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lieux communs (et autres fadaises)
17 janvier 2022

dans son carnet

009
TROMPERIE
d'Arnaud Desplechin

Vu cet après-midi sans Catherine ("Elle est pas là ta copine brune... " m'a fait remarquer le caissier-propriétaire du bôô cinéma) mais avec Emma. Philip Roth est un personnage (et un écrivain, surtout) qui m'intéresse (et ce depuis que j'ai découvert, je ne sais plus par quel hasard La Tache) même si son univers est (tout de même) bien trop exclusivement hétéronormé pour que j'y trouve tout à fait mon compte...
Tromperie est un de ces films "théoriques" que j'affectionne : un jeu cérébral, une re-création, autour d'un écrivain (Philip Roth pour ne pas pas le nommer, d'ailleurs jamais il ne le sera in extenso) en train d'écrire un livre, qu'on verra d'ailleurs publié à la fin, sous le titre de Deception (qui est, merci go*glemuche, le titre original de Tromperie, que Desplechin adapte ici.) dans lequel il évoque des conversations avec des femmes.
Denis Podalydès incarne, avec autant d'élégance que de véhémence, un Philip Roth tout à fait plausible (envisageable aurait écrit  Lagarce) et tout aussi bluffant dans le registre de la caresse (verbale) que dans celui du coup de patte. Autour de lui, la distribution féminine est un rêve : Léa Seydoux (décidément en très grande forme cinématographique) est impériale en maîtresse joueuse et joyeuse (mais triste aussi parfois), Emmanuelle Devos reste la reine qu'elle était dans Rois et reine, justement, du même Desplechin, Anouck Grinberg (qu'on a grand grand plaisir à retrouver à l'écran) joue la partition (un peu plus "ingrate") de l'épouse trompée avec la plus grande finesse, et Rebecca Marder (déjà vue dans Seize printemps de Suzanne Lindon, et qu'on reverra très vite dans Une jeune fille qui va bien de Sandrine Kiberlain) et Madalina Constantin (je ne connaissais pas cette demoiselle) complètent avec bonheur cette constellation de figures féminines et parlantes (c'est le principe -j'avais commencé à écrire plaisir, lapsus quand tu nous tiens- du livre de Roth.)
Il est question d'un livre en train de s'écrire, avec des vrais personnages dont l'écrivain retranscrit les propos dans son carnet (en affirmant au besoin à sa femme qu'il s'agit de personnages imaginaires, surtout la femme qu'il présente comme sa maîtresse) et, comme me le faisait remarquer Emma à la sortie, c'est peut-être une forme de réponse de Arnaud D. à Marianne D., qui avait publié Mauvais génie,  un bouquin pour expliquer combien elle avait mal vécu que Desplechin utilise des morceaux de sa vraie vie à elle pour les mettre dans son film, et combien elle trouvait donc que c'était un sale bonhomme pour ça (et d'autres choses encore, c'était vraiment un livre à charge...).
Le film aussi se présente comme un work in progress, où rien n'est jamais complètement définitif, et c'est comme s'il nous faisait régulièrement des clins d'oeil, à propos de sa forme mouvante et changeante, de ces chapitres en trompe-l'oeil, des tripatouillages divers (il me semble avoir lu un article où le critique évoquait le plaisir visible que chacun.e avait pris à son façonnage.
Et, indéniablement, (et juste retour des choses) le film suscite, à son visionnage, une pure jubilation. La mise en scène est élégante et joueuse, les dialogues brillants, le bousculage des conventions filmiques revigorant, bref tout est à l'image de ces incontestables reines : étincelant.
Ce Desplechin-là me convainc (me séduit) beaucoup plus que celui de Roubaix, une lumère ou des Fantômes d'Ismaël.

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