ça tourne
197
STILL RECORDING
de Saeed Al Batal & Ghiat Ayoub
Des images brutes, tirées d'une matière-monstre (4 ans de filmage, 450h de rushes) accumulée par deux jeunes réalisateurs, témoins de la vie au quotidien (et donc, hélas, de la guerre au quotidien) dans leur pays, la Syrie (et plus précisément dans (et autour de) la ville de Douma. Une immersion saisissante, au milieu d'une ville en ruines, qui zigzague entre bâtiments dévastés et rues trop exposéées. Combattants, snipers, embuscades, explosions rythment le film de leurs scansions sonores et mortifères, la mort est omniprésente, mais la pulsion de vie aussi, qui intervient à proportion égale pour rééquilibrer le propos (et c'est tant mieux).
Vivre c'est parler, manger, fumer, boire, danser, et c'est réjouissant (réconfortant) de voir vivre cette belle jeunesse syrienne et barbue (ces jeunes gens, en plus, sont indéniablement très beaux, du genre de beauté indéniable -barbounettes, cils de gazelle, et cette toujours touchante façon de danser- que j'affectionne, en tout cas). La vie dans tous ses états. Combattants, snipers, observateurs, interviewés, chacun à sa façon témoigne, s'exprime, et nous bouleverse (j'ai même rencontré des snipers sentimentaux pourrait-on paraphraser). Le montage alterne les moments de stress et d'accalmie, l'adrénaline et la rigolade, et on se sent à chaque instant aux premières loges. Tout près de, au coeur de.
On parle de la guerre, de Bachar, mais aussi (surtout ?) d'art(s) (le film s'ouvre sur un cours de cinéma, il y sera question de sculpture, de peintures murales), de comment s'exprimer, c'est résister. Un film important, de par sa démarche, et que je ne pouvais donc pas ne pas faire figurer dans mon Top 10 (qui commence sérieusement à déborder.
"Sois patiente ô ma Patrie..."
les réalisateurs