaborateur du prêtre... Et le film qui, jusque là tenait la route sans mollir, va se mettre à tanguer furieusement du scénario et à partir un peu trop dans tous les sens. D'abord en perdant de vue, pendant un temps suffisamment long, le p'tit barbu christique -où en ne s'y intéressant plus assez pour qu'on ait l'occasion d'y croire- ce qui est, à mon sens une erreur, puis en enfonçant le clou avec deux scènes d'ivresse un peu pénibles et excessives). Le rythme du film en pâtit, et le spectateur en est un peu déboussolé.
Heureusement dans la dernière partie la réalisatrice reprend les choses en main, d'abord avec une magnifique scène de procession, mettant, justement, en scène tous les protagonistes du film, sur un chouette morceau de Band of horses, et annonçant, un peu, le début de la fin.
Où (ah midinet un jour midinet toujours) on voit réapparaître -enfin!- le jeune barbu dans une dernière partie qu'on attendait, forcément, pour la grande scène des retrouvailles et de l'amour enfin consommé, (mmmh c'est délicieux, je le redis), juste avant un épilogue que je n'avais pas du tout vu venir. Qui m'a un peu agacé dans un premier temps je l'avoue, tellement je l'inattendais, mais qui, en y réfléchissant à deux fois (j'ai tendance, je l'ai déjà dit mille fois, à être primaire) est une belle et ironique façon de conclure. Et pan dans les dents de la religion!
Un film, donc, que je suis très content d'avoir finalement vu, et que j'aime énormément malgré certaines faiblessechounettes.

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Le film a obtenu le Teddy d'Or à Berlin...
(mais je trouve que l'affiche est mal fichue, une histoire de composition et de proportions, sans doute...)

*

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(christiques vous disais-je...)

 

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