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lieux communs (et autres fadaises)
1 février 2008

trou de serrure

NO COUNTRY FOR OLD MEN
de Joel & Ethan Coen

(impossible à chaque fois de se rappeler du titre exact)
Il y a pas mal de trous de serrure dans le dernier film des Coen Brothers. Au sens propre. A cause de l'arme utilisée par le méchant (impressionnant Javier Bardem) à tout bout de champ. Ca se présente comme une bonbonne (d'oxygène ?) à laquelle est raccordé un tuyau auquel est fixé un embout, qui, lorsqu'on l'appuie sur quelque chose et qu'on met les gaz, fait schklonk! et laisse un joli rond parfait, béant, en envoyant valser au loin la partie centrale de ce contre quoi on l'a appuyé, qu'elle soit serrure, justement, ou bien toute autre partie bien moins résistante a priori du corps humain.
Et des trous et des béances, justement, il en existe aussi pas mal dans ce même film. Et c'est peut-être ce qui  fait sa force, d'ailleurs. Un point de départ assez classicos : un chasseur tombe par hasard sur une fusillade qui a mal tourné et sur un gros paquet de billets dans une mallette. Un tueur à gages surhumainement inhumain est à ses trousses et veut récupérer le magot. Et c'est tout ? Oui, à peu près. Ah oui, il y a aussi un vieux shérif buriné presque à la retraite (Tommy Lee Jones), personnage touchant qui serait un peu le pendant masculin, question sympathie, de la fliquesse enceinte de Fargo (Frances Mc Dormand) qui, je ne sais pas exactement pourquoi, reste toujours extrêmement chère à mon coeur.
Bon, c'est quand même un polar, à la base, mais, certains spectateurs le trouveront frustrant. Pour l'amateur moyen de polars. Les frères C. s'amusent à nous déposséder des morceaux de bravoure qu'on était en droit d'attendre (l'affrontement dantesque et ultime entre  les deux adversaires qui se sont pourchassés pendant tout le film, par exemple) se privant (et nous aussi) des "scènes à faire" et autres passages obligés. Régulièrement, ils trouent leur récit (schklonk!) d'un vide soudain, une incertitude quant à l'issue d'une scène qui tourne  court (et vous fait vous demander Alors ça s'est fait ou pas ? ) dans un délicieux vertige, tandis qu'on passe à la suite. Et qu'on obtient alors la réponse. Ou pas.
Car on est chez Coen, et le schéma basique est quelque peu gauchi, tordu, dévoyé. Le chasseur du début n'est pas n'importe qui. C'est vraiment un chasseur solitaire, un traqueur, un pur et dur. Même pas mal . Presque aussi retors et plein de ressources que  son poursuivant (Bardeminator ? Dans le registre "même pas mal " bis, on a rarement vu aussi... endurant !). Et le fameux shérif, (qui met un certain temps pour apparaître, d'ailleurs) suit ça d'assez loin, avec une certaine désinvolture (nonchalance ?), et un intérêt relatif (ça l'amuse plus de vanner son adjoint un peu peu gentiment benêt), jusqu'à une certaine scène, qui finira d'ailleurs par un des "trous noirs" ou "appel d'air' susnommés... (Alors, hein, qu'est-ce qu'il a fait ? Mais qu'est-ce qu'il a fait ?)
Ca a l'air sérieux premier degré, mais finalement on ne sait plus trop. A cause de la coiffure playmobil de Javier Bardem, à cause de l'ironie du sort, à cause de personnages (le chasseur, le tueur, le flic, le cow-boy) et de décors (le désert, le motel, la frontière mexicaine) dont l'archétype est tellement poussé jusqu'au paroxysme qu'on pourrait prendre ça pour de l'ironie ou du hmmième degré. C'est peut-être juste de la fidélité au texte de Cormac Mc Carthy. Du respect au pied de la lettre. (Je ne l'ai pas lu, je ne peux donc rien en dire !)
En tout cas j'adore ça. D'un bout à l'autre. On est pris en otage - consentant - pendant  deux heures, bouche bée, jusqu'à ce que les frangins malicieux (c'est vrai qu'ils sont joueurs) nous retirent presque la carpette sous les pieds. La dernière partie du film (je vais peut-être finir par lire le roman!) est barrée, pourrait-on dire, marche en crabe, presque parle d'autre chose, pourrait-on croire, mais on est toujours aussi fasciné. Le personnage n'y comprend rien (ou ne veut rien y comprendre), nous raconte ses rêves, pendant qu'un autre rachète une chemise, avant de s'en aller...  on en aurait voulu un peu plus, encore. C'est vrai que c'est presque aussi beau que Fargo (la neige en moins) et tout aussi noir et rouge (je vous préviens, ça dégomme sec, et  même c'est la première fois que, dans un film, un mec se fait blesser par un coup de serrure !)
Et j'ai pensé, pendant le film, à plusieurs reprises, voila du cinéma  beau, intelligent, et américain. Ce qui n'est pas si fréquent. Un grand Coen.

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Commentaires
D
J'ai vraiment dû passer à côté de ce film !
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