hosto blues
LA GUERRE EST DECLAREE
de Valérie Donzelli
Journée de prévisionnement à Moirans : c'est looooin! (heureusement c'est Hervé qui conduit!) premier film des quatre prévus, début d'après-midi, on s'installe...
Celui-là, ça fait beaucoup de temps que j'en entends parler, en bien, en très bien, en mieux que bien... Je me méfie de l'unanimité (Oui c'est, au choix, mon côté snob ou vieux con) j'étais content donc, de le voir dans ces conditions-là,juste avant la "vrai sortie", pour me rendre compte par moi-même, quoi...
Et bien, décidément, la période est propice aux coups de coeur et autres émotions fortes : en peu de temps, j'aurai ainsi été remué assez fort par, successivement, Melancholia, This must be the place, et, là, aujourd'hui, encore plus fort si c'est possible, par La guerre est déclarée.
Oui, c'est vrai que le cinéma est pour moi surtout affaire de charge émotionnelle, et là, question émotion, comme on dit, "j'ai reçu"... Bon signe, j'ai, heureusement, terminé le film avec les larmes aux yeux, mais pas que. Dans un état de bonheur inexplicable et violent, aussi.
D'une histoire pas très joyeuse (un couple découvre que son premier enfant souffre d'une tumeur au cerveau), autobiographique qui plus est, Valérie Donzelli a tiré un film extraordinaire. Dans lequel elle joue, son propre personnage, donc, en compagnie de Jérémie Elkaïm qui joue son propre rôle aussi (et avec lequel elle reconstitue donc le couple d'alors, même s'il n'a pas, justement, survécu à cette aventure).
On commence au scanner (ou à l'IRM je n'ai jamais trop su la différence précisément), et on repart ensuite dans un long flash-back où toute l'histoire est racontée de a (la rencontre des deux amoureux) jusqu'à z (la promenade familiale). Et c'est du vrai de vrai cinéma, inventif, aventureux, primesautier, dramatique, rigolard, follement romantique, redoutablement réel, drôlement décalé, décidément cinématographique. Avec trois bouts de ficelle et un appareil-photo numérique (le même que pour Rubber me semble-t-il avoir compris) -et donc une équipe réduite (resserrée, ressoudée), Valérie Donzelli a réalisé un film miraculeux de simplicité, de spontanéité, d'enthousiasme.
On sent qu'elle prend plaisir à se colleter avec la matière même du film, qu'elle n'hésite pas à mettre les mains dans le cambouis des dessous de la narration, bref qu'elle affronte ses éléments divers, elle les organise, elle leur tient tête.
Il y a dans le film plein de moments merveilleux, magiques, où on est pourtant souvent sur le fil, du jeu des comédiens, de l'utilisation de la musique, du rythme des plans. Mais toujours, immanquablement, infailliblement, félinement, le film retombe sur ses petites pattes, fait une cabriole et repart de plus belle en nous faisant signe de le suivre. Il ya du léger et plus lourd, de l"allègre et du répétitif, du souriant et des engueulades aussi, un joli duo en voiture mais pas ensemble, des nuits à l'hôpital, du champagne bu à même la bouteille, des cacahuètes lancées pile-poil, des acteurs que certains trouveront trop ci et d'autres pas assez ça (moi, en toute mauvaise foi et en ce qui me concerne, je dirais que tout était juste comme il faut, que l'ensemble me convient, même s'il y a des scènes ou des bouts de, ici ou là, qui sonneraient peut-être un poil trop mais bon... indulgeons!)
La guerre est déclarée fait partie de ces films, somme toute pas si courants, dignes de respect. Oui, le mot est lâché. Pour la force du sujet, la dignité de l'ensemble, la légèreté et la quasi-inconscience du traitement, et l'optimisme -quasi béat- qui se détache de toutes ces choses pourtant a priori plutôt tristounettes, prises séparément (examens / tumeur / scanner / opération / nuits de veille / chimio / protocole / récidive etc.)
Des gens, vous, moi, la vie, quoi!
(et le plaisir, tiens, de revoir un acteur que j'adore mais qu'on ne voit pas assez : Frédéric Pierrot, qui a d'ailleurs le superbe rôle du super-chirurgien...)