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lieux communs (et autres fadaises)
27 mars 2022

double séance écosse/algérie

053
L'OMBRE D'UN MENSONGE
de Bouli Lanners

(sur le coup) Je dois reconnaître que j'ai pas mal trépigné (intérieurement) au début du film. Bouli L., les gens qui viennent par ici le savent, est vraiment quelqu'un que j'adore (comme acteur mais aussi bien sûr comme réalisateur : Ultranova (2004), Eldorado (2008), Les géants (2011), Les premiers, les derniers (2016) m'ont successivement tous enthousiasmé) et donc j'ai voulu y aller voir dès la première séance (avec, tout de même je l'avoue aussi une légère appréhension, au vu du titre (Nobody has to know), du genre -"drame, romance" annonce allocinoche-, du lieu -une île écossaise tiens donc-, du pitch (quand il est question d'amnésie dans un résumé, c'est comme quand il est question de jumeaux, je crians toujours qu'il n'y ait de grosses ficelles dans le scénar), de l'affiche aussi, bref un peu de tout...).
On retrouve dès les premières images le goût de Bouli pour le scope et les grands espaces (qu'il filme toujours aussi classieusement). On le retrouve tel qu'on le connaît et qu'on l'aime (la barbe, les cheveux, les tatouages la stature) on l'entend parler un anglais tout à fait vraisemblable, on découvre les autres personnages qui vivent sur la même Ile Lewis (c'est par Dominique que je l'ai su), et, là, je commence à piaffer. Et à me tortiller sur mon siège. Les paysages sont magnifiques mais l'histoire qui s'y déroule me semble toute riquiquite. J'ai trouvé ça beau mais mou mou mou... Comme si elle n'était pas vraiment à la hauteur des lieux. Quand les lumières de la salle se rallument, je ronchonne, alors qu'Emma et dominique ont ma foi l'air plutôt contentes.

(après coup) C'est sans doute ça qu'on appelle laisser décanter. J'étais en train de relire des critiques sur ce film pour notre prochaine programmation (spoiler), d'une part elles sont toutes grave élogieuses, et d'autre part je réalise que j'ai réagi comme un idiot, à chaud, simplement parce que le film ne m'avait pas embarqué exactement là où je pensais qu'il allait le faire. J'étais désarçonné, alors j'ai renâclé. Peut-être aussi parce que pour la première fois (dans un film de Bouli Lanners, une femme est entête d'affiche, et fait irruption -brillamment- dans ce que je considérais jusqu'alors comme des films d'hommes (et comme si du coup je m'en trouvais un peu dépossédé) et j'ai eu tort. C'est un film qui infuse lentement, et c'est seulement au bout d'un certain temps que j'en perçois toutes les saveurs. Et l'intérêt. Et donc je sais que je retournerai le voir, à partir du 20 avril (oui je sais, c'est loin...) dans le bôô cinéma.

054
DE NOS FRÈRES BLESSÉS
d'Hélier Cisterne

Avec Emma on a continué (juste cinq minutes entre les deux films histoire de prendre un peu l'air) et on est passé de l'Ecosse romantique de Bouli Lanners à l'Algérie historique d'Hélier Cisterne (jeune réalisateur qu'on avait reçu en 2013 dans le bôô cinéma pour son beau Vandal, en avant-première). Je ne savais rien du film, la bande-annonce m'en avait appris un peu plus (Vincent Lacoste, Vicky Krieps, Guerre d'Algérie, exécution), mais j'ignorais qu'il s'agissait d'une histoire vraie, celle de Fernand Iveton, "guillotiné pour l'exemple" le 11 février 1959

"Exécuté pour l'exemple, Fernand Iveton était accusé d'avoir tenté, selon l'expression du ministre résident en Algérie, le socialiste Robert Lacoste, d'avoir voulu "faire sauter Alger". Or, s'il a, certes, déposé une bombe dans les vestiaires de l'usine de gaz d'Alger, elle ne devait exploser qu'une fois les employés partis. Selon Jacqueline Guerroudj, qui lui a remis la bombe, Iveton avait exigé qu'elle ne fasse aucune victime civile. Il voulait des "explosions témoignages" pour faire avancer la cause de l'indépendance sans faire de victimes civiles. De ce fait, la bombe, de faible puissance, avait été réglée pour exploser le 14 novembre 1956 à 19 h 30. À cette heure, il n'y avait plus personne sur les lieux de travail, rapporte l'enquête. D'ailleurs, les artificiers l'avaient désamorcé vers 18 heures.
Arrêté sur dénonciation, le 14 novembre 1956, Iveton est présenté devant le tribunal permanent des forces armées d'Alger dix jours après, le 24 novembre, rasé, sans moustache, le visage marqué par les coups. Le procès se déroule dans une atmosphère de haine. La presse coloniale titre "Iveton le dynamiteur". Quand il fait son entrée dans le tribunal, des insultes fusent à son endroit, le public exige sa mort et ses avocats sont menacés. Le procès est expéditif : il est condamné à mort le jour même pour terrorisme. En vérité, son sort avait été réglé en France. Sur proposition du garde des Sceaux, François Mitterrand, le gouvernement socialiste de Guy Mollet avait décidé que l'examen des recours des militants du FLN serait accéléré et que ceux dont la grâce était refusée par le chef de l'État seraient exécutés au plus vite. Le 10 février 1957, son recours en grâce est rejeté par le président René Coty." (L'Humanité)

Le film d'Hélier Cisterne suit Fernand (Vincent Lacoste, impressionnant -un prochain César ?-) et sa femme Hélène (Vicky Krieps, tout aussi excellente) depuis leur rencontre jusqu'à l'éxécution de Fernand, après un simulacre de procès (où tous les gens de la Cour sont en kaki et disent "Rompez!" au lieu de bonjour). Un film fort,investi, documenté, inattaquable. Il est juste un peu dommage que le réalisateur (avec sa coscénariste Katell Quillévéré) ait (aie ?) décidé de complexifier -inutilement- le récit en emberlificotant la narration (on passe sans arrêt d'une époque à l'autre, sans aucun repère temporel).

"En 1956, en pleine guerre d’Algérie, un ouvrier français communiste, Fernand Iveton, est condamné à mort pour terrorisme. Il sera le seul Européen guillotiné (mais 221 Algériens seront ainsi exécutés). L’histoire, inspirée par le livre (2016) de Joseph Andras, est d’une puissance explosive : la machine coloniale, la pression politique, la mise en place de lois d’exception, et la décision du ministre de la Justice (François Mitterrand), tout contribue à une issue tragique. Le film, passionnant, est porté par une conviction d’airain, un acteur formidable (Vincent Lacoste) et un désir total de s’élever contre l’indignité de l’Etat. On sort de là brûlé par la mort d’Iveton et la honte d’une justice asservie." (nouvelobs.com)

(Ils ont dit très bien tout le bien que j'en pense...)

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