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lieux communs (et autres fadaises)
28 août 2020

entropie

074
TENET
de Christopher Nolan

S  A  O  R
A  R  P  O
T  E  N  E  T
O  P  R  A
R  O  A  S

Et voilà.
(Ca devrait suffire).
Je connais la formule depuis mon adolescence, sans bien savoir à quoi ça se réfère ni à quoi ça pourrait servir. Et voilà que Christopher Nolan l'a fait (je m'en doutais un peu depuis que j'ai appris le titre du film...) Comme le film ne sera projeté qu'en VF dans le boo cinéma, autant aller le voir en avant-première, n'est-ce pas ? C'était dans la 8 (aïe mauvais présage, c'était la salle de Div*rce Club), et, effectivement, il y avait dans la salle -qui est vraiment très grande- un peu plus de monde que d'habitude (bon, pas encore au point de ne pas pouvoir respecter la distance minimale d'un fauteuil entre spectateurs, hein, mais il y avait du mieux...)
Et ça a démarré, et on constaté tout de suite que le son était TRES FORT, et, tout de suite après, que le montage aussi, et on se prend dans les mirettes une scène d'attentat à l'Opéra par un ou plusieurs groupes inconnus, une scène d'ouverture pleine de mecs uniformés et masqués, de flingues maousses, de violence et de pyrotechnie qui démarre genre James Bonderie, pour nous donner l'occasion de découvrir le héros du film, celui qui va sauver le monde (Bruce Willis, ton temps est révolu hihi). Il (il n'a pas de nom) est black, est interprété par John David Washington (le fils de Denzell), sapé comme jamais, et -hélas- est doué d'autant d'expressivité et de charisme que, disons, Steven Seagal dans ses meilleurs jours (il a les mâchoires serrées comme s'il avait un appareil dentaire particulièrement occlusif, mais bon, quand on doit sauver le monde, on a sûrement autre chose à penser que de sourire et faire des mamours, n'est-il pas ?).
Pour sauver le monde, il a un adjoint, Neil, un blondinet trop cool joué par Robert Pattinson himself, décidément cet homme peut tout faire - les deux dernières fois qu'on l'a vu c'était dans The Lighthouse de Robert Eggers, et dans High Life, de Claire Denis-, et il joue le bras droit un peu rigolard (le Laverdure de son Tanguy sauveur de monde) faire-pas si valoir que ça, en fin de compte.
Et il y a bien sûr en face un méchant très méchant qui envisage de détruire le monde, Sator (clic clic!), un mafieux russe, interprété par Sir Kenneth Brannagh (j'ai dû attendre le générique de fin pour avoir confirmation de ma supputation) qui est vraiment oui oui affreusement méchant, (à côté de lui le Requin des Dents de la mer, c'est Bambi...), incarné un chouïa en force (ce que le doublage français n'arrange pas vraiment...)
Un héros, un méchant, et il faut bien sûr, entre les deux, une princesse à délivrer... Elle est blonde, elle s'appelle Kath (pour Katherine), elle est interprétée par la délicieuse Elizabeth Debicki, (dont on devrait bientôt reparler) qui compose un des personnages les plus intéressants du film... c'est l'épouse du méchant très méchant, et, devinez un peu qui va tomber illico raide dingue d'elle, hein?
Et le macguffin ? le truc pour lequel tout le monde se bat mais qui est -hitchcokiennement- un prétexte à la mise en place de l'histoire  ? Au début on croit que ça va être du plutonium 241, mais c'est un leurre! Le machin en question c'est le temps. Le temps c'est de l'argent bien sûr, mais le temps à l'envers c'est encore plus que ça! Et c'est là-dessus que va se construire le film, de morceaux de bravoure en morceaux de bravoure (un combat dans un port franc, une course-poursuite avec des voitures qui vont -vraiment- dans tous les sens, une confrontation de part et d'autre d'une vitre, une opération militaire avec les rouges à l'endroit et les bleus à l'envers -allez-y vous comprendrez mieux-) qui vous clouent incontestablement sur votre fauteuil (avec les mains sur les oreilles tellement c'est toujours aussi FORT, à savourer votre plaisir -régressif- de regardeur de blockbuster, yeux comme le loup de Tex Avery, mâchoire pendante et surtout, oui surtout, le cerveau en ébullition.
Carrément.
Car si, par certains côtés, on est en plein dans la bourrinerie (grosses burnes, grosse artillerie, grosses  bagnoles, gros bras, grosse camaraderie virile et j'en passe) clinquante et bien bourrinante (film d'action et d'espionnage, dira-t-on), voilà que le manteau de l'histoire se révèle nanti d'une doublure scientifique version hard-science, physique quantique, entropie, paradoxes temporels etc. vous voyez le genre, le genre justement qui vous fait froncer les sourcils et apparaître sur le front les rides dites "d'intense réflexion", (hounga hounga moi bas de plafond essayer de comprendre...) qui fait inexorablement monter la température de vos méninges jusqu'à ce que vous ayez, par instants, le sentiment d'avoir, oui, le cerveau qui frit.
Donc il vaut mieux alors passer en automatique et s'enfoncer béatement dans son fauteuil moëlleux en soupirant d'aise tranquillou et les regarder tous se foutre sur la gueule, sans plus essayer de chercher la petite bête ni de comprendre comment, par exemple, une même attaque peut avoir lieu en même temps à l'endroit et à l'envers (je n'en suis toujours pas revenu...)
Comme d'habitude chez Christopher Nolan (je me base sur ceux que j'ai vu : Interstellar, Following, Le Prestige, Memento) l'intrigue est virtuosement tarabiscotée, le scénario est tortueusement intelligent, le film vous traîne sans ménagement dans sa complexité paradoxale, où l'on a, en plus de la cinégénie, le plaisir de voir de temps en temps se confirmer une hypothèse de spectateur, tandis que le récit se retourne comme un doigt de gant, ou que le réalisateur nous permet de (re)voir la scène sous un autre angle (ça se produira plusieurs fois)... Dans Interstellar, par exmple, on revoyait, à deux moments du film,  une même scène, vécue de part et d'autre d'une bibliothèque, à des années (-lumière) d'écart, mais là, c'est carrément tout le film qui se revoit (et renvoie à lui-même), de part et autre d'un centre de symétrie spacio-temporel (le N de TENET), en avant et en arrière -simultanément!-.
Comme si le nouvel ennemi de James Bond, mieux que Goldfinger, se nommait à présent Schrödinger*
Bref (2h30, tout de même! ) le film est et n'est pas. Dans le même temps (!). Pas un chef-d'oeuvre impérissable, c'est sûr, mais un sacré moment de cinoche, c'est tout aussi certain...
Je ne suis pas certain que, en l'état, ça puisse renflouer les tiroirs-caisses des cinoches comme l'espéraient ceux de la profession désormais exsangue et sinistrée jouez hautbois résonnez musette (et tiroirs-caisses),  le quantique des quantiques... (et j'avoue qu'en fait je m'en fous un peu...)
Comme le conseille Téléramuche, (re) voyez plutôt Memento, Le Prestige, et Interstellar, du même, encore plus réussis...

2066772

1611203

deux façons de voir...

* "Le chat de Schrödinger est une expérience de pensée imaginée en 1935 par le physicien Erwin Schrödinger afin de mettre en évidence des lacunes supposées de l'interprétation de Copenhague de la physique quantique, et particulièrement mettre en évidence le problème de la mesure." (voir la suite sur wikipedioche)

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