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lieux communs (et autres fadaises)
18 novembre 2019

frontières

BÂTARDS / DÉPLACEMENT

la dernière fois que j'étais venu voir de la danse à l4espace, je n'avais pas été conquis (le coup des plaques de placo), là je le fus, et doublement. Deux enthousiasmes, pour le prix d'un. Deux "petites formes" (30' chacune) juxtaposées, avec juste un entracte technique au milieu (10) pour installer/ désinstaller le plateau.
D'abord un duo, Michel Schweizer et Mathieu Desseigne, un qui parle et un qui danse, qui, dans BÂTARDS nous font un genre de mini-conférence sur... le barbelé, qui commence, drôlement, hors-plateau par un speech du danseur (on croit que c'est un nouvel intervenant de l'Espace, qui, papier à la main, nous évoque un projet culturel d'envergure impulsé par l'actuel ministre de la culture, mais également jacques Wingler, le fondateur de l'Espace justement... On est d'abord étonné, ému, puis débarque, hors-plateau aussi, l'autre zigoto, pantalon de cuir et urne funéraire sous le bras, tout sourire, qu'il pose (l'urne, pas le sourire) sur le rebord de la scène (et dont on ne connaître la finalité qu'à la toute fin, justement), et que se mette en place leur dialogue clown blanc / Auguste, avant qu'ils ne montent tout deux sur scène.
Mathieu Dessaigne est danseur et acrobate (son cv précise qu'il est passé par la Compagnie C de la B. d'Alain Platel) et joue de son corps virtuosement (c'est même au-delà de ça...) pendant que Michel Schweizer, imperturbablement ou presque, nous fait un exposé sur l'histoire du fil de fer barbelé...
C'est... juste parfait. Le corps de l'un, les mots de l'autre se répondent et s'accompagnent. Ce que fait Mathieu Dessaigne est proprement époustouflant, et agit comme un contrepoint drôle, surprenant, aux propos de plus en plus fumeux, ampoulés, et vides (bref, amphigouriques)  de notre imperturbable conférencier en pantalon de cuir. les deux se complètent à merveille : on n'a d'yeux que pour le danseur, et on prête l'oreille au disserteur.
Jusqu'à l'image finale, d'une douceur et d'une tendresse qu'on n'aurait pas vraiment pu soupçonner. Un grand moment.

(à l'entracte, les machinos, dans la pénombre, vident la scène, ôtent (déscotchent et renroulent) les tapis de sol juxtaposés qui faisaient un espace immaculé et ne laissent qu'un espace vide, plateau nu nu avec juste deux enceintes sur pied au fond et une paire de bottes).

Déplacement, le solo du chorégraphe Mithkal Alzghair. Dans un silence religieux, il entre sur scène portant un drap blanc plié qu'il pose au sol (et auquel il ne touchera plus), puis marche jusqu'au centre du plateau pour enfiler les bottes, avec lesquelles il se mettra à marcher sur place, d'abord martialement, puis à danser, à rythmer, à marcher, dans un solo très physique (et pendant très longtemps sans musique, juste le bruit des bottes et la respiration du danseur) et, dans son dépouillement, très impressionnant, où le chorégraphe, avec très peu de choses (une paire de bottes, une chemise) parvient à évoquer/recréer son pays, la Syrie, et surtout la guerre, dans une chorégraphie asphyxiante de beauté (les pas traditionnels, les danses, puis  la violence, le conflit, la souffrance, et même la mort). On est scotché. A chaque nouvelle étape (quand il enlève sa chemise, quand il ôte les bottes, quand il se dépêtre de son pantalon) l'émotion grandit. c'est très fort. Une proposition a priori très éloignée, par le ton et la manière (tout ça sans un mot, juste le corps) des Bâtards de la première partie, mais qui, pourtant, rejoint son propos et le complète parfaitement. Yin yang. Oui, complémentaires.

Je suis sorti de là ravi.

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