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lieux communs (et autres fadaises)
29 décembre 2014

groumph

MR TURNER
de Mike Leigh

Un Mike Leigh en costumes, très long (2h30), avec une bande-annonce alléchante (bon, plus forcément à la 74ème fois) et un Prix d'interprétation masculine à Cannes, autant de raison(s) pour qu'on se retrouve avec Emma à la séance de 15h25 au Victor Hugo.
Ce qui est très malheureux c'est que dès le début du générique, j'ai senti que je n'allais pas rester éveillé très longtemps, et j'ai donc papillonné pendant un certain nombre de scènes (et, c'est drôle, il y a un moment, clic! où on est réveillé, où l'on a son quota de somnolence, et à partir de là on voit le film sans problème jusqu'au bout.)
Donc Turner est un peintre anglais avec plein de prénoms, un peintre anglais que je connaissais pour ses toiles lumineuses à la limite de l'abstraction, mais rien de plus (je n'aurais même pas été capable de dire à quel siècle il vivait), il est incarné ici par Timothy Spall, un acteur souvent vu dans les films anglais, une trogne pourrait-on dire, jusqu'auboutistement bougon et ronchon, et grand spécialiste du grognement  (il passe une grande partie du film à ne répondre que par monosyllabes oursines (on a même l'impression parfois que le réalisateur a collé de véritables cris d'animaux) aux questions qu'on lui pose, et, quand il ne grogne pas, il gueule. Un personnage haut en couleurs (normal pour un peintre) mal dans sa peau (il se définit comme "une gargouille"), peut-être mal dans son époque, mais phénoménalement bien dans sa peinture.
Les biopics a priori ne m'intéressent pas plus que ça (surtout quand il s'agit d'une reproduction plutôt qu'une interprétation), les reconstitutions historiques encore moins (le souci du détail pfff quelle barbe) mais là, allez savoir pourquoi, je me suis laissé aller (à partir du moment où j'ai été réveillé, bien évidemment). Le film raconte la dernière période de la vie de Turner, sans doute pas la plus joyeuse (maladie et mort du père, rapports compliqués avec les gens, quasi-"disgrâce" picturale et moqueries, sa propre maladie, avec une seule chose qui vient littéralement enluminer tout ça : l'idylle avec une logeuse du bord de mer,  occasion de quelques scènes parmi les plus touchantes du film)
Mais, ce qui est (et reste) sidérant, c'est d'essayer de comprendre comment quelqu'un d'aussi terrien (pour ne pas dire bourrin) peut produire des choses aussi éthérées, aussi aériennes, aussi magnifiquement immatérielles. Le film a l'intelligence de suivre la même dualité, de la prolonger, en nous mettant le nez dans la trivialité  (la plus réaliste ) de l'époque accouplée avec un travail  louangeable sur la lumière (et il ne paraissait pas facile a priori de réussir à se mesurer équitablement avec le sujet -la lumière dans les tableaux de Turner-) et Mike Leigh a je pense superbement réussi son portrait, d'un homme et d'une époque, d'un homme dans son époque, aidé magnifiquement par le jeu de Timothy Spall.
Il y  a une scène absolument magnifique, où l'on voit Turner en train de peindre, un genre de combat, où il prend la toile à bras-le-corps, se mesure avec la matière, étend avec les doigts, crache même sur le tableau, à laquelle succède une matière grise et tourmentée, accidentée, accidentelle, dont on se dit d'abord qu'il s'agit de celle de la peinture réalisée au plan précédent, mais la caméra recule soudain, et nous sommes au milieu d'un paysage de montagne, avec Turner en train de marcher. Juste des rochers. L'interaction entre peinture et cinéma est véritablement bluffante, de même que la scène de la "déclaration" amoureuse de Turner à sa logeuse, assise devant la fenêtre, que turner complimente pour son "profil de déesse" et c'est la première fois dans le film ou quasiment qu'onl'entend articuler une phrase complète, posément, amoureusement. ca aussi, c'est magnifique.

(oh la la c'est bien de faire le ménage de temps en temps sur ce blog -cf hier le post sur A girl at my door- voilà que je retrouve cet autre po(s)t de confiture entamé, et, qu'après si longtemps, je ne sais plus trop comment le poursuivre, et que je vais donc, comme hier, le publier en l'état)

Mr. Turner (2014) Poster

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