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lieux communs (et autres fadaises)
16 août 2018

bussang 2018 2

samedi 11 :
LES MOLIERE DE VITEZ
mise en scène de Gwenaël Morin

Originellement ça n'était pas prévu, mais c'est ce diable de Pépin qui nous a mis suffisamment l'eau à la bouche, et donné diablement envie de  voir l'intégrale des spectacles, présentée en continu le samedi à partir de 14h. Quatre pièces de Molière en enfilade (si je puis dire), chacune jouée en 1h30, sans déco (plateau nu et une ou deux chaises en plastoche), sans costumes (venez comme il vous plaira), sans accessoires ou presque (juste un par ci par là : canne, perruque, bouquet, seau, extincteur)..., sans lumière (pleins feux sur scène et dans la salle) et sans effet non plus (fond du théâtre ouvert tout le temps.
Tambour battant et montre en main, L'École des femmes, Tartuffe, Don Juan, et Le Misanthrope (dans cet ordre). 14h, 16h, 18h, et 20h, avec trente minutes (un peu moins ou un peu plus) entre chaque. Un marathon Molière, quoi.
Les textes de chaque pièce sont disponibles sous forme de grands journaux (certains spectateurs prendront plaisir -paradoxalement- à plutôt lire le texte qu'à suivre ce qui se passe sur scène -effet supplémentaire -et involontaire- du bruit dans le public des pages qui se tournent simultanément schhhhrffff-.) On avait apporté les coussins (pour les fesses), les petites laines (pour le soir), les pommes (pour l'entracte) et les bouteilles d'eau. on était parés. En CC4 (troisième rang du balcon, bien centré), j'étais hyper bien.
Neuf jeunes comédiennes/diens (là exceptionnellement ils étaient dix, le surnuméraire étant un nouvel arrivant destiné à  remplacer un autre comédien pour la prochaine -et dernière- semaine de représentations. Et reprendre tous ses rôles. Rôles qui ont été, dit-on, distribués par tirage au sort, dans trois pièces sur les quatre, la distribution de la dernière ayant été fixée, re-dit-on encore, par le metteur en scène lui même pour "rééquilibrer" les rôles. Et cette fameuse quatrième pièce, c'est justement l'Ecole des femmes, celle qui ouvre le bal. Qui met le feu aux poudres. Feu d'artifices, vous dis-je. 
Bam bam bam trois coups de grosse caisse portés par une jeune fille assise sur une chaise (de jardin) en jardin, justement. "L'école des femmes, premier acte!" Et c'est parti. Tagada tagada. Molière est revitalisé, comme après une piqûre de vitamines, ou, mieux, d'adrénaline.  Et tous les actrrices/teurs sont au diapason. Le texte est dit dans son intégralité (à quelques -délicieux- lapsus et autres rajouts près), trois pièces en alexandrins sur quatre, tout de même, mais pas forcément à un rythme dit "classique" ou "habituel". Du théâtre de Molière ne reste que l'essence : le texte et le corps. Mieux, la quintessence, la substantifique moëlle comme on dit.
Un débit parfois joyeusement fou-furieux, pour des pièces dont, si j'en (re)connaissais le plus souvent les personnages, et les grandes lignes, voire grosso-modo l'intrigue ou même quelques répliques, je n'avais jamais me semble-t-il eu le plaisir d'en voir la continuité jouée.
Si le texte est à l'honneur, le corps l'est tout autant. L'exercice est très physique : courses, pirouettes, chutes, escalades, bousculades, bourrades, poursuites, tout comme l'est le dévoilement régulier des corps (les masculins surtout, pour mon plus grand plaisir : dans chaque pièce ainsi il y aura au moins un moment où un des personnages se fout à poil, et je mentirais en disant que cela ne faisait pas partie du grand plaisir qu'on prend à ce(s) spectacle(s)) des corps disais-je régulièrement dans le plus simple (et le plus ravissant) des appareils.
Il faut être attentif au texte, puisque la distribution est aléatoire, au petit bonheur, et l'on réalisera par exemple que tel grand gaillard vociférant en jean et t-shirt rayé est en réalité la mère d'Orgon, et que, si Dorine est joué par un mec (excellent) et porte une robe jaune, l'acteur qui joue la fille est lui en short et baskets, et Sganarelle, dans une autre pièce est joué par une femme en robe rouge (Marion Couzinié, époustouflante), ou même Tartuffe, par une femme aussi, mais en pantalon... Il faut être toute ouïe, pour ne rien manquer, et, en même temps, on ne peut qu'être tout oeil, tellement ça galope ça pétarade ça rue ça vibrionne. Et emballe son monde la plus exquise des façons. Et régulièrement, des seaux d'eau viennent rafraîchir et moduler les ardeurs de quelques personnages en crise(s). En surchauffe. Qu'on nettoiera ensuite à la serpillère, toujours en jeu.
C'est du grand art.
Tous ces jeunot(te)s ne gaspillent pas leur peine, pendant quatre fois quatre-vingt-dix minutes, et ils doivent, à l'issue de ces quatre pièces, être complètement sur les rotules. Mais quel bonheur pour les spectateurs! A part quelques pisse-froid arc-boutés sur leurs vieux principes poussiéreux (j'en ai entendu un pérorer lors du premier entracte "C'est n'importe quoiii! Ca n'a plus rien à voiiiir avec Molièèèère!") le public y a visiblement pris grand plaisir, et la grande majorité en est restée jusqu'au bout...
La construction de la jounée est aussi astucieusement pensée : L'Ecole des Femmes pour démarrer en trombe, puis Tartuffe pour calmer un peu le jeu (c'est la plus "raisonnable" des quatre), ensuite Don Juan pour remettre les gaz (ce fut ma préférée) et enfin Le Misanthrope en guise d'apocalypse (ce fut la préférée de Dominique). le Misanthrope avec son quart d'heure de -vraiment- folie furieuse (le spectacle est dans la salle, et je peux vous assurer que ça déménage grave), son bouquet déniapé (comme on dit chez nous) que j'ai tant aimé et son "trois quarts d'heures à cracher dans un puits" qui a tellement plu à Pépin...
Bref, du bonheur, du bonheur, du bonheur et du bonheur. (Oui, quatre fois, c'est bien le minimum qu'on puisse faire, et c'est rien de le dire...)
Merci à Michaël Comte, Marion Couzinié, Lucas Delesvaux, Chloé Giraud, Pierre Laloge, Benoît Martin, Julien Michel, Maxime Roger, Judith Rutkowski, Jules Guittier

molieres de vitez

...et merci à Gwenaël Morin...

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