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lieux communs (et autres fadaises)
28 septembre 2007

marchand de glaces

LES MEDUSES
de Shira Geffen et Etgar Keret

(à chaud). J'étais curieux. Je connaissais Etgar Keret dont j'avais apprécié les nouvelles ("Crise d'asthme"), et j'ai en général un faible  pour la "Caméra d'or" (qui est pour moi au cinéma ce que le prix Médicis est à la littérature). Oui, j'y allais donc curieux, et de plus alléché par une bande-annonce sybilline.
J'aime beaucoup la première scène, qui nous plante  en peu de temps mais avec force le personnage de Baya. C'est presque trop gros, presque trop beau : elle est trop malheureuse, elle est trop triste, le film va prendre l'eau se dit-on. L'eau qui sera, d'ailleurs, partie prenante de chacun des segments du film (une petite fille rousse et muette sortie des vagues, plop! comme ça, une lune de miel ratée dans un hôtel où on veut voir la mer, et une maman philippine expatriée qui veut acheter un bateau pour son fils), segments au départ nettement distincts, sur les traces simultanées de plusieurs personnages féminins de divers âges et conditions, mais au bout du compte peut-être pas tant que ça (finalement).
Car ça devient intéressant à partir du  moment où le film arrête de se la raconter, où il prend un peu la tangente. Ne suit plus le droit fil des histoires. Chacun des récits sème des cailloux blancs de petit poucet qui vont parfois rouler jusqu'au récit voisin. (Bon, je sais, c'est le propre du film choral que de faire se rencontrer ses partenaires par des artifices scénaristiques plus ou moins grossiers). Le réalisme initial se gauchit subtilement, à l'image des petites choses incongrues qui soudain (se) passent, en arrière-plan. Et le film prend corps à partir du moment où il s'effrite, devient poreux, un peu se désagrège (se réagrège ?). Tout est dans les détails.
Trois (quatre ? cinq ? six ?) portraits de femmes légèrement à la dérive. (La semaine dernière les pieuvres, cette semaine les méduses. Tsss, encore que des filles ? Non non, il y a quand même un jeune marié plutôt agréable et mal rasé qui passe le film en marcel blanc). La partie courons après cette bouée est plutôt douce mais assez tristounette, celle de changeons de chambre chérie plutôt statique mais assez grinçante, et celle de ô mon bateau plutôt effleurée mais assez sans surprise. Et cette nostalgie balnéaire en super 8 (ah, le marchand de glaces...) m'a, je dois dire, plutôt ému.
L'une trouve une copine, l'autre démarre assez mal son mariage, la troisième rompt avec sa mère. La quatrième repart chez elle...
Et, sur la plage, le marchand de glaces est toujours là.

Alors d'où vient le fait que je sois sorti de là un peu flottant ?  Cette grand-mère comme dans Depuis qu'Otar est parti, cette fête de mariage comme dans Mariage Tardif, ce portrait en creux de Tel Aviv comme dans The bubble ? C'est vrai que j'ai beaucoup pensé à d'autres films, par association ou par ricochet. Sans que les références soient forcément en défaveur des Méduses,d'ailleurs. La méduse est un animal plutôt inerte en apparence mais à la mobilité singulière, fascinant, translucide, inoffensif au premier abord, un peu inquiétant malgré tout. De tout ça le film est un peu. J'en aurais voulu plus... Plus d'urticant, plus de dérive. Plus de temps, aussi, simplement peut-être.

(un peu plus tard) Reste surtout, c'est vrai, le visage de touchant de cette petite fille silencieuse aux cheveux roux et mouillés, aux yeux immenses et au sourire énigmatique, et cette bouée rouge et blanche qui soudain traverse l'écran, comme le lapin blanc d'Alice...

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