tipota
STRELLA
de Panos H. Koutras
Décidément c'était le jour des films atypiques! (Ca c'est pour appâter Pépin... Si je savais comment le faire clignoter, je le ferais!!!)
Sortant de l'Espagne jarmuschienne, j'ai à peine eu le temps de sauter dans ma vaillante 306 pourrie pour faire les 50km qui me séparaient de la Grèce de Koutras (pour l'info, c'est le monsieur qui avait réalisé L'attaque de la moussaka géante, qui m'a laissé peronnellement (je voulais écrire personnellement, mais ça aussi c'est joli, et du coup je le garde, tiens, surtout pour parler de trav') au bord de l'indigestion kitsch, mais bon il a fait du chemin depuis, et ce film-là est sans conteste d'une autre trempe.)
J'aurais pu faire ma grosse feignasse et vous donner simplement le lien qui conduit à la jouissive critique qu'en a fait Gérard Lefort dans Libéchounet mais bon je vais quand même me forcer un peu pour vous dire tout d le bien que j'en pense (sans m'abîmer mes faux-ongles).
Dès le début, on sait à quoi s'en tenir : Yiorgos sort de prison, après 15 ans de détention, dit tendrement au revoir à son jeune copain de cellule, et va se mettre en quête de Léonidas, son fils, dont il est sans nouvelles depuis tout ce temps. Il s'installe dans un hôtel, où il fait assez vite connaissance de la Strella du titre, un(e) jeun(e) transexuel(le), avec qui il va vite faire phosphorer ses hormones mâles (qu'il a puissantes d'ailleurs : Yiorgos est du genre mâle sans hésitation, sans concessions, sans sommations).
Voilà le point de départ, et je n'irai guère plus loin, sous risque de défloration (ouch!) dommageable d'une intrigue à propos de laquelle je proposerais volontiers à notre ami Almodovar d'aller se rhabiller. D'abord parce qu'ici les transexuels le sont vraiment et le prouvent... (Oui oui Strella est -grand bien nous fasse- un FAQV) et que, finalement, c'est assez rigolo de voir un film où l'altersexualité est posée quasiment en norme (il y a très peu d'hétéros purzédurs dans cette histoire plutôt échevelée -à perruques, je veux dire-). Histoire de famille et de liens familiaux : Yiorgos cherche son fils, Strella prend soin de celle qui l'a élevé, et qui est en train de mourir, le copain de Strella enterre sa mère et récupère une soeur... ("La famille ça fait partie des p'tits soucis quotidiens (vous rappelez-vous de Sheila ?) mais pourtant c'est une vie qu'on aime bien...") dans un univers de paillettes, de strass, d'éclairages nocturnes, de perruques et de faux-semblants.
A la différence de L'attaque de la moussaka... qui était une grosse pochade poilade au nième degré, très follasse et très cheap, Panos H.Koutras, s'il n'a visiblement pas beaucoup plus de moyens financiers (mais il se débrouille très bien comme ça), a opté -au moins au départ- pour un certain "réalisme" , un "profil bas " naturaliste, qui tire progressivement le récit vers le mélo flamboyant, avec tadam! révélation (lorsque le fils réapparaît) et changement de perspective en plein milieu du film (on se demande d'ailleurs à ce moment comment le réalisateur va réussir à se tirer d'affaire et boucler son odyssée, ce qu'il va pourtant réussir avec un brio certain lors de la scène finale "Noël en famille", comme un clin d'oeil joyeux (idyllique ? ), qui tiendrait plus du chromo sous coke que de l'imagerie sulpicienne (quoique...).
C'est vrai que le film avance parfois comme un travesti qui monte pour la première fois sur des talons-aiguilles, pas toujours sûr de son équilibre, mais continuant à avancer bravement, même en claudiquant parfois, manquant de peu de se casser la figure, et se relevant bravement, reprenant soudain de l'altitude et de l'audace pour nous mener à bon terme de son histoire. Mais les acteurs sont là pour compenser (comme les semelles huhuhu) les passages à vide ou les scènes un peu plantées (je pense à une déambulation de Strella sur fond de Callas qui juste ne fonctionne pas, mais alors pas, pas le bon rythme, pas le bon timing, je ne sais pas...)
Les deux principaux, en tout cas, sont superbes, et assurent à tous points de vue (Mina Orfanou as Strella, et Yannis Kokiasmenos as Yiorgos) les excès et abymes d'un scénar pour le moins couillu.
Le renouveau (plutôt la renouvelle, dans le cas présent) du cinéma grec serait-il donc arrivé(e) ? Allons (nous faire) voir... (Oui bon je sais elle est facile, mais elle est comme qui dirait au diapason, non ?)