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lieux communs (et autres fadaises)

14 novembre 2013

immersion

LEVIATHAN
de Lucien Castaing-Taylor et Véréna Paravel

C'est rare que pour apprécier pleinement un film je décide de m'installer bien au milieu de la salle ("au croisement des diagonales") pour en jouir pleinement, la dernière fois, c'était pour le sublime NE CHANGE RIEN de Pedro Costa. Les réalisateurs (oui, un monsieur et une dame, ça donne "les réalisateurs") de Léviathan annonçant une "expérience sensorielle ultime", et Hervé, en amont, étant tout aussi enthousiaste, je me suis dit que ça en valait peut-être la peine...
Wouahhhhh! En effet, ça la valait bien (la peine). Nous voilà sur un bateau de pêche, (si on ne le sait pas, on met un certain temps à le deviner, tant les premières images sont déroutantes, et nous forcent à quitter nos repères habituels) embarqués, le mot est juste, en pleine mer, avec les pêcheurs, les mouettes, les poissons, le tangage, le roulis, les écoutilles, les mouettes, dessus dessous, dehors, dedans, la nuit, la tempête, les éléments déchaînés, on vit ça véritablement du dedans, au plus près, en plein coeur.
On a l'impression qu'au tournage il y avait des caméras partout, sur le bateau mais dans l'eau, sur le pont, dans la cale, et même sur la tête des pêcheurs. Une matière intense, colorée, violente, accidentée (et probablement parfois accidentelle aussi), paroxystique, triturée et mise à vif, à nu, par un montage ad hoc (montagnes russes, rythme aléatoire, déstabilisant, où l'on peut aussi bien alterner violemment les images les couleurs les textures, empiler, hacher recoller, que soudain tout poser (comme au fond de l'eau se déposeraient les sédiments) pour un soudain plan long -on peut alors parfois penser "trop long"-, calme ou moins, en forme de respiration,break), avant de repartir ailleurs, un nouvel ailleurs incertain, glissant, fuyant, mouillé, encore renforcé par le travail sidérant effectué sur le montage-son, qui vous immerge véritablement dans un caisson aquatique, parfois amniotique, le plus souvent maelstrom, machineries, bruitages mi-organiques mi-industriels, aqueux, comme s'il s'était agi de reconstituer l'essence même du travail des pêcheurs.
Parlons-en, de ces pêcheurs . Ici devrait forcément apparaître le mot "rugueux", tel qu'il est apparu souvent dans les critiques du film, et qui apparaît tout aussi régulièrement dès qu'on montre des hommes dont ni les conditions de vie ni l'apparence physique ne correspondent tout à fait à l'habituelle imagerie mâle cinématographique ambiante, lisse proprette inodore. Et qui serait ici tout particulièrement adapté, puisque le caractère du rugueux est, spécifiquement, de ne pas être lisse, de présenter des irrégularités, des aspérités, qui justement permettent de faire face au mouvant, au glissant, à l'aquatique, au maritime. Schématiquement, le rugueux du marin serait le velcro qui lui permet de ne pas glisser sur le pont, et c'est tant mieux. Je plaisante, mais à-demi. Les hommes dans Léviathan sont montrés avec la même proximité, la même intensité, la même curiosité que leurs confrères marins, à nageoires, à branchies ou à coquilles. Avec la même fascination, d'égal à égal. Qu'ils soient en pleine action (vacarme, paquets de mer, agitation, exécution, ou au repos -étonnante séquence à la fois étirée et resserrée dans le temps d'un marin qui s'endort dans la cambuse en regardant les infos à la télé, son mug de café à la main-...).
Vu juste avant le film des Coen, je ne savais pas encore que j'allais voir deux films grandioses coup sur coup.
Dommage que le film, programmé juste deux fois au bôô cinéma dans le cadre du mois du doc, ait attiré si peu de monde (on était 5 au début, et 4 à la fin, enfin, déjà juste au bout de dix minutes...) et re-dommage que, dans ce même bôô cinéma, on ait la détestable habitude de rallumer -cling!- les lumières de la salle dès les premiers mots du générique de fin (et parfois même avant), sauf que, dans Léviathan, le film continue après ledit générique de fin, quelques minutes dans le noir, avec juste une lumière qui s'éloigne et sur un dernier glougloutis... du coup, on a juste entendu le glougloutis... Pfff!

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14 novembre 2013

les coen, 4 à 4

16 films... l'occasion d'un petit survol/classement par paquets de 4, chronologiquement descendants

un peu :

2008 : Burn After Reading

2004 : Ladykillers (The Ladykillers)

2003 : Intolérable Cruauté (Intolerable Cruelty)

2000 : O'Brother (O'Brother Where Art Thou?)

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beaucoup :

 

2010 : True Grit

2001 : The Barber : l'homme qui n'était pas là (The Man Who Wasn't There)

1994 : Le Grand Saut (The Hudsucker Proxy)

1990 : Miller's Crossing

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passionnément :

2007 : No Country for Old Men (No Country for Old Men)

1998 : The Big Lebowski

1987 : Arizona Junior (Raising Arizona)

1984 : Sang pour sang (Blood Simple)

 

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à la folie :

 

2013 : Inside Llewyn Davis

2009 : A Serious Man

1996 : Fargo

1991 : Barton Fink

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13 novembre 2013

Pour sylvain, encore un peu de tchekhov

(pour moi, un genre de quintessence...)

ELENA ANDREEVNA (pensive). Il est étrange comme homme... Tu sais quoi ? Laisse-moi, je vais lui parler... Avec délicatesse, par allusions...

Pause.

C'est vrai, combien de temps vivre encore dans cette incertitude... Laisse-moi faire!

Sonia hoche la tête affirmativement.

Splendide. Soit il aime, soit il n'aime pas, ce n'est pas difficile à savoir. Ne t'en fais pas, ma petite colombe, ne t'inquiète pas -je l'interrogerai avec délicatesse, il ne s'en apercevra même pas. Nous voulons juste savoir si c'est oui ou si c'est non.

Pause.

Si c'est non, qu'il ne vienne plus. D'accord?

Sonia hoche la tête affirmativement.

C'est plus facile, quand on ne se voit pas. On ne va pas attendre cent sept ans, on va l'interroger sur l'heure. Il voulait me montrer des graphiques... Va lui dire que je veux le voir.

SONIA (saisie d'une forte émotion). Tu me diras toute la vérité?

ELENA ANDREEVNA. Oui, bien sûr. J'ai l'impression que la vérité, quelle qu'elle soit, est tout de même moins effrayante que l'incertitude... Fais-moi confiance, ma petite colombe.

SONIA. Oui, oui... Je dirai que tu veux voir ses graphiques. (Elle sort et s'arrête devant la porte). Non, l'incertitude, c'est mieux... il reste quand même l'espoir...

ELENE ANDREEVNA. Tu dis?

SONIA. Rien

Elle sort.

(Oncle Vania, traduction d'André Marcowicz et Françoise Morvan)

13 novembre 2013

chat roux

INSIDE LLEWYN DAVIS
de Joel & Ethan Coen

Il me semble l'avoir déjà écrit, a propos de A SERIOUS MAN : il y a dans le cinéma des Coen quelque chose d'impeccable, une qualité de facture qui force, forcément (!) l'admiration. Un peu comme s'ils filmaient sur une pellicule spéciale. Cette façon imparable qu'ils ont de s'emparer d'un personnage (un looser magnifique de préférence) et de capturer l'espace-temps qui l'entoure, l'air qu'il respire, la vie qu'il vit.
Llewyn Davis est un musico, un guitariste, un folk-singer sans domicile fixe ni perspective de vie bien définie. Il chante (joliment) par-ci par-là, grapillant quelques dollars, et son principal souci quotidien semble être de savoir où il va bien pouvoir dormir le soir (car l'hiver cette année-là semble être rude, et le pauvre n'a même plus de manteau.
Dès le début du film (qui sera d'ailleurs, par une  construction temporelle spécifique, aussi la fin), les choses sont posées : il a chanté dans un bar, s'excusant au près du patron de la cuite qu'il tenait la veille, puis se fait casser la gueule par un cow-boy dans l'arrière-cour dudit bar, avant de se réveiller dans un appartement vide, en compagnie d'un chat roux qu'il va malencontreusement laisser s'échapper au moment où il ouvre la porte pour sortir, et à la poursuite duquel il va consacrer une certaine partie du film.
Llewin Davis est un  barbu frisé mimi que les réalisateurs réussissent à nous rendre attachant à défaut d'être toujours vraiment sympathique... Ok, il galère, mais est-ce vraiment la faute à pas de chance ? mais on le suit, au long des épreuves qui s'nchaînent tout au long des nuits hivernales (ce n'est pas pour iren qu'on apprendra, tout à la fin, que le chat s'appelle Ulysse) au fil des rendez-vous plus ou moins manqués, des rencontres plus ou moins improbables, des coups plus ou moins durs, des engueulades plus ou moins justifiées aux réconciliations plus ou moins idem, et c'est du grand grand Coen & Coen (mais n'est-ce pas le sentiment que j'ai chaque fois que je sors d'un de leurs films ? Non non, il ya des fois où je sens que, même si c'est brillant, c'est tout de même mineur, tiens il faudra que je fasse bientôt une liste récapitulative).
Oui, j'ai adoré, même si -honte à moi- je me suis un tout petit peu endormi au milieu , et c'est d'ailleurs pour ça que j'y retourne cet après-midi (fin de ce post alors suivra)

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(après l'avoir revu, donc)
Quel bonheur mais quel bonheur d'y être retourné! D'abord le plaisir de revoir le film, mais aussi ce que j'en avais manqué (rien pendant un certain temps, et puis, pour le voyage à Chicago, voilà qu'il m'en manquait pas mal, ou plutôt tout ce qui se passait entre les quelques images qui m'en étaient restées, et ç'aurait été très dommage car c'est vraiment un morceau du film que j'adore, typiquement coenesque : de la belle image, des personnages presque mystérieux, en tout cas inquiétants juste ce qu'il faut, la route dans la lumière des phares, les pauses dans des stations-services, la neige, les mots ou les actes sybillins, on ne comprend pas tout, juste ce qu'il faut, mais on se laisse porter, c'est merveilleux...)
Oui, merveilleux. Tout serait prétexte à compliments : la lumière, la couleur (une gamme d'ocre de bruns de gris), le cadrage, la construction (j'adore cette fuite en avant simplement rectiligne qui nous prouve, finalement, que, même en allant tout droit, et bien, on finit -plaf!- par revenir à son point de départ (parce que la terre est ronde, cqfd), sans oublier l'essentiel : les personnages, bien entendu, en premier lieu ce looser magnifique de Llewyn D., mais tout autant l'intégralité des personnages qui l'entourent, tous traités avec la même attention curieuse, dépeints avec la même tendre vacherie. La même humanité, simplement.
Si le film peut faire sourire en surface, il n'en relève pas moins en profondeur de la même veine mélancolique (aussi violente que discrète, si je peux oser le paradoxe) que j'aime tant chez les brothers C.
Un grand grand cru.

5 novembre 2013

5 morceaux d'anton t.

"Quand la vraie vie est absente, on se nourrit d'illusions. C'est tout de même mieux que rien."

 

"C'est étrange quand même !... On se connaît, et puis... brusquement, sans savoir pourquoi... on ne se revoit plus jamais ! C'est toujours comme ça, dans la vie !..."

 

"Parfois, j'en souffre d'une façon insupportable. Mais pour moi aucune petite lumière au loin. Je n'attends plus rien. Je n'aime pas les gens... Depuis longtemps déjà je n'aime personne."

 

"Ce n'est qu'une apparence... Nous ne sommes pas, il n'y a rien dans ce monde, nous n'existons pas, ce n'est que par apparence que nous existons..."

 

"L'amour sans aucun espoir ça n'existe pas, jamais, que dans les romans. Ce qu'il faut, c'est ne pas faire de l'attente de l'amour le but de votre vie, attendre éternellement qu'il arrive."

 

 

4 novembre 2013

péchés mignons 20

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(besac, 10 septembre 2008)

3 novembre 2013

péchés mignons 19

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(rue charonne /14 août 2008)

2 novembre 2013

péchés mignons 18

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(paris / 13 août 2008)

1 novembre 2013

fifty-fifty (prévisionnement Pont-de-Roide)

(tentative de critique "deux pour le prix d'un")

LE GEANT ÉGOÏSTE
de Clio Barnard

LES GARCONS ET GUILLAUME, A TABLE!
de Guillaume Gallienne

Deux films qui m'ont plutôt plu, mais aussi un peu déçu, chacun à leur manière.
Le premier est un film "socio-britton", d'obédience Ken Loach ou Andrea Arnold -déjà deux rigolos- mais que, ces deux-là, à côté c'est quasiment les Bisournous). Le deuxième est un film dont on parle beaucoup depuis Cannes (et avant ?) et c'est l'adaptation par Guillaume Gallienne de son one-man-show du même nom, qu'il réalise qu'il joue -et peut-être même qu'il produit ?-).
Dans les deux films il est beaucoup question de mère (celle des différents personnages principaux) et accessoirement de chevaux (dans les deux films, coïncidence, le même plan ou quasiment d'une tête de cheval dont on voit surtout l'oeil.)
Chez Barnard, les deux héros sont des gamins / jeunes ados "en rupture" (familles dans la mouise, absentéisme scolaire, alcoolisme, surpopulation, chômage, joggings crasseux, clopes, etc.) -un petit blond maigrichon teigneux en colère contre la terre entière et un petit gros placide qui aime les chevaux, qui vont essayer de "s'en sortir" (surtout en volant du cuivre et en se mettant en cheville avec des ferrailleurs), tandis que chez Galienne le héros est Guigui lui-même, tout propre et bien frisotté, son problème étant qu'il est considéré dans sa famille (et par sa mère) comme une fille, et tentant donc de se comporter comme tel(le).
En Angleterre on essaye de s'en sortir en grattant du fric par-ci par-là avec des combines plus ou moins légales et honnêtes (plutôt  moins que plus, d'ailleurs), tandis qu'en France, il s'agit pour le héros juste de faire son coming-out en tant qu'hétérosexuel, ce qui n'est pas évident non plus, certes, mais pas exactement sur le même plan.
Le film de Clio Barnard est une reconstitution poignante et immersive, extrêmement vériste, jusqu'au moindre cheveu gras et autres ongles en deuil, tandis que celui de Gallienne est avant-tout  une aimable -et hallucinante- prouesse technique, puisque l'acteur joue simultanément son rôle et -c'est là que ça dépote- celui de sa mère omniprésente et castratrice -hallucinante, je le répète-).
Peut-être que le premier (film) est trop noir-noir-noir et répétitif dans les hurlement les fucking bastard et les coups de vache, et que l'autre au contraire est trop gentillet et égocentré... Mais c'est incontestable, on flippe autant devant l'un qu'on rigole ou sourit devant l'autre...

Dans Le géant... il faut attendre les quinze dernières minutes (après une catastrophe qu'on pressentait quasi depuis le début du film) pour que tout ça s'apaise un peu (c'est vrai que, par opposition avec tout ce qui a précédé la fin est comme une respiration, un appel d'air, un apaisement) et acquière une certaine grandeur, alors qu'on contraire j'ai le sentiment un peu flou (je n'ai plus exactement le souvenir) que, chez Gallienne, c'est la fin, au contraire qui serait un peu ramollo-planplan, et, du coup, pêcherait...

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1 novembre 2013

péchés mignons 18

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(dans la cour / 6 août 2008)

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