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lieux communs (et autres fadaises)
26 juillet 2015

rois et reines

TALE OF TALES
de Matteo Garrone

Le film avait été ébouillanté, écorché vif et jeté aux oubliettes à Cannes, (à la place du réalisateur j'en aurais pleuré, et je me serais sans doute jeté dans les oubliettes à sa suite) puis la bande-annonce qui a fini par nous en parvenir en était à la fois alléchante (l'univers des contes) et vaguement répugnante, donc je me suis laissé tenter, puisque nous le programmions dans le bôô cinéma. On y était assez peu (j'y ai d'ailleurs retrouvé inopinément mon ami Régis). La bande-annonce ne mentait pas : attraction, pour cette série de contes et de moyen-âgeuseries, et répulsion pour un certain nombre des choses filmées. Je suis sorti, j'avais un peu la gerbe (mais je suis une petite chose fragile, vous le savez bien, un chochotton qui ne supporte ni les bestioles dégueulasses ni la tripaille...),  comme je l'ai dit à Régis (qui, lui, m'a dit s'être senti beaucoup plus à l'aise après celui-ci qu'en sortant de La isla minima.)
Trois histoires, grosso modo : celle de la reine qui veut absolument un fils (Salma Hayek), celle du roi qui veut absolument trouver une reine (Vincent Cassel), et celle du petit roi qui ne souhaite pas vraiment marier sa fille (Toby Jones), simplement juxtaposées (comme dans un tian, on alterne les tranches de légumes en veillant à l'harmonie des couleurs). Les décors et les costumes sont hyper-chiadés, et pourtant, pourtant...
Une (petite) déception quasi-immédiate : mon roi préféré (John C.Reilly, le mari de la méchante reine Salma Première) disparaît au bout de dix minutes de film. Quel dommage. Et pourtant il composait un roi de conte magnifique, idéal, une illustration parfaite. mais, à trop titiller les monstres sous-marins, on finit par y laisser la vie...
Garrone met autant de soin dans la représentation de ces contes italiens qu'il en avait apporté à soigner la crédibilité (le réalisme) des mafieux de Gomorra. La même énergie, la même intensité, la même violence, et c'est un grand bonheur de voir un tel réalisme au service d'une telle irréalité. Monstres de conte et créatures de légende, donc (la reine ombrageuse, la puce géante, l'ogre, la vieille qui devient jeune, les jumeaux albinos) parsèment ces histoires que sous-tendent néanmoins les universels ressorts de notre humaine nature (l'amour, sous toutes ses formes, la jalousie, la colère, le désir) qui le firent de tout temps.
Le filme dure 2h14, tout comme Victoria, et, tout comme Victoria, il aurait peut-être gagné à être un peu condensé.
Une autre déception, c'est qu'on n'y entend hélas pas du tout parler italien (c'est pourtant un réalisateur rital qui adapte des fameux contes ritaux (c'est le pluriel), et la langue du cru aurait été plus adéquate, plus logique) et donc tout le monde donc y parle anglais comme dans la première hollywooderie venue, et c'est dommage.
Une troisième déception concerne le montage du film (j'en ai déjà parlé) et la façon dont ces trois contes sont simplement saucissonnés et leurs rondelles intercalées. On a in extremis (dans le dernier plan!) une espèce de pseudo-réunification assez lourdaude, et, finalement, le découpage en trois chapitres, en respectant l'intégrité (et l'internité) de chacune des histoires aurait peut-être allégé la sauce (et rendu l'ensemble plus digeste).
A part ça, l'intention est tout de même assez louable, d'avoir voulu ainsi désaseptiser la nunucherie clinquante et habituelle des adaptations de contes au cinéma. Les acteurs incarnent valeureusement leurs personnages (En plus de John C.Reilly, un coup de chapeau -à plumes- pour notre Vincent Cassel national qui tire brillamment son épingle (à chapeau à plume, bien sûr) du jeu.)  J'ai eu plaisir à reconnaître Alba Rohrwacher en souillon italienne et il m'a semblé que l'ogre ne m'était pas inconnu... (faut que je le gougle...)
Et je dois reconnaître que si, effectivement, quelques scènes sont répugnantes -mais ça prouve que ces histoires ne sont pas à l'eau de rose, hein ?-, d'autres, beaucoup d'autres, sont plastiquement superbes (superbement plastiques ?), ne serait-ce que, par exemple, les scènes sous-marines (avec John C.Reilly, je sais, je me répète ça n'est pas de ma faute). Je ne connaissais pas les contes originaux (ou le conte des contes original) mais ça ne déparerait pas du tout avec ce qu'ont pondu dans le genre nos frères Perrault (et que j'ai tellement aimé lire lorsque j'étais gamin.)
Un essai courageux donc, qui ne méritait pas ces hurlements à la mort unanimes et Cannois (ah la surchauffe de le réactivité critique immédiate à Cannes...) mais qui, à cause de son formatage "mondialisation americana", ne rentrera pas non plus dans mon top10 de l'année.
C'est bien mais ce n'est pas extraordinaire (mais, par rapport à, par exemple, la dernière adaptation de contes au cinéma que j'ai vue -celle des Taviani- c'est bien mieux, c'est sûr...).

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