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lieux communs (et autres fadaises)
27 novembre 2007

rapports

LA QUESTION HUMAINE
de Nicolas Klotz

Désemparé. Voici un film qui m'a laissé complètement désemparé. J'en suis sorti sonné (la dernière scène est tétanisante dans son absolu -et nécessaire- minimalisme), c'est la seule certitude.
Avant ? Je me souviens d'avoir été mal à l'aise, d'avoir gigoté dans mon fauteuil, mal aux jambes, changer de position, inconfortable, pas vraiment dedans, parfois. Le film nous dépeint le parcours d'un psychologue (Mathieu Amalric), rattaché au département des ressources humaines d'une multinationale (au nom allemand, le détail a son importance) et chargé par un sous-chef (Kalfon) d'espionner un chef-chef (Lonsdale) qui semble ne pas aller très bien dans sa tête, aux dires de sa fidèle secrétaire. Il va donc avancer masqué et s'en rapprocher, avec maintes précautions et milles paires de gants, pour découvrir ce qui cloche et pourquoi, va donc fouiller dans les archives, et finir par exhumer un passé nauséabond en mettant au jour un rapport d'ingénieur pondu dans les années 40, concernant l'optimisation du gazage des juifs dans les camions prévus à cet effet.
Le film progresse suivant deux, (voire même trois) axes parallèles mais entrecroisés (ce qui, géométriquement, je le sais, est une absurdité) : la "face visible" du personnage d'Amalric, avec d'une part son "travail", ses entretiens d'embauches, et d'autre part ses manoeuvres de "recherche", ses relations avec les divers protagonistes de l'histoire (le plus souvent relations de travail, en tout cas relations sociales) et la face cachée (ou nocturne) du même personnage, qui semble mener la nuit une vie apparemment inconciliable avec ses journées de travail quotidien.
Vie agitée, étrange, musicale, avec sa copine (chanteuse ?), sa bande, des raves plutôt mystérieuses dans des clairières, des abus de boissons et de substances prohibées, des situations, des rencontres, des comportements, bizarres, à moins que ce ne soient des rêves... Comme si, paradoxalement, au fur et à mesure que la première ligne de récit s'élabore, progresse, l'autre au contraire dérivait, se fragmentait, se désagrégeait. D'autant plus que le film est long (trop), et que j'ai eu, à plusieurs reprises, le sentiment que le réalisateur faisait durer chaque plan juste un peu plus longtemps qu'il n'aurait dû.
Le monde de l'entreprise est traité, dès le début (des mecs en costume sombre dans des toilettes immaculées) comme un objet de fascination et de répulsion (de sidération pour utiliser un terme en vogue), par définition inhumain et dégueulasse. Un monde très froid traité de façon très froide, normal qu'on finisse par claquer des dents. la qualité de l'interprétation n'y est pour rien. Oui, tout ça m'a glacé.

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26 novembre 2007

english breakfast

A VERY BRITISH GANGSTER
de Donal McIntyre

Où "la réalité dépasse la fiction". Vraiment (et ce n'est pas un effet de style). Voici Dominic Noonan, un vrai caïd du vrai Manchester de la vraie Angleterre, sa vraie famille, sa vraie vie (ou ce qu'il veut bien en dire.) Au début le film amuse, c'est monté speed, il y a de la bonne musique, et ce bon gros chauve à lunettes plutôt souriant avec ze big gourmette, bagouzes aux pouces blingbling, portable en sautoir, paraît juste trop gentil pour être honnête. Il fait la loi (gentiment) dans son quartier, où il remplace la police, règle les querelles familiales ou de voisinage, etc. Pour un peu, il ferait traverser les petites vieilles...
On sourit déjà un peu moins lorsque le portrait devient plus précis (réaliste ?) : le business, le fric, la "famille", les procès dont il sort toujours innocent et blanchi comme l'agneau qui vient de naître, la taule, la religion (!) et jusqu'à ses préférences sexuelles (il se revendique désormais comme gay -tiens, pour une fois qu'il y en a un qui ose le reconnaître...-, car, comme le souligne délicatement l'interviewer "il préfère la banane à la figue".)
On a sans cesse l'impression qu'on assiste à une fiction plutôt bien goupillée, qu'une armada de scénaristes a peaufiné ce portrait plus vrai que nature, les réactions, les rebondissements, les interviews, et pourtant il semblerait bien que tout cela soit réel, de a jusqu'à z (je pense qu'il faudrait un deuxième alphabet complet pour inclure ce qui a été "omis".) Et ça fait un peu gloups! dans la gorge.
Ce qui fout encore plus les jetons, ce sont les autres membres (mâles) de la famille, notamment son frère Desmond, "exécuteur" addict au crack (la scène où il est interviewé est à la fois drôle et glaçante),  qui finira d'ailleurs au cimetière lors d'une grandiose scène en grande pompe pince moi je rêve c'est Le Parrain ou quoi ? Mais, plus, encore, c'est la jeune génération : les jeunes lieutenants embauchés par Noonan comme garde rapprochée (en tant que bras droit, bras gauche et bras du milieu) qui avouent sans ambages que "les anciens (gangsters) tuaient et détroussaient pour (sur)vivre, se défendre, tandis que eux le font pour l'adrénaline, pour le fun, parce qu'ils kiffent ça...", et, de la même façon les gamins de la vraie famille : le plus jeune fils de Noonan "sur la photo il a l'air d'un ange, mais c'est un sacré petit salopard" (Noonan himself), les cousins, filleuls, tous semblent vivre dans un autre monde que celui des braves gens. Ailleurs, années-lumières. Et semblent trouver ça agréable et plutôt normal.
Comme disait Zabetta en sortant, on se croirait dans du Ken Loach... Mais là c'est du vrai. La Grande-Bretagne des petites gens est sinistrée (Merci Maggie!), la démerde (et donc la violence, ou l'illégalité) sont devenues la norme, question de survie.
Le film a obtenu le Grand prix au Festival du Film policier de Cognac. C'est la première fois qu'un doc l'obtient, mais c'est indiscutablement mérité.

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24 novembre 2007

instruments de fortune

LA FRANCE
de Serge Bozon

Très, très étrange.
Un fantôme de régiment (un régiment de fantômes) à la dérive, venu d'on ne sait pas trop où (et allant on ne sait pas trop où non plus) est rejoint par une demoiselle (Sylvie Testud, parfaite comme d'hab') habillée en garçon qui veut aller retrouver son mari, quelque part au front (on est en 1917, dans le nord de la France). Dans quel état ils errent, je ne vous le fais pas dire. Elles les colle, ils bougonnent, mais finissent par l'accepter, de plus ou moins bon gré.
Paysages mouillés, branches qui craquent, glaise, bivouacs, sentinelles, feux de camp et baies des bois (pour grignoter). Bandes molletières et capotes. Lumière froide et quasi-hivernale, notre petite troupe vague et divague. Piétine, s'arrête, se cache parfois. Et parfois aussi se met à chanter. (La première fois surprend vraiment.) Les voix sont des vraies voix de vrais gens, pas forcément justes, mais en celà touchantes, et les instruments au diapason (connaissez-vous le choucroutophone ?), pour nous dire à quatre reprises et variantes l'histoire (si j'ai bien compris) d'une jeune fille aveugle qui attendrait son amoureux, chansons qui se terminent par un répétitif "Est-ce qu'il viendrait vers moi", ad libitum. Chanson de gestes peut-être, mais quasiment immobile. Surplace.
La course du lièvre à travers les champs. Quelque chose de furtif, de peureux, d'imprévisible. On avance en zigzags, apparemment au hasard, on s'arrête pour la nuit, on construit un radeau, on affronte une sentinelle. On (se) raconte des histoires, on tourne autour du pot...
Les cadrages sont léchés, les acteurs-soldats sont nickel (un bravo spécial à François Négret, plus guère revu depuis De bruit et de fureur), bref on suit cahin-caha cette odyssée ban(c)ale à volonté d'épure (un genre de minimimalisme sec, de lyrisme riquiqui) où le manque de (la simplicité des) moyens, revendiqué et assumé, serait comme un petit étendard narquois et dérisoire, claquant un peu, moitié gelé, au vent mauvais.
On a le droit de trouver ça un peu longuet (surtout à la fin), n'empêche que voilà un bel objet de cinéma sacrément intriguant.

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23 novembre 2007

manifestations

DE L'AUTRE CÔTE
de Fatih Akin

C'est très beau, c'est très fort, c'est très bien fait (et c'est énervant de penser que le réalisateur a à peine trente et quelques années, tant de talent, c'est indécent, c'est agaçant, et en plus il est craquant... tiens me lancerais-je dans la critique blonde ?)
Venant après le très destroy Head-On et le joyeusement bordélique Crossing the bridge, De l'autre côté pourrait, à première vue, ressembler à une respiration apaisée. On pourrait même parler de film de la maturité, s'il n'en avait pas déjà fait preuve, notre Fatihchounet, dans ses opi précédents, de maturité grave.Il est, encore une fois, question de racines, (et de déracinement), d'affection (et de désaffection), de familles (et de défamillement ?),  avec toujours ce très grand écart, géographique, affectif, social, douloureux entre la Turquie et l'Allemagne.
Le film est divisé en trois parties, la première, grosso modo,  met en jeu un père, sa maîtresse et le fils de celui-là, la seconde, tourne autour d'une mère, sa fille, et la maîtresse de celle-ci (qui est la fille de la maîtresse du père du premier segment, mais aucun des personnages ne le saura), ces deux parties "annonçant la couleur" par leur titre ("la mort de Yeter", "la mort de Lotte"), tandis que la dernière partie se décentre sur un autre triangle : la mère, du fils et de la fille, avec à la toute fin (assis,face à la mer, très Barton Finkesquement) l'amorce peut-être d'un nouveau lien (ou plutôt d'un lien renoué, retrouvé). Certains (clic clic Hervé) n'ont pas aimé les coïncidences, moi, ça ne me gène pas, bien au contraire!
Comme je l'ai dit plus haut, c'est très fort, mais en même temps très finement fait. Les personnages, comme tout un chacun, sont doubles (ou tout du moins duels) : Le papa turc est parfois un sacré rigolo et d'autres fois un vrai sale con, (très jolie scène avec son fils, où, mangeant une glace, il lui demande tout à trac "Et en ce moment, tu baises qui ?" sur le ton de la conversation la plus badine), la maman allemande (Hanna Schygulla, retrouvée, après toutes ces années, merveilleuse) est parfois une vieille réac rigide et d'autres fois  profondément humaine...
Ces êtres sont incomplets, en recherche, double ou moitié, bref ce qui manque ce qu'on cherche ce qu'on a perdu... Et leurs trajectoires sinuent, zigzaguent, parfois se brisent ou simplement s'infléchissent, dévient. La vieillesse, la solitude, l'engagement, la sagesse, le savoir, l'amour... Tous ces liens qui nous lient ou délient, qu'il faut parfois avoir le courage de rompre, ou au contraire de renouer... Etre capable d'affirmer un choix, une révolte (d'ailleurs les deux premières parties débutent chacune par une manif'... C'est dans l'air du temps, hein ?)
On sort de là les yeux pas trop secs, le coeur un peu chamboulé, la tête... apaisée ? Merci, Fatih! (j'aimerais de tout coeur être capable de dire merci en turc...)

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19 novembre 2007

heaven

FAUT QUE CA DANSE! (2)
de Noémie Lvovsky

J'y suis retourné parce que je voulais en avoir le coeur net : est-ce que c'était vraiment si bien que ça ? Un film qui vous reste si longtemps en tête (et en coeur), ça cache quelque chose ; en plus j'avais lutté contre la fatigue à un moment et je voulais voir ce qui m'avait alors échappé. et quand j'ai écrit mon billet, j'avais parfois du mal à faire le tri entre les deux films avec Valérie Bruni Tedeschi que je venais de voir : il y a finalement trois choses en commun : la piscine, le bébé et le vomi (mais ça n'a aucune importance)
Les deux qualités frappantes du film,  c'est d'abord cette "légèreté" (j'ai un peu de mal à trouver le mot exact... aérienneté ? ) cette façon de parler de choses graves, sombres, sans jamais s'apesantir, insister, surligner. La vieillesse, la mort, la solitude sont omniprésentes, et pourtant ça rigole et ça virevolte. Douceur, délicatesse, drôlerie. Et la seconde, c'est l'extraordinaire justesse de l'ensemble des acteurs. Rarement on les a vus à ce point en état de grâce. D'une finesse émouvante. Et en même temps d'une grande simplicité.
J'avais à peu près cité les principaux dans mon précédent post, je rajoute monsieur Mootoosany (Bakary Sangare), le grand black débonnaire (en plus il a des yeux qui, je ne sais pas pourquoi, m'ont fait penser exactement à ceux de Nard, mon ami bûcheron, et de penser comme ça à lui, ça a encore rajouté à mon émotion) dont le sourire immense vient ensoleiller tout ça encore davantage.
Et j'ai été aussi sensible au fait que c'est un film où on voit au moins autant qu'on vit. Bulle Ogier, perdue dans la contemplation d'on ne saura jamais quoi, les divers extraits de films qui interviennent dans le récit, les rêves que font les un(e)s et les autres, les histoires qu'ils (se) racontent, et les écrans divers qui sont contemplés en mangeant (de Vikash Dhorasoo aux poissons joufflus d'un aquarium de restaurant), c'est vraiment au plaisir de l'oeil.
Faut que ça danse! entre ainsi dans mon panthéon personnel des films qui "font du bien et qui pourraient presque vous redonner foi en l'humanité" (comme FisherKing, comme Cria Cuervos, comme Syndromes and a century...) Si j'ai les yeux mouillés à la fin, c'est déjà bon signe, mais si en plus j'ai un sourire béat, ça se précise, et que, en plus, j'entends me dire "merci pour ce film"  la copine que j'y avais emmenée, il n'y a plus de doute, c'est direction le top 10.

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18 novembre 2007

petit jeune homme

Tiens je vais me faire (je vais NOUS faire) un peu de pub.
Le mardi 4 décembre à 19h30 dans le hall du Thé' V' (ce théâtre a deux noms : la gauche (? gauche ?? vous avez dit gauche ?) en son temps ainsi le nomma,  mais comme c'est désormais l'UHèmePet qui règne ici et quasi sans partage, il a pris le nom de Théâtre Edwige Feuillère, qui est "la" seule gloire nationale née ici) de Vesoul aura lieu l'évènement pour lequel nous travaillons depuis quelques week-ends : la lecture publique de L'exercice de la raison de Jean-Luc Lagarce (dernère pièce de l'auteur publiée par les Solitaires Intempestifs, mais écrite il ya très longtemps, puis refusée par les Comités de Lecture, et ayant finalement servi de matrice aux Prétendants, du même, plus tard : je ne suis pas omniscient, c'est juste écrit sur la quatrième de couv')
Un genre de Conseil d'administration, une nomination (une destitution ?), les jeux du pouvoir (des pouvoirs), les discours et les apartés, l'officiel et les à-côtés, et surtout dix-sept personnages (yesss, 17!), mais notre metteur en scène a préféré une distribution réduite (hihi!) et nous ne serons ainsi que seize! (régis jouera deux maris). Seize chaises, seize pupitres, seize voix donc ce mardi soir-là, à 19h30. Je lirai le rôle du Premier Adjoint. Si vous passez par làet que vous voyez de la lumière...

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(c'est moi qui l'ai fait...)

17 novembre 2007

claquettes

FAUT QUE CA DANSE!
de Noémie Lvovsky

Sentiment étrange que d'avoir vu deux films quasi jumeaux (ou plutôt faux-jumeaux, ou encore mieux, fausses-jumelles!) en voyant, juste après Actrices, le film de Valeria Bruni-Tedeschi avec Noémie Lvovsky, Faut que ça danse!, celui de Noémie Lvovsky avec Valeria Bruni-Tedeschi!
Le film est aussi une histoire de Famille, autour du personnage de Salomon (Jean-Pierre Marielle, impérial, merveilleux, sublime, sidérant, les qualificatifs me manquent pour dire le plaisir de retrouver cet immense bonhomme, qui, comme certains vins, se bonifie encore en vieillissant) dont l'ex-épouse  évanescente (Bulle Ogier) délire doucement, garde-maladée par un grand black rigolard, histoire, donc,  racontée par sa fille Sarah (Valéria BT), mariée à un doux barbu (Arié Elmaleh). Salomon passe des petites annonces et va par ce biais rencontrer la douce Violette (Sabine Azéma)...

Il y a un lien de parenté certain entre les deux films, même si les thèmes et le traitement diffèrent quelque peu (la preuve, d'ailleurs, c'est que je commençais un peu à les mélanger tous les deux.) La première différence c'est la musique, opéra pour Actrices et juste Archie Shepp pour celui-ci. Jazz, impros, saxo, qui accentuent la forme plutôt libre, décousue, voire débraillée, du film.
Salomon ne veut pas vieillir, sa femme ne veut pas être raisonnable, sa fille ne veut pas être enceinte, etc. Tous ces joyeux doux dingues sont contre quelque chose. Chacun dans son histoire, son intrigue, des fois ça se croise et d'autres pas. On passe d'une vignette à l'autre, d'une bulle à l'autre, parfois ça fait juste plop et parfois ça fait pschittt! Inégal, un peu cahotique, mais tout à fait délicieux. Ca part un peu dans tous les sens, mais on s'y sent bien, on déambule avec chacun des personnages, quelque part entre l'Iosselliani  de Jardins en automne et la Chantal Akerman de Demain on déménage. Un comique  en demi-teinte, plus sourire que gorge déployée d'ailleurs.
L'expression sur le fil serait ici assez juste. Entre le rire et les larmes, entre espoir et désespoir, entre réel et autre chose, car Noémie Lvovsky (décidément je l'adore, cette dame!) dans son ouvrage de dame, a brodé cette trame légère fofolle de quotidien loufoque sur une doublure beaucoup plus sombre, beaucoup plus opaque, beaucoup plus amère : la deuxième guerre mondiale, la Shoah, la guerre, mais avec toujours une certaine pudeur, une politesse du désespoir (en filigrane, toujours, exception faite d'une scène affreusement culottée, d'un excessif mauvais goût mais d'une extrême drôlerie qui risque de rester dans les annales, celle dite "de la chambre d'Adolf" (je ne vous en dirai pas plus!) mais j'ai vraiment éclaté de rire)
Après Oublie-moi, La vie ne me fait pas peur et Les sentiments, Noémie Lvovsky  nous offre son nouveau petit  cocktail personnel et (d)étonnant. Avec une famille d'acteurs (téléramuche dirait "en état de grâce") tous formidablement au diapason (on aurait tous envie de les embrasser, pour des raisons différentes) dans leurs partitions pourtant éclectiques.
Comme chantait Fred Astaire (qui pourrait être l'ange tutélaire du film) à la fin de La rose pourpre du Caire,  "Heaven, I'm in heaven..."

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15 novembre 2007

in the mood

ACTRICES
de Valeria Bruni Tedeschi

Début de la semaine chargée culturellement : hyper-avant-première (le film sort le 24 décembre!) du film de Valeria BT. Bon, une petite trentaine de personnes dans la salle, pas le flop total, mais indéniablement moins de monde que pour l'avant-première de C*mping ou du Coeur des H*mmes 2. Tant pis pour eux. Ils ne savent pas ce qu'ils perdent.
J'aime bien Valeria et ses états d'âme de petite fille riche. Longtemps cantonnée (en tant qu'actrice) dans les rôles plus que border border line, ou tout du moins décalés dirons-nous, la voilà (en tant que réalsatrice)qui se (re)met en scène (comme on se remettrait en selle après un accident de cheval ?) et le résultat est sans conteste plus que plaisant. Son premier film (Il est plus facile pour un chameau...) parlait des difficultés d'être riche pour une demoiselle qui lui ressemblait plus qu'un peu. Ce film-ci traiterait des difficultés d'être actrice, mais aussi (et surtout ?) d'être une femme de quarante ans sans enfants. Pour une demoiselle qui continue de lui ressembler.
Elle joue ici Marceline, une actrice engagée pour jouer Natalia Ivavnovna dans une pièce de Tourgueniev (Un mois à la campagne) sous la férule d'un metteur en scène caractériel (Amalric). Marceline a quelques problèmes pour entrer dans la peau (et la robe verte, surtout) de son personnage. Marceline voudrait avoir un enfant (mais ce n'est pas dans ce film-là qu'elle l'aura), et envisagera, à cette fin, plusieurs PPP (pères porteur putatif). Marceline s'interroge...
Alors elle parle. Elle cherche, elle hésite, elle s'emporte, se rapporte, fait le point, perd le cap, tergiverse... Avec sa mère, avec la Vierge Marie, avec son père mort (Maurice Garrel), avec Jean-Luc le machiniste, avec son personnage (Valeria Golino), avec l'assistante du metteur en scène (Noémie Lvovsky, également co-scénariste du film), avec le jeune premier ténébreux de service (Louis Garrel), avec sa gynéco à qui elle raconte ses rêves, et même avec le joli maître-nageur de la piscine où elle va régulièrement nager.
C'est un bien beau film sur les actrices, mais aussi sur le théâtre, (la vie d'une pièce, de la première lecture à la représentation finale), un film sur la représentation, justement, théâtrale, certes, mais celle, plus personnelle, qu'on offre aux autres de soi-même.

Le film débute avec un piano qui s'élève dans les airs et se termine quasiment avec la chute d'un corps dans l'eau. La pesanteur et la grâce, contraires, contrariées. Ascendant descendant, action, réaction... Heureusement, il y a Glenn Miller.

18765007_w434_h_q80 (pas encore d'affiche)

12 novembre 2007

étoiles

LES PROMESSES DE L'OMBRE
de David Cronenberg

Trrrès trrès éprrrouvante experrriment (hmmm difficile beaucoup je écrrrire française langue comme dans française verrrsion du filmovitch de Crrronenbergskaïa) oui oui (smiley avec les joues roses de honte mais c'est pas de sa faute parce qu'il n'y a pas dans la région de copie en vo) je l'ai vu hier soir en version française  et je le dis bien haut, cette version française est calamiteuse. C'est bien ce qui m'avait semblé en voyant la bande-annonce (effroyable aussi avec tous ces "russes" qui parlent "français" en roulant des r et en plaçant mal exprès l'accent tonique) mais je me suis fait violence (quelle histoire!) y  amenant même  une copine!) et me suis décidé.
J'ai pensé, dès le départ (couic! un meurtre au rasoir avec   la gorge ouverte et  le sang qui pisse et qui fait bllllglllgllllll à gros bouillons) que j'avais peut-être fait une erreur (oui oui en plus j'avoue j'ai horreur des histoires de mafia, qu'elle soit italienne russe américaine ou même tonkinoise...) et la première demi-heure semblait bien hélas me donner raison : Naomi Watts est blonde et naïve (comme dans Mulholland Drive), Vincent Cassel est énervé et insupportable (comme d'habitude), Armin Mueller-Stahl est un immonde salopard à l'air bon dieu sans confession (comme dans Music Box), Viggo Mortensen est impénétrable et impressionnant (comme dans History of Violence), rajoutez la mafia, la violence omniprésente et, dirons-nous, complaisante, et, indéniablement, on se dit que, oui, ça démarre mal. J'ai d'ailleurs dit à ce moment à ma copine "je déteste ce film", et, à sa proposition de quitter la salle, j'ai tout de même résolu de  laisser au film encore une petite chance...)
Mais cette histoire de mafieux russes in London, de jeune prostituée ukrainienne droguée violée enceinte et assassinée, soignée (en vain) par une infirmière blonde et pure, qui ô hasard tombe sur le journal intime de la pauvrette (journal qui va nous être lu par bribes, en fil rouge et en voix off tout au long du film, mais encore une fois hélas avec ce grotesque accent ukrrrainien, ce qui nuira encore une fois à l'émotion de l'entreprise), et qui, mettant le nez dedans va passer de l'autre côté, dans le monde glauque du crrrime organisé  tovaritch avec beaucoup vodka beaucoup tatouages virils et langage idem (une femme ici ne peut être qu'une salope ou une pute, sauf babouchka, et encore rien n'est moins sûr) tueurs impassibles gorges tranchées  guerre des gangs, et trrrès méchant parrain cruel qui veut rrécupérrer jourrnal pauvrre Tatiana, avec fiston un peu taré sur  borrrds (de la Tamise ou de la Volga?), sans oublier bortsch balalaïka et kazatchok, mais qui (l'infirmière du début de la phrase, vous suivez ?) va trouver peut-être amourrr en croisant les yeux du tueur impassible quand il enlève ses lunettes noires et vient lui rapporter  sa moto qu'il vient de réparer, cette histoire donc, pourrait sembler banale et déjà vue (et convenue ? oui, et convenue) pour qui fréquenta jusque là assidûment la filmographie de David C., (remember Crash, La mouche, Vidéodrome, Faux-semblants...) et serait donc en droit de penser que le susdit a déjà été, dans ses oeuvres, plus original  plus audacieux et plus dérangeant (la violence à l'écran n'étant pas pour moi un signe d'originalité ni d'audace).
On en donc là de ses ronchonneries cinéphiles lorsqu'on réalise que tiens on maugrée un peu moins, tiens on regarde soudain avec un peu plus d'attention, et que petit à petit on s'intéresse à tout ça. Non seulement les faits et les situations, mais aussi comment dire... les articulations souterraines de cette histoire, les muscles et les nerfs mis en oeuvre sous l'épiderme de cette histoire, et, plutôt qu'à ce qui est raconté, on s'intéresse à la façon dont c'est raconté.
Et c'est vrai que Viggo Mortensen y est (de plus en plus) pour quelque chose, dans cet intéressement progressif. La pub, les journaux spécialisés, les interviews promo nous l'ont vendu comme  "un corps mutant" (il fallait bien justifier sa présence, raccrocher son apparence à la problématique des films antérieurs de Cronenberg, qui n'a jamais caché sa fascination pour ces altered states, ces états intermédiaires (homme / machine, normalité / folie, humanité / monstruosité), bref on n'allait pas juste vous dire "Il joue un gros bourrin musclé tatoué de partout").
Je dois reconnaître que j'ai une aversion quasi viscérale pour les tatouages, surtout en aussi grand nombre (il y a longtemps, dans Indian Runner, de Sean Pen, Mortensen jouait déjà un frangin poly-tatoué dont les apparitions me gâchaient un peu le film, oui oui je suis une petite chose fragile) et que le film joue là-dessus, avec un genre de fascination morbide (regardez ce qu'est un homme, un vrai de vrai corps d'homme, un tatoué, et russe bien sûr!) puisqu'il y consacre avec gourmandise tout son générique de fin. Mais cet homme, aussi illustré en surface qu'opaque à l'intérieur est, c'est certain, l'axe central de toute cette machinerie somme toute un peu énervante et vaine. Le pivot, le coeur du mécanisme.
Il sait extrêmement bien rester en-dedans de lui même, rien qui dépasse, aussi expressif qu'un bloc de glace juste sorti du frrrezerrr (plus froid encore qu'ukraine et kamtchatka rrréunis boljemoï ça me reprendrrre) mais, en même temps il a une façon très personnelle d'émettre des signaux infra-émotionnels (dur à expliquer : il fait passer des choses mais parfois sans manifester aucune émotion apparente...) et quand il passe à l'action, alors-là, mamma mia!
Il y a dans Les promesses de l'ombre (quel titre idiot, d'ailleurs!) une scène après laquelle le film entier bascule, vous avez dû en entendre parler, c'est celle dite "du hammam". Doublement sidérante, à la fois par l'extrême violence des combats qui y sont montrés, et aussi par le fait que Nikolaï (Viggo Mortensen) la joue comme on est dans un bain turc, c'est à dire complètement à poil. Je l'ai regardé assez attentivement (évidemment, dès qu'il y a un homme nu quelque part...), mais ma copine qui s'était caché les yeux m'a confirmé que "juste avec le son, c'était aussi horrible".
La deuxième scène forte c'est la scène finale, au bord de l'eau : quatre protagonistes mais avec une quantité de filiations et de liens familiaux possibles : amant et maîtresse, amant et amant, mère et fille, frère et frère, etc. (le sous-texte gay clignotant ici joyeusement) mais finalement rien ne se termine tout à fait comme on aurait pu croire...
Au final, donc, un sentiment mitigé (je suis par curiosité allé voir les étoiles critiques décernées sur allociné point freu et ouh lala tout le monde ou presque y va de son quatre étoiles carrément. Je me retrouverais donc plutôt dans la mouvance l'Huma ou Ouest-France -mais j'assume tout à fait-) de quelque chose qui a très mal commencé et se finirait plutôt très bien (cinématographiquement, je veux dire), sans qu'on puisse exactement expliquer ce qui s'est passé...

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10 novembre 2007

noir c'est noir

LE RÊVE DE CASSANDRE
de Woody Allen

Tiens, un film qui colle le bourdon comme ça, un vrai de vrai, ça faisait longtemps que ça ne m'était pas arrivé. (Mais peut-être n'était-ce dû qu'à une conjonction : celle du film lui-même, certes, mais aussi du dernier jour de ces vacances, de la baisse brutale des températures, de l'écoutage des infos sur france-imper, de la nuit noire et sans lune, du vague à l'âme caliméresque, etc.) Ou c'est peut-être juste que je me suis empathiquement trop identifié à Colin Farrell (qui joue ici le dépressif torturé de service, si si je vous jure)

Deux frères pas très riches s'achètent un bateau qui donne son titre au film et son huis-clos final au même (comme quoi, dans un film, rien n'est jamais gratuit, n'est-ce pas Hervé ?), ils ont donc des problèmes de liquidité, (l'un est un joueur compulsif et l'autre un ambitieux) qu'ils vont résoudre grâce à un genre de providentiel Tonton d'Amérique. Tonton qui (pourquoi tu tousses ?), en échange, va leur demander un petit coup de main. Que la morale bien sûr réprouve (il faut bien que le bât blesse quelque part). Ce qui va provoquer des flottements chez les deux frangins, qui ont bien du mal à passer à l'acte (et la scène dudit passage à l'acte va être tendue au maximum par notre Woodychounet (encore un peu plus et je faisais un arrêt cardiaque) qui remarquez, nous avait déjà un peu fait le coup dans Match Point.)
Mais ici pas d'ironie glacée glaçante, pas d'humour pas de clins d'oeil, plus ça avance plus on s'enfonce dans le drame (et le pathos.) Alors qu'Ewan Mc Gregor semble avoir plutôt aisément négocié le virage que lui (im)posait sa conscience, le pauvre Colin pédale de plus en plus dans le cambouis (il est garagiste en plus, so sexy le p'tit gars avec sa combi crade et ses mains noires) et on a mal pour lui, et de plus en plus, d'autant que tout va aller -bien sûr- de mal en pis, car il est dit que :
1) l'argent ne fait pas le bonheur
2) le crime ne paie pas
3) les pauvres ont tout intérêt à rester pauvres, c'est plus dans leurs cordes...
sans oublier (dernier plan)
4) les femmes n'ont rien dans la cervelle : inconscientes du drame qui se déroule, les voilà qui minaudent en essayant de la petite lingerie (Tss, Woody, tu vas pas te faire que des copines, sur ce coup-là!).
Mais, je le répète, au moins pour Colin Farrell, on peut y aller (ahlala ces sourcils en accent circonflexe et cette lippe de chien battu... Allez, viens là, Colinchou, viens  raconter tous tes malheurs à Tonton Chori...) et aussi pour la musique, plutôt surprenante pour un film d'Allen, puisque c'est l'ami Phil Glass qui s'y attelle (ça change du jazz de d'hab', et pour moi du moins ça n'est pas plus mal!)

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