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lieux communs (et autres fadaises)
27 juillet 2022

double programme "on enchaîne"

(soudain, une avalanche de bons films, à cause du plaisir d'aller au cinéma et de profiter de la clim', mais donc en multipliant le nombre de posts à rédiger... courage, donc!)

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AS BESTAS
de Rodrigo Sorogoyen

Sorogoyen, réalisateur de QUE DIOS NOS PERDONE (2016), de EL REINO (2018), de MADRE (2020), tous programmés dans le bôô cinéma, et tous fort appréciés, qui sait allier d'incontestables qualités de style cinématographique à la force d'histoires plus ou moins inquiétantes (plutôt plus que moins, d'ailleurs...). Ici, c'est dit, redit, acté signifié, on va flipper sa race et se crisper sur les accoudoirs  sans répit ni rémission (et à ce propos, si certain(e) journaliste de Téléramuche pouvait s'abstenir de raconter (d'éventer) quasiment tout le film en une phrase sibylline, ça serait encore mieux pour garder intact le plaisir du spectateur, hein!).
Les hasards de la programmation font qu'on retrouve ensemble nos chéri(e)s du moment : Marina Foïs (qu'on vient de voir dans EN ROUE LIBRE de Didier Barcelo, et qu'on reverra tout aussi prochainement dans L'ANNÉE DU REQUIN, des frérots Boukherma) et Denis Ménochet (qu'on vient de voir dans PETER VON KANT, de François Ozon), et c'est, semble-t-il, la première fois que ces deux-là jouent ensemble. Un beau couple.
Un couple de français qui ont tout laissé pour partir cultiver des tomates bio dans un trou du cul du monde español va se retrouver plongé (et le spectateur avec eux) sans ménagement dans une réalité  de lendemains qui chantent beaucoup moins que tout ce qu'ils avaient pu espérer, en dépit de tout la bonne volonté qu'ils manifestent et de tous les efforts qu'ils fournissent, en butte à l'hostilité absolue de leurs voisins proches : deux frères vivant avec leur mère, qui sont nés là et qui y mourront aussi d'ailleurs... Et n'acceptent pas les "étrangers".
Le film s'ouvre sur une scène magnifique, à couper le souffle -je pèse mes mots- (dont on se dit, on connait son Tchekhov sur le bout du doigt, qu'elle réapparaîtra tôt ou tard dans le film, et, bingo, on avait raison...), et enchaîne, en flux constant, sur la détérioration des rapports de voisinage entre les "primo-arrivants" et les autochtones...  En progression constante, chaque scène en rajoutant une louchette plus ou moins conséquente. Et la tension éprouvée par le spectateur va aller elle-aussi croissant, comme avant un orage l'air devient de plus en plus lourd et la lumière de plus en plus électrique... L'angoisse vous a saisi et elle ne vous lâchera plus, impitoyablement, avec, heureusement, ça et là, quelques scènes plus joyeuses (ou légères), où l'on profite de quelques minutes de calme (de bonheur) pour reprendre son souffle. Car l'orage éclatera, c'est inévitable, avec toutes les conséquences qu'on pouvait craindre pour la suite du film...
Un film formidablement impressionnant (mais on savait déjà que le réalisateur était plutôt doué pour ce genre d'ambiance stressante et délétère) dont on ne sort pas indemne (par solidarité avec ses personnages), asphyxiant pourrait-on dire, tant la pression maintenue par le réalisateur nous laisse impuissant(e)(s).

2625015

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LE PRINCE
de Lisa Bierwirth

Changement d'ambiance radical, nous voici à Francfort, où Monika, une jeune femme curatrice dans une galerie (ou un musée) très contemporain et très chic, (dont elle se prépare d'ailleurs à postuler pour la direction, prochaînement laissée vacante) va faire la connaissance de Joseph (un peu brutalement d'ailleurs, derrière les poubelles d'un club lors d'un contrôle de police), qui trimballe avec lui des diamants qui'ils a excavés sur son terrain, au Congo, et semble vivre grâce à des magouilles plus ou moins légales. Deux univers, deux personnages, qui n'ont a priori rien de commun, elle est blanche, il est noir, elle semble jouir d'une certaine indépendance financière tandis que lui galère, et avec lui ses potes (dont Ambara, son meilleur ami)...
Monika et Joseph se rapprochent, de plus en plus, télescopage d'univers, leurs ami(e)s respectifs/ves réagissant chacun(e) à leur façon, défiance pour les unes, encouragement pour les autres, et les choses vont encore se compliquer après un passage de Joseph en prison,  qui va en sortie grâce à Monica (c'est elle qui a payé, et elle le lui dira) alors que c'est Ambara qui se présente comme le sauveur providentiel. Il est question d'amour, de mariage, de papiers, d'argent, beaucoup question d'argent, qu'on prête, qu'on rembourse, et le rapprochement germano-congolais tangue de plus en plus...
Deux univers parfaitement disjoints dont l'unique point de tangence est la relation entre deux personnages, et les efforts faits (ou pas) par chacun(e) pour mieux connaître (se faire connaître de) l'autre. Les deux personnages (et les deux acteurs qui leurs qui les incarnent)  sont fascinants. Bref, l'amour, l'amour, l'amour... (Mouloudji), entre "Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour" (Pierre Reverdy) et "Aimer c’est donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”  (Jacques Lacan)
Un beau film en tout cas. Qui a peut-être souffert, malgré lui, en dépit de toutes ses qualités, qui donc a souffert d'être vu immédiatement après (à peine une minute de transition) AS BESTAS...

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