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lieux communs (et autres fadaises)
10 février 2022

pourquoi elle pleure à Venise

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THE SOUVENIR (Part I)
de Joanna Hogg

(Comment débuter un post) Opalescent. Coalescent. Convalescent. Cette plaisante assonnance m'est venue hier soir, juste avant de m'endormir, à propos du film. Et ça colle pas mal. (coalescent : "Qui qualifie la réunion ou la fusion de deux éléments qui se trouvaient normalement séparés. Deux éléments initialement dispersés qui ne forment plus qu'un après leur contact et qui grandiront ensemble par la suite."). Et les trois qualificatifs s'appliquent nickel à ce film (la lumière / le mélange / la maladie). Il s'agit, par une réalisatrice british inconnue dans ce bataillon-ci puisque ses précédents films n'ont pas connu la joie d'être diffusés ici (et tiens, au fait, qui c'est qui décide de ça, d'abord ?) il s'agit, donc, du premier volet d'un diptyque (pour lequel -tssss...- le programmateur, benêt, n'a même pas été fichu de planifier une séance double où pour voir les deux films en suivant... fermons la parenthèse), où, in England, dans les années 80,une jeune fille, alors en école de cinéma et en train de tourner un film (une histoire, tiens, de famille...) va devoir soudain se focaliser davantage sur sa vie propre, après avoir rencontré un drôle de coco dont elle est tombée follement amoureuse, et qui(on découvrira progressivement pourquoi...) va singulièrement lui compliquer la vie en question...
En plus, comme j'ai légèrement piquouillé du nez au départ, je n'ai cessé ensuite de me poser des questions (sur ce qui était effectivement non-dit, ou ce qui avait été dit et que j'aurais loupé d'un clignement d'yeux) et de découvrir des choses, en essayant de recoller les morceaux (en, comme on dit, me raccrochant aux branches, car la forme narrative empruntée par la réalisatrice n'est pas la plus simple ni la plus facile) et en me posant régulièrement des questions, dont certaines sont d'ailleurs, la plupart du temps, restées sans réponse: du genre "Mais pourquoi pleure-t-elle à Venise ?", et d'autres qui se sont résolues d'elles-même (implicitement) par la suite (le cambriolage, par exemple)...
Le film est complexe, aussi intense que dense, deux heures pleines à ras bord d'un matériau composite (la vie de la jeune fille, le film qu'elle tourne, les répétitions, les scènes avec le zigoto en question (il est question de "relation toxique"), les rêves, les souvenirs, les détails...) le film tient de la mosaïque (ou de la marquetterie), c'est tout un art d'assembler tous ces fragments, de les ordonner, de les organiser, et le tout est très british (et, tiens, on voit Tilda Swinton qui joue une maman so british elle-aussi, une maman à cheveux gris... (pas "une" maman, en fait, mais "la" maman de la jeune réalisatrice dans le film, qui s'avère être -bonjour les mises en abyme- la vraie fille de Tilda Swinton dans la vraie vie...) et que (je suis allé fouiner sur allocinoche) on retrouvera aussi dans le part 2.

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025
THE SOUVENIR (Part II)
de Joanna Hogg

Pas mal de monde dans la salle 3 du Victor Hugo ppour cette dernière séance de 15h50 (il ne passera plus la semaine prochaine). Je craignais surtout de m'endormir malencontreuesement, puisque je n'aurais ensuite aucune chance hélas de récupérer ce que j'aurais manqué, (mais, heureusement, je n'ai pas fermé l'oeil une seconde).
On reprend donc les choses exactement où on les avait laissées à la fin du I (le chagrin), on retrouve notre héroïne si atone si diaphane so british (Honor Swinton Byrne), qu'on ne va plus quitter, et suivre au fil des saisons (le film donne des détails naturels saisonniers : framboises, cynorhodons, roses trémières, pour donner des dates sans les donner et montrer comme ça file le passage du temps) qui dans le jardin de sa maman (Tilda Swinton toujours aussi bien) qui dans son école de cinéma, où elle semble avoir impulsé un nouvel élan (et un virage) à son work in progress, puisqu'elle veut faire de son film de fin d'études le récit sa propre histoire, de sa relation avec Anthony, qui en son temps (cf The Souvenir I) l'avait éloignée de l"école, et empêchée, justement de faire avancer son film.
Elle se (re)met au travail, et on a donc droit à une des choses que j'adore au cinéma : le film dans le film. Joanna Hogg nous fait sa Nuit Américaine, et même, dans sa toute fin, sa Montagne sacrée (puisqu'on n'a pas seulement un "film dans le film", mais bien un "film dans le film dans le film", et tout ça devient alors délicieusement vertigineux, comme si la réalisatrice voulait soudain nous suggérer -clic clic- que c'était peut-être son film de fin d'études à elle, en tout cas l'occasion de nous raconter, peut-être, une part de sa propre histoire à elle aussi, même si -soyons zens- "tout n'est qu'illusion" et rideau -"Coupez!" plutôt-). 
Aux mauvaises langues qui persiflaient et qualifiaient d'un "zéro de tension" (voire "catatonique") la première partie, je rétorquerais que celle-ci fut bien plus tonique (et elles en ont d'ailleurs convenu), parce que beaucoup plus dans la fiction que dans l'affliction. Et ça change tout (enfin, pas mal). Souvenirs souvenirs (et cinéma cinéma) : ce film-ci est aussi dense que son prédécesseur, mais bien plus plein de vie aussi, et sait parfaitement faire feu (cinématographique) de tout bois (biographique). Maman (Swinton) fait de la poterie étrusque -qui va casser-, et fifille (Swinton Byrne) fait du cinéma rafistolé qui s'auto-régénère...
Comme dans le I (il faut voir les deux films, et dans l'ordre), chaque plan est autonome, et s'agence (se construit) autour de sa propre énergie (et/ou de celle de ces acteurs, puisqu'il a beaucoup été question d'improvisation...) et de sa propre durée (et donc de sa propre force). On continue de passer du coq à l'âne avec la même intensité et la même ferveur (encore plus, peut-être dans ce second volet, avec l'effervescence so british et flashy des jeunes réalisateurs/trices autour de Julie...) et on n'a qu'à se laisser porter, en se posant cette fois beaucoup moins de questions que la fois précédente.
Un dyptique touchant.

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