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lieux communs (et autres fadaises)
5 février 2019

coup de foudre

022
BORDER
d'Ali Abbasi

En quinze jours deux réalisateurs iraniens nous auront offert deux films qui ne ressemblent pas à grand-chose de connu : Pig la semaine dernière, et Border cette semaine-ci. Border qui avait été vu à Cannes par Zabetta et Hervé, qui nous l'avaient recommandé tous les deux, mais restaient, au sujet du film, mystérieusement elliptiques, évasifs.
Hervé avait raison, c'est un film qu'il faut voir en en sachant le moins possible au préalable (dommage pour moi, qui ai dû lire au préalable un certain nombre de critiques pour choisir celle(s) qui figureraient dans notre prog papier, que, dans le lot, il y en ait eu au moins un(e) (je ne sais plus qui) qui a "vendu la mèche", d'un seul mot d'un seul (en général Téléramuche ou les Cahiaîs sont assez doués pour ça...) et je savais donc hélas plus ou moins le fin mot, justement, de l'histoire...).
L'héroïne s'appelle Tina, elle est douanière, et a un flair infaillible pour détecter les contrevenants... Un jour elle voit passer Vore, qui la déstabilise en mettant, en quelque sorte, son pouvoir en échec. C'est vrai que Tina n'est pas très jolie. C'est vrai que Vore ne l'est pas vraiment non plus. et comme dit le proverbe, qui se ressemble... Tina et Vore vont sympathiser doucement.
Voilà à peu près tout ce que je peux raconter.
C'est un film incroyable, bouleversant, tiré d'une nouvelle du monsieur qui avait aussi écrit Laisse-moi entrer, le bouquin dont a été tiré Morse, autre beau et singulier et touchant film suédois de Tomas Alfredson. Dans Morse il était question de vampires, mais pas du tout ici. On est en Suède, aujourd'hui, mais il s'agit d'autre chose.
Le récit est fait de telle façon qu'on est toujours plus ou moins en alerte, aux abois, aux aguets, et qu'on ira effectivement de surprise en surprise (je me suis caché les yeux plusieurs fois mais je suis un peu chochotte, juste quand il était question d'asticots -chose qui me répugne viscéralement-).
J'ai pensé à Corps et âme (de Ildiko Enyedi), j'ai pensé à The voices (de Marjane Satrapi), et à Elephant Man, et au Lobster de Lanthimos, (je pourrais continuer la liste...) pour l'inquiétante étrangeté qui nimbe le film, pour cette histoire d'amour d'exception que j'ai trouvée bouleversante. Entre douceur et violence. Entre caresses et grognements. Et aux différentes significations du mot border ("frontière") qui sert de titre (et de garde-fou, j'avais écrit garde-boue hihi ce qui n'était finalement pas si faux) au film.
Un film indéniablement fascinant, avec deux magnifiques performances d'actrices-teurs (Tina c'est Eva Melander et Vore Eero Milonoff, qu'on avait découvert -merci allocinoche- dans le finlandais et réjouissant Olli Mäki) et qui font vraiment tous les deux un boulot extraordinaire.
C'est ça l'amour...

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Vore et Tina

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4 février 2019

alors on danse genre

021
PREMIERES SOLITUDES
de Claire Simon

J'aime beaucoup les films de Claire Simon. On les a tous  ou presque programmés dans le bôô cinéma (et même déjà avant dans le vieux moche) et on a même, grâce à l'entregent de cette chère Zabetta, eu l'occasion déjà à plusieurs reprises de l'inviter à venir accompagner ses films (et même encore mieux, après, à partager un aligot, toujours chez cette chère Zabetta).
La dernière fois qu'on a pu parler (et que j'ai réussi à articuler quelques mots, je suis un incorrigible émotif) c'était après avoir vu Le bois dont les rêves sont faits, qui m'avait vraiment fait forte impression. Avec sa caméra, la réalisatrice arpentait les sentes et les chemins de traverse du Bois de Vincennes, à la fois dans l'espace et dans le temps, et nous en faisait découvrir les coins et recoins, les mystères, la poésie, la magie,mais aussi les habitants, les autochtones et les visiteurs, et tout ça avec attention et curiosité bienveillante(s).
Et voici cette fois qu'elle défriche un nouveau territoire, une terra incognita bien plus vaste et mystérieuse que ce bois de jubilatoire mémoire : l'adolescence. Mais, cette fois, sans presque se déplacer.
Il y a quelques années elle avait réalisé un film magnifique, Récréations, circonscrit dans l'espace de la cour d'une école maternelle, et ce film-ci pourrait presque en êtreen quelque sorte le prolongement, une dizaine d'années après. A l'école maternelle succède le Lycée Romain Rolland d'Ivry-sur-Seine, et (zoomons) plus spécialement la classe de Première, spécialité cinéma et (zoomons encore un peu plus) dix élèves de cette classe, partie prenante dans un projet initié par une de leurs professeures.*
Huit filles et deux garçons qui parlent entre eux (hormis une séquence d'ouverture à l'infirmerie, entre une des demoiselles et une infirmière scolaire), dans un atelier destiné à "mieux se connaître". Une parole libre, spontanée, des échanges avec une vraie qualité d'écoute que la réalisatrice filme de très près (les visages, certains détails vestimentaires) mais dans une proximité qui n'a rien d'intrusif (je pourrais reprendre exactement l'expression utilisée plus haut -attention et curiosité bienveillante(s)-). La parole de ces filles (en majorité) et de ces garçons (juste quelques) est importante.
Et de quoi parlent-ils ? De famille(s), d'abord. De familles bien souvent monoparentales, le plus souvent gérées par les mères (les pères sont souvent absents, -partis, congédiés, ou simplement pas là-) des familles où il n'est pas toujours facile de s'exprimer, de communiquer. J'étais étonné du nombre de familles dites "dysfonctionnelles" apparaissant dans les confidences de ces jeunes gens.
Le dispositif mis en place par Claire Simon permet des échanges en tout petits groupes, souvent à deux, à trois, rarement à plus. Dans le cadre d'un espace scolaire suffisamment vaste pour que ses différents espaces (ses coins et ses recoins) permettent de s'isoler un peu, de se mettre à l'écart. De s'épancher, de partager. Simplement.
On parle de familles, on parle d'amour, on parle d'avenir aussi (et de la peur, parfois, justement de cet avenir) comme le résume très bien le Alors on danse (de Stromae, que la réalisatrice utilisera judicieusement) pour tracer les grandes lignes d'un avenir a priori pas forcément très rose  :

"Qui dit études dit travail,
Qui dit taf te dit les thunes,
Qui dit argent dit dépenses,
Qui dit crédit dit créance,
(...)
Qui dit Amour dit les gosses,
Dit toujours et dit divorce."

Oui, alors on danse. J'aime bien l'idée d'avoir repris ce morceau qu'on peut croire très enjoué si on ne fait pas attention aux paroles. Ca ressemble à l'adolescence, oui. Ca ressemble à la vie.
On peut juste regretter (certains critiques l'ont fait) que tout ça finalement soit un peu lisse, que cette vision de l'adolescence reste un peu trop proprette (pas de sexe, pas de drogue, pas d'alcool), que le dispositif ne reste qu'un dispositif, mais bon je m'en fous. Telles que, toutes ces histoires constituent un bel objet de cinéma, et c'est surtout ça qui compte

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* (qui avait, dans un collège précédent, initié un autre projet cinéma avec une autre classe, une rencontre avec le cinéaste Olivier Babinet qui avait débouché sur le film Swagger)

3 février 2019

le tiers des étoiles

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6 PORTRAITS XL 3 : PHILIPPE BERNARD
d'Alain Cavalier

Le temps passe (trop) vite et finalement je ne pourrai en voir qu'un sur les trois présentés (mais c'est justement celui que j'avais le plus envie de voir). Des portraits XL (de 50' environ chacun), réalisés par ce cher Alain Cavalier (qui continue de tracer affablement son chemin singulier dans les marges du cinéma français), réunis deux par deux (il serait bien de savoir qui a fait le choix de ces appariements) dans trois films qui sont sortis chacun à une semaine d'intervalle.
Alain Cavalier filme Philippe (Labro) puis Bernard () et se dévoile un peu (et l'inverse aussi se vérifie : Alain dévoile Philippe et Bernard, et se filme un peu aussi) et c'est comme s'il nous tendait un fauteuil pour nous asseoir en leur compagnie, passer un peu de temps avec eux : l'un fait de la radio et l'autre du théâtre. L'un rédige des portraits pour les invités qu'il va recevoir ensuite (il fait des fiches) et le second se met en scène, tout seul, et joue un texte qu'il a lui-même écrit et mis en scène ("Motobécane"). le portrait du permier est composée de deux parties, séparées par 10 ans, le second n'est pas découpé temporellement aussi nettement. Tous les deux sont des gens que le réalisateur connaît depuis longtemps (le second a été acteur sur Le plein de super et monteur sur Libera me, c'est dire s'il est proche de l'univers de Cavalier et si la connivence entre eux est indiscutable.
Les deux portraits sont, chacun à sa façon, un exercice d'admiration de la part du réalisateur (d'ailleurs le deuxième portrait -et le film, donc, se clôt sur cette phrase chuchotée sur un rapide fondu au noir, tandis que Philippe s'apprête à entrer en scène  "Mon dieu comme j'aimerais être à sa place...") et on le remercie (Alain) de nous faire découvrir comme  ça simplement ces deux hommes en pleine "création", de très près, dans la plus proche intimité (qu'elle soit familiale ou professionnelle).
Le temps passe vite en compagnie d'Alain Cavalier, et le regret est d'autant plus vif de ne pas pouvoir voir les deux autres parties -avec l'espoir que dans un avenir assez proche paraîtra le dvd...-

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2 février 2019

late bloomer

019
LA MULE
de Clint Eastwood

Du grand art.
Il aura quand même fallu aller jusqu'à Besac car le bôô cinéma ne le programme hélas qu'en VF, pffff...). j'avais fait un peu l'impasse sur les derniers films du Monsieur (Le 15h17 pour Paris, Sully, American Sniper, que je reniflais comme lourd(aud)ement patriotiques) mais je gardais de bons souvenirs de Jersey Boys, Au-delà, et, surtout, Gran Torino (2008, quand même!), suffisamment pour céder à l'unanimité des critiques (ce que je ne fais pourtant généralement pas) et y aller. Clataclop, juste après Continuer, c'était rigolo de filer la métaphore équine...
Pas de cheval ici, mais  un vieux pick-up hors-d'âge, à l'image de son conducteur, Earl (Clintounet, bien sûr), un horticulteur que le hors-d'âge ne semble pas avoir spécialement bonifié puisque, avec presque quatre-ving-dix ans au compteur, il continue de faire le désespoir de ses proches (proches étant pris ici au féminin puiqu'il s'agit de sa femme, de sa fille -jouée d'ailleurs par la propre fifille de Clint- et même de sa petite fille -non, elle, elle continue de le défendre et de le soutenir, mais juste jusqu'à un certain point...) Earl, au début du film, s'occupe de ce qu'il préfère : ses lys (il est horticulteur), et le film, ironiquement, se terminera sur le même personnage cultivant d'autres lys... Il est horticulteur mais il est sans le sou (internet l'a, dit-il, ruiné), et les hasards de la vie (et ceux du scénario, mais c'est tiré d'une histoire vraie nous assure-t-on) le fait entrer en contact avec des chicanos jeunes tatoués et violents (les petites mains hargneuses d'un gros bonnet de la drogue -délicieusement incarné par Andy Garcia- où chacun est près à marcher sur la tête du voisin pour s'élever un peu dans cette structure pyramidale dite "du cartel") qui le chargent d'un premier convoyage.
Et voilà Earl qui fait la mule. Il conduit prudemment, n'a jamais eu de pv, mais fait les choses à sa façon, comme il l'entend, en tête de mule qu'il est, justement. Au point de provoquer, au fil des trajets (qui sont numérotés), l'ire croissante de certains membres du cartel, en même temps que la complicité souriante d'autres (qui l'appellent par des petits noms gentils, viejito, abuelito).
Clint filme Clint dans un rôle qui lui va comme un gant (il pourrait être le frérot "comme deux gouttes d'eau" du vieux con réac mysogine et misanthrope de Gran Torino, avec dix ans de plus, et comme les choses ne s'arrangent pas en vieillissant vous imaginez...) et compose un personnage touchant, avec une bonne dose d'humour et d'auto-dérision qui le rendent curieusement (furieusement) sympathique.
Il y a Earl et sa famille, il y a Earl et sa nouvelle famille (les tatoués avec des gros flingues) et il y a Earl et le flic des Stups qui le pourchasse, avec qui va se mettre en place une touchante relation quasi filiale).
Et Eastwood, le réalisateur, arrive à combiner tout ça (la famille, la vieillesse, la came, la violence, les p'tites pépées, même) et dose son cocktail avec un doigté et une précision incroyables (l'humour l'action le suspense la tendresse l'émotion) lors de bifucation de scénarios qu'on n'aurait pas forcément vues venir. Entre tord-boyaux et liqueur de dame, délicieusement.
Oui, du grand art.

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version us

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version french

31 janvier 2019

l'entrave

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CONTINUER
de Joachim Lafosse

Kacy Mottet-Klein a, depuis Quand on a 17 ans de Téchiné, pris une belle amplitude. il joue ici le fils de Virginie Efira qui elle aussi fait montre d'une belle intensité dramatique. Une mère emmène son fils au Kazakhstan ? Kirghizistan ? (les critiques ne semblent pas avoir réussi à se mettre d'accord sur le sujet mais c'est bien, finalement le Kirghizistan dont il est question), faire une longue virée à cheval cataclop cataclop pour lui remettre un peu les idées en place (et à elle-même aussi un peu, d'ailleurs). D'après le roman de Laurent Mauvignier du même nom (dont le réalisateur a gardé les prénoms des deux personnages, Sybille et Samuel), que je n'ai pas lu mais que le film donnerait justement envie de.
Une mère et son fils, des difficultés de communication (un carnet mon cher journal pour l'une, un i-pod dans les oreilles pour l'autre) Joachim Lafosse est coutumier de l'observation de ces structures viciées façon familles je vous hais (Nue Propriété, A perdre la raison, L'économie du couple), d'habitudes filmées de très près, dans des espaces très réduits -les appartements- mais il a cette fois abattu les cloisons, pour en faire, justement, une histoire sans limites.
Les paysages sont vraiment mêêrveilleux (gare! je ressens les premiers symptômes de la fièvre habituelle aux spectateurs du Ficâââ) et donnent au récit des allures de vrai-faux western comme aurait pu en filmer Kelly Reichardt (ceci est un compliment). Si le réalisateur a élargi les espaces, il a en revanche amenuisé les dialogues, et c'est pas à pas que se (re)construit la relation entre ces deux personnages qu'au départ tout sépare. Samuel est rempli de colère (comme l'était, récemment le Thomas de La prière). Il aime les chevaux, beaucoup plus qu'il n'aime les gens (ou même lui-même). Sybille a vécu une histoire complexe qui l'a multiplement meurtrie, et semble, au début du film, avoir perdu tout espoir.
C'est la chevauchée des bannis, le galop de la dernière chance. Le film est un peu court, un peu sec. Comme si l'acuité habituelle de Joachim Lafosse se diluait un peu dans l'immensité de l'espace environnant. Mais affirme la force incontestable de ses deux interprètes (Virginie Efira et le jeune Kacy Mottet-Klein y sont vraiment extraordinaires).

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30 janvier 2019

cutter

017
PIG
de Mani Haghighi

Waouh! Bam bam bam! (bruits de fusils). il y avait déjà les FI (Films Improbables) et voici désormais les FHI (films Hautement Improbables). Surtout (encore plus) venant d'Iran... celui-ci fut primé au FIFIGROT (festival international du film grolandais de Toulouse) ce qui nous donne déjà un avant-goût du paramétrage de la chose.
Le cinéma iranien, d'ordinaire, ne prête pas vraiment à la rigolade. Eh bien celui-là si. Et est plutôt connu pour son sens de la retenue. Eh bien celui-là non.
Tout commence par la découverte, en plein Téhéran, d'une tête coupée dans un sac plastique. C'est celle d'un cinéaste iranien, sur le front duquel on a gravé khook (cochon, en farsi) au cutter. Hasan Kasmai, le héros du film, est lui aussi un réalisateur iranien, et ça ne va pas très fort pour lui. Non seulement il ne peut pas tourner depuis des mois à cause de la censure, mais son actrice fétiche lui annonce qu'elle l'abandonne pour aller tourner avec un autre, tandis que lui en est réduit à tourner des pubs pour insecticide sous forme de comédie musicale,et que les réseaux sociaux (auxquels il semble très attaché) ne lui font pas de cadeau.
Hasan Kasmai est un gros barbu irascible au look de Bud Spencer (la carrure, la tignasse, la barbe), un gros grincheux avec des t-shirts de groupes de hard-rock, doté d'une mère encore plus irascible que lui (et qui n'hésite pas à manier le fusil). Et le voilà qui mène l'enquête sur ce mystérieux tueur de réalisateurs iraniens célèbres (au nombre des victimes figure le propre réalisateur du film) dont ne ne retrouve que les têtes, en se demandant pourquoi lui-même n'a pas les honneurs du joueur de cutter mystérieux.
C'est drôle, c'est hénaurme, c'est grinçant, c'est un joyeux n'importe quoi (rien que pour la scène où le héros et son acolyte arrivent dans une soirée déguisés en cafards, il faut voir le film) véritablement surprenant pour tout amateur de cinéma iranien "normal". Les femmes y sont voilées, mais c'est à peu près la seule ressemblance qu'on peut retrouver. On comprend que ce film ait été primé au Groland, tant il en a bien assimilé les codes. Pig n'y va pas de main morte et part dans toutes les directions (le clip publicitaire avec la danse des cafards, les parties de tennis killer, les rêves où le héros joue de la raquette électrique) mieux, il tire dans tous les sens.Furieusement, potachement, incorrectement.
Avec une scène finale étonnante  (où l'on n'arrête pas de sursauter) mais où on serait en droit de rester un peu sur sa faim...
Délicieusement dépaysant.

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27 janvier 2019

prévisionnement eldo

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013
WARDI
de Mats Grorud

Pour commencer, un film d'animation (qui est aussi au programme du FICAÂÂÂ) dont je ne pourrai pas dire grand-chose puisque je m'y suis copieusement endormi et ce dès le début ou presque. Une animation multiple (des figurines -que je trouve assez laides je dois dire- pour le présent et des dessins 2D pour les souvenirs, et aussi des photos -familiales- et des documents d'archive) pour évoquer le drame  des réfugiés palestiniens, chassés de leur terres en 1948, et parqués dans des camps. L'histoire de Wardi, une fillette de 11 ans dont je n'ai vu hélas que quelques bribes éparses...

*

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014
SANTIAGO, ITALIA
de Nanni Moretti

Là du coup, je n'ai pas dormi du tout, et j'étais très intrigué par le projet : le retour de Nanni Moretti par le biais du documentaire. Qui nous transporte, au tout début du film, en plein milieu de la liesse populaire, au Chili, juste après l'élection de Salvador Allende, en 1973. Puis du coup d'état qui a suivi, et de la mort du Président (je me souviens précisément quand je l'ai apprise, j'étais en terminale...) intercalant images d'archives et interviews (c'est Nanni Moretti qui les mène). Je me demandais juste pourquoi il y en avait en espagnol, et d'autres en italien, en alternance, jusqu'à ce qu'on comprenne, au fil du film, le pourquoi de ce bilinguisme (le film est construit grosso-modo en trois parties : Le Chili / L'Ambassade d'Italie / l'Italie). C'est très émouvant, encore plus du fait que sur l'écran, justement, à plusieurs reprises, on voit des interviewés être submergés par l'émotion en racontant leur histoire (et Nanni Moretti a à chaque fois l'intelligence de laisser la caméra tourner, de prendre le temps, de leur laisser le temps...) Magnifique.

*

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015
GRÂCE A DIEU
de François Ozon

Un nouvel Ozon, d'une "brûlante actualité" puisqu'il y est question du Cardinal Barbarin, et de la position de l'Eglise par rapport aux agissements de prêtres pédophiles. Et d'un d'entre eux en particulier, dont ont été victimes un grand nombre d'enfants, pour des faits qui sont, hélas, en grande majorité prescrits. Ozon met en scène plusieurs d'entre eux, au départ isolés dans une prise de parole difficile (par rapport à un passé qu'ils ont souvent -et douloureusement- enfoui) : un père de famille nombreuse (Melvil Poupaud) catholique pratiquant (et fervent), -celui qui lance l'affaire-, un autre père de famille athée, très remonté, (Denis Ménochet, toujours aussi imposant) -celui qui la médiatise-, et un jeune homme intranquille (Swann Arlaud), tourmenté, dont le cas n'est pas encore frappé de prescription -celui grâce à qui le procès pourrait avoir lieu-. un film fort, choral, mais juste peut-être (nous l'avons reconnu tous les quatre) un peu trop long dans sa démonstration (aussi long, justement que la mise en route de ce procès où l'église freine des quatre fers pour que rien ne puisse se passer).

*

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016
LES ESTIVANTS
de Valeria Bruni-Tedeschi

Il y a eu successivement, depuis ce matin, les réfugiés palestiniens, les réfugiés chiliens, les enfants victimes de prêtres pédophiles, et là on change radicalement d'univers : piscine et et cocktails, des gens riches, oisifs, en été, dans une villa. Un film fantasque. parfait pour terminer cette (excellente) journée de prévisionnement. Quatrième film de la dame (j'ai vu et aimé tous les autres, même si j'ai du mal à m'en souvenir précisément), quatrième volume de son "autobiographie imaginaire", et quatrième fois que j'y prends autant de plaisir. Plus encore, même, cette fois. C'est un peu comme elle racontait toujours la même histoire (la famille, sa mère, sa soeur, son frère disparu, sa fille, son amant, dans une grande maison, l'été, avec en parallèle, comme dans La règle du jeu, tout le petit monde des gens de maison, femme de chambre, valet, bonne, cuisinier, gardien, et qu'à tout ce monde se rajoutent encore  des  "invités" -la scénariste, le secrétaire, le comédien, l'ami de la mère-, etc.), comme je me plais à le redire "ni tout à fait la même ni tout à fait une autre", l'histoire d'une jeune femme blonde et jolie (dans ce film, je la trouve magnifique) qui vient de se faire larguer, et a du mal à l'accepter, et a, en même temps, du mal avec l'écriture de son nouveau film. Une distribution chromée super-luxe (autour de VBT, Valeria Golino, Noémie Lvovsky, Yolande Moreau, et, côté messieurs, Ricardo Scammarcio, Pierre Arditi, Laurent Stocker, Vincent Perez, François Negret et, en prime et en fantôme, le magnétique -et hélas trop peu employé- Stefanio Cassetti) pour un film auquel j'ai pris énormément de plaisir. Avec, pour couronner ce marivaudage estival (j'ai pensé au Woody Allen de Comédie érotique d'une nuit d'été) une très jolie scène finale, délicieusement embrumée.

 

 

 

 

25 janvier 2019

bague en bois

012
LETO
de Kirill Serebrennikov

Ce film m'enthousiasme.
J'y suis allé avec mon ami Philou (qui allait voir un autre film du Festival Téléramuche et que j'ai donc détourné de son droit chemin), et même s'il y a eu un léger cafouillage (ou plutôt une conjonction de cafouillages : dans le bôô cinéma c'est toujours le même cirque : pour la séance de 13h30 le caissier -qui, pour la petite histoire est aussi le propriétaire- arrive, disons, cinq minutes avant la séance, et bien sûr il n'y a qu'une seule caisse d'ouverte sur les trois possibles, et la file d'attente zigzague dans le hall (pourtant vaste) jusqu'aux portes extérieures, eh bien ce jour-là, pas de chance, un groupe d'handicapés, avec leurs accompagnateurs, ralentissait encore le rythme de la progression dudit flot de spectateurs, ce qui fait que, lorsque nous sommes enfin entrés dans la salle, le film était commencé depuis 5 bonnes minutes -car, autre subtilité à connaître dans le bôô cinéma, si le film dure plus de deux heures, la séance démarre directement et aussi sec par le film (alors qu'on a droit d'habitude à d'interminables premières parties), et Leto dure 2h06, mauvaise pioche donc!- J'ai d'ailleurs, à la fin du film eu l'envie de m'ouvrir au caissier-propriétaire à propos de ce double dysfonctionnement, mais en arrivant dans le hall j'ai tout de suite remarqué qu'il n'y avait qu'une file, et qui zigzaguait d'ailleurs jusqu'aux portes de sortie, et que si j'intervenais, je risquais encore de ralentir le flux et peut-être de faire rater le début de leur film qui durait peut-être plus de deux heures - aux spectateurs de la séance suivante, qui n'avaient pas mérité ça (quoique pour certains...) et je me suis donc dit que ce n'était pas le bon moment et que je n'avais pas le coeur ça et ouf fermons la parenthèse) mais la vision du film a généré en moi une telle production d'endorphines que c'était un peu comme lorsque plus jeune je fumais des cigarettes qui font rire, et je suis resté zen et béat, imperturbablement serein et souriant.
Je crois que je l'ai aimé encore plus que la première parce que, exceptées les fameuses cinq première minutes sur lesquelles je ne reviendrai pas (mais dont heureusement je me rappelais) cette fois jai tout vu, tout tout vu, en entier, sans en perdre une seconde, et, je me suis régalé de a à z, voilà, j'adore ce film (et je ne suis visiblement pas le seul dans ce cas).
Je ne suis pas, d'ordinaire très client des biopics (le fait de re-raconter à l'écran la vie d'un "vrai gens" mort en le faisant interpréter par quelqu'un d'autre ne m'intéresse pas plus que ça a priori, mais il arrive, c'est vrai, que l'originalité de la démarche rende -parfois- la chose vraiment intéressante (je pense au film sur Dylan de Todd Haynes, I'm not there, ou au Life d'Anton Corbijn, sur James Dean, ou au Control, du même Corbijn sur Joy Division), finalement le biopic c'est bien quand ça permet de raconter autre chose, ou, tout du moins, autrement, et c'est vraiment le cas de Leto.
Qui peut tout à fait passer pour une fiction jusqu'à ce qu'apparaissent, tout à la fin, les dates de naissance et de mort des deux personnages masculins principaux, les dotant à ce moment-là, paradoxalement, d'une existence "réelle".
Les scènes de concert (les réelles et les "mais ceci n'a pas existé"), les clips comme improvisés, en plus sur des chansons que j'aime et/ou qui me touchent, les relations amicales et/ou amoureuses entre les trois membres de ce trio, le portrait de la jeunesse russe et ses rapports avec le pouvoir, et l'omniprésence de la musique (et de la fascination qu'elle exerce sur ces jeunes gens, encore plus démultipliée que celle exercée sur nous-mêmes quand nous étions jeunes gens).
Leur énergie est aussi démesurée que pourrait bien être notre nostalgie (la mienne en tout cas) mais c'est un film autopropulsé, qui fonce furieusement et joyeusement, que rien n'arrête, où rock'n'roll rime avec humour, qui monte dans l'espoir et redescend sur terre qui dévale et redémarre, qui vibrionne et qui clignote, et qui, la seconde d'après n'est plus que douceur et silence.
Un grand et beau moment de cinéma.

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24 janvier 2019

du genou

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LA PRIERE
de Cédric Khan

Le titre et l'affiche m'avaient, à sa sortie, c'est vrai, dissuadé d'y aller, à cause de la viscérale méfiance que j'éprouve envers tout ce qui ressemble à ce que je nomme "les bondieuseries", mais il y a comme ça, tous les ans, lors du Festival Téléramuche, un miracle, un film auquel je donne une deuxième chance, un film envers lequel j'ai l'occasion de me racheter (introduction biblique à souhait, raccord avec le film, à dessein).
Cette année, c'était le seul que je n'avais pas vu, et ça m'a donc fait une bonne raison supplémentaire d'y aller. Au début, justement, il est question d'un jeune homme (au visage à la fois dur et poupin), somnolant dans un bus, qui va quelque part, on apprendra très vite qu'il s'agit d'un centre de rééducation pour toxicomanes, un centre "à la dure", sans médicaments ni médecins, dirigé par un prêtre, où, selon le programme qu'on lui annonce, le sevrage se fera grâce au travail, à la prière, et à la camaraderie. Ouch! Les débuts en effet  sont plutôt durs pour lui. Une communauté d'hommes, tous anciens drogués ou alcooliques (chacun son addiction), qui vivent selon les règles strictes qu'ils se sont fixées, (bref un genre de monastère mais sans les robes de bure ni la tonsure), règles que Thomas aura dans un premier temps énormément de mal à accepter, tant il est rempli d'une fureur mal contenue, toujours prête à exploser, envers chacun des autres, mais aussi envers lui-même.
Le film est aussi passionnant que les décors naturels où le réalisateur a placé son histoire sont impressionnants (la montagne, ici, est magnifique) et Cédric Khan a le mérite de filmer cette histoire simple de façon tout aussi simple, directe, brutale presque parfois pourrait-on dire. Où tout ne se passera pas, finalement comme, en spectateur malin, on avait cru l'anticiper. Et toc! L'évolution du personnage de Thomas est touchante (et il faut souligner à quel point le jeune Anthony Bajon qui l'incarne y est exceptionnel, et a bien mérité son prix d'interprétation à Berlin...) parce qu'elle se fait à hauteur d'homme, et avec les moyens du bord (ici les prières, les chants, les psaumes, la foi, Dieu, tout ça...).
Un bus qui arrive au début du film, un bus qui repart à la fin, avec le même jeune homme dedans, mais dont l'itinéraire est beaucoup plus complexe que ce que pourrait suggérer cet aller-retour. Les bondieuseries que j'appréhendais sont bien là (on prie souvent, et in extenso) mais Cedric Khan les film à la juste distance, soulignant de quelle façon la prière, les chants religieux, la liturgie, relèvent de la pose, du décorum (cet aspect-là m'a beaucoup plu), tandis que ce qui relève de la foi (qui aurait à mon avis été un titre plus judicieux, mais sans doute encore moins vendeur) est strictement à usage interne, difficile à montrer comme à quantifier.
Je ne suis pas croyant, mais j'ai été très touché par ce personnage de Thomas, et je remercie une nouvelle fois le Festival Téléramuche pour cette belle découverte.

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23 janvier 2019

festival de thann

un prévisionnement "Grand Est" auquel on est invité(s) grâce à l'entregent de notre cher président Hervé

 

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CELLE QUE VOUS CROYEZ
de Safy Nebbou

Un film "à lunettes" (et doublement) : Juliette Binoche y est la patiente de Nicole Garcia. Elle lui raconte son histoire, ce qu'elle a fait à cause de Guillaume Gouix (oui, mon Guigui d'amour, décidément, elle les veut tous, cette Juju! Je vais finir par être jaloux hein...) qui, après l'avoir pourtant plutôt énergiquement besognée, n'a ensuite pas été très gentil avec elle. Elle a voulu le revoir, et une chose en a entraîné une autre... (Après assayas et les ibouques, Nebbou et les fessebouques) Un thriller psy (Safy Nebbou avait débuté avec le dérangeant Comme un homme) d'après un livre de Camille Laurens, un récit qui fonctionne plutôt bien, en plusieurs paliers narratifs (de révélations et de  twists). Ca démarre bien, à un moment ça patine un peu, mais la fin remet un peu les gaz pour boucler habilement cette histoire de fausse identité et de nouvelles technologies. A bientôt Juliette ?
(sortie : 27 février 2019)
chanson suggérée : "Avec le filles je ne sais pas" de Philippe Lavil
"Quand l'une d'entre elles me dit :
"Pour qui vous me prenez ?
Je ne suis pas celle que vous croyez ! "

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007
SIBEL
de Çağla Zencirci et Guillaume Giovanetti

Un couple mixte de réalisateurs (elle turque, lui français) dont c'est au moins le quatrième film ensemble. Le beau portrait d'une jeune fille muette (mais pas sourde) qui s'exprime par sifflements. Une jeune fille un peu sauvage, farouche  (rebelle) parce qu'ostracisée par les autres (un village perdu) à cause de sa différence, et à qui son père a fait cadeau d'un fusil pour lui permettre de battre la campagne. ou plutôt la forêt, dans laquelle elle cherche les traces d'un hypothétique loup. Elle va faire la rencontre d'un fugitif blessé qui se dissimule aux forces de l'ordre dans cette même forêt, et tictac tictac la mécanique s'enclenche (on soupçonne assez tôt que tout ça ne peut pas finir très bien, mais on n'a pas forcément raison), qui va mêler plusieurs fils narratifs (et plusieurs strates temporelles). Amour, matriarcat, émancipation, secrets familiaux... Une jeune fille magnifique (bon l'honnêteté intellectuelle m'oblige à dire que le fugitif n'est pas non plus...) Du très beau travail.
(sortie le 6 mars 2019)
chanson suggérée : "Siffler sur la colline" de Joe Dassin


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C'EST ÇA L'AMOUR
de Claire Burger

Celui-là j'ai pu faire mon malin en disant "Je l'ai déjà vu en avant-première à Belfort/Entrevues..." mais je n'étais pas seul dans ce cas (donc je ne l'ai pas fait). Grand plaisir de retrouver Bouli Lanners en papa largué par son épouse qui lui a laissé leurs deux filles (ado tendance doigt d'honneur, notamment pour la plus jeune) sur les bras, et qui fait tout ce qu'il faut/qu'il peut pour que les choses aillent le mieux possible (mais il rame). Je redis combien Bouli L. y est d'une justesse extraordinaire, sans jamais trop en faire... et combien ce film m'a peut-être encore plus ému à la seconde vision. A partir d'une certaine scène, les larmes sont montées sans prévenir et ont tenu quasiment jusqu'à la fin...
(sortie le 27 mars 2019)
chansons suggérées :
-"C'est ça l'amour" du film Cendrillon
ou
-"C'est l'amour" de Léopold Nord et vous

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FUNAN
de Denis Do

Pour finir, pas le film le plus facile de la journée : un film d'animation (mais pas pour le jeune public) où il  est question du génocide commis par les Khmers Rouges, au Cambodge, entre 1975 et 1979, à travers l'histoire d'une famille qui, comme les autres habitants de Pnom-Penh, est évacuée de la ville et contrainte de partir à marche forcée. On suivra l'histoire de ces gens (principalement un couple qui a été très tôt séparé de son enfant (elle doublée par Bérénice Béjo, que je n'avais pas reconnue, et lui par Louis Garrel, dont j'ai par contre reconnu la voix assez vite), parallèlement à celle de ce peuple, lors de cette période effroyable par les violences qu'ils ont subies. Le réalisateur évoque un sujet qui lui tient à coeur, dans une histoire qu'il a connue de près. Le film a été primé à Annecy (Cristal du long-métrage) et, doublement, à Los Angeles (Grand Prix et Prix du Public), même si l'animation peut paraître parfois un peu "simple" pour les exigeants consommateurs de 3D que nous sommes devenus, mais la force de son sujet le rend inattaquable.
(sortie le 6 mars 2019)
chansons suggérées :
-"Cambodia" de Kim Wilde
ou
-"Mon fils ma bataille" de Daniel Balavoine

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