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lieux communs (et autres fadaises)
8 septembre 2019

poularde en croûte de sel

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FÊTE DE FAMILLE
de Cédric Khan

Cédric Khan, , en tant qu'acteur, je l'aime beaucoup, à chaque fois (L'économie du couple, Alyah, Tirez la langue mademoiselle). Plus irrégulièrement en tant que réalisateur. Et voilà que j'avais adoré son dernier La prière, alors je me demandais à propos de celui-là. Deux de suite ?
Oui oui, deux de suite.
J'ai beaucoup aimé ça (même si pas tout à fait de la même façon que pour La prière.)
Le film appartient à un genre que j'affectionne particulièrement , le FDFAT ("film de famille à table", parce que j'aime les histoires de famille -merci papa merci maman!- et que j'aime beaucoup aussi les histoires de bouffe, un genre qu'on peut qualifier d'ultra-codifié (une table, de préférence à l'extérieur, des gens autour, avec le contrepoint des apartés des mêmes en cuisine, ou dans le jardin, et, bien sûr, des histoires de famille, les secrets, les magouilles, les entourloupes, les récriminations, les révélations...oui ça j'adore... et encore mieux (idéalement) avec un casting de têtes connues (dans le même genre j'ai pensé au Skylab de Julie Delpy, multi-starisé aussi) : ici, Deneuve, Bercot, Macaigne (ah Vincentchounet-chounet, ici avec sa bonne grosse barbe comme je le préfère) et Kahn (des deux côtés de la caméra, tiens d'ailleurs comme l'ont déjà été deux de ses trois camarades ci-nommés).
La matriarche Andréa (c'est plaisant de voir comme la reine Deneuve est restée simple, on la voit abaisser de la pâte au rouleau, ranger des draps, essuyer des verres..., comme une vraie maman de la vraie vie) a réuni toute sa famille autour d'elle pour fêter son anniversaire, ça s'affaire dans tous les coins (l'effet Cuisines et dépendances, qui permet de découvrir les personnages, les lieux (une baraque de rêve), et ce qui se trame (un peu). On prépare le repas, on installe la table dehors, on met un rideau en guise de nappe... Et voilà qu'il pleut et qu'il faut tout rentrer (l'effet Sautet) et qu'on apprend (ça c'est l'effet Rude journée pour la Reine...) via un coup de téléphone l'arrivée d'une invitée supplémentaire (et non prévue), la fille d'Andréa, absente depuis plusieurs années, et qui réapparaît, en même temps qu'un passé familial un peu complexe et houleux. Comme souvent dans les histoires de famille(s), il sera question de gros sous, et (puis) de sentiments aussi (tiens comme dans Frankie, vu il n'y a pas longtemps, où la reine Huppert a réuni sa famille mais au Portugal mais sans formule repas) mais les gros sous ça revient souvent, et c'est même ça qui fait la "force" des personnages (dans le film, c'est frérot Kahn qui est riche)...
Au début le personnage de la mère est le centre du monde de l'histoire, mais celui de la fille va venir perturber ce système solaire bien organisé, et bien dézinguer l'apparent équilibre des choses. Et secouer le trône maternel. (Emmanuelle Bercot impressionnante dans un rôle pas facile).
Comme l'ont écrit certains critiques (méchants), le contexte n'a rien d'original a priori, mais j'aime beaucoup ce qu'en fait Cédric Kahn, avec sa propre petite musique à lui. Au début du film, le spectateur, avec ses gros sabots, pense qu'il va pouvoir les troquer (ses gros sabots) contre des pantoufles tellement on est en terrain connu (et qu'on adore ça, je le redis), mais, progressivement le réalisateur tire la nappe en biais, un peu, beaucoup, puis franchement de guingois, avant de -carrément- tout envoyer valser. Et d'en faire quelque chose de beaucoup plus grinçant. Qu'on n'avait pas franchement vu venir.
Ce qui ajoute encore un charme supplémentaire au film ce sont les différentes formes de  représentations qu'on y trouve (là, j'ai pensé à La petite Lili, de Claude Miller, qui opérait un peu de la même façon, et donc, aussi, par ricochet, à ce très cher Anton -Tchekhov, bien sûr-) : Vincent Macaigne, le fils bohème, est en train d'y tourner un film (dont on n'apprendra que très progressivement le pourquoi et dont on ne verra que quelques images, à la fin), les enfants quant à eux, préparent une pièce de théâtre sur l'histoire de la famille -qui sera regardée avec attendrissement par toute la (même) famille réunie-, on y chante -seule, Mon Amie la rose, à deux voix et à deux fois en voiture L'amour l'amour l'amour de Mouloudji- et on y danse aussi (une délicieuse chorégraphie familiale qui m'a fait penser à l'iconique Marcia Baila dans les toilettes, avec, tiens, la même Reine Deneuve, dans Belle-Maman, encore une histoire de famille...) bref, le spectacle sous toutes ses formes. J'adore voir dans un film les acteurs chanter.
Petits tracas du quotidien, bisbilles, chamailleries, puis problèmes personnels un peu plus conséquents, le tableau familial initial idyllique se lézarde progressivement.
Jusqu'à une scène de climax inévitable mais très impressionnante (je me suis même un peu caché les yeux).
La prière était plus rigoureux, plus ascétique. Celui-ci est plus terrien, "trivial", plus bordélique (plus "grand public"? et c'est tout le bien que je lui souhaite, justement de réussir à le trouver, le grand public...) Un film de combat.

0271822

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