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lieux communs (et autres fadaises)
1 septembre 2011

inconsolables

LES BIEN-AIMES
de Christophe Honoré

J'appréhendais un peu...
Beaucoup de battage publicitaire, la peur d'être déçu, je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre... J'avais adoré Les chansons d'amour, quasiment détesté Non ma fille tu n'iras pas danser, et Homme au bain m'avait laissé un sentiment... mitigé... (malgré le cul superbe sublime de François Sagat)
Alors ?
Un peu de mal au début, je dois le dire... Venant juste après La guerre est finie et sa radicalité simplissime, ces Bien-aimés semblent au départ un poil artificiels, posés, poseurs, enfin, toc quasiment. La reconstitution est appliquée, laborieuse presque (avec un indéniable petit côté Kundera -Jaromil et Pragues obligent-). Les talons-aiguille, les robes qui froufroutent, le rouge à lèvres...
Et, progressivement, insensiblement, les choses se mettent en place, (les gens, les amours, le temps qui passe...) le film se construit sous nos yeux,  s'élabore, s'enracine, s'approfondit. Progressivement. Comme si, dépassant cette apparence un peu clinquante, le film prenait son temps pour aller grattouiller, en profondeur, au coeur de cette confusion des sentiments à laquelle Christophe Honoré semble tant attaché (et qu'il dépeint, ma foi, de plus en plus justement).
Le film va, chronologiquement, depuis les années 60  jusqu'au début des années 2000, suivant sur la distance une mère et sa fille. Catherine Deneuve et Chiara Mastroianni, tiens donc. J'ai déjà confessé ma passion pour la demoiselle, sa voix et son allure, et regretté qu'elle (son personnage, enfin) m'énervât tant dans Non ma fille... et bien ici, elle est sublime, carrément, il n'y a pas d'autre mot.
D'un bout à l'autre du film elle navigue, impériale, damant  sans l'ombre d'une hésitation le pion à sa mère. Bluffante.
Comme dans Les chansons d'amour, on a justement... des chansons, qui viennent régulièrement illustrer / soutenir le propos (les situations), et sont, elles-aussi, superbes (comment Alex Beaupain peut-il autant rater mollassonnement  son dernier album et réussir magistralement celui-ci ? J'ai dès le lendemain acheté la chose, tant il y a des chansons qui me touchent et m'émeuvent - J'en passerai, Qui aimes-tu, Reims, Jeunesse se passe...).
Pour parler d'amour...
Histoires d'amour qui finissent mal en général, soit qu'on n'aime pas la bonne personne, soit qu'on hésite entre deux, soit que l'autre meure, soit qu'on meure soi-même... Avec des acteurs touchants et beaux du dedans (Deneuve, bien sûr, Milos Forman,émouvant, Michel Delpech, idem,  -oui oui, c'est un des seuls qui ne chante pas!- , Paul Schneider, (que j'avais déjà trouvé très plaisant dans L'assassinat de Billy the kid par je ne sais plus qui..). sans oublier le jeune tchèque Rasha Bukvic (kundérien) et sa copine Ludivine Sagnier (elle joue Deneuve jeune, il y a un charmant chasssé-croisé entre ceux d'hier et ceux d'aujourd'hui) ni, bien sûr le toujours charmant Louis Garrel (qui devrait quand même changer un poil de registre, non ?...)
Bref, un beau moment de cinoche (les larmes finissent par arriver... je pense notamment à une scène de 11 septembre par le petit bout de la lorgnette qui restera je pense dans les mémoires, enfin la mienne en tous cas.), plus que plaisant, joliment construit/déconstruit, palpitant entre légèreté et gravité, mais en effleurant, avec grâce, cette protéiformité des relations amoureuses. Christophe Honoré a l'intelligence d'aller de l'accessoire vers l'essentiel, du superficiel vers l'intime. Et le film n'est pas du tout la comédie joyeuse et écervelée à laquelle  l'affiche acidulée nous  ferait presque croire.
A coup sûr le coup de maître pour l'instant du sieur Honoré... (et je me souviens combien j'avais adoré Les chansons d'amour!)

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29 août 2011

hosto blues

LA GUERRE EST DECLAREE
de Valérie Donzelli

Journée de prévisionnement à Moirans : c'est looooin! (heureusement c'est Hervé qui conduit!) premier film des quatre prévus, début d'après-midi, on s'installe...

Celui-là, ça fait beaucoup de temps que j'en entends parler, en bien, en très bien, en mieux que bien... Je me méfie de l'unanimité (Oui c'est, au choix, mon côté snob ou vieux con) j'étais content donc, de le voir dans ces conditions-là,juste avant la "vrai sortie", pour me rendre compte par moi-même, quoi...
Et bien, décidément, la période est propice aux coups de coeur et autres émotions fortes : en peu de temps, j'aurai ainsi été remué assez fort par, successivement, Melancholia, This must be the place, et, là, aujourd'hui, encore plus fort si c'est possible, par La guerre est déclarée.
Oui, c'est vrai que le cinéma est pour moi surtout affaire de charge émotionnelle, et là, question émotion, comme on dit, "j'ai reçu"... Bon signe, j'ai, heureusement, terminé le film avec les larmes aux yeux, mais pas que. Dans un état de bonheur inexplicable et violent, aussi.
D'une histoire  pas très joyeuse (un couple découvre que son premier enfant souffre d'une tumeur au cerveau), autobiographique qui plus est, Valérie Donzelli a tiré un film extraordinaire. Dans lequel elle joue, son propre personnage, donc, en compagnie de Jérémie Elkaïm qui joue son propre rôle aussi (et avec lequel elle reconstitue donc le couple d'alors, même s'il n'a pas, justement, survécu à cette aventure).
On commence au scanner (ou à l'IRM je n'ai jamais trop su la différence précisément), et on repart ensuite dans un long flash-back où toute l'histoire est racontée de a (la rencontre des deux amoureux) jusqu'à z (la promenade familiale). Et c'est du vrai de vrai cinéma, inventif, aventureux, primesautier, dramatique, rigolard, follement romantique, redoutablement réel, drôlement décalé, décidément cinématographique. Avec trois bouts de ficelle et un appareil-photo numérique (le même que pour Rubber me semble-t-il avoir compris) -et donc une équipe réduite (resserrée, ressoudée), Valérie Donzelli a réalisé un film miraculeux de simplicité, de spontanéité, d'enthousiasme.
On sent qu'elle prend plaisir à se colleter avec la matière même du film, qu'elle n'hésite pas à mettre les mains dans le cambouis des dessous de la narration, bref qu'elle affronte ses éléments divers, elle les organise, elle leur tient tête.
Il y a dans le film plein de moments merveilleux, magiques, où on est pourtant souvent sur le fil, du jeu des comédiens, de l'utilisation de la musique, du rythme des plans. Mais toujours, immanquablement, infailliblement, félinement, le film retombe sur ses petites pattes, fait une cabriole et repart de plus belle en nous faisant signe de le suivre. Il ya du léger et plus lourd, de l"allègre et du répétitif, du souriant et des engueulades aussi, un joli duo en voiture mais pas ensemble, des nuits à l'hôpital, du champagne bu à même la bouteille, des cacahuètes lancées pile-poil, des acteurs que certains trouveront trop ci et d'autres pas assez ça (moi, en toute mauvaise foi et en ce qui me concerne, je dirais que tout était juste comme il faut, que l'ensemble me convient, même s'il y a des scènes ou des bouts de, ici ou là, qui sonneraient peut-être un poil trop mais bon... indulgeons!)
La guerre est déclarée fait partie de ces films, somme toute pas si courants, dignes de respect. Oui, le mot est lâché. Pour la force du sujet, la dignité de l'ensemble, la légèreté et la quasi-inconscience du traitement, et l'optimisme -quasi béat- qui se détache de toutes ces choses pourtant a priori plutôt tristounettes, prises séparément (examens / tumeur / scanner / opération / nuits de veille / chimio / protocole / récidive etc.)
Des gens, vous, moi, la vie, quoi!
(et le plaisir, tiens, de revoir un acteur que j'adore mais qu'on ne voit pas assez : Frédéric Pierrot, qui a d'ailleurs le superbe rôle du super-chirurgien...)

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28 août 2011

souffler sur la mèche

THIS MUST BE THE PLACE
de Paolo Sorrentino

Mettons les choses au point tout de suite : ce film, au départ,  est un bloc de bonheur cinéphile, ou plutôt, pour filer la métaphore pâtissière, un mille-feuilles de bonheurs variés (alternance des couches, variété des saveurs, statut  composite du plaisir...)
Question interprétation, d'abord, où, outre le plaisir de retrouver Frances Mc Dormand (depuis Fargo, j'adore cette sacrée bonne femme) et Harry Dean Stanton (qui se rappelle à notre bon Paris Texas souvenir) on a affaire à un Sean Penn absolument grandiose, en popstar déchue et dépressive (un personnage à mi-chemin entre Robert Smith (des Cure) et Droopy, qu'il a de plus doté d'une voix de Betty Boop sous prozac), qui a depuis longtemps refusé d'abandonner son brushing pétard et son maquillage chargé (les yeux la bouche). Vieil enfant vivant dans le passé, quoi.
La musique, ensuite (je vous redonne les choses comme elles viennent) écrite pour le film par David Byrne (Talking Heads) pour la musique et Will Oldham pour les paroles. J'avais déjà les larmes aux yeux à la fin du premier morceau. Je les avais aussi au génrique de fin, d'ailleurs (mais finalement, je crois que j'adore vraiment, ça, quitter une salle de cinéma avec les yeux mouillés, ça fait partie intégrante de mon plaisir de cinéphile). David Byrne qu'on voit d'ailleurs en vrai dans le film, pour une installation musicale. David Byrne, également réalisateur d'une film nommé True stories auquel ce film-ci n'est pas loin de me faire penser (j'y reviens). Pour terminer avec le chapitre de la musique, juste dire que tout ce qu'on y entend me ravit, et que j'ai même eu le plaisir d'entendre une musique spécialement chère à mon coeur, celle de Für Alina, d'Arvo Part (qu'on entend aussi dans Jerry, si je m'abuse, et aussi dans une des vidéos du jeune homme au t-shirt vert...)
Oui, True stories, qui parlait de L'Amérique profonde à sa façon, en un cocktail qu'on pourrait doser : 1/4 ethno/socio, 1/4 arty, 1/4 esthétique/chromatique et 1/4 sentiments, et qui semble être la recette que Sorrentino a utilisée pour ce premier film en anglais (dixit la pub). Qui pourrait être aussi 1/3 Irlande, 1/3 USA et 1/3 nowhere (ou somewhere else).
Un road-movie aussi archétypal qu'atypique (en valise à roulettes, c'est dire si ça fait du bruit dans les graviers). Comme dans tout road-movie, il s'y fait des rencontres -plus ou moins brèves- de personnages plus ou moins originaux et/ou touchants (un vieil indien, un gamin obèse qui a peur de l'eau, l'inventeur de la valise à roulettes...), de lieux aussi (l'image est époustouflante de brio, les éclairages et les cadrages idem), aussi trouduculdumondesques que sublimes/sublimés, et, entre les deux,  d'itinéraire, donc (si notre personnage se rend d'un point A à un point B, il évolue également, bien sûr, c'est ça le but du jeu, d'un état A vers un état A').
Trip qui démarre dans le jouissif pour virer soudain, peut-être un peu à l'aigre (il fallait bien qu'il y eût un défaut dans cette rutilante cuirasse, un grumeau de mauvais goût dans cette plaisante cuisine). Cheyenne (Sean Penn, donc) entame presqu'à contre-coeur un voyage jusqu'à son père défunt auquel il n'a pas parlé depuis trente ans (premier voyage), et se retrouve soudain lancé sur la piste d'un nazi à la traque duquel ledit père avait voué toute sa vie (deuxième voyage). C'est là que le bât blesse un peu (beaucoup) : à vouloir trop charger la mule, le réalisateur se tire hélas quasiment une balle dans le pied. Tout ce qui touche à l'Holocauste est extrêmement périlleux on le sait à traiter au cinéma. Et il est vraiment question ici, au minimum de maladresse et de faute de goût (et ce à deux reprises, lors de la séance de diapos et lors de la confrontation finale, deux scènes qui font plus que vous mettre mal à l'aise...). De toute façon, c'est cette dernière partie qui pêche, qui dérange, qui gène. Et la conclusion du film, aussi maladroite qu'agaçante (que je vous laisserai découvrir tout seul comme des grands...) nous faerait presque nous poser des questions sur le bien-fondé de l'entreprise : Quoi , tout ça pour ça ???
Le film est une succession, un enchaînement, de micro-plaisirs, parfois visuels, parfois musicaux, parfois sentimentaux, parfois esthétiques, parfois deux, ou trois choses en même temps, mais avec hélas donc quelques erreurs qui viennent un peu gâcher notre bonheur global de spectateurs(s). Et cette fin qui l'embourbe. heureusement, on a droit à un joli générique final qui se la joue encore une fois arty avec une rupture de ton musicale en plein milieu -me faisant je l'ai dit  opportunément à ce moment aux yeux me revenir les larmes-.
Donc, pas sans-faute, certes, mais pas sans (grand) plaisir non plus... (peut-être faudrait-il arrêter le film à 5 minutes de la fin ?)

 

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24 août 2011

scalpel

LA PIEL QUE HABITO
de Pedro Almodovar

Précisons d'emblée que j'ai depuis toujours un léger problème avec Pedrito : même si je vois voir chacun de ses films dès leur sortie (bien entendu uniquement en VO!), même si je prends un certain plaisir (souvent même un plaisir certain) à leur vision, j'en reviens au même constat : qu'il y manque toujours quelque chose pour que cela soit du "grand" cinéma (et j'ajoute en murmurant que, comme Quentin Tarantino par exemple, Pedro Almodovar fait partie des cinéastes surestimés). C'est du cinéma qui se dissout, qui s'évapore, dont, au bout de quelques temps, il ne reste rien, ou presque.
La sympathie qu'on pouvait avoir au début pour l'aspect trashy-provoc-movida s'est doucement émousseé/estompée au fil des ans, et ne resterait alors que quelques tics : relations familiales "complexes" (ton père est ta mère, ta soeur est ton frère, etc.) , changement(s) de sexe's), absorptions de susbtances diverses, et envie d'avoir enfin la fichue Palme d'Or à Cannes.
Et cent fois sur le métier donc il remet son ouvrage. Il a l'envie, mais il a aussi le talent. La technique, il faut le reconnaître, est irréprochable. Pedro connaît la grammaire et les codes sur le bout du petit doigt, et nous met tout ça hyper bien en place. mais, oui,  il manque quelqué chosé (pour parler français avec l'accent espagnol, et dieu sait si, à ce propos, il est doux à mes oreilles d'entendre parler cette langue si belle -je sais je ne suis pas objectif- et donc cet argument devrait me valoir une admiration sans bornes pour tous ces films, alors que non.)sans que je puisse dire précisément qué.
Là, ça commence plutôt mal à mon goût. les dix premières minutes du film sont pénibles, voire même chiantes (je me suis dit "je m'ennuie, là, si ça continue, je ne vais pas tenir deux heures, je pourrais presque envisager de sortir...") quand soudain, heureusement, le récit démarre vraiment (après ce deuxième flash-back "six ans auparavant"), la narration s'emballe, met les gaz, et empoigne vraiment le spectateur. Il faut dire que l'histoire, inspirée du roman de Thierry Jonquet Mygale, (que j'avais lu et apprécié  il y a très longtemps -même si je n'en avais plus trop de souvenirs : je me souvenais juste qu'il s'agissait de séquestration, de vengeance, et qu'il y avait un "truc" qui faisait frémir, mais je ne parvenais plus à me souvenir duquel) que l'histoire, donc, était suffisamment tordue et dans ses cordes qu'elle avait tout pour titiller notre Pedro, pour qu'à son tour il nous titillât, nous autres spectateurs..
il faut reconnaître qu'il y réussit plutôt bien. Le regard est clinique, le ton chirurgical, et cette histoire de folie(s) est presque inhabituellemnt grave, à ce point, en tout cas, chez Almo.
Glauque, malsain, venimeux, vénéneux, tous ces qualificatifs conviennent parfaitement. On ne peut pas trop déflorer l'intrigue, sous peine de gâcher le plaisir de la découverte du spectateur potentiel. Disons juste qu'il s'agit d'un docteur qui fait des expériences sur une peau de synthèse, et séquestre dans sa maison/clinique privée une mystérieuse jeune femme (à qui, il a, semble-t-il donné le visage de sa défunte épouse).  C'est noir, très noir, et c'est rien de le dire...
Il fauttout de même rendre à Georges ce qui lui appartient, et on ne peut passer sous silence (ce qu'aucun critique n'a omis de faire)  la filiation évidente (encore une histoire de famille...) du film avec Les yeux sans visage, de Georges Franju, (docteur maboul, demoiselle séquestrée, expériences, trouille...), en précisant toutefois que la comparaison entre les deux ne tournerait pas forcément à l'avantage de Pedro...
A part ça, ça fait toujours plaisir de revoir Marisa Paredes et Carmen M, les deux vestales maison (même si ça rigole nettement moins que d'hab'), et de saluer le retour -provisoire- au bercail (après tant de niaiseries américaines) de l'ami Antonio Banderas, dans un rôle plus mature et ... habité (dire qu'il y a quelques années, il se tortillait lascivement en slip sur un lit en sussurant  'follame, follame..." Les temps changent...)

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19 août 2011

un mariage / l'étoile mystérieuse

MELANCHOLIA
de Lars Von Trier

Deux titres, oui, car deux films pour le prix d'un, quasiment! Je le viens de le voir, et je dois dire que ça m'a plutôt secoué!
On commence par un préambule sublimissime, en ce qui me concerne. d'une beauté totale, absolue, et pourtant presque minimaliste : des images fixes croit-on d'abord mais qui s'animent à peine, soyeusement, péniblement : pluies d'oiseaux morts, de cendres, chutes, flammes, on sait d'ores et déjà à quoi s'en tenir... tout est dit, déjà, et il n'y a qu'à suivre le film pour y retrouver ces fragments échappés et suspendus. transfigurés.

S'ouvre alors la première moitié du diptyque, intitulée Justine, et consacrée à la première des deux soeurs (celle jouée par Kirsten Dunst) et qui, (unité de temps, unité de lieu, unité d'action) se déroulera pendant le mariage de cette dernière -enfin, juste le banquet et la fête qui suit- et, vue la quantité  d'invités et les moyens mis en oeuvre, il ne s'agit pas d'un mariage lambda... mais qui dit mariage fastueux ne dit pas forcément mariage heureux. Justine n'est pas bien dans ses petites chaussures de mariée, et on dirait qu'elle s'emploie systématiquement à faire tout capoter. Malgré un emploi du temps strictement minuté, elle n'est jamais au bon endroit au bon moment ni en train de faire la bonne chose.  Paradoxalement, cette partie pas forcément youp la boum est traitée avec une quasi-légèreté de comédie. pourtant, il y a de la souffrance, de la douleur, des reproches, des paroles blessantes échangées (Charlotte Rampling est assez terrifiante, dans le genre), des fuites, des règlements de comptes, des retours, des déchirements, des apaisements, mais comme si le réalisateur relativisait, en nous disant que, finalement, tout ça ne compte pas pour grand-chose. Comme si Lars Von Trier avait soigneusement collé son microscope tout près,  juste au-dessus, de l'agitation d'un nid de fourmis, visible mais pas forcément compréhensible, les avait observées soigneusement,  avant de tout à coup les abandonner, pour prendre de la hauteur, de l'ampleur, au-dessus d'un paysage plus global  dont elles font certes toujours partie mais où on les oublie, on ne les perçoit plus.M=

Vient alors la deuxième partie, intitulée Claire (la deuxième soeur, jouée par Charlotte Gainsbourg, qui aurait, tout autant que Kirsten Dunst mérité le prix d'interprétation à Cannes, mais bon, on ne pouvait peut-être pas lui donner deux fois de suite...) où l'on rentre dans le vif du sujet, enfin, celui que la pub autour du film nous a vendu : la planète Mélancholia fonce vers la terre, et ça va bientôt être la fin du monde. Oui ? non ? Claire craint que oui, son mari (joué par l'excellent  Kiefer Sutherland pour l'identication duquel il m'aura fallu tout de même attendre le générique de fin -glacial- ) pense que non,  leur gamin se dit que peut-être, et Justine, arrivée en piteux état dans leur maison -genre légume inerte- mais qui s'est reconstituée à vue d'oeil, sait des choses. remise d'aplomb, remise sur pied, pendant que sa soeur Claire , justement, commence à perdre pied, à sombrer dans le désarrroi, puis le désespoir, puis la panique... cette partie là est traitée "sérieusement" mais calmement. dignement, pourrait-on dire.

Nous accompagnons ces personnages jusqu'au dernier instant, inéluctable, inimaginable, et magnifique, qui génère une émotion d'autant plus violente et durable qu'elle est coupée cut et suivie d'un générique absolument et implacablement silencieux. Larmes aux yeux, alors, forcément.
Sublime, oui, forcément sublime.

(et j'aime bien l'idée, le "message" de Von Trier qui dit que, finalement, la dépression, le pessimisme, ça aide d'autant mieux à se préparer au pire...)


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17 août 2011

le garçon aux pâquerettes

UN CHIC TYPE
de Hans Peter Moland

Le titre est juste un clin d'oeil à La fille aux allumettes, d'Aki Kaurismaki, réalisateur auquel le film m'a fait penser. Même héros mutique ou c'est tout comme, mêmes personnages assez uniformément moches, même environnement grisâtre, même "humour" très noir et très froid. L'omelette norvégienne que j'évoquais dans Happy happy, ici, on a oublié de la passer au four. Glacé dehors et glacé dedans. ça pourrait faire mal aux dents.
Si j'évoque La fille aux allumettes, c'est parce que c'est pour moi un  chef-d'oeuvre dans le genre. Une noirceur ultime, assumée, aboutie, en même pas quatre-vingt minutes. Un condensé, une épure, un prototype. Pas un plan de trop.
Le film de Moland est finalement moins pessimiste (quoique), mais le réalisateur commet peut-être l'erreur, contrairement à Kaurismaki, d'un peu trop prendre son temps.
Ici, un mec qui sort de taule après douze ans reprend contact avec la vie réelle. Un "ami" lui trouve un logement dans le sous-sol de chez sa soeur (une souillon en dimettes particulièrement revêche), du travail dans un garage miteux, entre un patron aussi chrétien que bavard et une secrétaire aux faux-airs de de Florence Loiret-Caille (elle aussi, revêche, mais pour d'autres raisons). Il reprend aussi contact avec sa femme, qui ne veut plus le voir, et son fils, qui a fait croire à sa nouvelle copine que son père est mort. Ambiance. D'autant plus que l'"ami" en question (perpétuellement flanqué d'un sous-fifre tête-à-claques) voudrait bien que, en règlement de ses dettes, notre ex-taulard aille flinguer celui qui l'a balancé...
Après une exposition placide (c'est le moins qu'on puisse dire), le film se met en route, autour de cette micro-question : tuera-t-il, tuera-t-il pas ? mais force est de reconnaître que le réalisateur sait nous intéresser à cet univers pas joli-joli, ni joyeux-joyeux. On n'est vraiment pas au pays des bisounours...
La figure centrale, c'est Stellan Skangard, qu'on a déjà vu dans pas mal de films nordiques et/ou polaires, et il faut reconnaître qu'il fait merveille ici. Sa carcasse impressionnante semble abriter un personnage plutôt doux, placide, qui se fait mener par le bout du nez (et parfois d'autre chose) par les gens autour de lui. Sauf que, quand il se réveille, il peut se montrer très convaincant (la scène avec le mari de la secrétaire).
On le voit mal barré, plus le film avance, et d'ailleurs à un moment on peut se demander comment tout ça va se terminer, mais, habilement, le réalisateur parvient à nous étonner, avec une légère bifurcation de scénario, et réussit  même à placer en toute fin un quasi incroyable petit rayon de soleil printanier... A moins que ce ne soit, encore une fois un faux-semblant ?
Nordiquement plaisant, donc.

Merci, en tout cas, à JR et à ses conseils, qui m'a ainsi permis de découvrir ce film qui n'a pas eu la chance d'arriver jusque par chez nous...)

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(l'affiche est assez laide, mais représente assez justement le film...)

4 août 2011

continuons le combat

SALE TEMPS POUR LES PÊCHEURS
de Alvaro Brechner

(Je croyais faire le malin avec un film en hyper avant-première, vérification faite, il est sorti depuis mars 2011! Bien fait pour moi). Un lutteur professionnel neurasthénique et atteint par le limite d'âge (ceci expliquant cela ?) est coaché par un matamore hâbleur (sur le retour lui-aussi) et tous deux débarquent dans une petite ville trou du cul du monde d'un pays sud-américain pour y organiser un match truqué avec à la clé 10000 dollars (qui n'existent pas) si le challenger réussit à tenir tête trois minutes au champion du monde (enfin, à l'ex-).
Le début n'est pas très emballant : on a l'impression d'assister à un truc mille fois déjà vu : petit film indé sans moyen, exposition plate, couple masculin mal assorti sur lequel planerait l'ombre de Macadam cow-boy, situations prévisibles, personnages convenus, poncifs narratifs, bref, on soupire déjà et on s'apprête à prendre son mal en patience, quand  tout à coup, suite à une scène nocturne entre le catcheur dépressif et son "entraîneur", le film sort de la convention, passe à la vitesse supérieure, prend de la hauteur, aussi mystérieusement qu'indiscutablement, et, du coup, on n'a plus envie de zapper, on est harponné, chevillé, touché, attendri, par ce qui se joue devant nous. On est passé de l'anecdotique vaguement pathétique à l'émotion vraie.
Voir un film uruguayen n'est pas si courant, adapté d'une nouvelle de Juan Carlos Onetti qui plus est, et drôle en plus (ce qui est singulier chez Onetti, qui n'est pas vraiment le chantre de la rigolitude...) pour qu'on n'ait pas envie de le défendre. Malgré un début maladroit, le réalisateur nous livre in fine le portrait d'un looser magnifique, d'un has-been mythomane au coeur plus gros que le ventre, qui ne peut que nous attendrir (ah, ce geste magnanime qu'il a juste avant de partir...). Et l'acteur qui l'incarne (Gary Piquer, qui a participé aussi à l'écriture du scénario) n'y est pas pour rien, tant le personnage qu'il a composé nous touche, finalement, après nous avoir maintes fois agacés... Attendrissant.

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(l'affiche est très laide, on dirait qu'elle a été composée en quarante-cinq secondes...)

30 juillet 2011

systématique

THE NATIONAL

The National 2001 TheNationalSadSongs The National - Alligator national_boxer_cover The-National-High-Violet1-1024x1024

Voilà voilà... les 5 albums de ce groupe que je viens de découvrir, tout à fait par hasard... Quand j'aime je suis systématique , il faut que je connaisse tout ce qu'il est possible de. Je connaissais juste la première chanson du dernier album, que j'avais sur mon ordi, mais que je ne trouvais pas renversante... quelle erreur! J'ai donc découvert High violet, par un enchaînement de hasards, que je me suis mis à écouter  dans la voiture, au milieu d'autres albums, puis en boucle juste celui-là, et, après avoir un peu farfouillé sur le ouaibe et réalisé à côté de quoi j'étais passé, je me suis donc procuré les autres! J'en ai trouvé un à Besac (High Violet expanded), un autre à Vesoul (Boxer) et le reste j'ai téléchargé en payant! (presque tout... mon honnêteté me perdra).
Voilà, voilà... Comment ai-je pu vivre aussi longtemps en passant à côté de ça ? Visiblement Libé adore, et leur a même consacré une pleine page, eh bin je ne l'ai pas lue, figurez-vous, ou en tout ca ça ne m'a pas frappé.
The National, c'est d'abord une voix, celle du chanteur, une voix basse (certains disent râpée à la clope et à la bibine...) qui évoque un peu celle du chanteur des Tindersticks, c'est ensuite une batterie , musclée, virile, et puis des textes (la poésie simple du quotidien, les histoires d'amours qui finissent mal en général, un doux mal-être habituel, une tristesse à la Arab strap) pour des morceaux qui peuvent être soient des balades plutôt calmes néo-folk bord des larmes mais jamais mièvres, où au contraire des choses plus nerveuses /énervées, avec des montées de rage soudaines très souvent larmes aux yeux, et c'est, enfin, des belles guitares juste comme j'aime... Je n'ai plus qu'une envie, c'est de les voir en concert, mais bon, ils tournent actuellement en Europe de l'Est, et partent ensuite en Australie...
Si vous devez n'écouter qu'un album, je vous conseille Boxer...

27 juillet 2011

atavisme et duffle-coat

SUBMARINE
de  Richard Ayoade

So british...
So lovely...
So deuxième degré (à prononcer avec l'accent anglais, pas si facile)
Un film à mi-chemin entre Un amour de jeunesse pour le thème (un ado et une adote / je t'aime / je t'aime plus / je te raime finalement) -ça devrait plaire à Zvezdo hihi- et Beginners pour la forme extrêmement et de fort plaisante façon chiadée (ça devrait plaire à Mimi et énerver Zabetta & Catherine hihihi).
Oliver's story : il a 15 ans, Oliver, une bonne tête de bébé joufflu, éternellement en duffle-coat, c'est lui le héros et la voix-off, qui nous raconte son histoire, d'amour, physique avec la jeune Jordana, et filial avec sa mère qu'il soupçonne d'avoir une aventure avec un ex (amant) mais nouveau voisin.
deux histoires simples et plutôt ordinaires, n'était la façon dont elle(s) est:sont racontée(s) : avec moult tripatouillages formels plutôt plaisants (en ce qui me concerne) et des dialogues souvent percutants (acerbes) qui naviguent  entre sourire et éclat de rire.
Rien de révolutionnaire, mais on passe vraiment un bon moment. et le générique prouve, à son corps défendant, qu'on ne saurait pouvoir tout justifier (attention humour).
Maintenant que je réalise avec horreur que j'oublie quasi totalement la plupart des films que je vais voir, je me demande ce qu'il restera de celui-ci, par exemple, dans quelques mois...
Délicieux et rafraîchissant comme un petit sorbet par temps d'été normal (pour cet eté-ci je devais plutôt écrire "délicieux et réchauffant comme un bon petit grog").

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23 juillet 2011

ave maria

LOURDES
de Jessica Hausner

Vu hier soir sur ma télé (alors qu'il sort la semaine prochaine... eh oui, il y a même des gentils distributeurs qui nous envoient des films avant leur sortie, afin qu'on puisse justement les voir avant de les programmer). J'avais été moyennement conquis par le précédent Hôtel de la réalisatrice (et surtout sa fin très abrupte et très sombre -au sens propre du terme-), donc j'abordais celui-ci avec un enthousiasme modéré, vu en plus le thème du film...
Plusieurs personnages féminins s'en partagent la vedette : Christine (Sylvie Testud, parfaite), la "miraculée" ; Maria (Léa Seydoux) la bénévole qui s'en occupe, Cécile (Elina Löwensohn) la chef bénévole, et (? -est-elle seulement nommée dans le film ?-) la voisine de chambre de Christine (Gilette Barbier, quasiment muette pendant tout le film, mais personnage-clé, même si fermée à double-tour!). sans oublier la Vierge Marie, tellement omniprésente (par l'image mais aussi par le son) qu'elle joue forcément la cinquième roue du carosse de cet attelage féminin.
Lourdes, le décor, est déjà en soi tellement chargé (et lourd) de sens, (justement) qu'il suffirait de peu de chose pour que le film bascule. Avec une dextérité remarquable, Jessica Hausner trace son chemin, pile-poil sur le mince fil en équilibre, ni du côté du sabre, ni de celui du goupillon. Avec une précision et une objectivité de documentaire animalier. Sans ricaner, sans non plus se pâmer. Dire les choses, dire une chose, indicible a priori : évoquer un miracle.
Il est beaucoup question (impie, blasphème, anathème ?) d'aimer -son prochain- (et des impossibilités de ceci, à cause de l'infirmité, ou de la foi, ou de la maladie, ou du mysticisme, ou du doute) et Bruno Todeschini est tout de même ici le centre de ce cercle féminin désirant, l'objet de toutes les convoitises...
Un film solide, troublant, intelligent.

 

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