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lieux communs (et autres fadaises)
10 juin 2010

maïeutique

POLICIER, ADJECTIF
de Corneliu Porumboiu

Ce post (il faudra un jour que j'écrive un post sur le choix des titres des posts ciné) a d'abord failli s'appeler "TENNIS-FOOT", parce que ce sport viril -on joue à quatre comme en double au tennis, sauf que là ça se joue au pied et avec un ballon de foot- ne pouvait être que furieusement roumain, puis "QUE SERAIT LE DENTIFRICE SANS BROSSE A DENTS ? ", à cause d'une chanson -furieusement roumaine elle aussi- dans le film longuement évoquée et disséquée, et finalement le dernier choisi avait l'avantage d'étre précis (bien que, feignassement, j'aie omis d'en vérifier le sens exact dans le dico), court à taper, et évoquait -furieusement ? non non, très calmement-  la dernière (et étonnante ?) partie du film.
Je suis devant les films des roumains comme je suis devant les joues des iraniens : admiratif (et peut-être vaguement jaloux). Policier, adjectif (qui s'est longtemps appelé Police, adjectif, ce qui était une absurdité grammaticale) ne fait pas exception à la règle. Il est -roumainement parlant- aux enquêtes policières ce que La mort de Dante Lazarescu était aux soins hospitaliers... Un genre d'état des lieux, a priori lucidement objectif (et donc plutôt désespéré), mais dont l'apparent hyper-réalisme,  devenu pur objet esthétique par la distance imperceptiblement ironique qu'induit le regard du cinéaste, ne serait finalement qu'un élément de fascination (de sidération ?) intense  pour le spectateur.
J'avais laissé Porumboiu sur la clarinette sautillante et espiègle du générique de fin de 12h08 à l'est de Bucarest. Ici, on abandonne les aigus et on démarre dans le grave. Filatures. Un jeune policier suit un ado qui fume des pétards -et risque pour ce 7 ans de prison (ça rigole pas en Roumanie)- et en conçoit des états d'âme. Sa hiérarchie s'en agace.
Un film hivernal. un film atone, éteint, comme engourdi. Un policier méthodique, méticuleux (procédurier ?), à l'image du film. On passe de longs moments avec lui, qui fait les cent pas dans le froid aux basques de l'ado, et on les revit ensuite, précisément, sur le papier, par le rapport sur les filatures que le fliquet a consciencieusement (et à la main! ) rédigé.
Quotidien du boulot (grisâtre), quotidien du bureau (flippant), quotidien des soirées en famille (pas joyeux joyeux...) , rien qui justifie on le voit le tapage de cuisses. C'est un film où l'on attend beaucoup. Et pourtant on suit sans rechigner cette enquête banale et banalisée (ce pourrait être le L627 de la police roumaine...) Minimalisme et ironie glacée. Une enquête dérisoire, d'autant plus que l'attention qu'on lui accorde est inversement proportionnelle aux dimensions de la chose, qu'on en vient à faire un Himalaya d'une modeste et ridicule taupinière. Dura lex sed lex. Question de principe(s).
On avance à pas lent, on est attentif, parfois fatigué, comme le flic dans le film, on ressasse, on piétine, on se sent comme si on surveillait un trou. Jusqu'à une dernière partie dont le dispositif évoque celui du débat télévisé de 12h08 à l'est de Bucarest ), dans le bureau du chef-chef, qui se met à jouer sur les mots. Contrairement au tennis-foot, ça se joue à trois (dont un qui ne fait pas grand-chose), avec un dictionnaire mais sans filet,  et voilà qu'on bascule dans une quatrième dimension grammaticalo-philosophique, mais toujours très pince-sans-rire. Le supérieur, le subalterne, et le témoin.
Et j'avoue que là, juste après, me fait défaut -personnellement- une petite scène, pour faire le joint (!) avec la toute-dernière. On passe, toujours à mon (humble) sens, trop rapidement et facilement des mots aux actes. C'est comme s'il manquait un élément,  un hiatus, une fracture (celle de la prise de conscience justement) dans l'enchaînement.
Mais peut-être que non finalement.
Indécision, nom féminin etc.

19438861

(et j'aime bien l'affiche, que je trouve aussi ironique que le film)

Ce film, qui sortait ce mercredi à Besac, ne se voit offrir qu'une unique projection quotidienne à 18h lors de cette unique semaine... Oui, comme ça, donnons leur chance aux films roumains, en leur offrant un maximum de visibilité !

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