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lieux communs (et autres fadaises)
15 janvier 2015

je suis chori

samedi

Marche citoyenne ce samedi après-midi à Besac
J'y étais, avec Dominique et Emma. Une foule inhabituelle, insensée, incroyable,  entre 15.000 et 20.000 ont annoncé les organisateurs . La foule des grands jours, pourrait-on se réjouir.
Seulement, sur le trottoir, je regardais passer les gens, tous ces gens, et je ne pouvais pas m'empêcher d'avoir des questions, comme ça, qui me trottinaient dans la tête. Pourquoi tous ces gens, pourquoi étaient-ils tous là, dans la rue ? Et moi, d'abord, hein ? (c'est Christine qui m'a fait me poser la question, ce matin, quand je lui ai parlé de la manif d'hier.) Pourquoi je suis venu ?
D'abord parce que je retrouvais mes amies Emma et Dominique à midi à l'Hermitage (et que manger à l'Hermitage un samedi midi est toujours spécialement un plaisir), parce que c'était une "marche citoyenne" (et donc pas une manifestation, même si ça en présentait pourtant tous les symptômes), parce que je voulais savoir à quel point "ça" serait suivi (et qu'en effet ça le fut!), parce que je voulais témoigner (manifester) mon soutien pour les dessinateurs de Charlie-Hebdo, et pour tous les autres, morts ce jour-là, victimes de la violence imbécile et zélée de deux connards de tueurs, se réclamant de dieu sait qui, parce que je voulais ressentir en quoi ce soudain amour vibrant universel et national (comme a dit Dominique, "aujourd'hui tout le monde s'aime...") était différent d'avant, et qu'est-ce que ça allait changer pour après, parce que je me disais que je ne pouvais pas ne pas être là (les seuls absents, grosso modo, étaient les malades et les FN -et encore pour ces derniers je ne suis pas du tout absolument sûr que...-), parce que j'espérais que quelqu'un, quelque chose, pourrait à ce moment me permettre de m'aider à répondre à mes doutes, concernant tout ça, tout cet emballement médiatique, politique, social, qui a succédé à ce désormais fameux mercredi 7 janvier.
Je suis sûr de peu de choses : c'est un événement qui m'a foudroyé, terrassé, cet assassinat injustifiable, dégueulasse. Des hommes fusillés, c'est déjà, par définition, insupportable. Alors encore plus quand ils sont désarmés, et quand la seule chose qu'on reproche à certains car d'autres sont morts qui n'avaient strictement rien fait, à part d'être là au mauvais moment), c'est d'avoir fait des dessins. Des dessins, oui! Peu importe que ce soit la tête du prophète ou le cul du président, juste des dessins. Ces dessinateurs, ce journal, je les connaissais depuis 1973 (mon premier numéro, ramené à la maison quasiment sous le manteau -sous le t-shirt, on était en août-...) j'adorais l'insolence, les gros mots, les bites, l'irrévérence, le politiquement incorrect, bref cette façon de flinguer tous azimuths, contre la connerie, contre les politiques, contre les religions, contre la police et l'armée, contre le nucléaire, contre la droite, contre la gauche aussi quand il le fallait... Et c'est vrai que je m'en suis par la suite un peu éloigné...
Et me voilà, sur le trottoir, à contempler le flot des Charlies qui passent, et à me demander si je suis vraiment normal de ne pas prendre part sans arrière-pensée(s) à cet enthousiasme unanimo-national ("marchons marchons qu'un sang impur...") dont je ne mesure pas tout à fait ni les raisons ni les effets. Oui c'est bien de marcher comme ça tous ensemble mains dans la main vers un univers radieux et bleu-blanc-rouge (y en avait pas déjà bôcou bôcou qui l'avaient fait, genre en 98 ? et ça a donné quoi , hein ? ca a duré quoi ?), c'est 'achement bien sur le coup, c'est sûr, ça réchauffe, ça rassure...
Et il y a quand même tous ces politiques, qui se bousculent pour être là, sur la photo, à côté du bodyguard sexy de Hollande (je n'invente rien), à se serrer les mains, les coudes (pour ne pas dire mieux) tous le regard sur la ligne bleue des vosges d'un avenir décidément radieux à l'unanimité de forces unies contre le terrorisme abreueueueueuve nos sillons...
je me disloque à 15h et quelques et je vais voir l'assez pas très bon film d'Egoyan (on est quatre dans la salle : Dominique me fait remarquer "tout le mond est à la Manif...") avec presque de vagues scrupules : Suis-je anti-social ? Non-citoyen, mécréant,  anti-anti-terroriste , pas dans le sens du poil , bref, pas assez Charlie ?

(et puis quelques jours passent)

mardi

L'actualité se fatigue et patine un peu sur le coup, on en parle un peu moins, un peu moins fort, un peu moins unanimement, et -enfin- quelques couacs s'élèvent, quelques sons de cloches autres, heureusement, même si certains m'indignent et me filent la gerbe. Tiens, tout le monde n'est plus tout à fait Charlie... Les rebeus, les juifs, les dessinateurs, les journalistes, les pros et les cons (tiens ça m'arrange bien de parler à l'anglaise, sur ce coup) les gays, on reprend un peu (juste un peu) ses esprits, ses marques, ses -même si imperceptibles- distances
Les spécialistes (du terrorisme, de l'anti-terrorisme, de la religion, de l'intégrisme, de l'anti-amalgame, de la discrimination, de l'unanimisme, de la myopie, de la différence entre halal et kasher) s'expriment, s'impriment, glosent dialoguent et s'invectivent, se disent et se contredisent, donnent leur(s) avis(s) et on n'y voit pas vraiment plus clair. Chacun recommence à avoir raison, même si quelques-uns murmurent "je ne suis pas tout à fait certains")
la couverture du Charlie de demain a fuité, je la trouve excellente. ils n'ont pas baissé la garde, ils sont restés cohérents, ils ne baissent pas les yeux, c'est juste parfait.
On annonce un tirage de un, puis de trois millions d'exemplaires...)

mercredi
je me suis pointé comme une fleur à 9h, j'aurais pourtant du être alerté par quelques sms et mails des copines... J'ai fait plusieurs marchands qui affichaient tous "plus de charlie-hebdo, revenez demain!", et j'ai juste encore une fois souri en pensant à tous ces millions de gens qui allaient (qui avaient voulu) acheter le premier Charlie de leur vie, et à leurs réactions devant ce qu'ils allaient y trouver...
Et puis Catherine m'a parlé des tweets de Swami Petaramesh et je suis allé jeter un oeil
il y a de plus en plus de gens qui se posent des questions, ça c'est plutôt bien, mais je n'y vois pas beaucoup plus clair, au contraire. Les chaînes de télé n'ont plus de brassard sur leurs logos, les spécialistes glosent tous azimuths,
Ici ce soir le bôô cinéma a organisé une projection de Caricaturistes, fantassins de la République, au profit du fonds de soutien à Charlie : 77 spectateurs (j'avais un peu rêvé un raz-de-marée mais non)
Juste ça ne me semble plus si important que ça, finalement, de l'avoir tout de suite, ce fameux nouveau numéro de Charlie, (c'est peut-être juste le fait de m'imaginer que je vais devoir me lever à 6h du mat' pour ça et ma paresse naturelle qui reprend le dessus), d'autant plus que Catherine P. a la gentillesse de me le transmettre en pdf dans la soirée.
Tiens ça fait déjà une semaine...
Tiens ça fait déjà une semaine...

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