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lieux communs (et autres fadaises)
19 décembre 2021

sextape

BAD LUCK BANGING OR LOONY PORN
de Radu Jude

C'est le film qui m'a fait revenir à Besac au cinéma (je n'y étais pas venu depuis début novembre!).
J'ai déjà dit, et répété, et clamé, et ressassé mon amour pour le cinéma roumain (et ses réalisateurs, majoritairement en -u : Puiu, Mungiu, Porumboiu, celui-ci, Jude,  faisant un peu office d'exception qui confirme la règle).
Radu Jude (dont l'avant-dernier film, UPPERCASE PRINT,  est présenté en ce moment par arte dans le cadre de son arte kino festival) est peut-être moins connu,(justement!) mais il a réalisé des films foutrement forts (et je charge l'adverbe à dessein) : "PEU IMPORTE QUE L'HISTOIRE NOUS CONSIDERE COMME DES BARBARES" (2018), AFERIM! (2015), PAPA VIENT DIMANCHE (2012), LA FILLE LA PLUS HEUREUSE DU MONDE (2009), tous caractérisés par une certaine folie, virant d'ailleurs, le plus souvent, à la folie furieuse. FFF, même (folie furieusement féroce, mais on pourrait y adjoindre le J de joyeusement aussi...).
Le film se décompose en trois parties, après une introduction (!) plutôt hot (-la fameuse sextape qui va pourrir la vie de la prof qui l'a tournée-  vue "de l'intérieur", QV incluse) qui "justifie" l'interdiction aux moins de 16 ans dont a écopé le film (en Roumanie, c'est aux moins de 18!), et avant un épilogue décliné en trois propositions...
Trois partie très différentes : une marche dans Bucuresti fraîchement déconfiné(e), puis un abécédaire "image & son" (une grosse parenthèse, ou une façon de faire le point sur le sujet), et, enfin, la confrontation finale de la fameuse prof (celle vue dans la sextape) et les parents d'élèves, fort remontés.
Trois partie séparées (et introduites) par un écran rose bonbon (ou rose porcelet, au choix) avec les titres à rallonge (et la surprise d'entendre une chanson en français, je vous laisse la surprise de laquelle, car c'est bien la plus belle, la plus sensationnelle...).
La bande-annonce, , peut vous en donner une petite idée.
J'ai parlé de jubilatoire et de féroce dans un précédent post (sur Oranges sanguines) , on y est à nouveau, plouf! mais encore un cran au-dessus (ou plus profond, ça dépend comment on regarde). Mais c'est normal, on est en Roumanie, hein... Ce cinéma est du cinéma de sale gosse, turbulent, indiscipliné (dans téléramuche ils ont dit foutraque et brindezingue, et ils ont raison je trouve...) et, une nouvelle fois, ça me ravit.
La première partie, qui est une sorte de déambulation dans Bucuresti, tient quasiment du documentaire, la caméra suit l'héroïne qui marche dans la ville, le plus souvent masque sous le menton (c'est un film qui est très covid-marqué, et ça aussi c'est bien), et elle enregistre (la caméra) la prolifération de signes, d'enseignes, de messages publicitaires, tout un environnement visuel envahissant, coloré, abrutissant -qui donne, paradoxalement, envie d'aller s'y promener-, sans oublier non plus les autochtones, avec ou sans masque, dont on sait qu'ils ont -surtout les conducteurs- l'humeur ombrageuse et le recours au "Va te faire enculer, connard!" facile (et fréquent).
Dans la partie suivante, Radu Jude retire l'échelle et s'amuse -et nous surprend- en abandonnant son héroïne -et son récit- pour un genre de collage ("comme en faisait Jean-Luc Godard dans les années 60" dixit le journaliste de téléramuche mais je n'ai ici aucun avis sur la question, n'ayant pas assez vu -ni même pas vu du tout- les fameux "films de JLG dans les années 60" dont il est ici question -je ne suis pas godardien (godardiste ?)à mort du tout, au contraire : à part Le Mépris, hein...). Donc, où en étais-je ah oui un abécédaire où il semblerait que le réalisateur recense tout ce qui pour lui relève (ou est censé relever) de l'obscénité), avec des choses très drôles et d'autres qui le sont moins (je n'ai toujours pas compris l'histoire du taureau et du veau, en écrivant je me dis que ça doit être un truc en rapport avec les couilles, mais je ne suis pas sûr). Mais bon ça n'est pas si fréquent d'avoir dans un film une liste (ou une énumération) aussi conséquente(s), les listes j'adore  et donc je suis preneur.
Dans la troisième partie, on retrouve notre prof, cette fois dûment masquée, assise derrière un bureau, face à une meute de parents d'élèves diversement (et joliettement, souvent) masqués qui font son procès (sans autre forme de), après avoir demandé à voir une nouvelle fois, sur la tablette d'une des parents d'élèves ("je savais qu'ils allaient la supprimer, alors je l'ai téléchargée pour qu'on puisse la re-voir") la fameuse sextape incriminée...
Autant la première partie bougeait beaucoup et parlait assez peu, autant celle-ci prend le contrepoint, en usant d'un dispositif très théâtralisé. Ca parle beaucoup, beaucoup, mais chacun-e reste assis-e. Question dialogues et turpitudes, le réalisateur n'hésite pas à charger encore un peu plus la mule, et dégomme tous azimuths... Le sexe, le racisme, les roms, l'holocauste, l'inceste, et bam! et bam! et bam!
Il va de soi que, pour le spectateur moyen, cette histoire de sextape, c'est quand même du pipi de chat, par rapport aux saloperies  proférées par tous ces parents d'élèves qui tombent sur le rable de cette pauvre prof, et qui sont, au moins tout aussi "dégueulasses" que celle sur laquelle ils s'acharnent...
On n'en est donc que plus réjoui lorsque explose enfin la "troisième fin", proposée par le réalisateur à sa "farce" (ainsi que lui-même la décrit) et qu'on peut décrire comme salutaire...

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