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lieux communs (et autres fadaises)
8 mai 2013

captifs

BESTIAIRE
de Denis COTE

Oh l'intriguant (et splendide) documentaire sur un parc animalier au Québec. On pourrait dire - à première vue (!)- juste des images, très soigneusement composées, cadrées, juxtaposées, montées. Ni commentaire ni musique (il faudra un sacré bout de temps pour entendre des voix humaines, et elles sont juste alors reproduites "en situation".)
Il s'agit d'animaux, plus exactement du regard et des animaux, celui qu'ils ont sur nous autant que celui qu'on peut avoir sur eux, des rapports, généralisons, entre animal et humain. Et vice-versa. Le film raconte juste ce que donnent à voir ses images (qui sont tout sauf anodines) et le questionnement que celles-ci provoquent la plupart du temps. "Qu'est-ce qu'ils font ? Où sont-ils ? Qu'y a-t-il à voir ? Qu'est-ce qui se passe ?" etc.
On ne peut pas ne pas penser au travail de Nicolas Philibert sur un thème très voisin, dans Un animal, des animaux, avec le plaisir de retrouver ce regard "décalé", tangentiel pourrait-on dire, du documentariste par rapport à son thème ("nos amies les bêtes"), et en reconnaissant la différence de traitement qui pourrait faire apparaître Philibert plus "humain" et Côté plus froid, plus distant (la plus grosse différence étant que Philibert filmait des animaux naturalisés, alors que Côté les saisit vivants.)
Tout se joue bien souvent dans un cadrage que va (ou vont) traverser (ou pas) un ou plusieurs animaux. La façon dont ils vont, justement, occuper ce cadre, l'habiter, l'envahir, ou l'abandonner, qui est à la fois le fruit du hasard, mais aussi des choix (des partis-pris) forts du réalisateur, au moment du cadrage, puis à celui du montage . Une apparente objectivité du hasard, qui serait en définitive, extrêmement construite, et pas du tout hasardeuse, justement.
Denis Côté regarde et donne à voir. Comme ces jeunes gens, au début, qu'il observe en détail et en très gros plan (on a des détails de pelages et de crinières, quasiment), en train de destiner une bestiole (serait-ce un gnou?), jusqu'à la scène finale, qui, prenant ses distances, nous compose un étonnant ballet de bagnoles et de zèbres... Animaux acteurs, et humains accessoires : spectateurs, soignants, nettoyeurs, étudiants, taxidermistes, etc.
C'est très beau à regarder (le réalisateur possède un indéniable sens plastique), et jouissif parce que très mystérieux, de par les choix du réalisateur sur ce qu'il montre et la façon dont il le fait, sans surlignage, sans explications, sans didactisme miséricordieux ni paraphrase pompière. Juste la beauté du geste, pourrait-on croire, tandis que pourtant se construit sous nos yeux un discours militant, engagé.
A noter aussi le travail sur le son, parfaitement au diapason, efficace autant dans sa précision (le bruit des papattes dans la neige) que dans sa suggestion (la scène avec les lions et les coups contre les portes). Vraiment, vraiment, une excellente surprise, un vrai bel et fascinant objet de cinéma...
Top 10 ?

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