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lieux communs (et autres fadaises)
3 novembre 2005

family life ?

A HISTORY OF VIOLENCE
de David Cronenberg

Au début du film, (petit matin ensoleillé) on voit Très Méchant 1 et Très Méchant 2 à l'oeuvre à la réception d'un motel, et ça fait beaucoup de sang.
Juste après, ailleurs, (suite à une très habile transition), voilà Très Gentil Papa, Très Gentille Maman , et leurs deux Très Gentils Enfants, qui prennent leur Très Gentil Petit Déj. Ca paraît un peu schématique, mais on se dit, connaissant David Cronenberg, qu'on ne va pas en rester là. En effet, Très Méchant 1 et Très Méchant 2 arrivent en ville, et veulent faire encore les méchants (avec du sang). Malheureusement pour eux, Très Gentil Papa est là, et pan pan il réussit à buter les affreux. Fin du premier acte. Journaux télévisés, Gentil Papa applaudi en héros, mais il a juste envie de retourner à la tranquillité de sa Très Gentille Famille. Arrivent alors en ville Très Méchant(s) 4, 5 et 6. (4 est super très méchant, c'est visiblement leur chef), ils arrivent chez Très Gentil Papa, qu'ils confondent visiblement avec quelqu'un d'autre...
J'arrêterai là le résumé, de peur de vous dissuader d'aller voir  A HISTORY OF VIOLENCE. Et aussi, surtout, pour vous laisser le plaisr de découvrir la suite tout seuls comme des grands. Ne pas vendre la mèche, car il s'avère que ce film est une véritable poudrière. Une bombe à retardement (pour rester dans les métaphores viriles et pyrotechniques)
A priori différent des films précédents de Cronenberg (pas de mutations, pas d'altération organique, pas de fantastique ni de science-fiction, juste de la violence, dont la représentation plutôt hyper-réaliste (complaisante ?) met le spectateur lambda en plutôt déséquilibre. Certains ont parlé de "film commercial" , d'autres de "film de commande"... Peu importe. De la pointe de son scalpel cinématographique, Cronenberg farfouille là où ça fait mal, gratouille la plaie de la bonne conscience américaine (à travers les représentations les plus stéréotypées de ses valeurs les plus conservatrices et -donc- rassurantes) dans une escalade inéluctable, et somme toute, logique. Implacable. (Moralité : mettez un doigt dans l'engrenage et vous verrez bien jusqu'où ça (ne) va (pas) s'arrêter.)
Très fort, l'ami Cronenberg, qui nous scotche jusqu'à la dernière minute, lors d'une scène finale sublime et muette, anthologique (c'est la nuit), et encore plus pour avoir eu l'idée de confier le rôle principal à Viggo Mortensen (qui d'autre que lui aurait pu jouer ce personnage, aussi entièrement ?) sans oublier de confier à des monuments (entendez "classiques et rassurants") tels que Ed Harris ou William Hurt des contre-emplois plutôt grinçants...
Ce film (roublard ?) est une mine (dans tous les sens du terme!). Même s'il est -en apparence- moins dérangeant et moins touffu que Spider (auquel il est pourtant susceptible de faire penser), il sait , par sa linéarité même, jusqu'au bout jouer avec les nerfs du spectateur, qu'il place en position de voyeur, le sommant en quelque sorte de chosir son camp, de prendre position...

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29 octobre 2005

atypique

BATALLA EN EL CIELO
de Carlos Reygadas

(le titre, c'est juste un clin d'oeil pour mon ami Pépin, pour lui donner envie de lire la suite...mais bon c'est quand même très justifié!)
Comme promis cette nuit, un petit post sur Batalla en el cielo, de Carlos Reygadas.
Second film de ce réalisateur mexicain, qui avait déjà fait beaucoup parler de lui il ya trois ans à Cannes avec son premier long-métrage, Japón, et qui a remis ça cette année en -c'est un euphémisme pudique- "ne faisant pas l'unanimité" auprès des critiques (même chez les Inrocks, ils se bouffent le nez, l'un titre "déchirant" et l'autre "grotesque"...Pourtant,par le passé, ils n'ont pas eu peur d'apprécier pire, les Inrocks... mais passons) Bon, c'est vrai que, dès qu'on a dans un film la représentation non simulée d'un rapport oral -et Magritte là dirait "ceci est bien une pipe"- (La marche triomphale, de Bellochio, Brown bunny de Vincent Gallo...) tout le monde en fait des gorges chaudes. Là bien sûr, ça n'a pas loupé, et même doublement (ou plutôt quadruplement) puisque non seulement cette pipouille figure au début et à la fin du film une fois sans sourire et une fois avec) mais en plus elle est prodiguée par une délicieuse donzelle à un gros mexicain apathique et beaucoup plus agé (un "gros dégueulasse" ont écrit certains critiques, mais je ne partage pas leur avis...) , en plus c'est la fille de son patron...

Marcos est le prénom du dédicataire de la susdite gâterie , et c'est lui acccessoirement, le héros (si l'on peut dire, puisqu'on pourra l'admirer sous toutes les coutures et sans aucun voile) du film. Le synopsis, quand on le reconstitue, tient en peu de lignes (rassurez-vous, je ne vous le raconterai pas!) et -finalement- peu de personnages (on en reviendrait presque au classique triangle amoureux) Au début du film, on peut être désorienté par une suite de scènes en apparence sans rapport, mettant chaque fois le spectateur en déséquilibre par le rapport inhabituel des images et de la bande-son, cette dernière venant souvent comme déranger ce qui est montré (sonnerie de portable sur défilé militaire, tictac d'horloge sur conversation entre mari et femme, Bach à fond les manettes sur station-service, etc...) Mais il est relativement plus facile de remettre les morceaux dans l'ordre que ne pourrait le laisser supposer la perplexité initiale (du spectateur) devant ces lambeaux de fiction, ces grumeaux de chronologie, ces personnages dont on ne comprend pas forcément les rapports, ces plans-séquences aussi amples qu'étonnants ...
Le plus important, il me semble, est que Batalla en el cielo est avant tout un film profondément mexicain, et revendiqué ainsi par son auteur. Ce mélange iconoclaste entre la religion, la sexualité, la violence, la misère, la laideur. Un enlèvement, un crime, trois scènes d'amour (oui oui c'est bien le mot...) non simulées, un pèlerinage... Eros et Thanatos, le trivial et le sublime, pas très neuf tout ça me direz-vous ? Ben si, justement! De ce chant funèbre,  Reygadas fait une partition baroque et époustouflante, dérangeante parfois, fascinante la plupart du temps (aussi polyphonique que polymorphe ?) Sur un atlas des cinéastes, je le situerais quelque part entre Luis Bunuel et Harmony Korine (c'est vous dire le grand écart!). Avec un zeste d'Arturo Ripstein, et peut-être un je-ne-sais quoi de David Lynch... Il en a les audaces formelles, l'audace de la représentation crue des fantasmes et des obsessions, et (surtout) la capacité de transformer un mélodrame (osons le mot) en objet hybride, tour à tour flamboyant, nauséeux, lyrique, cynique, obscène, par un réel talent de cinéaste...
J'avais en sortant le sentiment d'avoir vécu une des expériences cinématographiques les plus étranges de ma vie. Comme lorsque, adolescent, j'ai découvert La montagne sacrée, d'Alejandro Jodorowski (que j'aimerais bien revoir d'ailleurs!)...
Fascinant aurais-je pu titrer...
Je terminerai juste en précisant
1) que je retournerai voir le film quand on le passera dans notre bôôô cinéma (il me semble que la salle où je l'ai vu avait un problème de projecteur, ce qui rendait la copie très sombre)
2) que l'affiche, même si je la trouve très jolie, est un peu malhonnête, car elle ne traite que la moitié du problème. (Vous vous en rendrez compte en allant voir le film, ce que je vous conseille vivement, mais je peux vous assurer d'avance que je connais certaines dents qui vont grincer...)

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28 octobre 2005

prévisionnement

Aussi rituellemnt que la foire aux livres revient chaque année la journée de prévisionnement  des ouacances de la Toussaint  à F.
Quatre films en avant-première, quatre oeuvres fortes

LE TEMPS QUI RESTE (de François Ozon) sortie le 30.11.05
(les derniers jours d'un jeune photographe qui apprend qu'il est atteint du cancer)
Un Ozon que certains dans l'assistance qualifièreent de "glacé" d'autres d'"abstrait", moi je l'ai trouve "fort" et j'ai été bouleversé par ce personnage, par l'atmosphère du film, pat l'ensemble des acteurs... et la mer à la fin!

POUR UN SEUL DE MES DEUX YEUX (d'Avi Mograbi) sortie le 30.11.05
(documentaire d'un réalisateur israélien prend parti pour les palestiniens)
Pas évident au départ, le film est aussi complexe que la situation que les gens vivent là-bas. Trois "histoires" imbriquées, un réalisateur qui se met en scène et n'hésite pas à s'impliquer physiquement... De la rage, de l'impuissance, et la mer à la fin!!

LE PETIT LIEUTENANT (de Xavier Beauvois) sortie le 16.11.05
(les premiers mois de travail d'un jeune flic)
Une chronique"profil bas", sans effets pyrotechniques, qui nous dévide le quotidien d'un groupe de flics de la PJ dont un "bleu" et sa supérieure un peu cabossée par la vie... Un film beaucoup plus sobre que certains de ses protagonistes, en tout cas le plus réussi de son réalisateur... et la mer à la fin!!!

KOKTEBEL (de Boris Khlebnikov, et Alexei Popogrebski) sortie le 09.11.05
(un père et son fils traversent la russie à pied pour aller en Crimée)
Un road-movie russe, qui sait prendre son temps, des paysages superbes, des rencontres qui le sont parfois, une balade bucolique souvent, alcoolique de temps en temps, la survie avec les moyens du bord, deux réalisateurs décidément poètes... et la mer à la fin!!!!

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26 octobre 2005

woody et les dardenne

L'ENFANT
de Luc et Jean-Pierre Dardenne
MATCH POINT
de Woody Allen

Quelques lignes pour parler de deux films que je viens de voir, MATCH POINT de Woody Allen , cet après-midi, et L'ENFANT , des Dardenne Brothers hier soir (film qui m'avait suffisamment collé le bourdon pour que j'écrive en rentrant un tout petit blog-gribouillis que je n'ai pas posté finalement, qui disait, du genre "Il y a des jours où on s'aime et des jours où on s'aime pas : ce soir je ne m'aime pas." Ce qui était lapidaire et relativement exact, mais pas uniquement dû à la vision de ce film, but passons...)

Deux films en apparence aux antipodes l'un de l'autre mais finalement pas tant que ça quand on y fait un peu attention, deux films en tout cas qui m'ont autant titillé et fait gamberger l'un que l'autre...
J'essaierai de ne déflorer l'intrigue ni de l'un ni de l'autre (contrairement à ce qu'ont super bien réussi à faire des critiques idiots en ce qui me concerne : il y a au moins une chose à ne pas savoir pour chacun des films,sinon ça gâche un peu le plaisir, eh bien, bingo, je les savais toutes les deux en rentrant dans les salles... Ca m'énerve!!!!)
Généralités d'abord : Autant L'ENFANT peut se reconnaître immédiatement comme un film avec l'étiquette  Dardenne collée dessus (belgique / misère / saloperie humaine /  jérémie rénier / olivier gourmet / etc...) , autant pour MATCH POINT, si ce n'était le générique-noir-et-blanc-avec-la-même-typo-depuis-vingt-cinq-ans (quoique... l'observateur scrupuleux et maniaque que je suis aura déjà remarqué qu'en lieu et place des standards jazzy habituels, on n'a droit là qu'à de l'opéra crachotant soixande-dix-huit-touresque... tiens tiens), eh bien on pourrait être en droit de ne pas reconnaître du tout la patte de notre vieux maître new-yorkais (que j'avais personnellement trouvé de plus en plus fatigué et cacochyme rabâchant lors de ses derniers opi (un opus / des opi ?), et je ne cèderai pas à la facilité d'écrire que c'étaient même pas des opi lents (non non, pas de quoi rire, mais je ne sais plus du tout où j'en suis de ma phrase et de mes parenthèses...) à tel point que j'en ai même loupé quelques-uns parmi les derniers je l'avoue oui oui fouettez-moi, eh bien là, donc, chapeau ! Table rase quasiment  de ce qui faisait son pain quotidien cinématographique, on n'est plus du tout ni dans l'humour yiddish, encore moins dans l'introspection post-bergmanienne, on est... rigoureusement ailleurs. Autres lieux, autres acteurs, autre problématique... la blondeur de Scarlett Johanssen serait-elle pour quelque chose dans ce nouveau départ ?
La même blondeur,  celle de Déborah François, (une non-professionnelle époustouflante) semble éclairer de l'intérieur le film des Dardenne, lui donner un peu d'air, avec cette grâce quasiment enfantine, oui, comme une petite loupiote dans cet univers gris de portes fermées et d'eau glacée...

Dans les deux films il sera question d'enfant, (en avoir ou pas) dans les deux films il sera question d'argent,(comment faire pour en gagner plus), dans les deux films il sera question de culpabilité (et des différentes façons d'y faire face), et de rédemption (ou pas), dans les deux films il sera fait le portrait d'un sacré beau salaud (alors qu'il me semble que, sur les deux, l'un ne l'est -en apparence- que par légèreté, par accident, par la force des choses, alors que l'autre l'est authentiquement, sciemment, d'un bout à l'autre, avec une rigueur maniaque qui fait froid dans le dos...)
Le monde de la jetset londonienne de MATCH POINT (blinis au caviar, opéra tous les soirs, appart de 25000 mètres carrés -merci papa-, limousine avec chauffeur et j'en passe) nous est quasiment aussi extérieur que celui de L'ENFANT (combines miteuses, foyers d'accueil, junk food,vol à la tire, piaules sordides) .
On est pratiquement aux deux extrémités de l'échelle sociale. Grand écart. Là, en tant qu'observateur je me sens moyen (et d'une certaine façon plutôt bien content de l'être!) , et, dans un cas comme dans l'autre, déplacé parmi ces gens, leurs soucis spécifiques de castes , leurs codes et leurs signes de reconnaissance.

Et dans chacun des cas, le(s) réalisateur(s) nous trace le portrait d'un homme (Jérémie Rénier /Jonathan Rhys-Meyers, également bons) qui se débat pour s'en sortir (ou pour progresser), avec, pour chacun, des moyens que la légalité ou la moralité pourraient -dans les deux cas- parfois légitimement réprouver.
C'est vraiment ça le point commun entre les deux films : ces deux personnages masculins qui pourraient n'en faire qu'un, oui qu'on pourrait quasiment permuter, interchanger, faire passer d'un film à l'autre (peut-être d'ailleurs Jérémie Rénier ne serait pas mécontent de batifoler avec la petite Scarlett, et idem pour Jonathan, mais bon là je crois que je m'égare). Dans le genre prêt à tout (pour survivre/pour réussir même combat...) combinard, magouilleur ... à la seule différence qu'au bout du compte, l'un est sincère et l'autre pas.
Un dernier mot sur le filmage, sans surprise je le disais (et ce n'est pas du tout une critique!), mais de haut niveau, dans un cas comme dans l'autre ( pas de musique, plans-séquences, caméra à l'épaule, prédilection pour le dos des gens,décors grisâtres et fout-le-bourdon pour les uns, tandis que lumières, décor, musique nickels, montage raffiné, découpage léché pour l'autre) Pour résumer ? A ma droite, un film noir de noir comme un expresso stretto, à ma gauche, il semblerait qu'à la noirceur initiale du breuvage on ait rajouté in extremis un peu de sucre (voire un nuage de lait soyons fou) pour en atténuer l'amertume.
Alors, jeu, set et match pour qui ?
Comme au tout début de Match Point, je fige l'image, et j'arrêterai la balle en suspens au-dessus du filet. A vous de trancher.
Tombera, tombera pas ?

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12 octobre 2005

la griffe du passé

CACHE
De Michael Haneke

Il doit y avoir une justice... Après avoir tergiversé longuement devant le cinéma, je m'étais enfin décidé pour aller voir The Descent qui, selon la rumeur et les critiques ferait effroyablement peur, j'arrive donc à la caisse, j'exprime mon choix, et je m'entends répondre que The descent ne passera qu'à 15h50 (il est 13h50). Je me replie donc sur mon deuxième choix, le film de Michael Haneke. Moins gore sans doute que le susdit (quoique... on a quand même droit à une décapitation à la hache et un suicide au rasoir, non non je ne plaisante pas!)  Caché ne ménage cependant pas les nerfs du spectateur...
C'est probablement le meilleur film de Michael Haneke, peut-être parce que le plus "simple", en tout cas le moins dérangeant. Ici pas de meurtre au pistolet à cochons (Benny's video), pas de joyeux suicide en famille (le 7ème continent), pas de civilisation post-apocalyptique (L'heure du loup), pas d'extermination familiale en gants blancs (Funny Games)... Sur un point de départ qui rappelle étrangement Lost Highway, de David Lynch (un couple reçoit des cassettes vidéo où leur appartement a été filmé, Haneke tricote une histoire au moins aussi sombre , mais radicalement "autre".
Caché  nous expose un moment de la vie de ce couple (Binoche et Auteuil, nickel tous les deux) et de leur fils, à travers les réactions en chaîne et les bouleversements que cette cassette va produire, entre mari et femme, entre parents et enfants, avec la soudaine remontée à la surface d'un passé lointain, qu'on croyait définitivement enfoui... Dire ou ne pas dire ? Se rappeler ou pas ? Il est ici question de culpabilité, et de la façon dont chacun doit gérer la sienne. A la fin, les questions qui ? et pourquoi ? n'auront pas forcément reçu de réponses (qui dit la vérité ? qui ment ?), en tout cas pas forcément celles qu'on attendait..
L'ensemble des comédiens mérite des éloges: autour des susdits, Maurice Bénichou fait forte impression dans un rôle aussi  placide en apparence que meurtri à l'intérieur, et quel bonheur de voir (ou revoir) des acteurs plutôt "rares" (et qui donc nous sont chers) comme Annie Girardot, Daniel Duval, et surtout l'exquisissime Nathalie Richard...

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5 octobre 2005

grimm et châtiment ?

LES FRERES GRIMM
de Terry Gilliam

Quelques mots à postériori sur le film vu mardi : Les frères Grimm, de Terry Gilliam, dont je ne savais pas trop quoi penser en sortant. Lu interview du réalisateur où il confie -ce dont j'avais eu le sentiment- que c'est une commande. Sa filmo, en ce qui me concerne, est un peu en montagnes russes : Plus de pics (Fisher king, Brazil, Bandits bandits, Les aventures du Baron de Munchausen) que de gouffres (Las Vegas Parano, L'armée des douze singes) mais là j'étais perplexe.
C'est donc l'histoire imaginaire des deux frères envisagés à la fois comme écrivains mais aussi héros (et victimes) de contes.
Après une introduction plutôt calamiteuse (aussi éprouvante pour les yeux que pour les oreilles, genre "exorcisme au moulin en 3D avé le dolby a donf que ça me saoule"), Gilliam baisse un peu le son, calme le jeu, et déroule le fil d'une narration plus posée, (que je ne vais certainement pas pour dévider ici), dans un jeu de va-et vient moins balourd qu'il n'y paraît entre apparence et réalité, subterfuges et sortilèges, émerveillement et horreur... Il ya du catalogue dans ce film : catalogue de peurs et de phobies diverses (bestioles rampantes, vertige, asphyxie, perte de visage, arbres sournois, lapin écorché...) mais aussi catalogue d'illustrations et de références aux contes dits "de notre enfance" (des vrais chromos, soignés, respecteux,admirables, comme qui dirait du Gustave Doré en couleur...) Le petit chaperon rouge, Hansel et Gretel, Blanche-Neige et consorts, interviennent comme autant de clins d'oeil complices au fil de cette histoire dont la richesse pourrait bien devenir un handicap, à cause de personnages exaspérants (Cavaldi, Le "petit lieutenant" français) ou de situations redondantes... Bref c'est un conte sur les contes avec des vrais morceaux de conte dedans. Bien sûr, souvent, on est soufflé par la force visionnaire, le délire imaginatif qui font l'intérêt de Gilliam ; comme à Guignol, on sursaute, on se cache les yeux, on rit de bon coeur, mais bon , il faudrait être ermite à la diète depuis quelques lustres pour être capable d'apprécier jusqu'à la dernière miette de ce dessert bavaro-américano-français (genre forêt noire fourrée à la quiche et au triple cheese-cake, et Monica Belluci en cerise sur le gâteau n'apporte rien de gastronomiquement remarquable, idem Matt Damon dans le rôle de la tranche de bacon ? mais je m'égare...)
A  la sortie de la salle, oui, on s'interroge, et on ne peut s'empêcher de se sentir un peu barbouillé, au bout du conte...

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16 septembre 2005

virilité(s)

BROKEN FLOWERS
DOUCHES FROIDES
VOICI VENU LE TEMPS

D'abord une petite précision sur la dénomination de cette catégorie : la première abréviation est bien évidemment celle de "pluriculturel" (quoique...) l'ambiguité sur les trois dernières lettres n'étant pas pour me déplaire, qui  souligne en quelque sorte l'imbroglio entre l'intellect et l'affect, entre le désincarné et le ... disons charnel, méli-mélo qui permettrait en partie d'expliquer (un peu) pourquoi on est sensible à tel film, tel roman, tel acteur, bref pour quelle(s) plus ou moins avouable(s) raison(s) on aime ça...

Juste pour évoquer 3 films que je viens de voir (ou de revoir) dans notre bôôô cinéma, et qui m'ont fait autant résonner (raisonner ?) que la plus grosse cloche de Notre Dame actionnée par un Quasimodo en folie : DOUCHES FROIDES, d'Antony Cordier, BROKEN FLOWERS, de Jim Jarmusch, et VOICI VENU LE TEMPS d'Alain Guiraudie.
Trois univers, trois réalisateurs, trois façons de faire...

Antony Cordier (j'ai vu sa photo dans Libé, il est tout mimi tout comme j'aime, mais ce n'est pas forcément que pour ça que j'ai autant apprécié son premier long!) tourne autour d'un trio d'ados (le prolo, le bourge et la nymphette) à la justesse sidérante dans un filmage précis, aigu, ("sharp") et constamment sensuel. Jim Jarmusch, quant à lui, suit à la trace Bill Murray tristounet-comme-on-aime, dans un film élégant et attachant, avec le recul nécessaire pour rester juste à bonne distance de l'émotion, avoir la force de sourire alors qu'on pourrait très bien avoir envie de pleurer, tandis qu'Alain Guiraudie, lui, nous bricole un ovni foutraque et bandant, tout à fait étonnant, en même temps complètement ailleurs mais tout à fait ici, où on joue à guerriers et brigands, accroché aux basques de Fogo Lompla, le vaillant héros aussi bien dans son corps qu'il est un peu confus dans sa tête...
(pourquoi me suis-je donc lancé sans cet exercice de critique comparée, ça me fait faire des phrases de quinze kilomètres...)
Trois approches d'une même notion. Virilité(s) donc, qu'elle soit décrite dans ses fondations (construction d'une identité), ou dans sa représentation mature, qu'elle soit "normale" ou "fantasmée". Chez Cordier il y a des corps adolescents, de la testostérone (ah ces scènes de douche), avec un poil de fierté exhib' (et parfaitement justifiée). Chez Jarmusch, deux portraits d'hommes mûrs, Bill Murray -peut-être désormais comme d'hab' un petit poil trop monolithique c'est vrai- et son voisin black, son exact contraire, rigolard, hâbleur,extraverti. Ils sont voisins et amis. (Je pense que "amitié virile dans les films de Jim Jarmusch" pourrait faire un beau sujet de mémoire). Amitié virile, donc, sans aucune arrière-pensée... Avec les femmes, dans ses films, il y a toujours un peu de souffrance quelque part, tandis qu'entre mecs, tout est clair, simple. Fort,direct (straight and strong). Pas d'embrouilles. Ni remords ni regrets. Juste l'amitié. Cette image-là me fait craquer. Je voudrais avoir un pote mâle comme dans les films de Jim...
Tandis que chez Guiraudie, cette virilité "normale", ordinaire, a la particularité d'être associée à un goût - naturel et complètement assumé dans cet univers-là semble-t-il (nous sommes en Obitanie) pour les personnes de son sexe (mâle), sans ostentation ni provocation, d'ailleurs (la seule quéquette visible  se manifestera lors d'une tentative -plutôt drôle d'ailleurs- d'échange manuel et hétérosexué). Le héros (Eric Bougnon) est certes plutôt... plaisant à regarder, et le réalisateur semble d'ailleurs du même avis que moi (ce qui ne gâche rien)...

Entre les trois pistes, je ne choisis pas. Elles me paraissent (ces approches de la virilité) toutes trois nécessaires et complémentaires.
Les corps, les esprits, les relations...

Et une, et deux, et trois images, et un petit jeu en prime (redonne à chaque photo le titre de son film)

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"Regarde autour de toi, tu verras que tu n'es pas tout seul" (réplique finale de Voici venu le temps)

9 septembre 2005

o superman

Hmmm ce soir , me voilà tout rêveur mélancolique alangui sourire béat chocolat sweet'n'sour doux oiseau de jeunesse et compagnie...
Je viens de recevoir via airmail and from the states une petite enveloppe matelassée contenant deux dvd (une compil d'apparitions télévisées 82/90 et un concert "Speed of darkness" de 98) de qui donc ? d'une personne qui compta beaucoup beaucoup pour moi, au temps de ma jeunesse folle (euh enfin, juste un peu après ? quoique... on est jeune à 30 ans , non ?) ; je veux parler de Laurie Anderson. (Si ce nom ne vous dit rien, je vous envie, il vous reste des merveilles à découvrir!)
Tout commence en ... 80 et quelques (?), quand je reçois une K7 audio d'un ami mulhousien un peu perdu de vue (en vrai, c'était mon premier amant!), je la mets en fond sonore plutôt agréable, et l'écoute un peu distraitement en (je m'en souviens parfaitement) faisant la vaisselle... Je ne me souviens plus des premières chansons, mais je sais que , juste après My sex (d'Ultravox) commença un machin bizarre, avec voix de synthèse répétant "ah ah ah ah", qui me fit illico lâcher mon torchon (ou mon éponge), pour aller écouter ça de plus près... C'était la première fois que j'entendais O Superman, et ça m'a aussitôt -comme on dit- scotché de chez scotché.
Dès que possible, j'ai acheté son premier album (un disque noir! un 33 tours! vous vous rappelez?), et ainsi commença une longue histoire de fascination respectueuse (peut-être un peu bavante, j'ai l'enthousiasme assez peu mesuré!), quasiment sans faillir pendant 20 ans! :

BIG SCIENCE (1982) *****
MISTER HEARTBREAK (1984) *****
UNITED STATES LIVE (4CD,1984) *****
HOME OF THE BRAVE (1986) ****
STRANGE ANGELS (1989) *****
BRIGHT RED (1994) *****
THE UGLY ONE WITH THE JEWELS AND OTHER STORIES (1995) Spoken works ***
TALK NORMAL (2CD, 2000) Greatest hits ****
LIFE ON A STRING (2001) ***
LIVE IN NEW-YORK (2002) ***

Car la dame trouve parfaitement sa place -et à plus d'un titre- dans cette catégorie "pluricul/multimed" : Violoniste de formation, performer, artiste multimédia, conteuse espiègle et ironique, chanteuse et musicienne, en plus de ses albums ci-dessus répertoriés, elle a réalisé un film (Home of the brave), plusieurs bouquins dont le monumental United States, et, à ma grande surprise, a même épousé... Lou Reed! Avec des chansons qui m'ont véritablement habité pendant très longtemps (jusqu'à maintenant!) :
O Superman , From the air, Walking and falling, Blue Lagoon, Smoke rings, Strange angels, Tightrope, Same time tomorrow, entre autres...
Voilà, dans les années 80 et quelques, je l'avais installée dans mon petit panthéon personnel, aux côtés de gens comme Duane Michals, Julio Cortazar, Georges Perec, Wim Wenders, Jim Jarmusch, Antoni Tapiès, Nicolas de Stael, Francis Ponge, ma dream team de l'époque, en quelque sorte...
O Supermen...

27 août 2005

deux films sinon rien

L'ETE OU J'AI GRANDI
THE JACKET

Ce soir, pour me récompenser (ça y est! je m'y suis mis! la cuisine étincelle comme dans la pub de Monsieur Prop', la grande pièce est nickel, pas un dvd un cd un bouquin ou un journal qui dépasse... et ça ne m'a pris que 2 heures à peine!) et pour conclure dignement une faste journée (que du beau ciel bleu pétant, pas une goutte de pluie, terminé "Fondu au noir" de Jean-jacques Reboux (très noir) , commandé pas cher le dvd d'Apichatpong Weerasethakul "Tropical malady" que j'avais beaucoup aimé en salle (pour 6€, pourquoi s'en priver?) rencontré un sympathique routier portugais, échangé sur yahoo avec un australien (pourquoi donc habitent-ils toujours aussi loin ? ), reçu (encore) un belle carte postale (une très belle photo panoramique) de Mongolie de mes amis les D., trouvé des figues fraîches (je ne sais pas pourquoi, en ce moment j'ai une grande passion pour ces fruits.. j'y reviendrai peut-être plus longuement ultérieurement (Me reste cette phrase de... je ne sais plus qui "me gustan las higas porque son como testiculos..." )...) donc, pour terminer, suis allé dans notre nouveau bôôôô cinéma, et me suis tapé deux films, carrément et d'affilée: L'été où j'ai grandi de Gabriele Salvatores et The jacket de John Maybury...
Un film italien en v.o (normal, de "notre" programmation des amis du Cinéma) et un film américain en v.f, tous deux en scope , ce qui a confirmé mon impression première que les écrans de nos nouvelles salle sont un peu surdimensionnés : il faut s'assoir dans la moitié supérieure de la salle, voire au(x) dernier(s) rang(s) pour pouvoir englober la totalité dudit écran d'un seul coup de champ visuel, sans avoir à se livrer à de fastidieux balayages oculaires horizontaux, avec la menace d'un torticolis  foudroyant ou d'une entorse des cervicales.
Deux films empreints d'une certaine violence , mais d'une certaine poésie aussi (bucolique dans un cas, entre les champs de blé de La nuit de San Lorenzo et les bestioles de la promenade nocturne de La Nuit du Chasseur ; technologique dans l'autre cas, du genre avalanche d'images qui font un peu mal aux yeux, générique graphique chiadé, boucles temporelles et tutti quanti... bon peut-on vraiment ranger tout ça dans la poésie ? On est un peu entre Dead Zone et L'échelle de Jacob, si ça peut vous situer l'objet, tout ça avec le dolby à fond les ballons de la mort... la stridulation des cigales et la violence des coups de feu, je vous raconte pas!
Quand je suis sorti de la salle, minuit et quart, il faisait... frisquet! (Ils annoncent juste 9° pour demain matin) j'ai fait fonctionner les essuie-glace pour chasser un imperceptible voile de (givre ? buée ? je devais me croire encore dans The jacket ), et j'ai dû alors  avoir quelques pensées noires et gémissantes (passé le quinze août / temps de toussaint / bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres / ...)  tout à fait inconscientes, mais qui m'ont permis de rentrer à la maison directos sans tenter d'escapade nocturne... Merci les pensées!

Pour terminer, une image volée cet après-midi :

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