pierre, paul ou jacques
LA REINE DES POMMES
de Valérie Donzelli
Failli rater la séance pour cause de sieste prolongée, mais, rétrospectivement, c'eut été dommage...
Un titre comme une chanson de Lio (chanson que j'adore, d'ailleurs, et qui accompagne le générique de fin), et, visuellement, qui (au générique de début) rappelle (clic clic!) le très beau clip de Michel Gondry pour Jean-François Coen (la Tour de Pise)
Un "film de dame", se dit-on, au départ, avec son charme et sa fraîcheur comme atouts ; pas beaucoup de moyens, pas très bien éclairé, mais on ne sait pas pourquoi, dès le début justement, on adhère, on pardonne tout et vogue le navire, on continue avec la demoiselle en question (Adèle, qu'elle s'appelle) qui vient de se faire plaquer par Mathieu et qui se retrouve malheureuse comme tout. On feuillette avec elle son catalogue de la déroute.
Hébergée par une cousine au début un peu revêche (et à l'oeil en méduse) sur les conseils de qui elle va rencontrer successivement trois hommes (l'étudiant, le bourgeois le loubard) qui vont la faire avancer dans sa guérison. sans oublier une femme blonde qui interviendra deux fois dans le film, et qui est jouée par la sublimissime Laure Marsac (qui réalisa il n'y a pas si longtemps un "Quatrième morceau de la femme coupée en trois" d'aimable mémoire, et dont ce film-ci ne serait d'ailleurs pas un parent si éloigné...)
Adèle est donc malheureuse (mais les scènes d'ouverture nous l'ont présentée comme un peu destinée à ça, dans la famille pas de bol persiste et signe. Comme dit la chanson-titre "celle-là elle leur court derrière, les catastrophes elle en a fait une carrière...", et donc oui, elle les collectionne... mais dans la bonne humeur cinématographique (on serait ici quelque part du côté de Sophie Fillières (par exemple), mais pas si loin de chez Rohmer, à Demy chez Mouret, voyez un peu le genre... On se pose des questions, on fait des rencontres, on épilogue sur la conduite à tenir, on hésite, on suppute, on chante même, et on convoque même une voix off qui survole tout ça de ses petits apartés.
Une mise en scène sans tape-à-l'oeil (!) mais sans ascétisme non plus, et un ton très personnel donc qui font qu'on sourit à peu près continuellement au récit des malheurs de cette (finalement pas si) nunuche (que ça) dont les péripéties ressemblent quand même drôlement à la vraie vie, mis juste irisée, acidulée par le filtre d'un humour pince-sans-rire qui fait vraiment mouche. La vraie vie, justement, qui fait valoir ses droits : j'adore ces scènes en extérieur où à chaque fois intervient un élément d'"imprévu" (une main à une fenêtre ouverte, une bagnole qui s'arrête dans le champ, un pigeon qui vient passer par là) qui vient comme pour rappeler que tout ça est presque vrai.
Ajoutez le fait que la réalisatrice a eu l'excellente idée de faire jouer l'ensemble des mecs (Pierre Paul et Jacques, donc) par le même acteur (Jérémie Elkaim) et que certains cinéastes appréciés (Dominik Moll, Serge Bozon) y font juste une apparition complice.
Oui, décidément : charmant.